GRUNEWALD
Publié le 24/06/2012
Extrait du document
Il n'est peut-être point d'oeuvre d'art au monde qui joue sur un clavier aussi vaste et aussi nuancé, point de peinture aussi riche en moyens picturaux, allant de la copie exacte, mais intensément repensée, des plus modestes beautés de la nature, jusqu'aux architectures de rêve que seules expliquent les disciplines de maître d'oeuvre et de peintre-verrier que les archives permettent d'attribuer à l'artiste. Sous l'influence des Antonites (qui soignaient le feu de saint Antoine, l'épilepsie, la peste et le mal de Naples), ...
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copie, avait été peint dès 1509 par Albert Dürer.
Les petites Crucifixions du Musée de Bâle et de
la collection Kœnigs à Harlem semblent devoir être de la même époque, en tout cas avant le dé
part de l'artiste pour Issenheim en Alsace.
La connaissance que nous avons aujourd'hui de la jeunesse du maître explique comment
l'artiste franconien a
pu être appelé, de préférence à un peintre du voisinage, à exécuter l'immense
retable
du célèbre couvent et hospice des Antonites.
Comme élève de Schongauer, il avait assisté
à
la création du premier retable d'Issenheim, peint en 1475 pour le précepteur général Jean
d'Orliac, et était sans doute retourné chez les moines lors de séjours ultérieurs en Alsace.
Le retable d'Issenheim, seule œuvre intégralement conservée de
«Mathis d'Aschaffenbourg»
(1513-1515), a été recueilli à Colmar pendant la tourmente révolutionnaire.
Retable à trans
formation,
il se présentait initialement sous trois aspects différents: fermé, il montrait la Cruci
fixion, la Déploration formant prédelle, et deux volets fixes, étroits, où sont représentés les saints
Antoine et Sébastien, ce dernier sous les traits de l'artiste lui-même.
La Crucifixion étant séparée
en ses deux volets, apparaissaient au centre la Nativité et le Concert des anges, encadrés par le re
vers de
la première paire de volets: l'Annonciation et la Résurrection; la prédelle, rabattue, faisait
apparaître le Christ et les douze apôtres, en buste, sculptures polychromées et dorées.
Enfin, la
Nativité et le Concert des anges écartés, le retable se présentait entièrement consacré à saint Antoine:
au centre, la statue sculptée et dorée du saint, assis sur un trône, ayant à ses côtés, debout, saint
Jérôme et saint Augustin; les volets peints représentent la Tentation de saint Antoine, composition
violente
jusqu'à l'hallucination, et, idylle sylvestre dans un paysage de drame, la Visite de saint
Antoine à saint Paul du Désert.
Il n'est peut-être point d'œuvre d'art au monde qui joue sur un clavier aussi vaste et aussi
nuancé, point de peinture aussi riche
en moyens picturaux, allant de la copie exacte, mais inten
sément repensée, des plus modestes beautés de
la nature, jusqu'aux architectures de rêve que
seules expliquent les disciplines de maître d'œuvre et de peintre-verrier que les archives permettent
d'attribuer à l'artiste.
Sous l'influence des Antonites (qui soignaient le feu de saint Antoine,
l'épilepsie,
la peste et le mal de Naples), et de sources mystiques comme les Révélations de sainte
Brigitte de
Suède, les maux physiques et la douleur de l'âme sont traduits avec une vérité aussi
poignante
que les joies célestes; les couleurs, souvent dictées par les textes, sont orchestrées avec
une sensibilité
et une liberté toutes modernes.
Dans le retable d'Issenheim, toutes les aspirations
du moyen âge chrétien trouvent leur dernière expression, en même temps qu'y sont annoncées
toutes
les possibilités de l'art moderne.
A PRÈS son retour à Seligenstadt, « Magister Ma theus» peint pour deux chanoines le retable
de Notre-Dame-des-Neiges
(1517- 1519) de la Collégiale d'Aschaffenbourg.
Seuls en subsistent
le
panneau central, l'émouvante Vierge à l'Enfant dans un paysage, conservé actuellemènt dans
la petite église de Stuppach, et un volet, la Fondation de Sainte-Marie-Majeure, au Musée de Fri
bourg-en-Brisgau.
Si ce dernier laisse paraître des influences ital~ennes dans ses architectures
(influences qui
ont posé la question d'un voyage en Italie), la Vierge de Stuppach, en revanche,
répétant la composition de celle d'Issenheim, présente une curieuse évocation du transept sud de
la cathédrale de Strasbourg.
L'œuvre suivante parvenue jusqu'à nous est, vers 1520, le retable de la croix de Tauber
bischofsheim,
panneau fixe dont les deux faces, figurant la Crucifixion et le Portement de croix, ont
été recueillies par le Musée de Carlsruhe.
Le Christ est une réplique exaspérée, alourdie, de ce
lui
du Musée de Colmar.
Les dernières années sont consacrées à
un ensemble de peintures commandées par le car
dinal Albert de Brandebourg
poùr le dôme de Halle.
Il en subsiste, dans l'église d'Aschaffenbourg,
le fragment
d'une Pietà et, à la Pinacothèque de Munich, l'admirable Rencontre de saint Erasme
GRi::NEWALD Reta\le d'Issenheim..
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