Isabeau de Bavière par Maurice Clavel Il m'est arrivé une curieuse aventure avec Isabeau de Bavière.

Isabeau de Bavière par Maurice Clavel Il m'est arrivé une curieuse aventure avec Isabeau de Bavière. Je m'étais proposé, dans une pièce de Jeanne d'Arc commandée par un festival de Lorraine, de montrer dans l'au-delà, en Enfer ou du moins à sa porte, Jeanne réhabilitant, sauvant son siècle d'horreur, forçant le pardon de Dieu par un appel obstiné à sa charité contre sa justice. Encore fallait-il trouver, dans la vie de chaque personnage porté à la scène, quelque chose, fût-ce un je ne sais quoi, un rien, qui permît le salut. Le plus difficile fut évidemment avec Isabeau de Bavière. Sa vie semblait un tissu de trahisons et de crimes : ses premiers adultères, ses débauches, sa liaison avec Orléans, sa trahison d'Orléans en faveur de Bourgogne - il n'est pas impossible qu'elle ait fait assassiner son bel amant -, sa trahison de la France, ce traité de Troyes où, non contente de livrer le pays, elle bafouait son propre honneur en désavouant le dauphin, tout en se faisant servir par l'Anglais une rente qui figurait au texte du protocole. Enfin la déchéance, la vieillesse, l'obésité, l'ivrognerie, la misère, le mépris où la tenait l'ennemi, ne l'invitant pas même au sacre de son petit-fils Henri VI - l'enfant qui passe sous sa fenêtre et ne reconnaît pas sa grand-mère, qui se détourne et pleure -, cette vivante agonie où elle trouve le moyen de se su...