Véronèse : LE REPAS CHEZ LEVI (analyse)

« Les droits du peintre Tous ces détails n'ont rien à faire dans une image religieuse censée commémorer le moment où fut instituée la première eucharis­ tie.

Mais le tableau de Véronèse réjouit l'œil du point de vue esthétique.

L'équilibre des formes satisfait le regard, dans ce décor aux amples architectures.

La combinaison des verts et des rouges, rompue ici et là par quelque tache jaune, crée une harmonie chro­ matique chaleureuse et riche.

Enfin, le foison­ nement des détails amuse l'esprit, qui se plaît à scruter la peinture pour y relever toutes les inventions de l'artiste.

L'Inquisition, à Venise, ne fut jamais sévère.

Forcé de s'expliquer sur ses intentions devant le Saint-Office, Véronèse en fut quitte pour affir­ mer sa bonne foi, c'est-à-dire en fait son atta­ chement aux principes de la foi catholique elle­ même.

Cette pétition de principe une fois faite, le tribunal obligea seulement le peintre à modi­ fier le titre de son tableau qui, de Dernière Cène, devint le Repas chez Lévi.

Mais la comparution fut l'occasio n pour Véronèse d'affirmer la liberté de l'artiste à peindre ce que bon lui semble.

À plusieurs reprises au cours de l'inter­ rogatoire, le peintre insiste sur la distinction Véronèse Paolo Caliari , dit Véronèse parce qu'il est originaire de Vérone, est né en 1528 , d 'un père tailleur de pierres .

Formé dans sa ville natale , il est appelé à Venise en 1553 pour participer à des décors de plafonds dans le pala is ducal.

Là , il découvre la couleur , qui devient son moyen d 'expression principal , et s ' oriente vers une grande peinture décorative , riche en figures, en accessoires et en architectures .

Dans les années 1550, outre les pein­ tures pour le palais des Doges , Véronèse décore des plafonds et des murs dans l'é glise S.

Sebastiano, et réa­ lise ses premières très grandes toiles, les Pèlerins d'Emmaüs (Lo uvre ), la Présentation au Temp le (Dresde ), le fondamentale qui doit être établie entre le thème central - ici le dernier repas du Christ-, qui doit être respecté , et les épisodes annexes, que le peintre doit pouvoir inventer et représenter selon sa fantaisie.

La distinction peut paraître subtile, mais elle est décisive à l'époque de Véronèse.

L'tglise, alors, ne s'est pas encore remise du schisme de la Réforme et, Repas dans la maison de Simon (Tu rin, ga lerie Sabauda).

Peu après 1560 , il entreprend un cyc le décora tif très impor­ tant : celui de la villa Barbaro à Maser , en Vénétie .

Parallèlement, il continue de peindre ses grandes œuvres mi­ historiques , ou mi-religieuses , et mi­ décoratives : les Noces de Cana (Louvre), la Famille de Darius devant Alexan dre (Londres, National Gallery ), et la Dernière Cène, devenue , sous la press ion de l'inquisition , le Repas chez Lévi.

Les dern ières années voient les com­ mandes se mul tiplier et, en consé­ quence , l'ate lier participer toujours davantage à l'exécution des œuvres.

Véronèse meurt à Venise, en 1588 .

frileuse, elle craint que les peintres trahissent ses intentions en illustrant de façon hérétique ou grotesque des thèmes qu'elle regarde comme sacrés.

Or le peintre convainc le Saint­ Office de la nécessité de reconnaître à l'artiste le droit d'interpréter librement les scènes reli­ gieuses, pourvu qu'il respecte l'esprit du dogme de l'tglise catholique.. »