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Gabriel Fauré

Publié le 26/02/2010

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Cinquième fils d'un sous-directeur de l'enseignement primaire, Gabriel Fauré est né le 10 mai 1845 à Pamiers dans l'Ariège. Il faut le hasard d'un harmonium à sa portée dans une chapelle pour faire remarquer le petit enfant par une brave paroissienne qui conseille à son père de l'envoyer à Paris à l'École Niedermeyer. A neuf ans, Gabriel Fauré entre donc à l'École Niedermeyer, où il eut à subir la discipline sévère de l'internat qui devait lui apprendre à se replier sur lui-même pour travailler, à utiliser au maximum son temps et ses forces. Il s'imprègne de l'art religieux des maîtres anciens, des classiques français et allemands. Saint-Saëns, son aîné de dix ans, est nommé professeur à cette école et l'initie à Schumann, Liszt, Wagner. Entre le disciple et le maître se noue une amitié dont la fidélité, à travers tous les succès, ne devait s'arrêter que quelque soixante ans plus tard, par la mort de Saint-Saëns. Sortant de cette école de musique religieuse, où il avait déjà composé le très beau Cantique de Racine, Gabriel Fauré trouve à Rennes un poste d'organiste. Nous le retrouvons peu après à Paris, à Notre-Dame de Clignancourt, puis à Saint-Honoré d'Eylau, à Saint-Sulpice et enfin maître de chapelle à la Madeleine (1877). Il devait y rester presque vingt ans, avant de monter aux grandes orgues. Il lui faut pour vivre correctement donner des leçons, beaucoup de leçons. Cependant il compose : sa Ballade pour piano date de 1875. Un voyage à Weimar avec Saint-Saëns, en 1877, le met en présence de Liszt qui, à soixante-six ans, avait décidé d'y créer Samson et Dalila ; le jeune compositeur tremble en lui montrant son ouvrage. Liszt hésite d'abord devant cette Oeuvre si riche de sonorités nouvelles, mais le fond classique de légèreté nuancée de mélancolie le ravit, et il lui remet sa photographie en témoignage de "sa haute estime et de son affectueux dévouement".

« entraîné un jour, écrit-il de Béziers, "dans la vanité de mettre en mouvement près de sept ou huit cents hommes etfemmes !".

Un orage effroyable, le jour de la générale, faillit tout noyer, y compris les harpes et le grand comédienDe Max, attaché à son rocher.

Mais la redoutable épreuve, dirigée par le maître lui-même, s'achève triomphalement.Sept ans après, l'Oeuvre était remontée à Paris, à l'Hippodrome, puis à l'Opéra, pour deux représentations de gala.En 1905, Fauré qui n'avait été ni élève au Conservatoire, ni Prix de Rome, est nommé directeur du Conservatoire !Naturellement, cela n'alla pas sans quelques luttes, dont on retrouve les échos encore en 1909, lors de son électionà l'Institut. Fauré, libéré de soucis lourdement matériels, peut enfin consacrer tous ses moments de loisir à son art.

Ses goûtssont des plus simples, et lorsqu'il part en vacances chez des amis, à l'hôtel, une table et son papier à musique avecses carnets d'esquisses très ordonnés, suffisent à son bonheur.

De 1907 à 1913, c'est en vacances qu'il travaillera àPénélope.

René Fauchois a écrit un livret solide et plein d'une chaude poésie auquel ne manquait que la musique.Fauré y trouve les grâces de la jeunesse, la tendresse ainsi que la grandeur avec laquelle il a bâti toutes sesOeuvres.

Et ce sont les paysages de Lausanne, de Lucerne ou de la Côte d'Azur qui sublimeront les imagesmythologiques et leur apporteront leur naturelle et divine fraîcheur.

Fauré travaille beaucoup et avance peu.

Parlantde la scène des fileuses flâneuses : "C'est étonnant ce qu'il faut travailler pour dépeindre les gens qui ne travaillentpas !...Des rouets et des fileuses, on en a tant fait qu'il fallait d'abord trouver du nouveau.

J'espère que ça y est !"Tous les jours, il travaille, sensible à la magnificence du paysage.

"C'était délicieux.

Le soleil n'éclairait que la côtede la Savoie et n'avait pas encore tourné de mon côté.

J'étais devant un paysage gris clair et dans une atmosphèrede fraîcheur exquise." Par moments, il trouve que "Pénélope est bien médiocre", mais des moments comme ca,ajoute-t-il, "ça s'est produit pour tout, toute ma vie".

Des vacances passent, et c'est en 1913 qu'il subira lesderniers tourments, lors de la préparation de son opéra à Monte-Carlo.

Il se dispute avec le directeur qui veut"modifier la fin de Pénélope et remplacer l'apaisement final par beaucoup d'éclat et de bruit".

Il songe à son Oeuvre,au temps qu'elle mettra à s'imposer, "aux médiocrités dont le public se repaît ou dont on le repaît".

Heureusementque trois mois après, Pénélope monte à Paris, au Théâtre des Champs-Elysées, le 10 mai 1913, interprétée parLucienne Bréval et Lucien Muratore ; et l'enthousiasme du public et de la presse est unanime.

Peu après le mêmeaccueil triomphal lui était fait au Théâtre de la Monnaie de Bruxelles. On a souvent dit que dans ses vingt dernières années, Fauré avait écrit une musique de plus en plus sobre,cherchant la pureté de la forme, tendant à imaginer "tout ce qu'on voudrait de meilleur, tout ce qui dépasse laréalité".

On dirait qu'au fur et à mesure que sa pensée s'enrichit de musicalité, il cherche à épurer l'instrument aveclequel il la traduira, tels les grands statuaires antiques en quête des marbres les plus durs pour y enfermer toute leurspiritualité.

L'Oeil intime ne peut pas manquer de s'apercevoir de la différence entre la Bonne Chanson et lesOeuvres de 1910, par exemple : la page s'éclaire, se dépouille de toute fioriture.

Le charme "exquis" du Fauré quenous connaissons ira s'estompant derrière une manière plus renfermée, plus lointaine, plus déroutante par sa nudité,son rejet de toute complaisance.

Si l'on considère qu'une grande Oeuvre est comme une autobiographie, comments'expliquer que Fauré finira par confier à la musique seule ce qu'il avait à dire, dans le langage qu'il s'est imposé, leperfectionnant sans cesse jusqu'à la plus extrême nouveauté ? En voici, hélas ! la triste raison. Dès 1909, Fauré ressent les premières atteintes de la surdité.

Il lutte comme Beethoven, moins révolté peut-êtreque lui, mais, comme lui, ne cessant de s'élever, enveloppé par moments "d'un affreux manteau de misère et dedécouragement".

A partir des événements de 1914-1918, il entendra de moins en moins, et, chose horrible, les sonsextrêmes seront déformés comme par un strabisme auditif.

Dans cet isolement, son public, amoureux fervent de sespremières Oeuvres, aura peine à le suivre.

Cependant lui-même ne cherchait nullement à s'isoler, à pontifier.

Je mesouviens de sa réflexion, devant une jeune interprète que je lui avais amenée : "Vous m'avez fait grand plaisir en mefaisant entendre cela, car, vous savez, je ne l'ai pas entendu souvent." Parvenu à ses quatre-vingts ans, il nevoulut jamais fermer sa porte.

Quel accueil ses disciples, ses amis trouvaient toujours près de lui, même s'iltravaillait ! Il posait son crayon, penchait la tête, tendant son attention pour éviter de faire répéter ce qu'on luidisait.

Toujours ouvert à la musique sincère, à l'émotion vraie, sûr de son univers intérieur, il avait besoin de sentirvenir encore jusqu'à lui la vie d'un monde qui lui échappait.

En 1903, un de ses amis organise un concert où sonRequiem voisine avec le Roi David d'Honegger.

Touchant rapprochement ! Fauré reconnaissait chez son cadet laqualité rare d'un art pourtant si différent du sien. Depuis 1914, c'est à la musique de chambre et à deux admirables cycles de mélodies : Le Jardin clos et l'Horizonchimérique, qu'il consacre ses forces spirituelles de plus en plus étonnantes.

"S'il vit cent ans, jusqu'où ira-t-il ?"disait-on de lui. La première audition, en 1921, du Second Quintette au Conservatoire fut bouleversante.

Philippe Fauré-Frémiet,dans l'émouvante biographie qu'il a consacrée à son père, décrit ainsi cette mémorable séance : "On s'attendait àune belle Oeuvre, pas à celle-là.

On savait bien que Fauré était très haut, on ne croyait pas que, sans en avoir l'air,il fut parvenu à un tel sommet...

A mesure que l'Oeuvre se déployait, l'enthousiasme augmentait, mêlé semble-t-il,d'un remords : celui peut-être d'avoir méconnu le vieillard qui avait dans les mains pareil présent.

Au dernier accordtout le monde fut debout.

On hurlait, les mains tendues vers la grande loge des jurés où Gabriel Fauré, qui n'avaitd'ailleurs rien entendu, était caché.

Il s'avança tout seul, hochant la tête, jusqu'au premier rang.

Il regardait cettesalle où Berlioz et Liszt, Chopin et Wagner ont vécu des heures ardentes, cette foule empoignée par la seulemusique." Et le chant dernier du vieillard se termine par une de ses pages les plus grandioses, d'où l'éloquence discrète estbannie, où toute la poésie qui s'en dégage dépasse la puissance des mots par une sublime spiritualité.

C'est son. »

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