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Dfinition: AGONIE, substantif fminin.

Publié le 14/10/2015

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Dfinition: AGONIE, substantif fminin. A. Littraire. Extrme souffrance morale entranant un trs grand abattement spirituel, et parfois certaines rpercussions physiques, mais non ncessairement la mort immdiate. Synonymes: angoisse, dtresse, tourment. 1. [En parlant de la veille du Christ au jardin des Oliviers] a) [Sans complment] : 1.... je me reportai en pense cette nuit, veille de la rdemption du genre humain, o le Messager divin avait bu jusqu' la lie le calice de l' agonie, avant de recevoir la mort de la main des hommes, (...). (...) je me reprsentai l'ocan d' angoisses qui dut inonder le coeur du Fils de l'homme quand il contempla d'un seul regard toutes les misres, toutes les tnbres, toutes les amertumes, toutes les vanits, toutes les iniquits du sort de l'homme (...); quand, reculant d'effroi devant l'ombre de la mort qu'il sentait dj sur lui, il dit son pre: Que ce calice passe loin de moi! ALPHONSE DE LAMARTINE, Souvenirs, impressions, penses et paysages pendant un voyage en Orient (1832-1833) ou Note d'un voyageur, tome 1, 1835, pages 424-425. 2. Seigneur Jsus, ayez piti de moi! Il est crit dans votre Livre que vous avez eu peur en votre Agonie, lorsque votre tait triste jusqu' la mort, et que vous avez eu peur jusqu' suer le sang. LON BLOY, La Femme pauvre, 1897, page 189. 3. tant le Fils de Dieu, Jsus connaissait tout, Et le Sauveur savait que ce Judas, qu'il aime, Il ne le savait pas, se donnant tout entier. Et c'est alors qu'il sut la souffrance infinie, C'est alors qu'il connut, c'est alors qu'il apprit, C'est alors qu'il sentit l'infinie agonie, Et cria comme un fou l'pouvantable angoisse, Clameur dont chancela Marie encor debout, Et par piti du Pre il eut sa mort humaine. CHARLES PGUY, Le Mystre de la charit de Jeanne d'Arc, 1910, page 126. 4.... la divinit, abandonnant ostensiblement ses privilges traditionnels, a vcu jusqu'au bout, dsespoir inclus, l' angoisse de la mort. On s'explique ainsi le Lama sabactani et le doute affreux du Christ l' agonie. L' agonie serait lgre si elle tait soutenue par l'espoir ternel. Pour que le dieu soit un homme, il faut qu'il dsespre. ALBERT CAMUS, L'Homme rvolt, 1951, pages 50-51. b) [Avec complment] : 5. Agonie du Christ. Saint Luc, XXII, 43, se sert de cette expression pour rendre l' angoisse du Christ, lorsqu'il priait l'cart au jardin des Oliviers, avant d'tre arrt par les Juifs (...). Ce terme a????a ne se trouve point dans d'autres passages de la Sainte criture. Il dsignait, chez les crivains profanes, les luttes des exercices gymnastiques, ou encore l'motion et l' angoisse des lutteurs avant le combat, ou en gnral les agitations violentes de l' Dans saint Luc, il exprime l' angoisse prouve par Jsus dans l'apprhension de sa passion... Dictionnaire de thologie catholique (A. VACANT, E. MANGENOT) tome 1, 1 1909, pages 615, 619. 2. Par extension . [Appliqu par hyperbole, notamment au domaine de la passion amoureuse] a) [Sans complment] : 6. Si je vous savais parti pour Toulon, l'instant je me tuerais et tout serait dit. Si je savais que vous ne venez pas ici, je partirais pour Londres, non pour y vivre avec vous, mais pour mourir aprs vous avoir vu, vous avoir accabl de votre ingratitude, du spectacle de ma passion pour vous et des tourments ternels qu'elle me causera jusque dans le tombeau. Mais hsitant entre l'homme que j'ai cru connatre et celui qui se montre moi depuis deux mois, mon agonie se prolonge et la mort se diversifie sous toutes les formes de mon dsespoir. GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAL, Correspondance gnrale, Lettres indites Louis de Narbonne, 1793, page 191. 7. L'on pleure le cadavre et l'on panse la plaie, L'me se brise et meurt sans que nul s'en effraie Et lui dresse un tombeau. Et cependant il est d'horribles agonies Qu'on ne saura jamais; des douleurs infinies Que l'on n'aperoit pas. Il est plus d'une croix au calvaire de l' THOPHILE GAUTIER, La Comdie de la mort, 1838, page 25. 8. Les bourgeois ne se doutent gure que nous leur servons notre coeur. La race des gladiateurs n'est pas morte, tout artiste en est un. Il amuse le public avec ses agonies. GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1859, page 340. 9. Point d'amis, point de relations, tout ferm!... Ce silence si bien organis contre tous ceux qui veulent manger au gteau de la publicit, ces tristesses et ces navrements qui me prenaient pendant ces annes lentes o je battais l'cho sans pouvoir lui apprendre mon nom!... Ah! cette agonie muette, intrieure, sans autres tmoins que l'amour-propre qui saigne et le coeur qui dfaille! Cette agonie monotone et sans vnement, crite sur le moment, sur le vif des souffrances, ce serait une bien belle tude que personne ne fera, parce qu'un rien de succs... EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Charles Demailly, 1860, page 87. 10. Vous qui souffrez parce que vous aimez, aimez plus encore. Mourir d'amour, c'est en vivre. Aimez. Une sombre transfiguration toile est mle ce supplice. Il y a de l'extase dans l' agonie. VICTOR HUGO, Les Misrables, tome 2, 1862, pages 134-135. b) [Avec complment] : 11. Avoir sans cesse le corps inactif, la tte agite, l' malheureuse, et n'chapper que fort mal dans le sommeil mme ce sentiment d'amertumes, de contrainte, et d'ennuis inquiets, c'est la lente agonie du coeur... PIVERT DE SENANCOUR, Obermann, tome 1, 1840, page 208. 12. Les religieuses de Port-Royal de Paris le signrent non sans difficult le 23 juin; j'ai dit ailleurs les peines qu'il causa au monastre des Champs, o l'on tait moins bien inform, et les douloureuses angoisses, l' agonie de conscience de la soeur de Sainte-Euphmie (Pascal), qui mourut la suite de cette lutte intrieure. CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Port-Royal, tome 4, 1859, page 29. 13. La mort dont tous les dramaturges avaient tant abus, il l'avait, en quelque sorte, aiguise, rendue autre, en y introduisant un lment algbrique et surhumain; mais c'tait, vrai dire, moins l' agonie relle du moribond qu'il dcrivait, que l' agonie morale du survivant hant, devant le lamentable lit, par les monstrueuses hallucinations qu'engendrent la douleur et la fatigue. Avec une fascination atroce, il s'appesantissait sur les actes de l'pouvante, sur les craquements de la volont,... GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, rebours, 1884, pages 253-254. 14. bout de force morale et physique, le major se dlassait l, ananti, terrass par une tristesse, une dsolation immense, dans une de ces minutes d' agonie du praticien qui se sent impuissant Celui-ci pourtant tait un solide, une peau dure et un coeur ferme. Mais il venait d'tre touch par l' quoi bon? Le sentiment qu'il ne ferait jamais tout, qu'il ne pouvait pas tout faire, l'avait brusquement paralys. quoi bon? puisque la mort serait quand mme la plus forte! ZOLA, La Dbcle, 1892, pages 339-340. 15.... pourtant sa rsistance devait encore durer quatre annes: il essaya de tous les moyens et dut abandonner l'une aprs l'autre des armes qui ne lui servaient rien. Ce fut la grande crise de sa vie, cette agonie de la pense dont Arthur Rimbaud a crit: Le combat spirituel est aussi brutal que la bataille d'hommes. HENRI MASSIS, Jugements, tome 2, 1924, page 269. B. Courant . 1. [Chez un tre vivant] tat transitoire correspondant aux derniers instants de la vie et qui peut prendre l'apparence d'une lutte contre la mort lorsqu'il s'accompagne d'une agitation convulsive ou de ractions psychologiques telles que peur, refus, etc. a) [En parlant d'une personne] [Sans complment] : 16.... le mdecin avait dit Stephen: Votre parent ne passera pas la journe, vous le verrez mourir au soleil couchant Jusque-l, Stephen avait dsir sa mort, car, depuis quelques jours, le pauvre homme souffrait d'horribles tortures, et, si le jeune homme en et eu la facilit, peut-tre l'et-il empoisonn pour terminer son agonie. Mais, en ce moment, cette sparation de la vie et du corps a quelque chose de terrible et d'imposant quoi l'on ne saurait rsister. (...) Stephen tenait les yeux fixs sur le soleil qui descendait derrire une maison en face, de temps en temps les reportait sur le mourant qui rlait; dj ses pieds et ses mains taient morts, sa voix tait morte et son regard mort: ce rle semblait le reste de sa vie qui cherchait se rapprocher de la bouche pour s'chapper dans un dernier souffle. (...) Ce fut seulement quatre heures aprs que ses yeux restrent ouverts, que son coeur cessa de battre et le rle de se faire entendre. Allons, dit Stephen, il ne souffre plus! Et longtemps il resta le regard attach sur cette figure livide et inanime. Tout est fini, rpta-t-il. ALPHONSE KARR, Sous les tilleuls, 1832, pages 127-128. 17.... quant au fugitif, il resta couch, se dbattant dans les convulsions de l' agonie. (...) Il venait d'expirer les poings ferms, la bouche contracte par la douleur, et les cheveux hrisss sous la sueur de l' agonie. ALEXANDRE DUMAS PRE, Le Comte de Monte-Cristo, tome 1, 1846, page 456. 18. Ce fut son dernier moment lucide. Il s'affaissa sur lui-mme et n'eut plus qu'une sorte de somnolence remue par le souffle affaibli de sa respiration. Le docteur Lanre le regardait attentivement; il suivait sur son bras les dgradations du pouls. Voici l' agonie, me dit-il. Quelquefois Sylvius rouvrait les yeux, mais il ne parlait plus. Avez-vous dj vu mourir? me demanda le docteur Lanre. Souvent, rpondis-je. C'est un bon spectacle, reprit-il, et je ne sais pas trop ce qu'on peut y voir d'effrayant MAXIME DU CAMP, Mmoires d'un suicid, 1853, page 240. 19. Les gens comme moi, qui ont observ beaucoup d' agonies et qui rflchissent, ne peuvent pas croire une autre vie. Non, non, quand on voit chez des tres intelligents s'en aller peu peu l'esprit, la grce, le sentiment, tout ce qui fait l'tre humain, jusqu' ce qu'il n'y ait plus sur le lit de douleur qu'une pauvre brute stupide et vagissante, on a conscience d'assister la dissolution lamentable d'une crature et non son glorieux dpart. FRANOIS DE CUREL, La Nouvelle Idole, 1899, I, 6, pages 181-182. 20. Il n'y a aucun rapport entre la pense de la mort et les convulsions de la chair et de l'me qui se dbat et meurt. Tout le langage humain, toute la sagesse humaine, n'est qu'un guignol de raides automates, auprs de l'blouissement funbre de la ralit, ces misrables tres de boue et de sang, dont tout le vain effort est de fixer une vie, qui pourrit, d' heure en heure. Christophe y pensait, jour et nuit. Les souvenirs de l' agonie le poursuivaient; il entendait l'horrible respiration. ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Le Matin, 1904, page 130. 21. J'tais seul dans cette grande chambre, seul avec elle, assistant au solennel envahissement de la mort, et j'coutais en moi l'cho des battements inquiets de ce coeur qui ne voulait pas renoncer. Comme il luttait encore! J'avais t tmoin dj d'autres agonies, mais qui ne m'avaient point paru si pathtiques, soit qu'elles me semblassent plus conclusives et achever plus naturellement une vie, soit simplement que je les regardasse avec moins de fixit. Il tait certain que maman ne reprendrait pas connaissance, de sorte que je ne me souciai pas d'appeler mes tantes auprs d'elle; j'tais jaloux de rester seul la veiller. Marie et moi nous l'assistmes dans ses derniers instants, et lorsqu'enfin son coeur cessa de battre, je sentis s'abmer tout mon dans un gouffre d'amour, de dtresse et de libert. ANDR GIDE, Si le grain ne meurt, 1924, pages 611-612. 22. Des Cigales poumon regarde le plafond avec exaltation; il a l'air parti. Kidnapp par cette exprience de l' agonie, il sue et crispe les doigts convulsivement. On dirait qu'il va mourir, ses yeux semblent montrer qu'il se trouve dj bien loin. Non il ne mourra pas, non il ne mourra pas, des minutes passent navrantes mais peu peu l'touffement cesse, la carapace qui se rapetissait crasant sa poitrine se dissout, il parvient de temps autre russir une longue inspiration, des minutes passent encore, Des Cigales tendu tout de son long respire peu prs correctement,... RAYMOND QUENEAU, Loin de Rueil, 1944, pages 24-25. 23.... en dpit ou cause de son pathtique extrme qui se rpercute jusque dans mes entrailles, l' agonie ruine toute pense; un gros premier plan offusque la mditation; l' agonie n'est pas la fin, mais la lutte pour la fin, vers la fin; cette lutte nous participons, aidant le moribond lutter (comme dit Heidegger, nous n'assistons pas la mort, nous assistons le mort ), moins que, frapps de stupeur, nous ne soyons rsums dans l'attente horrible que la mort vienne enfin rompre de son silence et de sa paix le tumulte de l' agonie autre chose est le dernier acte, autre chose le dnouement. PAUL RICOEUR, Philosophie de la volont, 1949, page 432. [Avec complment] : 24.... la femme naturelle (...) ne craint point la mort. Ce moment, si redout, n'existe pas pour elle; elle n'en a point d'ide, son dernier moment est aussi serein que tous les autres; elle finit plutt qu'elle ne meurt, mais elle se laisse aller sans se dfendre; si elle a l' agonie du corps, elle n'a pas celle de l'esprit; elle est exempte des terreurs de tout genre qui, parmi nous, ne cessent d'assiger les mourants. PIERRE-AMBROISE-FRANOIS CHODERLOS DE LACLOS, De l'ducation des Femmes, 1803, page 444. 25. Avant d'tre fix sur mon sort, la crainte m'est venue plus d'une fois de ne pas savoir mourir, le moment venu, (...). Les agonies de moines ou de religieuses ne sont pas toujours les plus rsignes, affirme-t-on. Ce scrupule me laisse aujourd'hui en repos. J'entends bien qu'un homme sr de lui- mme, de son courage, puisse dsirer faire de son agonie une chose parfaite, accomplie. Faute de mieux, la mienne sera ce qu'elle pourra, rien de plus. (...) l' agonie humaine est d'abord un acte d'amour. GEORGES BERNANOS, Journal d'un cur de campagne, 1936, page 1256. Remarque: 1. L'agonie est caractrise par les signes cliniques suivants: ralentissement de la circulation entranant une irrigation crbrale insuffisante et certaines perturbations de conscience, ou mme le dlire (quoique dans certains cas le malade reste en pleine possession de ses facults mentales) (exemples 18, 19, 21); petitesse et intermittence du pouls (exemple 18); extinction graduelle de la chaleur animale depuis les extrmits jusqu'au tronc (exemple 16); trouble de la vue, aspect terne de la corne (exemple 16, 22); abolition progressive du mouvement (exemple 17, 20, 22); altration profonde de la physionomie (exemple 16, 17); gargouillement des liquides dans l'oesophage; scheresse et lividit des lvres, de la langue, aphonie (exemple 16); rle trachal (exemple 16); affaiblissement et arrt de la respiration, puis du coeur aprs ultime amlioration trompeuse de l'tat gnral (exemple 16, 18, 21, 22). 2. Quelques exemples stylistiquement intressants de l'emploi pluriel qui s'applique des personnes (exemple 26) ou des dtails du corps humain (exemple 27): 26. Nous retournons l'hpital quatre heures, pour entendre la prire; et cette voix grle, virginale, aigu et tout la fois chantante de la novice genoux, disant Dieu les remerciements de toutes ces souffrances et de toutes ces agonies, qui se soulvent sur leurs lits ou rampent jusqu' l'autel, les larmes, par deux fois, nous montent aux yeux... EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, dcembre 1860, page 861. 27. Le ple mail des yeux uss S'tait fendu en agonies Minuscules, mais infinies, Sous les sourcils martyriss. Le front avait t l'clair, Avant que les ples annes N'eussent riv les destines, Sur ce bloc mort de morne chair. VERHAEREN, Les Villes tentaculaires, 1895, pages 182-183. Par extension . [En parlant d'une collectivit humaine] : 28. Eh quoi! Lorsqu'un peuple est arriv ce point; lorsque, arrach ses anciennes moeurs et ses anciennes lois par une force invincible, et incertain de son existence, il endort sa lche agonie dans les bras des jongleurs hypocrites qui le caressent pour hriter de ses dernires dpouilles; lorsque la socit, si prs de sa ruine, ne repose presque plus parmi les mchants que sur des intrts, parmi les honntes gens que sur quelques rgles de morale qui vont cesser d'exister, il sera interdit l'homme fort qui trouve en lui, et dans l'impulsion qu'il est capable de donner aux autres, la garantie, la seule garantie des droits de l'espce entire,... il lui sera dfendu de rassembler toutes ses facults contre l'ascendant de la destruction,... CHARLES NODIER, Jean Sbogar, 1818, page 167. 29. Ma vocation est dfinitivement pour l'hpital o gt la vieille socit. Elle fait semblant de vivre et n'en est pas moins l' agonie. Quand elle sera expire, elle se dcomposera afin de se reproduire sous des formes nouvelles, mais il faut d'abord qu'elle succombe; la premire ncessit pour les peuples, comme pour les hommes, est de mourir... FRANOIS-REN DE CHATEAUBRIAND, Mmoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 243. b) [En parlant d'un animal, gnralement domestique] : 30. C'tait un gros brochet, moins gros pourtant qu'on ne l'aurait cru, en juger par sa force et les secousses terribles qu'il donnait la cordelette. Mais c'tait tout de mme une belle pice. Il sautait sur le fond de la barque, parmi les avirons et les crocs, se dbattant dans les soubresauts de l' agonie ; ses oues palpitaient, s'ouvraient toutes grandes, et parfois il bait largement la gueule, (...) il s'puisait en efforts impuissants, touffant dans l'air mortel. MOSELLY, Terres lorraines, 1907, page 180. 31.... le cheval bless vous apitoie parce que vous le voyez; il mourrait derrire un mur, cela vous serait gal; il mourrait un peu loin, cent mtres de vous, cela vous serait gal. Et il vous apitoie parce qu'il est gros: il serait grand comme une mouche, vous vous moqueriez de son agonie, comme vous vous moquez de celle des mouches qui meurent lentement, touffes dans la glu de vos papiers collants. HENRI DE MONTHERLANT, Les Bestiaires, 1926, page 447. c) [En parlant d'un vgtal] [Sans complment] : 32. Le vieux pommier va mourir. C'est mme pour cela que je suis triste pleurer. Est-ce que ce serait inconvenant de dire les prires des morts pour un arbre l' agonie ? Moi, quand un de nos arbres meurt, j'ai envie de prendre le deuil. GEORGES DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Suzanne et les jeunes hommes, 1941, page 199. [Avec complment] : 33. Ce pleur pais au long d'une bche, c'est l' agonie d'un trs ancien sapin, que le lierre patient a tu. J'ai vu l'arbre, la cogne, une rousse chevelure morte abattue dans l'herbe, il n'y a pas longtemps. Son tronc pleure une rsine qui se trane en bave, puis en flamme rampante et lourde, mais la rousse chevelure sche casse en traits de feu vif,... GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Sept dialogues de btes, 1905, page 113. d) Par analogie . [En parlant d'objet personnifis] : 34. Un instant, elle parut dborde, vaincue. Mais, d'un dernier coup de reins, elle se dlivra, avana de trente mtres encore. C'tait la fin, la secousse de l' agonie: des paquets de neige retombaient, recouvraient les roues, toutes les pices du mcanisme taient envahies, lies une une par des chanes de glace. Et la Lison s'arrta dfinitivement, expirante, dans le grand froid. Son souffle s'teignit, elle tait immobile, et morte. ZOLA, La Bte humaine, 1890, page 152. 35. Juste au moment o le ciel tait devenu trs clair, trs beau, tout plein d'toiles, o la sirne venait de se taire, o la Devonia n'avait plus peur, la chose hypocrite et perfide lui creva le ventre, s'accrocha dans ses entrailles, et la fit basculer. La Devonia eut une agonie d'une demi-heure peine, avec des spasmes et des sanglots. Mais ses sanglots taient les explosions qui faisaient sauter ses cloisons tanches, et ses spasmes lui arrachaient la membrure. Paul et Armide n'eurent pas trop peur, pourtant, quand deux matelots en tricot bleu vinrent les prendre dans leurs bras pour les mettre dans un canot que ses palans largus firent aussitt descendre la mer. PIERRE MILLE, Barnavaux et quelques femmes..., 1908, page 273. e) Argot . S'offrir une agonie d'eau douce (Gustave Fustier, Supplment au Dictionnaire de la langue verte d'Alfred Delvau, 1883, page 536): " se noyer. " (Gustave Fustier, Supplment au Dictionnaire de la langue verte d'Alfred Delvau, 1883, page 536): 36. Cline demeura triste. Elle songea bien se jeter dans la Seine, mais elle se fit cette rflexion qu'elle souffrait dj pour ce monstre d'homme et qu'il bien inutile de souffrir davantage, en s'offrant une agonie d'eau douce. GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, Les Soeurs Vatard, 1879, page 51. 2. Au figur. Approche de la fin, stade prcdant l'abolition finale. Synonymes: dcadence, dclin. a) [En parlant d'une ralit humaine abstraite] [Sans complment] : 37. Ces problmes qui passionnrent l'humanit (...) cessent l'un aprs l'autre d'intresser, non point parce que la solution est trouve, mais parce que la vie s'en retire. Ils meurent ds qu'ils cessent d'tre urgents, de sorte qu'on ne s'aperoit mme pas qu'ils meurent, car ils n'ont pas d' agonie, mais bien seulement: qu'ils sont morts. ANDR GIDE, Journal, 1930, page 968. [Avec complment] : 38. En effet, la dcadence d'une littrature, irrparablement atteinte dans son organisme, affaiblie par l'ge des ides, puise par les excs de la syntaxe, sensible seulement aux curiosits qui enfivrent les malades et cependant presse de tout exprimer son dclin, acharne vouloir rparer toutes les omissions de jouissance, lguer les plus subtils souvenirs de douleur, son lit de mort, s'tait incarne en Mallarm, de la faon la plus consomme et la plus exquise. C'taient, pousses jusqu' leur dernire expression, les quintessences de Baudelaire et de Poe; c'taient leurs fines et puissantes substances encore distilles et dgageant de nouveaux fumets, de nouvelles ivresses. C'tait l' agonie de la vieille langue qui, aprs s'tre persille de sicle en sicle, finissait par se dissoudre, par atteindre ce deliquium de la langue latine qui expira dans les mystrieux concepts et les expressions de saint Boniface et de saint Adhelme. Au demeurant, la dcomposition de la langue franaise s'tait faite d'un coup. GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, rebours, 1884, pages 265-266. 39. Cet ennui, certes, n'est pas un mal tout fait vulgaire, il n'est pas non plus un mal continu. Il procde par accs et noie d'une vapeur de dtresse les victimes, souvent grandioses, de ses funbres atteintes. Toute sa vie durant, Gautier s'est essay tromper cet ennui-l et Flaubert aussi, et Baudelaire qui a si cruellement dcrit ses affres en nous et cette agonie secrte de la puissance du bonheur... PAUL BOURGET, Nouveaux Essais de psychologie contemporaine, 1885, page 74. 40. mesure qu'elle donnait sa ferveur religieuse toute libert de s'exprimer, cette ferveur l'abandonnait. Sans le savoir, cet enfant avait assist l' agonie de sa pit; c'taient les cris de cette pit mourante qu'il avait entendus. VALRY LARBAUD, Fermina Marquez, 1911, page 189. b) [En parlant d'une entreprise, d'une chose cre par l'homme] [Sans complment] : 41. Et la fume entrane en ses molles spirales L'me s'extnuant des cloches vesprales Qui s'teint avec elle en trs lente agonie ; Et tout le triste doux d'une chose finie Et tout le triste doux d'une chose en alle Subsiste aprs ce bleu de vapeur exhale Comme si la fume, on savait qu'elle porte Un linceul impalpable quelque toile morte ! GEORGES RODENBACH, Le Rgne du silence, 1891, pages 220-221. [Avec complment] : 42. Rien ne sauve les empires destins prir. Les grandeurs grecques et romaines se sont clipses au jour fix par le sort; rien n'a pu reculer cette chute, ni les conseils de quelques philosophes, ni la vertu de quelques empereurs. L'toile des Paturot tait destine disparatre de l'horizon de la bonneterie; le dvouement de ma femme ne pouvait pas arrter ce dclin. Dans les heures d' agonie du commerce de dtail, il y eut, grce elle, des lueurs inespres, des retours de vitalit extraordinaires. LOUIS REYBAUD, Jrme Paturot la recherche d'une position sociale, 1842, page 398. c) [En parlant du temps, de la dure, notamment du jour] [Sans complment] : 43. J'appris les matins ingnus, et la mlancolie crpusculaire, les triomphes et les dclins, les renouveaux, les agonies. SIMONE DE BEAUVOIR, Mmoires d'une jeune fille range, 1958, page 126. [Avec complment] : 44. Je vous cris dans la dernire heure de 1833. Il y a je ne sais quelle tristesse solennelle dans cette agonie de l'anne. J'ai le coeur plein de penses et lamentables, car la tempte rugit au dehors, et l'anne expire dans les convulsions d'une nuit sombre et orageuse. MAURICE DE GURIN, Journal intime, 2 janvier 1834, page 193. 45. Crpuscule, comme vous tes doux et tendre! Les lueurs roses qui tranent encore l'horizon comme l' agonie du jour sous l'oppression victorieuse de sa nuit, les feux des candlabres qui font des taches d'un rouge opaque sur les dernires gloires du couchant, les lourdes draperies qu'une main invisible attire des profondeurs de l'orient, imitent tous les sentiments compliqus qui luttent dans le coeur de l'homme aux heures solennelles de la vie. CHARLES BAUDELAIRE, Petits pomes en prose, Le Crpuscule du soir, 1867, page 107. Remarque: 1. Syntagmes frquents a) Adjectif atroce, douloureux, interminable, lent, long, moral, muet, suprme; b) Substantif coeur, convulsion, heure, sueurs; c) Verbes assister, durer, entrer, tre, (se) prolonger. 2. Association paradigmatique frquente me, angoisse, chute, coeur, crainte, cri, dcadence, dclin, dtresse, douleur, extrmit, fin, heure, hoquet, lit, (dernier) moment, mort, nuit, rle. STATISTIQUES: Frquence absolue littraire: 1 664. Frquence relative littraire: XIX e. sicle: a) 1 764, b) 2 786; XXe. sicle: a) 3 435, b) 2 012. Forme drive du verbe "agonir" agonir AGONIR, verbe transitif. Populaire et familier . A. [Avec un complment d'objet secondaire exprimant une ide d'injure, etc.] Agonir quelqu'un d'injures, de reproches, de sottises, etc. Accabler: 1. Ah! je vous l'ai arrange !... En voil une baraque, avec leurs cochonneries gtes qui empoisonnent le monde! Qu'est-ce que vous lui aviez donc dit? demanda la vieille, toute frtillante, enchante d'apprendre que les deux femmes s'taient disputes. Moi! Mais rien du tout! Pas a, tenez!... J'tais entre trs poliment la prvenir que je prendrais du boudin demain soir, et alors elle m' a agonien de sottises... Fichue hypocrite, va, avec ses airs d'honntet! Elle payera a plus cher qu'elle ne pense. Les trois femmes sentaient que la Normande ne disait pas la vrit; mais elles n'en pousrent pas moins sa querelle avec un flot de paroles mauvaises. ZOLA, Le Ventre de Paris, 1873, page 677. 2. Le vieux Troglodyte rpte avec nous: c'est un famlique jeune gars de dix-huit ans, que Brague secoue, ahurit, agonit d'injures, au point de m'apitoyer... GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Vagabonde, 1910, page 107. B. [Sans complment d'objet secondaire] Accabler d'injures: 3. Il est apparu enfin avec un vlo tout en boue. Je croyais qu'il allait m' agonir, m'attribuer des catastrophes, j'tais dj prpar pour une corrida imptueuse... et puis rien du tout!... Il semblait heureux au contraire d'tre au monde et de nous trouver l. Il m'a plutt flicit sur ma conduite... LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CLINE, Mort crdit, 1936, page 139. 4. On attendait buvant notre jus qu'ils se ramnent en trombe les maniaques, les fbricitants de la goupille... qu'ils recommencent nous agonir ... menacer... piquer l'pilepsie... emboutir la porte... se faire rebondir dans le dcor... C'tait moi alors Courtial qu'il entreprenait... qu'il essayait d' humilier... a le soulageait qu'on aurait dit... LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CLINE, Mort crdit, 1936 page 473. 5. Eh bien? qu'elle leur dit... Qu'est-ce que vous avez?... Bande de paums! Bande de saindoux! Vous tes que des sales morveux! Allez vous-en vous gratter! Malfrins! Cressons! De quoi que vous tes pas contents?... Vous le connaissiez pas vous ce bigleux?... C'tait culott d'attitude... mais n'a pas pris quand mme... Ils l' ont encore plus agonie !... Ils ont redoubl en beuglements. Ils glaviotaient plein notre vitre. Ils balanaient des graviers... C'tait du massacre bientt... LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CLINE, Mort crdit, 1936 page 530. Se faire agonir: 6. Ou bien si elles banquaient un peu, elles rlaient, chialaient tellement, rabotaient si fort les petites factures minuscules, avec des telles dmonstrations... que ma mre, la fin du compte, savait plus comment ni quoi dire... Elle avait seulement transpir, boit, bav sang et eau aprs la Jasmin, aprs toutes, pour la fin se faire agonir, traiter comme pourri... LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CLINE, Mort crdit, 1936 page 333. Remarque: 1. Sur la confusion souvent faite en langue populaire et mme chez de bons auteurs entre agonir et agoniser, confer agoniser2. 2. quivalents synonymiques: accabler, arranger, entreprendre, honnir, injurier, insulter, invectiver, menacer, outrager, rler, traner dans la boue. Antonyme: fliciter. STATISTIQUES: Frquence absolue littraire: 18.

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je me reportai en pense cette nuit, veille de la rdemption du genre humain, o le Messager divin avait bu jusqu' la lie le calice de l' agonie, avant de recevoir la mort de la main des hommes, (...).

(...) je me reprsentai l'ocan d' angoisses qui dut inonder le coeur du Fils de l'homme quand il contempla d'un seul regard toutes les misres, toutes les tnbres, toutes les amertumes, toutes les vanits, toutes les iniquits du sort de l'homme (...); quand, reculant d'effroi devant l'ombre de la mort qu'il sentait dj sur lui, il dit son pre: Que ce calice passe loin de moi! ALPHONSE DE LAMARTINE, Souvenirs, impressions, penses et paysages pendant un voyage en Orient (1832-1833) ou Note d'un voyageur,. »

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