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ALFRED SISLEY: sa vie, son oeuvre

Publié le 02/05/2019

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sisley

Ces lendemains de luttes ont quelque chose de consolant et de poignant à la fois, et vraiment de presque solennel. Ceux qui triomphent par leur propres fo rces, et aussi un peu avec le consentement de la vie, viennent d'accomplir les souhaits non exaucés des vaincus, qui, ainsi, ne s'en iront pas dans une accablante solitude. Comme dans les contes d'autrefois, on fait des choses pour assurer la paix à leur âme, qui fut inquiète. La tâche de l'amitié et de l'assistance ne s'arrête point aux regrets et aux condoléances ; elle veut être active et apporter au foyer du disparu le secours matériel que sa fierté, tant qu'il était sur la brèche, lui eût interdit d'accepter.

 

Les amis, les camarades, les confrères de Sisley ont tenu à ce que leur offrande fut large et brillante, pour que le public fût généreux. C'est à vous qu il appartient de compléter leur œuvre, amis de qui l'on ne sait point les noms, mais de qui les sympathies certaines assistent perpétuellement les artistes dans leurs revers, comme dans leurs victoires chèrement gagnées.

 

ADOLPHE TA VERNIER Introduction au catalogue de l'exp osition L'Atelier de Sisley Galerie Bernheim jeune, 2 au 14 décemlre 1907

 

Il aimait profondément son art, celui qui, sollicité par un ami de donner son sentiment sur la façon dont il l'entendait, lui écrivit en janvier 1892 ces lignes sans prétention, mais si révélatrices :

 

... Coucher sur le papier des aperçus de ce qu'on appelle aujourd'hui son esthétique, me paraît joliment scabreux et lorsque je suis tenté de le fa ire, je pense toujours à Tu rner et à l'anecdote qu'on m'a contée sur lui. Il sortait de chez des peintres amis où l'on s'était pas mal chamaillé à propos de peinture - chacun pré-fé rant la sienne naturellement -, mais chacun s'efforcant de dissimuler cette préférence sous de grands mots et de belles théories pompeuses. Pendant la discussion, Turner n'avait pas souillé mot.

Sa vie et son œuvre font entre elles un étrange contraste, sauf durant les années du début. Au commencement, elles sont en harmonie et également heureuses. Dans le petit groupe laborieux et insouciant, épris de lumière que fo rment à Fontainebleau Monet, Renoir, Sisley, Bazille, il représente la gaieté, l'entrain, la fa ntaisie. Renoir se souvient et nous a souvent parlé de l'intrépide bonne humeur de Sisley, à cette époque exempte d'argent et de mélancolie.

 

Mais, dès 1870, tout cela change. L'œuvre continue à être pleine de fr aîcheur et d'éclat tandis que le caractère bifurque; il devint ombrageux et fa rouche L'artiste continue à donner de la joie aux passants, tout en devenant de plus en plus sombre pour son propre compte. Sa peinture, comme par le passé, est sans aucune arrière-pensée, tandis que son esprit en est tout rempli.

 

Il voit peu ses amis, qui le plaignent et ne lui en veulent point. Il souffre moralement et physiquement - entre autres mauvaises fo rtunes, des froids attrapés en peignant dehors en plein hiver lui causèrent une paralysie momentanée de la face -, mais il se crée lui-même bien d'autres chagrins, souvent imaginaires il est irritable, mécontent, agité. Il saisit avec une avidité poignante et touchante les marques de sympathie qui lui viennent d'inconnus, de nouveaux venus, et tout aussitôt il s'éloigne encore avec défiance de ces nouvelles amitiés. Arriva un moment - c'est alors que je l'ai connu et que j'ai éprouvé personnellement ce que je dis - où il devint tout à fait malheureux et éprouva d'extrêmes difficultés pour vivre.

 

Pendant ces heures noires, ses arbres demeuraient aussi verts, ses rivières aussi transparentes, sa peinture aussi gaie et dorée ; il voyait successivement toutes les joies l'abandonner, sauf la joie de peindre, qui ne le quitta jamais.

 

Dès qu'on apprit qu'il n'allait plus pouvoir peindre, sa peinture monta de prix... C'est même comme cela que, ne le voyant plus beaucoup, la nouvelle de sa grave maladie me parvint . Seulement il n'avait plus rien, ou presque rien chez lui, et il laissait les siens sans ressources.

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« ARSÈNE ALEXANDRE Dans cette période de 1872 à 18 79, j'exposais à presque toutes les expositions organisées entre nous, Impressionists (sic).

Je suis donc depuis bientôt 12 ans à Moret ou aux environs.

C'e st à Moret devant cette nature si touf fue, ses grand peupliers, cette eau du Loing si belle, si transparente, si changeante, c'est à Mor et cer tainement que j'ai fait le plus de progrès dans mon art; surtout depuis 3 ans.

Aussi quoiqu'il soit bien dans mes intentions d'agrandir mon champ d'études, je ne quitterais jamais ce coin si pittoresque.

Maintenant, entre-t-il dans votre programme que je vous parle un peu de peinture ? J' aimerais mieux pas.

Vous me renseignerez à cet égard.

Est-ce bien ce que vous attendez de moi? En tout cas si vous avez besoin d'un renseignement je me ferai toujours un plai­ sir de vous satisfaire.

Jusqu'au revoir je vous serre bien cordialement et sincèrement la main.

A.

Sisley AR SÈN E AL EXA NDRE Pré face au catalogue de la vente L'Atelier de Sisle y, le 1'' mai 1899 Paris, Bibliothèque tzational e, cabinet des Estam pes.

Lendemains de luttes Sisley a vécu fier et mort pauvre.

Elle est arrivée souvent cette histoire, bien qu'heureusement l' indépendance n'ait pas tou jours, pour les artistes, entraîné comme conséquence fatale la pa uvreté.

Mais la vie est une étrange loterie, où le plus souvent on s'exténue pour gagner de mauvais lots.

La chance de Sisley fut particulièrement assidue.

Presque sans interrup­ tion, il gagna.

Avec des dons riants, il vécut la tristesse à ses côtés ; malgré un talent qui présentait tout ce qu'il faut pour plaire, il ne conn ut une grande partie de sa vie que le souci et même l'angoisse.

1 33. »

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