DICTIONNAIRE: ENJAMBEMENT.

n. m. En versification, l'enjambement est un procédé qui consiste à faire «déborder« une phrase d'un vers sur le vers suivant ; la compréhension du premier vers est impossible sans la lecture de la partie de la phrase rejetée dans le second. C'est le cas de ce début d'une fable de La Fontaine :

Un astrologue, un jour, se laissa choir Au fond d'un puits.

On confond souvent les mots enjambement et rejet. Le procédé est effectivement le même. Mais certains auteurs recommandent de distinguer l'enjambement, défini comme le processus d'empiétement d'un vers sur l'autre, et le rejet, défini comme la partie de la phrase effectivement « rejetée « dans le second vers. Selon cette logique, ils nomment contre-rejet la partie de la phrase qui précède l'enjambement (fin du premier vers). D'autres auteurs préfèrent opérer la distinction selon l'importance des deux membres de phrase : il y aurait rejet lorsqu'une faible partie est rejetée, et enjambement lorsque l'essentiel de la phrase est dans le second vers. C'est l'exemple de ce quatrain de Baudelaire où l'auteur, décrivant « les Aveugles «, use successivement des deux procédés :

Leurs yeux, d'où la divine étincelle est partie, Comme s'ils regardaient au loin, restent levés REJET -> Au ciel; on ne les voit jamais vers les pavés ENJAMBEMENT -> Pencher rêveusement leur tête appesantie.

Dans la pratique, on peut se contenter de cette distinction. L'essentiel est de préciser le sens des termes qu'on emploie et, surtout, d'analyser les effets produits par le rejet ou l'enjambement.