MEMLING
Publié le 24/06/2012
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On tient pour son chef-d'oeuvre, dans le style précieux, la série de panneaux et de médaillons qui décorent la fameuse Châsse de sainte Ursule, inaugurée en 1489. On a comparé son art chatoyant, pittoresque, à celui des chroniqueurs de la cour de Bourgogne. Ici et davantage dans ses Madones, maître Hans poursuit l'éternel féminin à travers un type bien défini de beauté qui sent l'artifice: un grand front bombé, un nez vertical, plutôt long, une bouche aux lèvres finement ourlées, un menton menu, des yeux en amande, un air absent, distingué, hiératique, oserait-on dire un peu snob?
«
de son éclectisme, de son classicisme.
Ne soupçonne-t-on pas un académisme latent dans son art
aux rythmes savants, bien balancés, et aux élégances correctes?
A trente ou
quarante ans, il a sa manière définitive.
Il est brillant, délicat, assez impassible.
Il n'évoluera plus guère et
se répétera souvent.
L'éblouissant Mariage m;stique de sainte Catherine,
achevé en r 4 79, reprend et amplifie, avec quelque solennité, le thème du triptyque de Chats
worth.
La partie centrale assemble, autour de la Vierge trônant, des saintes qui sont des prin
cesses, des anges souriants, espiègles, et les silhouettes, doucement ascétiques, des deux saints
.Jean.
La vie de
ces derniers fournit les sujets des volets, tandis que les revers montrent les portraits
des religieux et des religieuses de l'hôpital.
Ce pieux hommage rendu à la Madone et aux patrons
du célèbre Hôpital Saint-Jean- où sont encore conservés les chefs-d'œuvre de maître Hans
unit une somptuosité toute profane à une exemplaire componction.
Même calme et mêmes
splendeurs dans la
Nativité, l'Adoration des lvlages, la Présentation au temple de l'Hôpital Saint-Jean.
De l'émotion certes, mais aucune tragédie dans
la Pietà commandée par Adrien Reyns.
Et
l'homme qui peint, sur des volets d'orgue, le Christ et les anges musiciens d'Anvers, graves figures
composant une frise monumentale, est capable aussi (voir
la Passion de Turin) de fignoler une
narration avec des soins méticuleux d'enlumineur.
On tient pour son chef-d'œuvre, dans le style précieux, la série de panneaux et de mé
daillons qui décorent
la fameuse Châsse de sainte Ursule, inaugurée en 1489.
On a comparé son
art chatoyant, pittoresque, à celui des chroniqueurs de la cour de Bourgogne.
Ici et davantage
dans
ses Madones, maître Hans poursuit l'éternel féminin à travers un type bien défini de beauté
qui sent l'artifice:
un grand front bombé, un nez vertical, plutôt long, une bouche aux lèvres
finement ourlées,
un menton menu, des yeux en amande, un air absent, distingué, hiératique,
oserait-on dire
un peu snob? C'est devant une telle icone que prie Martin van Nieuwenhove,
à Bruges, et que s'agenouillent, au Louvre, Jacques Floreins, sa femme et leurs dix-huit enfants.
Les portraits de Memling vivent
d'une existence mi-charnelle, mi-spirituelle, où l'expres
sion
du personnage rejoint en quelque sorte la moralité, la piété, la fierté du temps.
Vérités
courtoises, exemplaires, persuasives.
On n'oublie pas les physionomies de Guillaume Moree!,
de sa femme, de l'inconnu
du Mauritshuis, de la vieille dame du Louvre, de la pâle et quasi dia
phane
Maria Moreel.
Depuis quelques années, une œuvre assez inattendue est inscrite
au catalogue de Memling:
la Bethsabée de Stuttgart.
C'est un nu grandeur nature, comme l'Eve de Jean van Eyck, mais
d'un esprit radicalement différent.
L'auteur y poursuit le rêve d'une beauté purement formelle,
liée au
jeu des proportions et au balancement des lignes.
Cette beauté sera la plus noble conquête
du XVIe siècle.
A
la fin de sa vie, maître Hans agrémente de putti, de jolies guirlandes florales à l'italienne,
sa
Résurrection du Louvre et ses Vierges.
Timide prélude à la Renaissance.
C'est toutefois à la
peinture flamande du XVe siècle que Memling offre sa conclusion: accord parfait, -auquel
Gérard David met
un point d'orgue.
« Bethsabée au bain.
» ( Staatsgalerie, Stuttgart.)
PAUL FIERENS
Conservateur en chef des Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique
75.
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