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Les mémoires intérieurs de Maurice Pialat

Publié le 05/12/2018

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une cohérence arbitraire. D’où un certain sentiment de gratuité et de monotonie, l’impression pour le spectateur de ne pouvoir trouver sa place, tant le miroir est placé près du visage. De surcroît, Gérard Depardieu, par un mimétisme cultivé depuis Loulou (première étape d’une collaboration envisagée dès la Gueule ouverte, où Philippe Léotard avait repris le rôle qui lui était destiné, poursuivie avec Police et Sous le soleil de Satan), incarne moins un personnage qu’il n’étend sur tout le film l’ombre portée du réalisateur, de ses colères, de ses doutes, de son égocentrisme autodestructeur. Aussi excessif que puisse paraître cet effet de proximité, et parfois improbable l’improvisation des comédiens (un exercice pour lequel Géraldine Pail-has s’avère la plus à l'aise, dessinant une vraie figure féminine, qui compense jusque dans sa discrétion la misogynie envahissante de son partenaire), on admire la liberté souveraine que s’autorise ici Pialat - à l’instar de ces romanciers qui, parvenus à la pleine maîtrise de leur art, peuvent se laisser aller à la nonchalance et à la confidence. D’une certaine manière, l’auteur du Garçu concrétise un idéal entrevu il y a vingt-cinq ans, lorsqu’il réalisait pour la télévision la Maison des bois : retrouver par le moyen des images, une durée qui n’est communément permise qu’à l’écriture.

Quatre ans après Van Gogh, le onzième film de Maurice Pialat aura donné lieu à un long murmure d’attente - que le cinéaste s’ingénie une nouvelle fois à court-circuiter : s’éloignant des sujets plus « spectaculaires » de ses dernières œuvres, se passant même de toute concession à la dramaturgie traditionnelle, il offre avec le Garçu un autoportrait éclaté, elliptique, une somme d’impressions et d’humeurs qui semblent le ramener à l’inspiration documentaire de ses débuts. Un retour aux sources qui est d’abord une tentative, à la fois provocante et très humble, de se retrouver face à face avec soi-même - mais qui constitue aussi, indirectement, une sorte d’anthologie de ce qui est en fin de compte son esthétique.

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