Troie

Lorsque Zeus eut confié à Alcmène le germe d’Héraclès, il proclama sous serment que le premier descendant de Persée qui allait naître serait investi d’un pouvoir temporel sans exemple. Il fut encouragé dans cette déclaration par Até — l’Erreur —, la déesse aux pieds légers qui se pose sur les têtes sans qu’elles en aient conscience. En réalité, grâce à une supercherie d’Héra, Eurysthée, cousin d’Alcmène, vit le jour avant Héraclès et bénéficia, au détriment du fils de Zeus, des effets de la promesse divine.

Até avait sciemment induit le roi des dieux en erreur, il se vengea en la précipitant du haut de l’OIympe et lui interdit pour jamais le retour parmi les immortels. Aussi joue-t-elle depuis lors son triste personnage aux seuls dépens des hommes. Até devait tomber en Phrygie, sur une colline et c’est cette colline d’Até qui allait être innocemment choisie pour devenir la citadelle de Troie: la néfaste influence de la déesse allait s’exercer en premier lieu sur ses habitants. Le « roman de Troie » commence avec le débarquement de Dardanos sur les côtes d’Asie Mineure. Venait-il de l’île de Samothrace ou bien d’Italie centrale, comme l’ont affirmé les Romains, pour lesquels l’émigration d’Énée n’aurait constitué qu’un retour aux sources? Quoi qu’il en soit, il fut chaleureusement accueilli par le roi Teucer, qui lui donna sa fille en mariage et l’appela à sa succession. À Dardanos succédèrent de père en fils Érichthonios (homonyme du roi d’Athènes), Tros, llos, Laomédon. Ce dernier bénéficia du concours d’Apollon, de Poséidon et d’Éaque pour la construction des murs de Troie. Il devra faire face à une expédition dirigée par Héraclès, lui reprochant ses parjures. Il trouva la mort dans le combat, ainsi que tous ses enfants présents, à l'exception de sa fille Hésione, qu’Héraclès donna en mariage à son ami Télamon, et de son plus jeune fils, Podarcès, que le héros vendit symboliquement à Hésione. Aussi lui donna-t-on le surnom de Priam, qui signifie vendu.

Priam monta sur le trône de Laomédon, épousa une fille du devin Mérops, puis, l’ayant répudiée, prit pour femme Hécube, qui devait se montrer prolifique. Leur premier fils fut Hector, le second Pâris.

Lorsque Pâris vint au monde, un songe le présenta à son père une torche à la main, embrasant la citadelle de Troie. Ce présage incita les parents à le faire exposer. Mais il fut recueilli par des bergers qui l’élevèrent jusqu’à ce qu’il fût un solide et magnifique adolescent, digne du nom qui lui fut donné: Alexandre (le Protégé, ou le Protecteur). Un jour, des serviteurs de Priam vinrent prélever sur les troupeaux de Pâris un taureau d’une grande beauté: il devait constituer le prix offert au vainqueur des Jeux funèbres périodiquement organisés par le roi en l’honneur du fils qu’il croyait mort. Pâris-Alexandre décida d’aller concourir incognito. Il remporta tous les concours, se fit reconnaître et reprit sa place au palais. Lorsqu’eurent lieu devant les Olympiens les noces de Thétis et de Pélée, Éris la Discorde lança parmi les invités une pomme d’or, qui devait être offerte à la plus belle des déesses. Aucun des convives n’ayant voulu se compromettre à porter un jugement, Zeus pria Hermès de conduire les postulantes sur le mont Ida, qui dominait la ville de Troie, pour comparaître devant le beau Pâris. Héra, Athéna et Aphrodite se présentèrent, chacune promettant, si elle recevait la pomme d’or, soit l’empire de l’Asie (c’était la proposition d’Héra), soit le don de sagesse et la certitude de la victoire (c’était l’offre d’Athéna), soit (et c’était la tentation d’Aphrodite) l’amour de la plus belle femme du monde (de nombreux tableaux représentent Le Jugement de Pâris: Jules Romain, Cra-nach, Rubens, Watteau, Boucher...). C’est Aphrodite qui l’emporta.