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ARISTOCRATE, substantif et adjectif.

Publié le 27/10/2015

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ARISTOCRATE, substantif et adjectif.  

I.—  Emploi comme substantif (quelquefois sous la forme abrégée péjoratif populaire aristo) 

A.—  HISTOIRE, POLITIQUE.  

1. Partisan de l'aristocratie, en tant que forme de gouvernement : 

Ø 1. Ce que disait Weiss : « Rousseau, Montesquieu nous feraient croire qu'il n'est au monde d'autres partis que les libres penseurs et les superstitieux, les démocrates et les aristocrates, les royalistes et les républicains. (...) »

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 13, 1920-21, page 8. 

2. [Plus particulier et souvent péjoratif]  Partisan, noble ou non, de l'Ancien Régime, à l'époque de la Révolution française : 

Ø 2.... [le commissaire de la Convention] —  (...) Ce Léopold d'Auverney est un aristocrate, un contre-révolutionnaire, un royaliste, un feuillant, un girondin.

VICTOR HUGO, Bug-Jargal,  1826, page 269. 

B.—  Membre ou partisan de la noblesse héréditaire : 

Ø 3. C'est singulier, je suis un aristo, et je trouve qu'il n'y a que moi qui, dans le roman peuple, ait eu de la tendresse, des entrailles pour la canaille.

EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1879, page 16. 

Ø 4. Au demeurant, le divorce est plus grave que ne le dit Maurras, et ce n'est pas le seul aristocrate, mais tout aussi bien le bourgeois ou l'ouvrier qui lit depuis quelque cent ans et admire Feuillet, non Flaubert; Gustave Droz, non pas Bloy;...

JEAN PAULHAN, Les Fleurs de Tarbes,  1941, page 19. 

—  Par extension.  Personne privilégiée en raison de la fortune, de la profession ou de certaines qualités propres; membre d'une minorité : 

Ø 5. Il se décida, non sans angoisse, à mobiliser une partie de son argent, qui était en dépôt à la Nationalbank, sous la garantie d'aristocrates de la finance, tels que Henikstein, Geymüller, Arnstein, surtout Von Eskeles, que tous Beethoven connaissait personnellement.

ROMAIN ROLLAND, Beethoven, tome 1, 1928, page 41. 

—  Par analogie ou par métaphore.  [En parlant de choses concrètes ou abstraites] :

Ø 6. Ce soir, chez la princesse, le vieux Franck, plaidant pro domo sua, se plaint que tout soit à la philologie, que le monde scientifique ne veuille plus que des noms, qu'il y ait une convention pour rejeter les idées, ces vieilles aristocrates, selon son expression.

EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1883, page 250. 

Ø 7. On circule au milieu de pins élégants et droits, jeunes aristocrates élancés, au-dessous desquels les bizarres genévriers se livrent aux contorsions les plus maniérées.

MAURICE BARRÈS, Le Mystère en pleine lumière,  1923, page 125. 

—  Populaire. Faire l'aristo. Faire le malin (Charles-Louis Carabelli, [Langage populaire] ). 

—  Argot. Aristo. \" Prisonnier qui a les moyens de prendre sa nourriture à la cantine. \" (Georges Delesalle, Dictionnaire d'argot-français et français-argot, 1896, page 16). 

II.—  Emploi adjectival. 

A.—  HISTOIRE, POLITIQUE.   [En parlant d'une personne, d'un attribut de la personne ou d'une collectivité]  Qui est partisan du gouvernement aristocratique et, plus particulièrement à l'époque révolutionnaire, de l'Ancien Régime : 

Ø 8. Mais les factions aristocrates ne sont pas les seules, on doit compter avec les républicaines, et avec tous ceux, en général, qui critiquent l'action de la Législative et de la Convention.

ALBERT CAMUS, L'Homme révolté,  1951, page 159. 

B.—  [En parlant d'une personne ou d'une collectivité]  Qui est membre ou partisan de la classe noble; par extension qui est privilégié en raison de la fortune, de la profession ou de certaines qualités propres : 

Ø 9. Mes parents étaient métayers, leur ferme qui était bien sale appartenait au comte de Vigenève. Dès que j'eus atteint l'âge de cinq ans personne ne put plus douter que j'étais sa fille et que ma mère femme d'une petite taille avait fauté avec notre aristocrate patron.

RAYMOND QUENEAU, Loin de Rueil,  1944, page 213. 

—    [En parlant d'un inanimé]  Qui appartient à une personne ou au monde noble : 

Ø 10. Le chaos augmentait : il suffisait de porter un nom aristocrate pour être exposé aux persécutions : plus votre opinion était consciencieuse et modérée, plus elle était suspecte et poursuivie.

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 1, 1848, page 241. 

Ø 11. Ainsi, ce jour-là, il me demanda, étant un peu compositeur aussi, et capable de mettre quelques vers en musique, si je ne connaissais pas de poète ayant une situation importante dans le monde « aristo ».

MARCEL PROUST, Le Côté de Guermantes 1,  1920, page 265. 

C.—  Au figuré.  [En parlant d'un animé ou d'un inanimé]  Fin, distingué, supérieur comme ce qui est le propre d'un noble : 

Ø 12. Tout animal qui a un trait admirable est ridicule par un autre. L'albatros, divin dans les airs, marche comme Charlie Chaplin; le paon, aristocrate par le vêtement, est faubourien par la voix...

ÉMILE HERZOG, DIT ANDRÉ MAUROIS, Mes songes que voici,  1933, page 144. 

—  Péjoratif : 

Ø 13. Je me le représente [Gourmont] ce soir, en pensée, couché là-bas dans cet amphithéâtre d'hôpital, lui si aristocrate, si distant, si dédaigneux.

PAUL LÉAUTAUD, Journal littéraire, tome 3, 1910-21, page 196. 

Remarque : Employé comme adjectif, aristocrate est souvent synonyme de aristocratique, mais avec une référence plus directe à la noblesse historique et/ou une nuance nettement péjorative (soulignée parfois par l'antéposition expressif, confer exemple 9). 

 

 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 543. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 1 116, b) 968; XXe.  siècle : a) 812, b) 348. 

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