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Pierre Puget 1620-1694 Singulier destin que celui de Puget !

Publié le 05/04/2015

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Pierre Puget 1620-1694 Singulier destin que celui de Puget ! S'il était mort avant la soixantaine, il ne figurerait sans doute pas dans les histoires de l'art ; et ce génie " polyvalent ", à la manière des maîtres de la Renaissance, ce sculpteur qui fut aussi peintre, architecte, urbaniste, décorateur de navires, c'est par une demi-douzaine de statues ou de bas-reliefs qu'il survit dans nos mémoires. Pierre Puget, fils d'un maître maçon marseillais, naît en 1620 (ou 1622). Orphelin à trois ans, élevé par son oncle, il reçoit, avec la formation artisanale, une instruction assez poussée, apprenant même le latin ; placé à quatorze ans chez un maître menuisier, il excelle très vite dans les techniques du bois. A dix-huit ans, hanté par la grande sculpture et les mirages de l'Italie, il s'embarque pour Livourne. Cinq années outre monts, d'abord chez un sculpteur florentin, puis à Rome chez Pierre de Cortone. Ensuite, pendant une quinzaine d'années, sa vie semble se fixer à Toulon (il s'y marie en 1647, un fils lui naît en 1650) : sa vie, mais non ses activités. Un premier essai de prendre pied à l'Arsenal comme décorateur de navires, est interrompu par la mort de l'amiral de Brézé qui le protégeait ; une production abondante de peintures et de retables se disperse entre les églises de Toulon, de Marseille et d'Aix ; c'est en 1657 seulement que le sculpteur donne sa mesure à la façade du nouvel hôtel de ville de Toulon, avec ces Cariatides fameuses où Puget, prenant pour modèles des portefaix du port, oppose avec tant de puissance l'effort allègre du jeune homme à la crispation douloureuse de l'atlante âgé. Mais loin d'épanouir Puget dans une paisible gloire régionale, ce succès provoque des réactions " en chaîne ". Ayant répondu à l'appel de M. de Girardin pour décorer le château que Lepautre lui construit à Vaudreuil, non loin de Rouen (dont le musée conserve, mutilé, l'Hercule terrassant l'hydre qui ornait la cour), voici que Mazarin et Fouquet se le disputent. Pressenti par Colbert au nom de son maître, Puget préfère le fastueux Surintendant, qui lui a commandé un Hercule gaulois symbolique et qui l'envoie chercher sur place, pour Vaux, des marbres de Carrare. C'est à Gênes, en septembre 1661, que Puget apprend la disgrâce de son protecteur. Plus d'espoir de commandes officielles avec Colbert au pouvoir. Autant rester à Gênes, plus prospère que jamais. Comblé de commandes par l'aristocratie, installé avec sa famille dans une belle demeure, parmi les tableaux et les meubles précieux, Puget connaît six années de détente, les plus heureuses sans doute de sa vie. Entouré d'élèves français et italiens, il sculpte des statues de marbre, dresse des...

« n'apporte à Puget que des mécomptes : déceptions de l'urbaniste à Marseille, où son projet de grande voie, bordée de palais à la génoise, de la Porte d'Aix à la Porte de Rome, demeure enterré dans les cartons par des échevins parcimonieux ; déceptions du décorateur à Toulon, où Puget, appelé à diriger l'atelier de sculpture de l'Arsenal, prétend régner aussi sur les chantiers de navires et les bâtiments du port, et s'attire une tranchante réponse de Colbert (“ S'il se met de pareilles chimères en tête, il faudra bientôt le remercier ”).

Et pour comble de malheur, le voilà bridé sur son propre terrain, lorsque les marins, surclassés par les vaisseaux de leurs adversaires anglais ou hollandais, décident le ministre “ à retrancher tous ces grands ouvrages auxquels les sculpteurs s'attachent plus pour leur réputation que pour le bien du service ”.

Adieu les châteaux d'arrière à multiples galeries, peuplés de dieux, de sirènes, chargés d'emblèmes et de trophées, du Royal-Louis ou de la Thérèse-Royale ! Puget s'adapte avec maîtrise ; et d'admirables dessins — modèles de poupes, études de vaisseaux croisant au large des côtes provençales ou ancrés devant des portiques à la Claude Lorrain — nous permettent de suivre sa trajectoire vers un style plus sobre.

Mais l'Arsenal ne l'intéresse plus et sa brusque radiation des cadres en 1679, pour amère qu'elle lui soit, ne fait que consacrer un détachement bien antérieur... C'est que, depuis 1670 — ayant obtenu l'autorisation d'employer des marbres entreposés à l'Arsenal — la grande sculpture l'obsède de nouveau et l'espoir de faire agréer par le Roi la statue Milon de Crotone et le grand bas-relief Alexandre et Diogène qu'il a entrepris.

Déchargé des “ devoirs parasites ”, réinstallé dans sa ville natale, il achève en 1681 le Milon .

Déballée à Versailles, la statue obtient l'exclamation ingénue de la Reine : “ Oh ! le pauvre homme, comme il souffre ! ” Mais aussi les suffrages de Le Brun, de Le Nôtre, du Roi lui-même.

On l'érige à l'entrée de l'Allée Royale “ qui est le plus bel endroit du jardin ”.

La chance tourne-t-elle pour Puget grâce à un Ministre “ dont les bontés le feront rajeunir ”, avec l'avènement de Louvois beaucoup mieux disposé pour lui que son prédécesseur ? Sexagénaire, va-t-il pour le Roi-Soleil fixer dans le marbre les grands mythes qui nourrissent ses rêves : Persée et Androméde, Apollon et Marsyas, ce Ravissement d'Hélène, “ qui serait quelque chose d'extraordinaire ”, et cet Apollon colossal qu'il dresserait au milieu du Canal de Versailles et dont les jambes écartées laisseraient passage aux bateaux ? Mais le destin veille ; après le succès de Persée (1684), l'activité de Puget dévie vers un projet grandiose, également séduisant pour le sculpteur et l'urbaniste, pour le citoyen de Marseille et le sujet du Roi. A la statue équestre de Louis XIV que lui commande la municipalité, il conçoit un cadre à sa mesure : une Place Royale ovale, ouvrant sur la mer.

Une fois de plus, il se heurte à la lésinerie des échevins, qui soudoient ministres et hauts fonctionnaires pour contrer son plan ; à la cour, partisans du “ plan ovale ” et du “ plan carré ” s'affrontent ; Mansard intervient en faveur du “ plan carré ” qu'il retouche.

Puget rompt le marché, abandonne place et statue.

Lorsqu'il se rend à la cour pour convaincre le Roi, la guerre de la Ligue d'Augsbourg met tout le monde d'accord : la ville remplace la statue par une contribution financière et Louis XIV donne courtoisement congé à l'artiste : “ Allez, M.

Puget, travaillez toujours pour moi et me faites de belles choses comme vous savez faire.

” Cette fois le vieux lion, vaincu, renonce.

Il se remarie, et se construit un petit palais dominant Marseille, parmi les vignes et les oliviers.

Il a le temps d'y achever son Diogène — qui lui restera pour compte — et un autre grand bas-relief religieux Saint Charles. »

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