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Caligula Albert CAMUS 1944

Cette pièce en quatre actes, écrite en 1938, fut publiée seulement en 1944 et créée en 1945.
L’empereur romain Caligula, qui a régné de 37 à 41, s’est distingué devant l’histoire par sa folie. Camus en a pris les traits chez Suétone (Vie des douze Césars), mais pour les organiser, écrit-il, en une «tragédie de l’intelligence » (Préface, éd. américaine de son théâtre), en choisissant d’expliquer la conduite de Caligula par la révolte contre la condition humaine.
A l’acte I, à la suite de la mort de sa sœur et maîtresse Drusilla, Caligula prend conscience que «le monde tel qu’il est n’est pas supportable ». Par révolte, il va défier l’ordre romain et toutes les valeurs sur lesquelles il repose. En face de sa vieille maîtresse Caesonia, qui l’aime mais ne le comprend pas, du jeune Scipion scandalisé, de l’honnête Cherea qui veut «plaider pour ce monde», il affirme sa liberté totale et se propose de l’enseigner à Rome. Cette «pédagogie» est annoncée comme «une grande épreuve» qui se développe aux actes suivants.
Caligula bafoue les hiérarchies sociales et fait périr arbitrairement les patriciens, assurant «qu’il n’est pas nécessaire d’avoir fait quelque chose pour mourir» (II, 5), ferme les magasins publics («Demain il y aura famine», II, 9), entretient la débauche (II, 10), se fait adorer sous les traits de Vénus (III, 1-2). Il dévoile enfin son intention : ouvrir les yeux aux hommes sur l’absurdité des dieux et du destin : «J’ai pris le visage bête et incompréhensible des dieux. » Contre ce désespoir, Scipion invoque la valeur de l’homme. Mais Caligula oppose la même incrédulité aux hommes qu’aux dieux, affectant d’espérer inutilement qu’on l’assassine. Cependant son entourage y songe : les patriciens blessés dans leur amour-propre et aussi Cherea qui, quoiqu’il le comprenne mieux que tout autre, «ne (veut) pas entrer dans sa logique» et désire «vivre et être heureux» (III, 6). Averti, Caligula le laisse libre et continue son œuvre de destruction. Il fait le vide autour de lui, ridiculise les poètes, chasse Scipion qui s’est pourtant peu à peu converti à son désespoir, puis entreprend d’en finir avec sa «tendresse honteuse» pour Caesonia (IV, 13). Mais c’est pour avouer son échec peu avant de tomber sous les coups des conjurés : « Je n’ai pas pris la voie qu’il fallait, je n’ai abouti à rien. Ma liberté n’est pas la bonne. » (IV, 14). Cette pièce nous conduit au centre de la pensée de Camus qui a commenté ainsi l’aveu de Caligula : «Si sa vérité est de se révolter contre le destin, son erreur est de nier les hommes. » Dans La Peste on trouvera l’expression positive de l’humanisme de Camus.

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