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TARDIEU Jean (vie et oeuvre)

Publié le 15/10/2018

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tardieu

TARDIEU Jean (né en 1903). L’auteur dramatique a acquis une certaine notoriété dans les années 1950. Mais on le compara un peu trop rapidement à Ionesco, oubliant de voir qu’il y avait un poète derrière cet apprenti sorcier du langage — c’est d’ailleurs sous la forme d’un recueil de poèmes inédits, de toutes les époques, qu’il donnera en 1986 une singulière autobiographie, Marge ries. Né à Saint-Germain-de-Joux (Jura), d’un père peintre et d’une mère musicienne, Jean Tardieu suivit, dès j 1923, les « Entretiens d’été » de Pontigny et vit, en 1927, la Nouvelle Revue française publier pour la première fois les vers qu’il avait écrits.

 

A la lecture des poèmes composés entre 1938 et 1961, Accents (1939), le Témoin invisible (1943), Jours pétrifiés (1947), Monsieur Monsieur (1951), Une, voix sans personne (1954) et rassemblés dans le Fleuve caché (1968) — que suivront Formeries (1976), Comme ceci, comme cela (1979) —, on s’aperçoit que leur auteur, élargissant une expérience personnelle qui lui fit connaître en 1921 une véritable stupeur d’exister, crée un univers insolite qui n’est pas sans rappeler celui d’Henri Michaux. « L’homme qui ne comprend rien » — c’est le titre d’un poème — s’adresse à nous, pour nous demander :

 

Telle chose vient Telle autre se passe Telle autre s'en va Ne trouvez-vous pas Qu'on n'y comprend rien?

tardieu

« l'h umour devient nettement plus grinçant lorsque est dénoncée la vacuité des conversations tenues par les mélomanes (la So nate et les Trois Messieurs) ou la bêtise de certains admirate urs de la sculpture moderne (la Société Apollon).

Mais Jean Tardieu évoque aussi d'au­ tres iJlu sions : celle de l'esp oir (Qu i est là?), ce lle du lyrisme, qui nous fait aimer vo ir la nuit par les yeux de l'autre (le Sacre de la nuit), celle de la connaissance de soi (Mo nsieur moi), cel.le du souvenir, qui prétend ressusciter des êtres (Une voix.

sans personne).

Le poète, dans Monsieur Mons ieu r, se livrait à «s ix études pour la voix seul e>> : étude de pronoms, de sylla­ bes, de voyelles, de rythme et de voix enfantine notam ­ ment.

Le dramaturge pou rsuit ces expé rien ces su r les mots, afin de mieux sais ir les limites de leur p ouvoir.

De même que les gestes (Un ge ste pour un autre), ils ap par aissent terriblement arbitra ire s, puisque înterchan ­ gés ils n'empê che nt pas les personnages et le public de se comprendre (Un mot pour un autre) .

Ils n'ont pas besoin d'êtr e «rech erchés>>, car les membr es d'une famille peuvent user, pour communiqu er, d'un vocabu ­ laire infantile (Ce que parler veut dire), et le partenaire clownesque de Monsieur moi parvient à s'exp rimer par de simples intc.tjections.

Eu x.

seuls le savent illustre la difficulté pour un spectacteur de com prendr e de quoi parle n t, au théât re, les personnages et l'auteur.

P arm i les obstacles auxquel s se heurt e Lui po ur r ejoindre Elle, dans le métro, l'Ou vrier n'est pas le moins redoutab le, q ui dit : « Il y a mots et mots : les siens et les vôtres.

C'est pas les mêmes » (les Amant s du métro) .

Mais le langage est a ussi tout-p uis sant : dans le Temp s du verbe, Rober t, en ne parlant qu'au passé, parvient à abolir le présent et le futur et à ébranler l'équilib re des proches venus pour tenter de le gué r ir.

La te ntation musicale est grande, quand on veut maîtri se r les mots : dan s Conver­ satio n-sinfoni etta et dans l'ABC de notr e vie, Jean Tar ­ dieu orchestre les voix des personnages en s'inspirant de la structure d'une sy mphonie et d'un concerto .

L'humour dont il ne se dépan jamais ne doit pas nous fai re oublier q ue toutes ces tentatives ont un grave enjeu, celui de la poésie, qui est de traduire et de commun iquer : d'ailleurs l'une des pièces recueillies dans Poèmes à jouer, Ryth me à trois temps ou le Temple de Ségeste, ne se présente-t-elle pas comme « un essai de poésie sur scèn e »? Et 1 'un des de ux personnages d'Une soirée en Provence ne finit- il pas par « mettre en lambeaux >> le djctionnaire, parce qu'obéissant à l'exhortation formulée dans le poème «Méd ium anonyme >>, iJ ve ut « aller jus ­ qu' au bord d u non-sens, faire bouge r les mot s, les allu­ mer, les éteindre, les forcer à produire des étincelles jamais vues >>? BTBLIOGRA P HIE La collection Po~s ie-Gallimard a publié trois recueils de Jean Tardieu qui couvrent la totaHté de l'œuvre poétique : le Fleuve caché (1938-1961), la Part de l'ombre (1937- 1967 ), l'Accent g rav e et l'Accellf aigu (1976 -1983).

Son Théâtre (4 vol.) est éga lem ent publié chez Gallimard.

A consu lt e r.

- E.

Noulet , Jean Tardlw , Paris, Seghers, « Poè ­ tes d'aujo ~rd 'hui » , 196 4; Éd.

Kinds, Jean Tardieu ou l'é11igme d'exister, Ed.

de l'unjv .

de B ruxelles, 1973; P.

Vernois, ta Dra­ mantrgie poétiqu e de Jean Tardieu , Paris, K lincksieck, 1981; J.

Onimus, Jean Tardieu, un rire inqui e t, Seysse l, Champ Val1on, 1985; Lire Tardi eu (dir.

J.-Y.

Debr euille), P.

Univ.

Lyon, 1988; Jean Tardieu, Rom e, Bu lzoni, 1990.. »

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