Ophélie de REDON

« 1905-1908 Peintre français Anal yse ......, L'œ uvre figure, sur un fond sulfureux et doré parsemé de taches bleu lapis-lazuli , une jeune femme de profil contemplant une guirlande fleu­ rie disposée légèrement au-dessus d'elle.

Sa tête, ceinte d'une fine couronne de fleurs, se détache à peine sur l e fond immatériel.

La physionomie du modèle a effectivement moins intéressé le peintre que son expression.

Fasciné par la guirlande, le personnage semble surgi d'un rêve et son image paraît encore moin s tangible que celle des fleurs , également assez désinc arnées : l 'émotion qu 'elles s uscitent et l eurs couleurs pri ­ ment là encore sur le dessin .

Aucun des végéta u x représenté s n 'appartient, par ailleur s, à une espèce précise : tout comme l'évanescent profil féminin, les fleur s sont la proj ection d'une vision intérieure, d' une pens ée calme et sereine quoi ­ qu'un peu mélancolique .

Odilon Redon a repris ici l'un des thèmes fétiches des peintre s du x1x e siècle : les visio ns d ' Ophélie ; peut -ê tre ce tableau illustre-t-il même la toute dernière vision de la jeune fille, juste avant la mort.

Comme Orph ée - qui inspira à Redon un pastel très semblable, aujourd 'hui conservé au Museum of Art de Cleveland -, l ' héroïne shakespearienne symbolise pour les artistes le tourment créateur, le génie incompris : celui qui se fie à son instinct plutôt qu 'à l'appa ­ rence des choses.

P astel 64 x 91 cm La tragédie de Shakespeare raconte comment cette fille de courtisan aimée d'Hamlet répondit à l'amour de son fiancé avec une pureté candide et toute enfantine, et comment elle se laissa pren­ dre à la ruse imagin ée par le jeune homm e.

Simu­ lant la démence , ce dernier entreprit de repousser Oph élie : rendu e, elle, vrai ment folle, la jeune fille devint la proie de visions douces et mysté ­ rieuses qui l'éloignaient chaque jour d ava ntage de la réalité.

Elle finit par tomber dans un ruis­ sea u et par se noyer en tentant d'a ttraper une guirlande de fleurs qui pendait d' un saule se reflétant dan s l 'ea u.

L'œu vre C Exécutée entre 1905 et 1908, Oph élie est signée en bas à droite « Odilon Redon ».

Armand Parent acquit directement le pastel auprès du pein­ tre : il resta dans sa collection jusqu'au 8 février 1945, date à laqu elle l' épouse du collectionneu r décida de mettre l 'œuvre en vente dans une galerie parisienne.

C 'est là qu'elle fut achetée par César de Hauk e, qui devait la revendre à son tour en 1949 au New- Yorkais Albert D.

Las ker : ce dernier , enfin , la céda en 1977 à la Nat ional Gallery de Londres.

L'œuvre d 'art , révélatrice de l'énerg ie créatrice + Également écrivain (son Journal et se~ dont la source est l'inconscient et l 'inconnu ; il Notes furent publiées en 1922 sous le titre A n'attend rien de ce qui sera.

J'aime ce qui ne soi-même) Redon notait en 1908 : fut jamais .

Le souci doit être l'hôte habituel et « Le peintre qui a trou vé sa technique ne constant du bon atelier.

Le souci est comme m 'intéresse pas ; il se lève chaque matin sans une équation entre la palette et le rêve.

Il est passion et, tranquille et paisible , il poursuit le le ferment du nouveau ; il renouvelle la faculté labeur commencé la veille .

Je lui soupçonne un créatrice ; il est le témoin d'erreurs sincères et certain ennui propre à l'o u vrier vertueux qui de l'inégalité du talent.

L 'homme est alors visi- continue sa tâche sans l'éclair imprévu de la ble chez l'artiste, et celui q u i regarde son œ u vre minute heureuse.

Il n'a pas le tourment sacré est plus près de lui.

» Du même peintre: PICTO 815 à 816 Pho to Na tiona l Galle ry, L ondres.

© Nardini Editore, 1994.

Uria d e pour l'édition française, 1994.

34 -2 7. »