Mann, Thomas
Publié le 17/01/2022
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Ecrivain allemand, frère du précédent, né à Lübeck, mort à Zürich (1875-1955). Peintre de la société hanséatique, il exprima d'abord des vues nationalistes et conservatrices, et reçut le prix Nobel en 1929. Il s'opposa au nazisme et s'exila en 1933. Réfugié en France, en Suisse, puis aux Etats-Unis (1940), il s'adressa régulièrement à ses compatriotes par les ondes de la B.B.C.
«
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une sagesse après la crise de la maturité.
Le feu du commencement brûle toujours, mais on voit
moins les flammes.
Soit que Mann, délivré de ses fantômes personnels, s'occupe de Dieu, un peu
de haut comme d'habitude et non sans ironie.
Et il s'engage des années dans un immense effort
de reconstitution biblique.
Joseph l'intéresse par son destin singulier.
N'est-il pas, d'une certaine
façon, l'un des premiers artistes restés dans la mémoire humaine? Face à des frères obtus que nulle
inquiétude n'effleure, il découvre seul les lois du monde et assume après Abraham et Jacob la
tâche sublime de recréer Dieu.
Soit que l'essai littéraire, musical ou politique détourne provisoirement notre auteur de la
fiction.
Soit qu'il mêle l'un et l'autre comme dans Charlotte à Weimar.
Ce roman procède de la même
recherche passionnée qui était à l'origine de la série des Joseph : la mesure du temps.
Eliezer
a-t-il existé une fois ou mille fois? se demandait le jeune Joseph.
Le Gœthe de Charlotte à Weimar
ne nous est pas présenté jeune et bouillant à l'époque du suicide de Werther mais aux jours sereins
de la vieillesse.
Autre tentative pour saisir la durée, pour l'apprécier peut-être grâce au revoir
de Gœthe et de Charlotte Kestner, après quarante-quatre ans d'absence.
Un conte philosophique de la même époque ( r 940), les Têtes interverties, reprend sous un nouvel
aspect le thème du dépassement.
Il est traité avec la légèreté ironique qui convient aux hésitations
d'une belle dame, éprise de l'esprit d'un homme et du corps d'un autre.
Les deux ayant été
malencontreusement décapités, l'interversion de leurs têtes va peut-être permettre à l'amoureuse
de parfaitement concilier la matière et l'esprit.
Dans l'atmosphère irréelle et un peu vague des
légendes orientales, le prodige n'est pas exclu.
Sous nos climats, il faut que l'intervention surna
turelle soit bien voyante pour que l'être exceptionnel ait une chance d'atteindre au sublime.
Thomas :Mann va donc écrire son Faust.
Le Docteur Faustus n'est pas un roman de technique
traditionnelle comme les Buddenbrook ou la Nlontagne Magique.
La vie du musicien génial Adrian
Leverkuhn, racontée par l'un de ses amis, se présente en réalité grâce à cet humaniste distingué
et qu'on a voulu pédant comme une somme de la pensée mannienne.
Considérable entreprise,
et qui devrait être passionnante.
Mais s'il est excitant de voir analyser l'inspiration infernale qui
conduit l'Allemagne à l'hitlérisme et à l'effondrement, Leverkuhn à l'indicible et à la folie, on
peut regretter que la démonstration soit pesante et ne nous épargne aucune particularité de la
technique musicale.
En faisant souvent passer l'abstrait devant le concret, ce récit austère parle
beaucoup à l'esprit et peu à la sensibilité.
Thomas Mann semble avoir voulu se délasser d'une longue spéculation en revenant avec
l'Élu à une expression plus légère et plus imagée, à un humour subtil qui est inséparable de ses
grandes réussites formelles et donne une dimension supplémentaire à son univers romanesque.
Son dernier roman, les Confessions du Chevalier d'Industrie Félix Krull, est aussi écrit avec une allé
gresse
qui peut aller jusqu'à la farce.
Sous son apparente frivolité se cache encore une fois le secret
de l'artiste, de l'être qui passe sa vie à donner le change.
Il est émouvant et singulier que Mann
ait repris, peu avant sa mort survenue en 1955, une nouvelle ancienne pour en faire l'un de ses
romans les plus vivants.
Que l'œuvre soit restée elle-même inachevée n'est pas tellement mélan
colique si l'on songe que Thomas Mann avait finalement faite sienne la sereine parole de Gœthe :
« Meurs et deviens.
»
377.
»
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