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ROUSSEAU: GENÈVE. LA JEUNESSE ET L'ADOLESCENCE

Publié le 17/01/2022

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rousseau

Même si le Contrat social n'est pas écrit en pensant constamment à Genève, on ne peut pas nier que Rousseau est né à Genève, qu'il y a vécu les seize premières années de sa vie, que sa famille a continué à y vivre, qu'il a voulu reprendre le titre de « citoyen de Genève b, qu'il a eu à se mêler aux affaires de Genève, que certains de ses ouvrages y ont été condamnés, que les Lettres de la Montagne ont été écrites pour discuter des accusations genevoises, bref que Genève, la vie et la pensée genevoise ont tenu dans sa vie une place importante. Qu'était donc cette cité à l'époque où Jean-Jacques y passa les seize années de sa vie ?

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« les citations et les « grièves censures » du Consistoire n'étaient pas toujours efficaces car Théodora Rousseau, uneautre tante, accouche huit jours après ses noces.Quant à Isaac Rousseau, père de Jean-Jacques !...

Il occupe trois fois le Consistoire avec ses disputes.

Marié en1704 avec Suzanne Bernard il avait été, comme tant d'autres genevois, horloger.

L'horlogerie lui avait sans douteparu une occupation trop sédentaire : Il s'était donc mis maître de danse, dans une ville où la danse était interdite— il est vrai qu'il pouvait l'enseigner aux jeunes Anglais qui venaient en pension à Genève se perfectionner dans lalangue française et que le maître de danse tout autant que la danse enseignait les bonnes manières et l'art de fairetrois révérences à la marquise.

Puis la danse elle-même avait dû lui paraître dénuée de charmes et un an après sonmariage il était parti s'établir horloger à Constantinople — il est vrai que cette aventure était moins « turque » qu'ilne pourrait sembler ; il y avait dans la ville des sultans toute une colonie d'artisans genevois, avec un pasteur.

MaisSuzanne ainsi veuve de fait perd sa mère en 171o.

Elle dut souffrir de sa solitude ; elle rappelle son mari en 1711.

EtJean-Jacques naquit le 28 juin 1712.La source essentielle, pour écrire la vie de Rousseau, reste les Confessions.

Rousseau a attesté à plusieurs reprisesqu'elles étaient absolument sincères et que, sauf défaillances de mémoire, elles étaient fort exactes.

On n'a pas crule narrateur sur parole.

De très nombreuses vérifications ont été faites sur toutes sortes de correspondances et depièces d'archives.

Tous ceux qui n'aiment point Rousseau et aussi bien tous ceux qui aiment la vérité plus que luiont essayé de le prendre en flagrant délit de mensonge ou d'erreur grave.

Disons de suite que toutes cesrecherches ont confirmé la confiance que l'on peut avoir dans les Confessions.

Pour tout l'essentiel elles sontexactes.

Quand elles ne le sont pas il n'y a aucune raison de croire que Rousseau nous a sciemment trompés.

Nousdiscuterons d'ailleurs, chemin faisant, les cas les plus importants.La mère de Rousseau meurt le 7 juillet des suites de couches.

Il est élevé par la sœur de son père, SuzanneRousseau.

Il semble bien que la principale intervention de son père dans son éducation ait été, dès qu'il sut lire, dedévorer avec lui des romans ; puis des historiens et des moralistes plus ou 'moins romanesques.

Les lectures furentd'ailleurs interrompues.

Isaac, que les aventures turques n'avaient pas calmé, se prend de querelle, au cours d'unepartie de chasse, avec un propriétaire, Pierre Gautier.

Il le blesse d'un coup d'épée.

Nul doute qu'il ait étél'agresseur.

Comme une enquête judiciaire est ouverte il juge plus prudent de quitter le territoire de Genève et des'installer à Nyon, Sans doute un père soucieux de ses devoirs aurait pris son jeune fils avec lui.

Mais Isaac avaitd'autres soucis.

Il mit son enfant en pension (avec son cousin Abraham Bernard) chez le pasteur du village deBossey, à 7 km.

de Genève, Jean-Jacques Lambercier.

L'enfant y passe non pas deux ou trois ans comme le disentles Confessions, mais quelques mois de l'hiver 1724-25 dont il garda de vivants souvenirs.

Rentré à Genève, il entreen apprentissage chez le greffier Masseron.

Les besognes du greffe le rebutent ; il remplace la procédure par ledessin et la gravure en entrant, en mai 1726, chez le graveur Ducommun.

La gravure ne semble pas l'avoir beaucoupplus intéressé que le greffe.

Il partage la vie bruyante et mal disciplinée des apprentis et épuise le cabinet delecture de la Tribu, soupçonnée de louer, sous le manteau, des livres peu conformes à la morale de Genève et mêmeà la morale tout court.

Il reste tout de même chez Du commun près de trois ans.

Mais en mars 1728 il prolongeimprudemment une promenade dans la campagne et trouve les portes fermées.

Il faut coucher dehors et affronter lelendemain la colère du patron. Jean-Jacques couche donc dehors mais décide (il a 16 ans) qu'on peut vivre ailleurs qu'à Genève et du métier degraveur.

Mais où aller ? à l'aventure d'abord pendant quelques jours.

Mais l'aventure ne nourrit pas.

Il s'en va donctrouver le curé de Confignon, village sarde, M.

de Pontverre.

Il est probable qu'il le connaissait.

M.

de Pontverreétait l'un de ces prêtres de frontière qui poursuivaient avec les pasteurs de Genève l'une de ces guerresd'embuscade dont les trophées étaient des conversions.

De 1690 à 1732 M.

de Pontverre reçut 64 abjurations.

Ilest fort probable que les convertis étaient d'abord des visiteurs que M.

de Pontverre recevait avec assez delibéralité pour qu'ils revinssent.

Quoi qu'il en soit l'excellent curé décide que le néophyte doit aller trouver à Annecycelle qui centralisait tous ceux et celles qui désiraient entrer dans le giron de l'église catholique, Mme de Warens.Nous connaissons bien Mme de Warens.

Son existence avait été aussi aventureuse que celle du père de Jean-Jacques.

Elle était Suisse et avait été mariée avant quinze ans à un mari assez riche qui habitait Vevey.

Mais elleavait sans aucun doute la tête légère et l'imagination fertile.

Elle entraîna son mari dans des spéculations qui lesruinèrent.

Pour arranger les choses elle quitta, le 14 juillet 1726, à l'insu bien entendu de son mari, Vevey pourEvian, en territoire sarde, ayant soin d'emporter l'argenterie.

Puis elle gagne Annecy, entre au couvent de laVisitation et se convertit au catholicisme.

Mais, même catholique il faut vivre.

Elle était intelligente ; elle savaitplaire.

Elle obtient du roi de Savoie une pension annuelle de 1.300 livres.

En échange elle devait remplir deuxfonctions : l'une avouée qui était d'accueillir et de diriger vers qui de droit tous ceux lui désiraient rentrer dans ledroit chemin du catholicisme ; l'autre, naturellement secrète, qui était d'entrer dans le service d'espionnage du roide Savoie.C'est chez cette dame que Rousseau arrive le 21 mars 1728, dimanche des Rameaux.

Mme de Warens estaccueillante et même tendre.

Mais elle n'a évidemment pas droit de conversion.

Il faut partir trois jours après pourTurin.

Voyage enchanteur et qui dure, non pas comme le dit Rousseau, sept ou huit jours, délai matériellementimpossible, mais vingt jours.

Le 12 avril, Jean-Jacques est admis, comme catéchumène, à l'hospice du Spirito Santo.Ici se place la seule erreur des Confessions qui ait quelque importance parce qu'elle est sans doute voulue et dictéepar une raison d'amour-propre.

Rousseau nous dit avoir abjuré après plus de deux mois de discussions attentives etscrupuleuses avec ses convertisseurs.

Or le registre du Spirito Santo le dément sans conteste.

Il entre à l'hospice le12 avril 1728 ; il abjure le 21 et il est baptisé le 23.

Apparemment il a eu quelque honte d'avouer qu'il avait suffi deneuf jours pour convaincre un jeune homme qui devait plus tard montrer tant de fermeté et tant de pénétrationdans les polémiques religieuses.

On peut d'ailleurs alléguer que converti en neuf jours on le garda tout de même àl'hospice quelques deux mois, car il ne sortit qu'après le 13 juin.

Il est fort possible que, pendant ce délai, Jean-Jacques ait parlé religion et théologie avec les prêtres qui l'avaient fait abjurer.Mais pas plus que le protestantisme le catholicisme ne nourrissait par lui-même son homme.

Il fallait vivre.

Rousseau. »

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