Devoir de Philosophie

Guy de Maupassant, Bel-Ami: Quand la caissière lui eut rendu la monnaie de sa pièce de cent sous, Georges Duroy sortit du restaurant.

Publié le 31/03/2011

Extrait du document

maupassant

Quand la caissière lui eut rendu la monnaie de sa pièce de cent sous, Georges Duroy sortit du restaurant. Comme il portait beau par nature et par pose d'ancien sous-officier, il cambra sa taille, frisa sa moustache d'un geste militaire et familier, et jeta sur les dîneurs attardés un regard rapide et circulaire, un de ces regards de joli garçon, qui s'étendent comme des coups d'épervier. Les femmes avaient levé la tête vers lui, trois petites ouvrières, une maîtresse de musique entre deux âges, mal peignée, négligée, coiffée d'un chapeau toujours poussiéreux et vêtue toujours d'une robe de travers, et deux bourgeoises avec leurs maris, habituées de cette gargote à prix fixe. Lorsqu'il fut sur le trottoir, il demeura un instant immobile, se demandant ce qu'il allait faire. 10 On était au 28 juin, et il lui restait juste en poche trois francs quarante pour finir le mois. Cela représentait deux dîners sans déjeuners, ou deux déjeuners sans dîners, au choix. Il réfléchit que les repas du matin étant de vingt-deux sous, au lieu de trente que coûtaient ceux du soir, il lui resterait, en se contentant des déjeuners, un franc vingt centimes de boni, ce qui représentait encore deux collations au pain et au saucisson, plus deux bocks sur le boulevard. C'était là sa 15 grande dépense et son grand plaisir des nuits ; et il se mit à descendre la rue Notre-Dame-de-Lorette. Il marchait ainsi qu'au temps où il portait l'uniforme des hussards, la poitrine bombée, les jambes un peu entrouvertes comme s'il venait de descendre de cheval ; et il avançait brutalement dans la rue pleine de monde, heurtant les épaules, poussant les gens pour ne point se déranger de 20 sa route. Il inclinait légèrement sur l'oreille son chapeau à haute forme assez défraîchi, et battait le pavé de son talon. Il avait l'air de toujours défier quelqu'un, les passants, les maisons, la ville entière, par chic de beau soldat tombé dans le civil. Quoique habillé d'un complet de soixante francs, il gardait une certaine élégance tapageuse, un peu commune, réelle cependant. Grand, bien fait, blond, d'un blond châtain vaguement roussi, 25 avec une moustache retroussée, qui semblait mousser sur sa lèvre, des yeux bleus, clairs, troués d'une pupille toute petite, des cheveux frisés naturellement, séparés par une raie au milieu du crâne, il ressemblait bien au mauvais sujet des romans populaires. C'était une de ces soirées d'été où l'air manque dans Paris. La ville, chaude comme une étuve, paraissait suer dans la nuit étouffante. Les égouts soufflaient par leurs bouches de granit leurs 30 haleines empestées, et les cuisines souterraines jetaient à la rue, par leurs fenêtres basses, les miasmes infâmes des eaux de vaisselle et des vieilles sauces. Les concierges, en manche de chemise, à cheval sur des chaises en paille, fumaient la pipe sous des portes cochères, et les passants allaient d'un pas accablé, le front nu, le chapeau à la main.

Quand Georges Duroy parvint au boulevard, il s'arrêta encore, indécis sur ce qu'il allait faire. 35 II avait envie maintenant de gagner les Champs-Élysées et l'avenue du Bois de Boulogne pour trouver un peu d'air frais sous les arbres ; mais un désir aussi le travaillait, celui d'une rencontre amoureuse. Guy de Maupassant, Bel-Ami, 1885. QUESTIONS question 1 Relevez, sous la forme d'un tableau, des expressions du texte relatives : - à l'apparence du personnage principal Georges Duroy, - à sa situation sociale et financière. Quelle idée vous faites-vous de ce personnage ? (2 points) question 2 Dans le septième paragraphe « c'était une de ces soirées... vieilles sauces. «, relevez une comparaison et une métaphore. Quel est l'effet produit par ces images ? (2 points) question 3 Sous la forme d'un développement organisé d'une page au moins, vous dégagerez les caractéristiques de ce début de roman. Vous pourrez étudier notamment la façon dont le cadre de l'histoire (temps et lieux), et le personnage sont présentés par le narrateur. (6 points)

maupassant

« question 1 Relevez, sous la forme d'un tableau, des expressions du texte relatives : à l'apparence du personnage principal Georges Duroy, à sa situation sociale et financière. Quelle idée vous faites-vous de ce personnage ? (2 points) Apparence dupersonnage Situationsociale et G.

Duroy financière deG.

Duroy - il portait beau - ancien sous-officier - cambra sa taille - un geste militaire - frisa sa moustache - il lui restait juste en pochetrois - regards de joli garçon francs quarante pour finir lemois - poitrine bombée - beau soldat tombé dans lecivil - jambes un peu entrouvertes - un complet de soixantefrancs - il avançait brutalement - toujours défier quelqu'un - gardait une certaine élégancetapageuse - d'un blond châtain vaguementroussi - une moustache retroussée - mauvais sujet des romanspopulaires Ainsi que la deuxième syllabe de son patronyme l'y invite, le personnage de Georges Duroy cherche — malgré sesennuis d'argent — à garder une belle apparence flatteuse, un aspect « royal ».

Ancien militaire, il n'a pas renoncé aucombat, mais son champ de bataille a changé (il se bat maintenant dans la société), et ses conquêtes sontdifférentes (il fait celle des femmes). question 2 Dans le septième paragraphe « c'était une de ces soirées...

vieilles sauces.

», relevez une comparaison et unemétaphore. Que! est l'effet produit par ces images ? (2 points) Dans le septième paragraphe, pour caractériser la chaleur d'un soir d'été à Paris, Guy de Maupassant emploie unecomparaison : « La ville, chaude comme une étuve ». Cette chaleur a pour principale conséquence de provoquer des nuisances qui, en provenance des égouts, viennentfrapper l'odorat des passants.

L'auteur grossit le trait à l'aide d'une métaphore filée « Les égouts soufflaient par leurbouches de granit leurs haleines empestées ».

Maupassant s'amuse ici à prendre au sens propre le terme « bouche», dans l'expression bouche d'égout.

À l'aide de cette métaphore il fait de ce trou un véritable orifice vivant,exhalant un air vicié et nauséabond. question 3 Sous la forme d'un développement organisé d'une page au moins, vous dégagerez les caractéristiques de ce débutde roman. Vous pourrez étudier notamment la façon dont le cadre de l'histoire (temps et lieux), et le personnage sontprésentés par le narrateur.

(6 points). »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles