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francis bacon

Publié le 15/11/2012

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bacon
présente : de FrédériqueToudoire-Surlapierre et de Nicolas Surlapierre (collection : « Universités/Domaine littéraire «) extrait de leur ouvrage, Edvard Munch - Francis Bacon, Images du corps (sortie prévue premier trimestre 2009) I. De quelques points de contact de la peinture et de la peau Peindre c'est recouvrir une forme par une couleur.1 L a chair est l'un des éléments faisant du corps imagé une « touche « ; pour Bacon il s'agit d'ailleurs très exactement « d'avoir une touche «. La représentation de certains détails corporels (la bouche, la mâchoire, les yeux, les mains, les pieds) n'existerait pas sans la couleur ni la picturalité. En peinture, le corps ne se distingue jamais complètement des couleurs qui lui donnent naissance parce qu'il lui doit ses propriétés mimétiques. La couleur est un élément littéralement vital de la peinture. D'un point de vue strictement physiologique, la couleur du corps vient du sang qui circule sous la peau. La chair et la peau sont pareillement question d'incarnat et de coloration (pigmentation). Mais la couleur convoque aussi la transparence. Quand la nécessité du coloris correspond au désir, elle représente aussi la matière par excellence, telle une matérialité renvoyant à une intériorité (celle du corps humain). C'est parce que la couleur est associée à l'expression de pathos qu'elle s'approche de la chair. On distingue la chair des os parce que « le corps ne se révèle que lo...
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« donc pas seulement une qualité de la surface, mais un jeu sur la pro- fondeur, un rendu pictural du corps voyant : La couleur n’est pas le lieu de la surface des corps.

Elle n’est pas une juxtaposition ni même une superposition mais une interpénétration corporelle effective.

Elle est visible parce qu’elle contient en elle- même la cause de sa visibilité 3.

Avec Munch et Bacon, la couleur fait également écran, elle em- pêche de voir « derrière » ce qui est peint : elle est un indice (et un signe) de visibilité.

Elle participe d’un « effet de pan », selon l’ex- pression de Georges Didi-Huberman, symptôme du « sôma dans le sèma pictural » 4.

S’il importe de distinguer le symptôme de la mime- sis, c’est que celui-ci manifeste violemment une invisibilité à l’œuvre dans le tableau.

Leur peinture suscite une frayeur et un affolement, poussé à l’extrême (pour Munch) et à un certain degré d’excitation (pour Bacon) : autant d’affects auxquels l’emploi des couleurs, leur propension anthropomorphe et la façon dont les couleurs des corps et des objets sont interverties ne sont pas étrangers.

Alors que la cou- leur semblerait relever a priori d’une fonction optique, Bacon tout particulièrement la dote d’une fonction haptique.

La vue se dote d’une fonction tactile distincte de sa fonction optique.

« On dirait alors que le peintre peint avec ses yeux, mais seulement en tant qu’il touche avec les yeux » 5.

Comment le corps réagit-il aux couleurs et aux sensations ? Le toucher pris dans une dimension haptique — et non en tant que différenciation — signifie la tentation et la tentative de l’oubli des différences sensorielles.

« La dimension haptique du sentir est celle d’une communication avec l’être donné des choses (ou des êtres) dans laquelle l’être est comme mis en branle dans l’ébranlement des assises de l’existant » 6.

Le rapport des corps à la couleur et à la transparence est porteur d’enjeux esthétiques et es- thésiques chez Munch et Bacon qui en font un usage.

Les schèmes de la pudeur et de la voracité, de la perversion et de l’englou- tissement sont suffisamment saisissants en ce sens : représenter la peau pour Munch et pour Bacon a directement — et littéralement — à voir avec l’étreinte mais aussi la dévoration.

La représentation de la chair et des os existe sur et dans les corps, renvoyant au spectateur, à portée de sa main comme de sa vue, cette intrication du visible et du tactile.

3.

Georges Didi-Huberman, La Peinture incarnée, Paris, Minuit, « Critique », 1985 , p.

29.

4.

Ibid., p.

61.

5.

Gilles Deleuze, Francis Bacon.

Logique de la sensation, op.

cit., p.

146 .

6.

Henri Maldiney, Regard parole espace, Lausanne, éd.

L’Âge d’homme, « Amers », 1973 , p.

71.. »

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