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La musique classique au XXe siècle par Ernest Ansermet On peut dater le " moderne " en musique de l'époque qui suit les grands romantiques, c'est-à-dire du dernier quart du XIXe siècle.

Publié le 05/04/2015

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La musique classique au XXe siècle par Ernest Ansermet On peut dater le " moderne " en musique de l'époque qui suit les grands romantiques, c'est-à-dire du dernier quart du XIXe siècle. Mais il faut y distinguer deux étapes, d'autant plus tranchées qu'on sera amené à rattacher l'une au passé tandis que l'autre ouvre un devenir aujourd'hui encore entièrement imprévisible. La première de ces étapes s'étend jusqu'aux environs de la première guerre mondiale et culmine dans l'oeuvre de Debussy ; la seconde domine l'activité de l'entre-deux guerres ; c'est là que nous trouvons les chefs de file de la musique contemporaine. Leur apport est considérable et les innovations qu'a subies le langage musical au cours de ces quelque vingt ans ont été plus radicales, plus diverses et surtout plus rapides qu'en aucune autre époque de son histoire. Mais quand on se bornerait à les énumérer et à les décrire, on ne ferait que de la statistique et l'on n'aurait encore rien dit, en somme, si l'on ne s'efforçait en même temps de discerner leur signification. La langue musicale est, en effet, bien autre chose qu'un simple moyen matériel apte à exprimer n'importe quelle pensée ; elle porte en elle l'esprit de l'art qui en résultera, sa nature expressive et la mesure de sa portée. Si la civilisation occidentale a créé un art musical incomparablement plus riche et de tout autre transcendance que les civilisations antérieures, c'est qu'un certain esprit l'animait, qui, informant l'action créatrice de races ou du moins d'ambiances diverses, faisait se conjuguer leurs efforts, imprimait une unité à la pluralité des genres et des esthétiques et une continuité aux métamorphoses que leur faisait subir l'histoire. Depuis Bach, cet esprit s'était incarné dans le principe configurateur de la force harmonique tonale et cet apport germanique avait marqué de son sceau toute la production ultérieure. En accordant la primauté, dans la musique qui en est issue, à l'accent individuel, le romantisme ouvrait la voie aux nationalismes musicaux, et ce qui caractérise la première étape de la musique moderne, c'est l'action dissociante des individualités nationales. Le champ de la musique occidentale s'était étendu ; de nouveaux éléments (scandinaves, slaves, etc.) s'étaient joints à ceux qui jusque là en avaient constitué le corps et ces individualités nationales, en cherchant à se dégager de ce qu'il y avait de spécifiquement germanique dans leur art commun, tendaient à en rompre l'unité organique. L'esprit de notre culture subsistait encore, mais divisé, et par là, affaibli. Il eut pu se faire, comme à d'autres tournants de l'histoire, que l'une de ces individualités, celle que personnifiait Debussy, par exemple, prît le pas sur les autres et entraînât avec elle toute la musique occidentale dans la voie qu'elle s'était ouverte. Ce n'est pas ce qui s'est produit et nous pouvons voir là le signe d'une période de crise. Elle se traduit, sur le plan technique, par l'abandon du principe harmo-nique tonal. Il est vrai que, sous ses formes traditionnelles, celui-ci paraissait avoir épuisé ses ressources, semblait frappé d'usure et de stérilité. Mais son abandon privait la musique de son principe configurateur, du seul agent d'une forme autonome et significative qu'elle ait jamais connu. Aussi la musique nouvelle pourra-t-elle frapper par de nouveaux moyens expressifs, de nouvelles ressources sensibles - de nouveaux effets ! - elle restera en quête d'une faculté...

« par Ernest Ansermet. »

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