XLVIII Dix-huit.
Publié le 30/10/2013
Extrait du document
«
perdrez... »
Etpuis, ilsm’ont coupé.
Maisjen’avais pasterminé.
— Ce n’était déjàpasmal, apprécia lecolonel.
— J’aurais vouluajouter autrechose, poursuivit Hamadura.
Êtreblanc, àmon sens, cen’est pasune couleur depeau.
Mais
un état d’esprit.
Danslesrangs desSudistes, quelsquesoient l’époque etlepays, ilyatoujours eudes Noirs qui
n’éprouvaient aucunehonteàcombattre dumauvais côté.Siles blancs sontdevenus noirs,pourquoi quelques« peau-
noire » nevoudraient-ils pasrester blancs ? J’aiopté, etme voici.
Avecmesquatre fusilsetM. Sollacaro, quej’aitrouvé ce
matin surlaroute etqui possède unfameux coupdegâchette.
Mercid’êtrevenunouschercher.
— Monsieur Hamadura,ditlesecrétaire d’État,j’aiune proposition àvous faire.
Ilreste unministère disponible quivous
irait comme ungant.
M. Calguès adéjà laCulture, lecommandant Notaras :laMarine, M. Mâchefer : l’Information,le
colonel Dragasès : laDéfense nationale.
Voulez-vous êtreministre ?
Devant leslarges sourires quiéclairaient lesdix-huit visages, l’homme dePondichéry oubliatoutlesérieux desparoles
qu’il venait deprononcer.
Etc’était celaprécisément, quetous recherchaient, auVillage.
Poureux,lacomédie : mourir
gaiement etvite.
Pour lesautres, lapesante tragédie àtraîner stupidement jusqu’àsonterme, jusqu’à lafin d’un monde
pauvrement égalitaire.
— J’accepte, monsieurleministre, répondit-il enriant.
— Monsieur Hamadura,poursuivitlesecrétaire d’État,vousvoilà désormais ministredelaFrance d’outre-mer.
— Si celanevous gênepas,conclut Hamadura, jepréfère l’ancienne dénomination : ministredesColonies !
Lui aussi avaitcompris.
— Et vous, monsieur Sollacaro, quepourrions-nous fairedevous ? Ilnous manque unaumônier etles secours dela
religion, dansnotre situation, nesont pasànégliger.
Jevous voistouthabillé denoir.
Seriez-vous hommed’Église, par
hasard ?
Sollacaro étaitungaillard grandetmince, auprofil enlame decouteau, dontlasévère élégance trahissait unerecherche
excessive ducôté desmanchettes desachemise desoie blanche, notamment, etdu brillant velouté deson veston d’alpaga
impeccablement coupé.Toutcelaavait souffert descombats delamatinée, lesescarpins crocomaculés, lepantalon
déchiré, mais,justement, àconsidérer l’excellente tenuedel’ensemble, ilsautait auxyeux queM. Sollacaro nelésinait pas
sur laqualité.
Unénorme solitaire àl’auriculaire gaucheconfirmait l’impression d’ensemble.
— Aumônier ! Aumônier !Moi,jeveux bien, dit-il.
Jesuis corse, catholique etjen’ai pasoublié uneseule demes prières.
Mais autant quevous lesachiez : jepossédais jusqu’àvendredi leplus beau clandé detoute lacôte.
Le
Péché d’argent, à
Nice.
Vingt fillessuperbes.
— En effet,ditlecolonel, jeme souviens d’unecertaine Cléo...Mescompliments, monsieurSollacaro !
— Moi aussi,ditleduc, jeme souviens d’unepetitenégresse quin’avait passeize ans.Léa, ouBéa...
— Béa, précisaleCorse.
C’était l’andernier.
— Béa, eneffet, ditleministre.
Maisjepréférais LuckyetSylvie.
Ineffable duo,monsieur Sollacaro ! Lessoirs decongrès
politique, quelrepos !
Manifestement, cettefoisl’émotion lesgagnait.
Letemps passéprenait unvisage, etle bonheur perdu,uneidentité.
En
Occident, l’argentfaisaitaussilebonheur.
Tantdepéchés qu’ilpouvait offrir...
— Et quesont devenues cesdemoiselles ? demandaleduc enécrasant unelarme furtive.
— Justement ! réponditSollacaro.
C’estpourcelaquejesuis ici.Jeles aiévacuées moi-même, dansunbel autocar.
Tout allaitbien,jusqu’à Montélimar.
Là,jesuis tombé surunrégiment mutinéquifaisait lafoire danssescasernes.
Ily
avait detout, dans cechenil ! DesArabes, deséchappés deprison, desclodos.
Ellesysont toutes passées ! Toutesmes
filles ! Etquand jedis : passées...
Unechiennerie ! Etpour rien ! Etdans queldécor ! Minable.
Dégueulasse.
Àvous
dégoûter d’êtreunhomme.
C’estlàque j’aicompris quecebordel etmoi, nous n’étions pasdumême bord.EtSollacaro
règle toujours sescomptes.
Entrecebordel etmoi, c’est laguerre.
J’aivolé unebagnole, j’aifaitdemi-tour etme voilà.
Alors, ministre, aumônier, n’importequoi,toutceque vous voudrez, pourvuqueM. Hamadura melaisse deuxdeses jolis
fusils...
La profession defoi dutruand coupaheureusement l’émotion.Ellefitsourire.
Puisrire.M. Sollacaro combattantpourson
bordel etrejetant l’autredanslesténèbres del’animalité, voilàquiétait plaisant ! Etbeaucoup plusprofond qu’iln’y
paraissait, personnenes’y trompa.
Puis lemaréchal deslogis deshussards fitses comptes.
Autableau dechasse municipal, ilajouta desrangées debâtonnets.
Gange : deuxcentquarante-trois bâtons.Assimilés : trente-six.Surlapetite placedelamairie, chacun commentait lescore.
Une habitude, déjà.Etàmoins d’envoirrapidement lafin, probablement ilsselasseraient.
« Lesavions, songealecolonel,
pourvu quelesavions netardent pas... »
— Procédons légalement,ditsoudain leministre.
Jevois làdeux centquarante-trois immigrantsduGange abattus, alors
qu’aucun textedeloi nenous yautorise, aucontraire ! SiMM.
lesministres sontd’accord, jevous propose ledécret
suivant, aveceffetrétroactif detrois jours etaffichage immédiat.
Jeviens delerédiger, voici !
Il tira unpapier desapoche etlut :
— Vu l’étatd’urgence proclamédanslesdépartements duMidi, sontsuspendues jusqu’ànouvelavislesdispositions dela
loi du9juin 1973 ainsiprécisées danscestermes :
« Ceux quiauront provoqué àla discrimination, àla haine, ouàla violence àl’égard d’unepersonne oud’un groupe de
personnes àraison deleur origine oudeleur appartenance àune ethnie, unenation, unerace, unereligion déterminées,
seront punisd’unemprisonnement d’unmois àun anetd’une amende dedeux mille àtrois centmille francs.
D’autre part,.
»
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