Devoir de Philosophie

DRIEU

Publié le 08/04/2013

Extrait du document

drieu

Les tourments de ses amitiés blessées sont, chez Drieu, plus pathétiques encore que ses amours déçues. Seule subsistera l'amitié forte, indestructible, qui l'unit à Malraux, faite d'admiration et d'estime réciproques. Prévoyant la tourmente qui tous deux les emporterait, les séparerait, ils l'admettaient par Je même amour fasciné de l'histoire, convaincus qu'à travers toutes les péripéties, la mort même, leur amitié survivrait. Drieu, ayant lu Nietzsche, Barrès et D'Annunzio, s'est toujours fait une certaine idée de l'écrivain comme homme d'action. Il a horreur du clerc et des tours d'ivoire. Parce qu'il a vécu la Première Guerre mondiale, il lui semble impossible de rester simple spectateur. Il ne se veut pas homme de lettres, il aspire à figurer quelqu'un. Voilà toute l'histoire du malentendu rochellien.

drieu

« qu'il recommande en ces termes à la généreuse sollicitude de Jacques Doucet : « Vous et moi, Monsieur, nous sommes dans le siècle.

Louis Ara­ gon n'y est pas.

Il a pro­ noncé des vœux qui l'en excluent.

( ...

) Louis Ara­ gon est dans ces années 1920 pour faire vivre quelque chose dont nous nous nourrissons tous et qui est l 'Esprit.

Au­ jourd'hui il est poète, en un autre temps, il eût été aussi l'homme de Dieu ...

» (Drieu, lettre du 6 novembre 1924 à Jacques Doucet.) A cette époque, Drieu se livre à la débauche, fré­ quente le bordel.

La liste serait fasti­ dieuse et peu élégante à dresser des maîtresses de grande qualité que col­ lectionna Drieu entre 1920 et 1945, Drieu La Rochelle blessé pendant la Première Guerre mondiale princesses de sang, d'in­ dustrie ou seulement de cœur...

Expériences de séduction douloureuses dont il tire un roman, son premier, L'Homme cou­ vert de femmes (1924) ..

Mais don Juan est incor­ rigible ...

En 1925, le divorce est consommé entre les deux surdoués de l'excès : Ara­ gon sera stalinien, Drieu hitlérien après avoir long­ temps et éloquemment plaidé la cause de L'Europe contre les patries (1931), puis d'un Socia­ lisme fasciste (1934), de Doriot (Avec Doriot, 1936), pour finir pétainiste incertain à la rédaction de Révolution nationale que dirige Lucien Com­ belle (1943).

NOTES DE L'ÉDITEUR En aoüt 1925, Drieu publie une lettre ouverte à Aragon dans la NRF, La Grande Erreur des surréalistes.

Aragon lui répond : « Es-tu bien celui qui était mon ami? ...

Tu n'es qu'un homme comme les autres et pitoyable, et peu fait pour montrer leur chemin aux hommes, un homme perdu et que je perds.

Tu t'en vas, tu t'effaces.

Il n'y a plus personne au lointain, et, tu l'as bien voulu, ombre, va-t'en, adieu.

» 1 Roger- Viollet 2, 3 Laski / Sipa Press 4, S Roger-Viollet L'écrivain en 1928 dans son appartement de l'île Saint-Louis Retour d'Allemagne des écrivains français.

Au premier plan, deuxième depuis la gauche, Drieu La Rochelle.

A ses côtés, en pardessus blanc, Robert Brasillach.

«Drieu avait-il songé aussi à se sacrifier pour que certains de ceux qu'il avait, pensait-il, entraînés dans la collaboration, ne fussent pas inquiétés ? Il est sûr que le procès Drieu, c'était aussi le procès Chardonne, Jouhandeau, Fabre-Luce.

Je me le demande, sur quelques mots qu'il avait dits, un jour que nous étions allés discuter au musée Rodin.

Quelle grandeur, de toute façon, dans son suicide (même s'il ne l'a pas pensée) et comme la littérature est grave.

»Jean Paulhan, lettre à Colette Jeramec, 16 mars 1945.

~J'ai souvent envie de me suicider tout de suite » 1 943, c'est l'année où Drieu se demande avec insistance ce qui l'a empêché de devenir commu­ niste ...

tant lui apparaît dérisoire son engagement dans cette aventure suicidaire d'une Europe que les décombres unifient mal.

Le vieux rêve de la pure action revient, l'image de L'Homme à cheval (1942), chevalier à la triste figure et guerrier solitaire.

Il est tard.

En 1939, Drieu a publié son roman majeur, Gilles - « Toute ma génération s'y retrouvera de gré ou de force », prévoyait-il -, qui consacre, large­ ment autobiographique, le naufrage des dieux, le périgée d'un monde imaginaire, l'impuissance avérée des rescapés hallucinés de la Grande Guerre à construire l'avenir radieux ...

Le 16 mars 1945, alors qu'un man­ dat d'amener a été la veille lancé contre lui, Drieu se souvient de Jacques Rigaut, son ami, qui s'est suicidé le 5 novembre 1929 et qui lui inspira son récit le plus décisif : Le Feu follet (1931).

Il arrache le tuyau du gaz et avale trois tubes de gardénal.

«Je n'ai aucune envie de m'humilier devant les communistes, surtout les Français et surtout les littéraires.

Donc, je mourrai.

» Pierre Drieu La Rochelle, Récit secret, 1944.

«Il y a une intoxication de l'écriture.

La solitude s'ouvrant sur une perspective de suicide est intolérable.

Il y a un appel de l'écriture dans ce vide.

L'écrivain n'écrit jamais aussi bien qu'en prison.

» F.

Grover, Six Entretiens avec André Malraux, 1959.

DRIEU LA ROCHELLE 02. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles