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FANATIQUE, adjectif et substantif.

Publié le 11/02/2016

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FANATISER, verbe transitif.  

A.—  Emploi transitif.  Rendre fanatique, inspirer un zèle ardent et excessif (pour une cause, une doctrine, une personne, etc.). Fanatiser une foule; un moine fanatisé. Il [Bonaparte] sait comment on entraîne les peuples et comment on les fanatise (FRANÇOIS COPPÉE, La Bonne souffrance,  1898, page 105) : 

Ø ... toujours conscient de jouer un personnage, même dans la vie, il aimait avoir un public, être entouré de spectateurs; pour travailler avec entrain il lui fallait un cercle d'assistants disponibles et fanatisés, prêts à toutes les besognes, à tous les dévouements...

ROGER MARTIN DU GARD, Souvenirs autobiographiques,  1955, page LXVI. 

Remarque : On rencontre parfois fanatiser employé absolument Les vrais saints ne fanatisent pas ainsi (GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 4, 1855, page 260). 

—  Par métaphore. Des cérémonies religieuses plus propres à fanatiser les sens qu'à édifier les âmes (ALPHONSE DE LAMARTINE, Nouvelles Confidences,  1851, page 156 ). 

B.—  Emploi pronominal.  Devenir fanatique. Il se fanatisa pour la royauté (HONORÉ DE BALZAC. Histoire de la grandeur et de la décadence de César Birotteau,  1837, page 35 ). Que l'homme au ciel s'égare ou qu'il se fanatise (VICTOR HUGO, Religions et religion,  1880, page 218 ). 

Remarque : On rencontre dans la documentation a) Fanatisant, ante, participe présent en emploi adjectival. M. Ingres, dont l'enseignement a je ne sais quelle autorité fanatisante (CHARLES BAUDELAIRE, Salon de 1845, 1846, page 154). Les fanatisants souvenirs (HONORÉ DE BALZAC, Lettres à l'Étrangère, tome 3, 1850, page 128). b) Fanatiseur, substantif masculin  Celui qui fanatise. Race de chair, combien prenable aux grossiers fanatiseurs, aux dévotions sensuelles et corruptrices (JULES MICHELET, Journal, 1843, page 532). 

 

FANATIQUE, adjectif et substantif.  

I.—  Emploi adjectival. 

A.—  Vieux.  Qui se croit inspiré par la Divinité. Les illuminés, les trembleurs étaient fanatiques (Dictionnaire de l'Académie française.  1878-1932). 

B.—  Par extension, dans la langue moderne, souvent péjoratif. 

1. [En parlant d'une personne]  Qui est porté au fanatisme, qui adhère à une cause ou à une doctrine religieuse, politique ou philosophique avec une conviction absolue et irraisonnée et un zèle outré poussant à l'intolérance et pouvant entraîner des excès. Sectateur, zélateur fanatique; apôtre, prêtre fanatique; royaliste fanatique; nations, peuples fanatiques. Ils sont des dreyfusards forcenés, des dreyfusards fanatiques (CHARLES PÉGUY, L'Argent,  1913, page 1225 ). Fanatique et prosélyte, il [le paranoïaque] ne joue pas généralement les génies repliés et sauvages (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère,  1946, page 553) : 

Ø 1. Qu'un sectaire d'une secte d'autant plus sectaire qu'elle est plus impuissante, qu'un partisan fanatique et aveuglé par la discipline de son parti, qu'un mauvais écrivain à qui on refusa sa copie, qu'un imbécile enfin juge que Vendredi n'est pas libre, et qu'il appelle servitude tout ce qui justement dans ce journal libre n'est pas à son propre service, nous le comprenons...

JEAN GUÉHENNO, Journal d'une révolution, 1938, page 220. 

—  Par hyperbole.  [souvent suivi d'un complément non déterminé introduit par de]  Qui éprouve pour quelque chose ou quelqu'un un intérêt, un amour ou une admiration passionnée, parfois excessive. Fanatique de justice, de liberté; fanatique de musique; un amateur fanatique. Dans ce même pays tout fier, tout fanatique de démocratie, de liberté, d'égalité (RODOLPHE TOEPFFER, Nouvelles genevoises,  1839, page 439 ). [Un homme] enragé de musique et fanatique de peinture (VICTORIEN SARDOU, Rabagas,  1872, I, 10, page 26 ). Ces gamins, très vite, devinrent fanatiques d'Antoinette (MAXENCE VAN DER MEERSCH, Invasion 14,  1935, page 397) : 

Ø 2. M. Lasserre appelle cet art un art de chapelle. Il entend par chapelle le cercle fanatique et la louange, sans critique ni discernement, dont certains écrivains seraient entourés...

ALBERT THIBAUDET, Réflexions sur la littérature,  1936, page 134. 

—  Familier. Fana. Qui est passionné à l'extrême (pour une chose telle qu'un sport, une activité professionnelle, une forme ou une mode artistique, etc.). [Les polytechniciens] deviennent tous fanas du métier militaire à l'École d'application [de Fontainebleau] (ROGER SMET, Le Nouvel argot de l'X,  1936, page 60 ). 

2. [En parlant d'une chose]  Qui est marqué ou suscité par le fanatisme. Culte, zèle fanatique. Son admiration fanatique pour un nom qui donnait de l'humeur au marquis (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Le Rouge et le Noir,  1830, page 273 ). Ce plaisir fanatique qu'éprouve l'animal humain à triompher par la violence (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, Épilogue, 1940, page 828) : 

Ø 3.... c'était une race singulière (...) Tous, de père en fils, avaient des passions violentes, de grands élans de tout leur être qui les poussaient aux choses les plus exaltées, aux dévouements fanatiques, même aux crimes.

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, Une Veuve, 1882, page 342. 

SYNTAXE : Dévotion, religion fanatique; nationalisme, patriotisme fanatique; fureur, haine, intolérance fanatique; amour, attachement fanatique. 

II.—  Emploi comme substantif. 

A.—  Vieux.  Personne qui se croit inspirée par la Divinité; visionnaire, illuminé : 

Ø 4. —  Mon général, il [le derviche] dit que c'est l'ange Gabriel qui cause les éclipses...

—  C'est donc un fanatique!...

ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Sur la pierre blanche,  1905, page 151. 

B.—  Par extension, souvent péjoratif.  Celui, celle qui adhère à une cause, à une doctrine religieuse, politique ou philosophique avec une conviction absolue et manifeste à leur égard un zèle aveugle pouvant entraîner des excès. Un fanatique républicain, royaliste. Songeons à la certitude des fanatiques et des fous. Celle-là n'admet jamais le doute, quand l'aliénation est complète (CHARLES RENOUVIER,  Essais de critique générale, 3e.  essai, 1864, page XLVI. ). Un Claudel qui ne serait plus un zélote et un fanatique ne serait plus Claudel (PAUL CLAUDEL, Correspondance [avec André Gide] , 1905, page 55) : 

Ø 5.... l'incroyance déclarée gardait la violence et le débraillé de la passion; un athée, c'était un original, un furieux qu'on n'invitait pas à dîner de peur qu'il ne « fît une sortie », un fanatique encombré de tabous qui se refusait le droit de s'agenouiller dans les églises...

JEAN-PAUL SARTRE, Les Mots,  1964, page 79. 

—  Par hyperbole.  Personne qui éprouve à l'égard de quelqu'un ou de quelque chose un goût, un intérêt ou une admiration passionnée, parfois excessive. Elle [Mlle Sylva] était debout, et recevait avec des grâces et des sourires de reine les hommages d'un cercle de fanatiques en cravate blanche (OCTAVE FEUILLET, Un Mariage dans le monde,  1875, page 161) : 

Ø 6. Il n'était pas un maniaque de la politique ni un fanatique de l'écriture, ni un grand passionné; il se sentait plutôt quelconque...

SIMONE DE BEAUVOIR, Les Mandarins,  1954, page 51. 

—  Familier. Fana. Amateur passionné. Il [Zucar] n'avait d'autre passion (...) que le sport (...). Un mordu, un fana; mais théorique et dans l'abstraction (ALEXANDRE ARNOUX, Pour solde de tout compte, 1958, page 42 ). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 605. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 827, b) 841; XXe.  siècle : a) 883, b) 884. 

DÉRIVÉS : Fanatiquement, adverbe  D'une manière fanatique; avec fanatisme. Ces hommes m'ont paru simples, et sincèrement mais fanatiquement crédules (ALPHONSE DE LAMARTINE, Souvenirs, impressions, pensées et paysages pendant un voyage en Orient (1832-1833) ou Note d'un voyageur, tome 1, 1835, page 346 ). Las de dépendre d'une chimère que notre imagination seule persiste à admirer fanatiquement (JULES VUILLEMIN, Essai sur la signification de la mort,  1949, page 218 ). 

 

FANATISME, substantif masculin.  

A.—  Vieux.  Comportement, état d'esprit de celui qui se croit inspiré par la Divinité. Fanatisme d'illuminé (DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT) ). 

B.—  Par extension dans la langue moderne, souvent péjoratif.  Comportement, état d'esprit d'une personne ou d'un groupe de personnes qui manifestent pour une doctrine ou pour une cause un attachement passionné et un zèle outré conduisant à l'intolérance et souvent à la violence. Fanatisme politique, religieux; fanatisme de quelque chose, pour quelque chose, contre quelque chose J'y ai vu [dans « Servitude et grandeur militaires »] une dépréciation systématique du dévouement aveugle (du culte de l'Empereur par exemple), du fanatisme de l'homme pour l'homme (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance,  1846, page 418 ). Si nous sommes enfin délivrés de toutes les superpositions misérables et de tous les fanatismes répugnants, c'est quand même à la fermeté d'un sage rationalisme que nous le devons (GEORGES DUHAMEL, Les Maîtres,  1937, page 39) : 

Ø 1. En politique, en morale, en sociologie, en religion, en philosophie, le conservateur de la doctrine ancienne et le révolutionnaire le plus acharné à détruire les vérités présentes se confondent dans l'identité d'une même foi. Leur fanatisme est de même ordre; car ils croient l'un et l'autre qu'il existe une vérité objective, propre, à l'exclusion de toute autre conception, à assurer le bonheur humain.

JULES DE GAULTIER, Le Bovarysme,  1902, page 298. 

SYNTAXE : Fanatisme brutal, farouche, féroce; fanatisme catholique, chrétien, militaire, national, patriotique, républicain; fanatisme de secte; les fureurs du fanatisme; combattre, exciter le fanatisme. 

—  Par hyperbole.  Intérêt, goût passionné et parfois excessif pour quelque chose ou quelqu'un. Fanatisme littéraire, scientifique; le fanatisme de l'art; aimer avec fanatisme. Que tu es bizarre, avec ton fanatisme pour ce jeune vicomte de Joyeuse! (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Henri III et sa cour.  1831, III, 3, page 166 ). Les nombres ne sont en général que des illusions, et le fanatisme de l'exactitude quantitative est un grand écueil de la méthode expérimentale (CLAUDE BERNARD, Principes de médecine expérimentale,  1878, page 200) : 

Ø 2. Les Juifs, dans le monde moderne, sont un élément nouveau d'illusion, de duperie, mais aussi d'énergie et de durée. Ils ont le fanatisme de la félicité publique, de la justice sur terre, de l'avenir de la société.

JEAN-RICHARD BLOCH, Destin du siècle,  1931, page 271. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 548. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 1 250, b) 571; XXe.  siècle : a) 530, b) 638. 

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