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DÉCHU, -UE, participe passé et adjectif.

Publié le 09/12/2015

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DÉCHU, -UE, participe passé et adjectif.  

I.—  Participe passé de déchoir* 

II.—  Adjectif. 

A.—  [En parlant d'une personne physique ou morale] 

1. Qui est tombé dans un état inférieur au précédent. Chapelain, si déchu et si rabaissé aujourd'hui (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Causeries du lundi, tome 14, 1851-62, page 135 ). 

—  Emploi comme substantif. Quand on dit des déchus qu'ils ne savent même plus qu'ils sont déchus, ce n'est pas un grand compliment qu'on leur fait, il me semble (ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos,  1922, page 393 ). 

—  En particulier. 

·    Qui est décrépit par l'âge : 

Ø 1. On a beau dire, c'est pas drôle de vieillir dans les pays où y a pas de distractions... Où on est forcé de se regarder dans la glace dont le tain verdit devenir de plus en plus déchu, de plus en plus moche... 

LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Voyage au bout de la nuit,  1932, page 145. 

·    Femme, fille déchue. Demi-mondaine, prostituée. Femme déchue, goton des champs, fille des rues (OSCAR VLADISLAS DE LUBICZ-MILOSZ, L'Amoureuse initiation,  1910, page 62 ). 

2. Dont on a prononcé la déchéance, qui a été privé d'un privilège, d'une dignité ou d'un avantage. Synonyme : destitué. Louis XVIII entrait à Paris tandis que l'empereur déchu débarquait à l'île d'Elbe (JACQUES BAINVILLE, Histoire de France, tome 2, 1924, page 136 ). 

—  Emploi comme substantif : 

Ø 2. Que dirais-je, alors, Judith, moi qui repars maintenant vers la disgrâce! Car pour te convaincre, (...) j'ai perdu dans mon rang tout grade et toute ancienneté. Va. Si ta peine peut en être allégée, je ne vois pas de mal à ce que tu te dises que dans les cohortes inférieures, il est un déchu pour qui le nom de Judith est un nom de tendresse...

JEAN GIRAUDOUX, Judith,  1931, III, 7, page 248. 

SYNTAXE : Empereur, maître, roi déchu; gouvernement, pouvoir, régime déchu; reine déchue; race déchue. 

—  THÉOLOGIE.  Qui a perdu l'état de grâce (originelle). Homme déchu; humanité, nature déchue. La possibilité pour l'homme déchu d'arriver à connaître Dieu par la raison naturelle (Dictionnaire de théologie catholique (A. VACANT, E. MANGENOT)  tome 4,1  1920, page 775 ). 

·    [Par référence à Apocalypse 12, 7-9]  Ange, archange déchu. L'archange déchu qui veut toujours la guerre (HONORÉ DE BALZAC, Le Père Goriot,  1835, page 224 ). Y aura-t-il au paradis place assez glorieuse pour l'ange déchu que touchera soudain la grâce? (GEORGES DUHAMEL, Confession de minuit,  1920, page 194 ). 

·    Emploi comme substantif. Le déchu, Satan! (ÉDOUARD ESTAUNIÉ, L'Empreinte,  1896, page 232 ). 

B.—   [En parlant d'un inanimé]  Qui est tombé en désuétude, défraîchi. Vieux murs, pignons déchus et pierres condamnées (GEORGES RODENBACH, Le Règne du silence,  1891, page 93 ). Sa chemise [d'Agnès] (...) laissa voir son sein déchu mais gracieux (PIERRE DRIEU LA ROCHELLE, Rêveuse bourgeoisie, 1939, page 227) : 

Ø 3. L'étude de la langue grecque, si déchue dès les premières années du dix-septième siècle, retomba encore vers la fin du même siècle...

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Port-Royal, tome 3, 1848, page 447. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 505. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 926, b) 523; XXe.  siècle : a) 671, b) 672. 

 

Forme dérivée du verbe \"déchoir\"

 déchoir

DÉCHOIR, verbe intransitif.  

Littéraire. 

A.—  Tomber dans un état inférieur à celui où l'on était, s'abaisser. Déchoir de; faire déchoir; ce serait déchoir. La préoccupation du rang, le souci de ne pas déchoir, hantaient ces familles (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, À cheval, 1883, page 398 ). Le bourg n'accepterait pas (...) qu'elle [Noémi] déchût de son rang de veuve admirable (FRANÇOIS MAURIAC, Le Baiser du lépreux,  1922, page 213) : 

Ø 1. De bonne heure ceux-ci [les enfants] sont sevrés de merveilleux, et plus tard, ne gardent pas une assez grande virginité d'esprit pour prendre un plaisir extrême à Peau d'Âne. Si charmants soient-ils, l'homme croirait déchoir à se nourrir de contes de fées...

ANDRÉ BRETON, Les Manifestes du Surréalisme, 1er.  Manifeste, 1924, page 31. 

—  En particulier.  Tomber en décrépitude avec l'âge. La bonne fille (...). A déchu dans l'horreur d'une immonde vieillarde (PAUL VERLAINE, Œuvres complètes, tome 3, Invectives, 1896, page 346 ). 

·    Commencer à déchoir. Synonyme usuel : décliner (confer Dictionnaire de l'Académie Française 1932). 

—  THÉOLOGIE.  Perdre l'état de grâce (originelle). Tu fis tomber Adam et tu fis déchoir Ève (VICTOR HUGO, La Fin de Satan, 1885, page 929 ). 

B.—  Au figuré.  Se dégrader, se défraîchir, s'altérer. Vaucogne n'en trouverait pas cinq mille francs, tellement il l'avait laissée déchoir [la maison] (ÉMILE ZOLA, La Terre,  1887, page 486) : 

Ø 2.... on pouvoit s'en fatiguer quelquefois [de Weimar] , mais on n'y dégradoit pas son esprit par des intérêts futiles et vulgaires; et si l'on manquoit de plaisirs, on ne sentoit pas du moins déchoir ses facultés.

GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAËL, De l'Allemagne, tome 1, 1810, page 217. 

—  Par métaphore littéraire, avec recours au sens étymologique. Ce délire de croire que l'on peut cueillir son rêve, sans que la brusque cueillaison de ce corymbe chimérique n'en fasse déchoir les pétales au froid vent de la réalité (ANDRÉ GIDE, Correspondance avec Paul Valéry, 1891, page 77 ). 

Remarque : 1. Déchoir est un verbe défectif qui se rencontre surtout à l'infinitif et au participe passé. Cependant, outre l'exemple du subjonctif chez Mauriac supra, on rencontre chez Flaubert (Correspondance, 1852, page 421) je ne déchoirai pas, et chez Proudhon (Guerre et paix, 1861, page 91) une nation (...) ne périra, ne décherra même pas. 2. Le verbe se conjugue avec l'auxiliaire avoir quand il exprime une action et avec l'auxiliaire être quand il exprime un état résultant d'une action antérieure. État primitif de perfection, d'où la nature humaine est ensuite déchue par sa faute (François-René de Chateaubriand, Le Génie du Christianisme, tome 1, 1803, page 29). Comme j'ai déchu de moi-même depuis l'an dernier! (Colette, Claudine à Paris, 1901, page 197). 3. On rencontre dans la documentation l'emploi transitif, rare. Se consoler de leur déchéance avec ce qui les [les convertis] a déchus (François Mauriac, Vie Racine, 1928, page 239). Cet emploi n'est pas attesté par les dictionnaires généraux du XIXe.  et du XXe.  siècle, à l'exception de Davau-Cohen 1972. Dans Le Français moderne, tome 16, 1948, n° 2, page 93, A. Thérive le signale comme un fait \" d'observation courante, au moins depuis quelques années (...) au sens transitif de destituer ou, plus exactement, frapper de déchéance \". 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 15 

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