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LE GROUPE SUPPORT-SURFACE

Publié le 14/09/2014

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Des toiles tendues entre des poteaux, comme de fragiles coupe-vent sur une plage l'été, de grands morceaux de tissu peints d'une seule couleur et pendus de telle façon qu'on les regarde d'un côté et de l'autre, des châssis nus au sol ou cloués sur les murs, d'autres couverts mollement de toiles non tendues sur lesquelles se trouvent imprimées des formes répétitives, des filets et des cordes trempés dans du goudron..., voilà ce que peut voir le public de l'A.R.C. Un tract réalisé par trois peintres qui ne participent d'ailleurs pas à l'exposition, Louis Cane, Marc Devade et Daniel Dezeuze, est distribué au moment du vernissage. Il précise la position des artistes. Ceux-ci considèrent l'oeuvre d'art comme un objet matériel, résultat d'un travail qui ne doit rien à ce qu'on nomme romantiquement l'«inspiration«. Les membres du groupe Support-Surface dénoncent en effet la conception qui fait de l'élaboration d'une oeuvre l'expression d'une subjectivité; une telle vision est pour eux un leurre, qui a pour seul effet d'encourager les rivalités entre artistes et de profiter au marché. Ce raison­nement de type «politique« peut étonner, mais, en 1970, la pensée maoïste influence largement les intellectuels français et notam­ment les peintres qui, sur un fond plus géné­ral de contestation et de révolte, rêvent de 

« - Le châssis et la toile Pourtant, si les artistes de Support-Surface renoncent au projet traditionnel de la pein­ ture, qui est d'inventer une image ou d'élabo­ rer des formes imagin aires, ils ne rompent en aucune manière avec les moyens propres à la discipline.

Bien au contraire, le travail du groupe vise à révéler ce qui n'était jusqu'alors qu'un paramètre obscur de la création : les facteurs matériels.

C'est pourquoi les artistes de Support -Surface démembrent les œuvres : ils ôtent la toile du châssis, peignent celui-ci, plient et découpent la toile.

Cela leur permet, d'une part, de mettre en évidence tous les élé­ ments constitutifs du tableau et, d'autre part, de faire prévaloir l'articulation du support (châssis ) et de la surface (toile) dans l'œuvre .

Or, tel est précisément leur propos : ils enten­ dent faire du premier une forme à part, valant en lui-même comme un objet d'art situé dans l'espace, et ils veulent affirmer dans la toile autre chose qu'un simple écran destiné à recevoir une image.

Les «sol-mur» de Cane De ces deux éléments, le support et la sur­ face, l'un ou l'autre est privilégié en fonction des artistes.

Né en 1942, Daniel Dezeuze expose des châs ­ sis.

Aucune toile ne les recouvre, mais seule­ ment une feuille de plastique transparent.

Dezeuze réalise aussi des quadrillages, des claies, de souples échelles de bois peintes, Sol-Mu r ( 1972) , Louis Cane (collectio n particulière).

prêtes à s' enrouler sur elles-mêmes .

Viall at (né en 1936) , au contraire, tend dans l'espace des filets ou expose des toiles exemptes de châssis que le collectionneur peut plier, enrouler, ou laisser flotter dans l'espace, à son gré.

Teintes des deux côtés, ces toiles, qui peuvent être indifféremment des bâches, des draps, des stores, des toiles à matelas, portent, répété selon une scansion régulière, un motif en forme de «haricot» imprimé au pochoir.

Louis Cane (né en 1943 ), de la même façon, fait porter l'essentiel de ses recherches sur la toile.

Celle-ci est de grandes dimensions et débarrassée de son châssis.

Elle est clouée directement sur le mur et retombe sur le sol : c'est ce qu'on appelle le «sol -mur».

Posée à même le sol et travaillée à p l at, elle ne reço it aucun apprêt et nul dessin préparatoire n'y est tracé.

Mais le peintre y projette la couleur au moyen d' un pistolet qui lui permet de créer des dégradés.

li plie ensuite la toile en deux dans le sens de la longueur, la découpe parfois, la déplie de nouveau.

Les couches de pigmen t encore humide imp ressionnent la surface de tissu là où le pistolet n'est pas passé, et les blancs s'effacent progressive­ ment.

C'est le rapport d e la teinte et des sur ­ faces de toile demeu rées vierges qui ind ique au peintre le moment où il doit s'interrompre.

Finalement, l'œuvre est redressée lors de sa présentat i on : une marge est découpée sur trois des côtés de la partie au sol et rabattue sur la partie murale , de façon à former une sorte d'encadrement à cette partie de la toile .

Rouleau horizontal , Daniel Dez euze , 1968 (Pa ris, musée national d'Art moderne).. »

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