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appelle, conquièrent Édesse, Antioche, Tripoli et prennent bientôt Jérusalem (15 juillet 1099).

Publié le 06/01/2014

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appelle, conquièrent Édesse, Antioche, Tripoli et prennent bientôt Jérusalem (15 juillet 1099). Partout, ils fondent principautés et royaumes, et s'installent sur leur nouvelle terre. Mais dès 1144, Zenghi, l'émir de Mossoul, reprend Édesse. Les Francs d'outre-mer appellent au secours. Cela vaut une deuxième croisade. Plus tard, en 1187, après avoir défait les Francs à Hattin, le sultan Saladin reprend Jérusalem. Voilà un but tout désigné pour la troisième croisade. C'est l'histoire. Une déferlante de riches et de pauvres, de princes et de petites gens On prend des villes, la nouvelle arrive en Europe, qui festoie. On en perd, l'Europe s'émeut, les papes prêchent, de nouvelles troupes s'embarquent. On se bat, on se massacre, on se replie, on ré-avance. Cela durera deux siècles. Durant ce temps, on a entendu à Vézelay un futur saint, Bernard de Clairvaux, prêcher de sa voix d'or une des expéditions - la deuxième croisade. On a vu passer par les ports de la côte de Palestine, ou sur les sables des déserts d'Orient, des empereurs - Frédéric Barberousse, qui se noie en traversant une rivière - et des rois - Louis VII, ou plus tard Richard Coeur de Lion et Philippe Auguste. Des princes et des petites gens qui viennent chercher la rémission de leurs fautes et leur assurance pour le paradis, comme le pape l'a promis à ceux qui prennent la croix. Et des cadets de famille qui rêvent de la gloire, des terres et de la fortune qu'on leur refuse chez eux. On a créé, pour défendre cet Orient latin, des ordres armés, les chevaliers Teutoniques, les Templiers, les Hospitaliers, qui ont dressé des forteresses si imposantes et si solides qu'on les visite encore aujourd'hui, en Syrie, au Liban. On a vu d'autres pauvres gens, d'autres rois, d'autres guerres, d'autres massacres répondant à des massacres, et on en est arrivé au terme de l'aventure. En 1270, Saint Louis, sur le chemin de sa seconde croisade, meurt devant Tunis. On ramène ses saintes entrailles à Paris pour les offrir à la vénération des foules. C'est la dernière fois qu'un morceau de roi fait le voyage entre l'Orient et l'Occident. Les grands s'en sont lassés, ils n'iront plus. Dans les années 1290, les dernières places fortes franques sont reprises par les musulmans. Les derniers moines-soldats réembarquent pour aller ailleurs combattre pour leur salut. Seule dans la région l'île de Chypre restera longtemps une petite principauté latine. Les croisades ne sont plus, fermez le ban et tournez la page, ce chapitre de notre histoire est clos. Dans ce livre, j'aurais pu en rester là. Que dire encore ? Ou plutôt que dire de différent de ce qu'on peut lire dans tant d'ouvrages remarquables écrits sur le sujet. On trouve tout, dans cette bibliographie abondante, des vieux grimoires et des thèses d'État, des petites synthèses admirablement faites1 et même le point de vue qui nous manqua si longtemps, magnifiquement mis en forme par Amin Maalouf, dans un de ses ouvrages les plus célèbres, Les Croisades vues par les Arabes2. Qu'ajouter, surtout, quand tout le monde, catholiques et incroyants, historiens de droite comme de gauche, est d'accord, sinon peut-être quelques vagues exaltés d'extrême droite dont on se fiche : cette entreprise aura été un désastre ou du moins une parenthèse totalement inutile dans l'histoire du monde. Le médiéviste Jacques Le Goff eut l'idée heureuse, dans un de ses livres, de solder le bilan général de l'opération par une boutade : « Comme fruit possible ramené des croisades par les chrétiens, je ne vois que l'abricot. » Deux siècles pour des prunes, en quelque sorte. Bilan léger, fantasme pesant Sur un plan social, économique, artistique et même culinaire, le bilan des croisades est léger, c'est indéniable. Mais comme fantasme, leur souvenir est bien lourd. L'a-t-il toujours été ? Peut-être pas. Je ne suis pas certain qu'au xvie ou au xviie siècle, par exemple, quand les regards étaient plutôt tournés vers l'Ouest, on se préoccupât beaucoup de ces vieilles histoires de soleil et de sable. Mais aujourd'hui, dans notre univers post-11 Septembre, comme cela pèse ! Forcément, à une époque où tout le monde redoute le match espéré par tant d'extrémistes, ce fameux « choc des civilisations » qui finirait forcément par opposer le monde musulman et le monde occidental chrétien, on a tendance à se redemander souvent comment s'est passée la première manche. Alors, avant que vous ne tourniez la page, permettez-moi de glisser les remarques suivantes. Qui étaient les fanatiques ? Au cours des siècles, on a cherché, pour expliquer les croisades, toutes les causes possibles : on y a lu la tentative des papes d'établir enfin l'empire théocratique dont ils rêvaient, en muselant les rois qui leur tenaient tête, en fédérant enfin l'Occident sous leur bannière, tout en prenant le contrôle sur les communautés chrétiennes d'Orient qui jusqu'alors dépendaient de Byzance, la grande rivale de Rome. On y a trouvé des raisons sociales et économiques, la nécessité pour un Occident en trop-plein démographique dans ces siècles de prospérité de s'assurer de nouveaux débouchés et des terres où placer les fils de famille sans héritage. On a, pour expliquer les avancées et les échecs de ceux-ci et de ceux-là, les victoires et les défaites qui ont eu lieu à tel ou tel moment, invoqué toutes les faiblesses humaines, les rivalités, les jalousies, le goût de l'or, l'appât du pouvoir ou de la pompe. On a tout fait, en somme, pour chercher à ces deux siècles d'histoire des explications rationnelles. C'est louable et rassurant. Prenons garde toutefois à ne pas oublier ce qui en a été le levier principal : le fanatisme religieux. Comment expliquer, sinon, tant d'épisodes qui nous semblent aujourd'hui proprement ahurissants ? Lors de la première croisade, en 1096, ils sont 300 000 à quitter tout ce qu'ils ont, famille, champ et village, pour suivre des gens qu'ils n'ont jamais vus qui leur demandent de délivrer un endroit dont ils ne savent rien. Sitôt qu'ils aperçoivent les tours d'une ville de Rhénanie, ou des Balkans, les croisés hurlent : « Jérusalem ! Jérusalem ! », parce qu'ils se croient au terme du voyage. Ils n'y arriveront jamais. Seuls quelques milliers échappent au soleil du désert et au sabre des Turcs, et moins encore réussissent à se greffer à la croisade des chevaliers, celle de Godefroy de Bouillon, partie à leur suite. Les quelques survivants y deviendront les « tafurs » - on croit savoir que ce nom curieux dérive du patronyme de celui qui dirigeait leur bande. Cette appellation oubliée était connue de tous, à l'époque. Il suffisait de l'évoquer pour semer la terreur dans les deux camps. Apôtres du dénuement, armés de leur seul bâton mais d'une férocité, d'une folie devenues proverbiales, les tafurs se rendront célèbres, entre autres, en organisant des repas de cadavres d'infidèles. La prise de Jérusalem de 1099, telle qu'elle est racontée à la fois par les musulmans et les chrétiens, restera dans l'histoire comme un bain de sang d'une ampleur inconcevable. « Il nous montait jusqu'aux chevilles », écriront les vainqueurs après avoir massacré dans des spasmes de haine tous ceux qui défendaient la ville où ils habitaient depuis des siècles, les musulmans, les Juifs, et ceux des chrétiens orientaux qui estimaient que leur place était de ce côté- là de la muraille. Le monde a connu d'autres carnages. Plus rare, plus stupéfiant, est ce qui le suit immédiatement : un moment de piété, d'absolu recueillement. Après avoir tué, tué, tué, les chevaliers et les soldats, couverts du sang qu'ils ont versé, se prosternent en silence devant le tombeau du Christ, l'âme en paix et le coeur en joie, car ils sont convaincus, avec cet holocauste barbare, d'avoir fait à leur Seigneur l'offrande qu'il espérait. Cent ans plus tard encore, en 1212, lors de ce que l'on a appelé la croisade des pauvres et des enfants, ils sont à nouveau des milliers à quitter l'Allemagne, armés de rien, pour suivre un nouveau prédicateur halluciné. Cette fois ils coupent par les montagnes, se ruent en Italie et foncent vers la Méditerranée sans même chercher de ports ou de vaisseaux sur lesquels s'embarquer. Pourquoi donc ? Leur chef leur a dit que la mer allait s'ouvrir devant eux comme elle s'était ouverte devant Moïse fuyant l'Égypte, et ils le croient. La plupart mourront en Italie ou finiront en esclavage. Que dire des pieux délires de Saint Louis, persuadé que les sultans d'Égypte ou de Tunisie allaient tomber à genoux et se convertir à la seule vue de la croix ? Ne vous méprenez pas. Je ne tire de tout cela aucune conclusion sur la religion en général. L'histoire ne manque pas d'épisodes tout aussi fanatiques et parfaitement laïques. Le communisme - ce siècle d'obstination à refuser de voir l'horreur de la réalité au nom de l'angélisme des intentions - restera sans doute un des grands moments de délire de l'histoire du monde. La guerre de 14-18, ces millions de gens morts pour rien d'autre que la couleur de leur drapeau, en est un autre. Je ne tire non plus aucune généralité d'aucune sorte sur les catholiques en particulier : ils sont si nombreux, à tant de moments de l'histoire, à avoir su trouver dans leur croyance la force généreuse de l'héroïsme et de l'altruisme. Je remarque seulement qu'à notre époque, bien des gens sont persuadés que l'islam est la seule religion à être capable, par son essence même, de produire du fanatisme. Il n'est pas mauvais de leur rappeler qu'à ce jeu le christianisme a su montrer qu'il n'était pas dénué de talent. Le choc des civilisations n'est pas forcément celui qu'on croit Y aura-t-il dans l'avenir un « choc des civilisations » ? Qui le sait ? En tout cas, les croisades en produisirent un, aux xie, xiie et xiiie siècles. C'est indéniable. La « guerre sainte », menée par les papes, a abouti à durcir les rapports de l'Europe chrétienne avec les musulmans et à les raidir pour des siècles. Longtemps, pour les chrétiens occidentaux, les musulmans resteront ces « infidèles » que l'on regrette de ne pas avoir battus. Longtemps, pour les musulmans du Proche-Orient, les chrétiens d'Europe laisseront le souvenir de ces barbares fanatisés qui, un jour, ont débarqué sur leurs terres. Pour autant, cette rupture ne doit pas en masquer d'autres, que l'on a tendance à oublier, et qui pourtant sont tout aussi essentielles : les ruptures que les croisades vont creuser, au sein même des deux mondes, chrétien et musulman. La sphère islamique est diverse. On l'a vu plus haut, elle est bousculée au xie siècle par l'expansion des Turcs, les Seldjoukides, un peuple issu du Turkestan qui va constituer un empire dominant le Moyen et le Proche-Orient et soumettre les Arabes qui l'avaient conquis quelques siècles auparavant. Et, depuis la mort du Prophète et les déchirements sanglants entre ceux qui s'en prétendaient les seuls héritiers, elle est partagée aussi entre les deux grandes obédiences ennemies : le premier courant, majoritaire, est celui des sunnites, mais ils sont concurrencés au début de la période des croisades par une dynastie chiite, les puissants Fatimides, qui règnent sur l'Égypte. Côté musulman, donc, le pouvoir est instable, la division règne, à coups d'assassinats, de trônes renversés, de trahisons dont sauront, à leur heure, profiter les chrétiens. Il faut attendre le xiie siècle et la poigne et la finesse d'un jeune Kurde, Saladin, pour faire l'unité qui mènera à la victoire. Côté chrétien, il n'y en a aucune. Au nom du Christ, deux mondes s'opposent depuis des siècles, les deux branches de l'Empire romain que l'histoire a séparées à jamais : celui d'Occident - notre partie de l'Europe - et celui d'Orient - qui couvre le monde balkanique et l'actuelle Turquie. De ce côté, rien n'a changé depuis les Césars, il n'y a pas eu d'invasions barbares, il n'y a pas de rois et de féodalité. Un empereur règne toujours à Byzance - appelée aussi Constantinople. La vieille partition géographique s'est doublée de tensions religieuses de plus en plus vives : le patriarche de Constantinople refuse toute prééminence à ce pontife de Rome qui se croit tous les droits. En 1054, on en est venu aux anathèmes et aux excommunications entre les légats de l'un et les représentants de l'autre. Par tradition, c'est de cette date que l'on fait partir la séparation entre ceux qui se disent les orthodoxes - c'est-à-dire qui se pensent conformes à la vraie doctrine - et les catholiques - c'est-à-dire les « universels ». Les croisades ne feront que mettre du sel sur cette plaie qui ne se refermera jamais. En 1095, pourtant, on a pu croire au rapprochement. C'est l'empereur Alexis Comnène lui-même qui a appelé l'Occident au secours parce que la menace des Turcs sur son empire était trop forte. En fait, il espérait quelques bons mercenaires pas trop chers et n'avait jamais envisagé, même dans ses pires cauchemars, ce qui lui est tombé dessus : cette masse de fanatiques incultes qui se sont abattus sur son empire comme les sauterelles sur l'Égypte. À leur arrivée, les Latins, comme on les appelle, tentent bien avec lui des accords : quelques barons lui promettront de reconquérir des terres en son nom, quelques petits royaumes joueront le jeu de se déclarer ses vassaux, au moins symboliquement. Le reste de l'histoire, lui, ne fait que creuser entre les deux peuples, entre les deux civilisations, ce fossé de préjugés qui les sépare. Pour les Occidentaux, les « Grecs » sont cupides, efféminés, lâches : ne préfèrent-ils pas la diplomatie à la guerre ? Les Byzantins ne le démentent pas. En effet, ils aiment bien mieux, le plus souvent, traiter avec les Arabes, ces gens éduqués, raffinés, avec qui l'on peut s'entendre, que d'avoir à s'allier aux Latins, ces rustres à la propreté douteuse, ces soudards aux moeurs inqualifiables et qui prouveront bientôt l'étendue de leur sauvagerie. Pour les Byzantins, l'horreur arrive avec la quatrième croisade. Elle a été armée par Venise, trop contente de faire payer fort cher les vaisseaux qu'elle loue aux Francs, trop heureuse d'asseoir un peu plus sa domination sur l'Adriatique et la Méditerranée. Pour s'acquitter de leur lourde dette envers la Sérénissime, les croisés commencent par prendre la ville de Zara (aujourd'hui Zadar, en Croatie). Elle est peuplée de gens qui parlent une langue curieuse, ça doit être des ennemis. Manque de chance, il s'agit de Hongrois, chrétiens. Cela fait un premier scandale. Un peu plus tard, toujours en principe sur le chemin de la Palestine et de l'Égypte (le but officiel de cette croisade est de vaincre les Égyptiens), les voilà qui arrivent près de Byzance, avec, dans leurs bagages, un vieux prétendant au trône impérial exilé. Il comptait sur ces étrangers pour remonter en selle. On ne se mêle pas impunément de la politique d'un vieil empire. Des gaffes sont commises ; la population gronde contre cette immixtion ; la tension monte. Bientôt quelques heurts suffisent à mettre le feu aux poudres, et à déclencher l'impensable : les croisés mettent la ville à sac, pillent, massacrent, profanent les églises, volent tout ce qu'ils peuvent de reliques et d'objets d'art (dont les fameux lions de Venise, jamais rendus). Forts de cette victoire pathétique, ils créent sur les décombres de la perle du monde grec un « empire latin », parenthèse de l'histoire byzantine qui durera soixante ans. Ils récoltent surtout, et à jamais, la haine des orthodoxes. Vu d'Occident, on croit que la grande date de l'histoire de l'empire romain d'Orient est 1453, l'année de la prise de Constantinople par les Turcs. Pour beaucoup de gens de cette ville, la catastrophe était arrivée deux siècles plus tôt, et les barbares qui en étaient responsables étaient catholiques. Un cas à part, Frédéric II de Hohenstaufen Faut-il pour autant rester sur une tonalité aussi négative, n'y a-t-il donc personne pour racheter cette longue parenthèse par quelque action méritoire, quelque geste noble ? En général, on convoque le souvenir des deux grandes âmes chevaleresques du temps des croisades : Saladin, qui fait envoyer des médecins pour soigner ses adversaires s'il les sait malades, et Richard Coeur de Lion, impressionné par la grandeur de cet adversaire, qui rêve de lui donner sa soeur en mariage - et ne le fera pas. À dire vrai, on trouve aussi dans la biographie des deux hommes bien des épisodes autrement sanglants - massacres de prisonniers, tueries gratuites -, mais on dira que l'époque n'allait pas sans. Pour ma part, je préfère profiter de l'occasion pour vous toucher deux mots d'un personnage moins connu en France et qui est un de mes favoris dans cette période : Frédéric II de Hohenstaufen (né en 1194, règne en 1220, meurt en 1250), empereur du Saint Empire romain. Les Allemands en ont une approche prudente, car le pire nationalisme germanique chercha un peu trop, au xxe siècle, à l'annexer. Quelle erreur ! Il n'y a pas moins national, moins étroit que ce grand esprit.

« pompe. Onatout fait,ensomme, pourchercher àces deux siècles d’histoire desexplications rationnelles.

C’est louable etrassurant.

Prenonsgardetoutefois àne pas oublier cequi enaété lelevier principal : lefanatisme religieux. Comment expliquer, sinon,tantd’épisodes quinous semblent aujourd’hui proprement ahurissants ? Lors delapremière croisade,en1096, ilssont 300 000 àquitter toutcequ’ils ont,famille, champetvillage, pour suivre desgens qu’ils n’ont jamais vusquileur demandent dedélivrer unendroit dontilsne savent rien.Sitôt qu’ils aperçoivent lestours d’une villedeRhénanie, oudes Balkans, lescroisés hurlent : « Jérusalem ! Jérusalem ! », parce qu’ilssecroient auterme duvoyage.

Ilsn’y arriveront jamais.Seulsquelques millierséchappent ausoleil du désert etau sabre desTurcs, etmoins encore réussissent àse greffer àla croisade deschevaliers, cellede Godefroy deBouillon, partieàleur suite.

Lesquelques survivants ydeviendront les« tafurs » –on croit savoir que ce nom curieux dérivedupatronyme decelui quidirigeait leurbande.

Cetteappellation oubliéeétaitconnue de tous, àl’époque.

Ilsuffisait del’évoquer poursemer laterreur danslesdeux camps.

Apôtres dudénuement, armés de leur seul bâton maisd’une férocité, d’unefoliedevenues proverbiales, lestafurs serendront célèbres, entre autres, enorganisant desrepas decadavres d’infidèles. La prise deJérusalem de1099, tellequ’elle estracontée àla fois parlesmusulmans etles chrétiens, resteradans l’histoire commeunbain desang d’une ampleur inconcevable.

« Ilnous montait jusqu’aux chevilles », écrirontles vainqueurs aprèsavoirmassacré dansdesspasmes dehaine tousceux quidéfendaient laville oùilshabitaient depuis dessiècles, lesmusulmans, lesJuifs, etceux deschrétiens orientaux quiestimaient queleur place étaitde ce côté- làde lamuraille.

Lemonde aconnu d’autres carnages.

Plusrare, plusstupéfiant, estcequi lesuit immédiatement : unmoment depiété, d’absolu recueillement.

Aprèsavoirtué,tué, tué,leschevaliers etles soldats, couverts dusang qu’ils ontversé, seprosternent ensilence devant letombeau duChrist, l’âmeenpaix et le cœur enjoie, carilssont convaincus, aveccetholocauste barbare,d’avoirfaitàleur Seigneur l’offrande qu’il espérait. Cent ansplus tard encore, en1212, lorsdeceque l’onaappelé lacroisade despauvres etdes enfants, ilssont à nouveau desmilliers àquitter l’Allemagne, armésderien, pour suivre unnouveau prédicateur halluciné.Cettefois ils coupent parlesmontagnes, seruent enItalie etfoncent verslaMéditerranée sansmême chercher deports ou de vaisseaux surlesquels s’embarquer.

Pourquoidonc ?Leurchefleuradit que lamer allait s’ouvrir devanteux comme elles’était ouverte devantMoïsefuyant l’Égypte, etils lecroient.

Laplupart mourront enItalie oufiniront en esclavage. Que diredespieux délires deSaint Louis, persuadé quelessultans d’Égypte oudeTunisie allaient tomber àgenoux et se convertir àla seule vuedelacroix ? Ne vous méprenez pas.Jene tire detout celaaucune conclusion surlareligion engénéral.

L’histoire nemanque pas d’épisodes toutaussi fanatiques etparfaitement laïques.Lecommunisme –ce siècle d’obstination àrefuser de voir l’horreur delaréalité aunom del’angélisme desintentions –restera sansdoute undes grands moments de délire del’histoire dumonde.

Laguerre de14-18, cesmillions degens morts pourriend’autre quelacouleur de leur drapeau, enest unautre.

Jene tire non plus aucune généralité d’aucunesortesurlescatholiques en particulier : ilssont sinombreux, àtant demoments del’histoire, àavoir sutrouver dansleurcroyance laforce généreuse del’héroïsme etde l’altruisme.

Jeremarque seulement qu’ànotre époque, biendesgens sont persuadés quel’islam estlaseule religion àêtre capable, parson essence même,deproduire dufanatisme.

Iln’est pas mauvais deleur rappeler qu’àcejeu lechristianisme asu montrer qu’iln’était pasdénué detalent.

Le choc descivilisations n’estpasforcément celuiqu’on croit Y aura-t-il dansl’avenir un« choc descivilisations » ? Quilesait ? Entout cas,lescroisades enproduisirent un,aux xi e , xii e et xiiie  siècles.

C’estindéniable.

La« guerre sainte », menéeparlespapes, aabouti àdurcir lesrapports de l’Europe chrétienne aveclesmusulmans etàles raidir pourdessiècles.

Longtemps, pourleschrétiens occidentaux, lesmusulmans resterontces« infidèles » quel’onregrette denepas avoir battus.

Longtemps, pour les musulmans duProche-Orient, leschrétiens d’Europelaisseront lesouvenir deces barbares fanatisés qui,un jour, ontdébarqué surleurs terres. Pour autant, cetterupture nedoit pasenmasquer d’autres, quel’onatendance àoublier, etqui pourtant sont tout aussi essentielles : lesruptures quelescroisades vontcreuser, ausein même desdeux mondes, chrétienet musulman. La sphère islamique estdiverse.

Onl’avu plus haut, elleestbousculée au xie  siècle parl’expansion desTurcs, les Seldjoukides, unpeuple issuduTurkestan quivaconstituer unempire dominant leMoyen etleProche-Orient et soumettre lesArabes quil’avaient conquisquelques sièclesauparavant.

Et,depuis lamort duProphète etles. »

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