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FERME1, adjectif, adverbe et interjection.

Publié le 16/02/2016

Extrait du document

 

FERME2, substantif féminin.  

A.—  Domaines juridique et financier. 

1. Vieux. 

a) Convention par laquelle le propriétaire d'un droit en abandonne la jouissance à un tiers, pour un temps et un prix fixés. La ferme des chaises d'une église (Dictionnaire de l'Académie Française). 

·    Ferme des jeux (Dictionnaire de l'Académie Française). Autorisation de tenir une maison de jeux. 

b) HISTOIRE (ANCIEN RÉGIME).  Délégation faite par le roi à des particuliers, de percevoir certains revenus publics. Les fermes des droits du roi, la ferme générale des gabelles, des aides (Dictionnaire de l'Académie Française). 

—  Par extension.  Administration chargée de percevoir ces revenus. Il est certain que l'accaparement du numéraire ne peut se faire par les agents de la caisse et des fermes, sans l'appui du Ministère (JEAN-PAUL MARA, DIT MARAT, Pamphlets, Nouvelle dénonciation contre Necker, 1790, page 191 ). Il obtint un emploi dans la ferme générale, dans les fermes; un employé des fermes (Dictionnaire de l'Académie Française). 

c) Par analogie.  JEUX.   [Au XVIIIe.  siècle]  Jeux de société qui se pratiquent avec des dés ou des cartes.  Attesté dans Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse)-Larousse de la Langue française en six volumes, DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ), Dictionnaire général de la langue française (Adolphe Hatzfeld, ARSÈNE DARMESTETER), DICTIONNAIRE DES DICTIONNAIRES  (SOUS LA DIRECTION DE PAUL GUÉRIN) 1892, ALLEAU 1964, Mots rares 1965. 

2. AGRICULTURE et.  usuel.  Convention par laquelle le propriétaire d'un bien foncier, notamment d'une exploitation agricole, en abandonne la jouissance à un tiers pour un temps et un prix fixés. 

—  Locution adverbiale. À ferme. L'avenir, ne sera-ce pas l'état absorbant tout, assurant tout, tenant à ferme la propriété de chacun? (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1860, page 862 ). Il avait envie de prendre à ferme tous les remblais de la ligne du nord pour y semer des pommes de terre (GUSTAVE FLAUBERT, L'Éducation sentimentale, tome 2, 1869, page 146) : 

Ø 1. Si, au contraire, le locataire ou le fermier ont été troublés dans leur jouissance par suite d'une action concernant la propriété du fonds, ils ont droit à une diminution proportionnée sur le prix du bail à loyer ou à ferme...

Code civil des Français (ou Code Napoléon)  1804, article 1726, page 315. 

B.—  [Par métonymie de A 2] 

1. Exploitation agricole qui a fait l'objet d'un bail à ferme; par extension toute exploitation agricole. Ferme école*, modèle*, pilote*; fille, garçon, valet de ferme; exploiter, habiter, louer une ferme. L'exploitation d'une terre est ici la plus fatigante des industries. Nous avons peu de revenus en argent, nos fermes sont cultivées à moitié, système qui veut une surveillance continuelle (HONORÉ DE BALZAC, Le Lys dans la vallée, 1836, page 88 ). Quelques jours après, mon père alla chasser sur la ferme de Serrières (SIBYLLE-GABRIELLE-MARIE-ANTOINETTE DE RIQUETTI DE MIRABEAU, COMTESSE DE MARTEL DE JANVILLE, DITE GYP, Souvenirs d'une petite fille,  1928, page 15) : 

Ø 2.... je croyais docilement que l'ouvrier dans la rue, le paysan dans sa ferme me devaient de la reconnaissance puisque je me consacrais d'une manière noble, pure et désintéressée à la spécialité du spirituel au profit de l'homme en général, qui comprend, parmi ses espèces, des ouvriers et des fermiers.

PAUL NIZAN, Les Chiens de garde,  1932, page 13. 

2. En particulier (L'exploitation du point de vue des) bâtiments et espaces constitués par ceux-ci. Cour de (la) ferme. Cette cour avait l'aspect d'une cour de grande ferme; elle était encombrée de charrues, de bétail, de fumiers, de volailles, de tous les instruments de la vie rustique (ALPHONSE DE LAMARTINE, Souvenirs, impressions, pensées et paysages pendant un voyage en Orient (1832-1833) ou Note d'un voyageur, tome 2, 1835, page 84 ). Nous en logions [les Cosaques] une douzaine à la ferme. Ils puisaient de l'eau, portaient du bois et gardaient les enfants (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Petit Pierre,  1918, page 242 ). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 2 522. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 2 985, b) 3 794; XXe.  siècle : a) 4 438, b) 3 475. 

 

Forme dérivée du verbe \"fermer\"

 fermer

FERMER, verbe.  

I.—  Vieux.  Rendre fixe. 

A.—  ARCHITECTURE.  Fermer une voûte. 

—   [Le sujet désigne une personne]  Poser la clef de voûte. 

—   [Le sujet désigne un élément de construction]  Consolider, assurer une voûte. 

·    Par métaphore. Tu illumines (...) la situation de la connaissance, où tu viens te placer par magie comme une clef de voûte qui ferme et assure une phrase (PAUL VALÉRY, Mauvaises pensées et autres,  1942, page 164 ). 

B.—  MARINE.  Fermer une embarcation. L'arrêter, l'amarrer.  Attesté notamment dans DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ), DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT) et Larousse de la Langue française. 

II.—  Usuel. 

A.—  [L'objet désigne un élément mobile, généralement un dispositif de fermeture]  Manoeuvrer (le ou les éléments d'une ouverture), de façon à priver de communication deux espaces. Fermer brusquement, doucement, soigneusement, vivement. Synonyme littéraire : clore; antonyme : ouvrir. L'air était devenu plus tiède, les nuits si belles, qu'ils ne fermaient plus la croisée (ANDRÉ GIDE, La Tentative amoureuse,  1893, page 75 ). 

1. Emplois et constructions. 

a) Emploi absolu : 

Ø 1. Elle jeta les yeux vers la porte : il l'avait laissée ouverte, comme pour marquer qu'il avait seulement l'intention d'entrer et de sortir.

—  « Tu as froid? Veux-tu que je ferme? »

ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, La Mort du père, 1929, page 1316. 

b) Emploi pronominal réfléchi à valeur passive et emploi intransitif (souvent avec un adverbe) En haut, se trouvait une chambre dont la porte, comme celle des granges, se fermait avec un crochet qu'on mettait du dehors (GUSTAVE FLAUBERT, Par les champs et par les grèves,  1848, page 327 ). Une porte qui fermait hermétiquement (PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 2, 1859, page 473 ). Une méchante armoire de bois blanc, qui ne ferme point et où je n'ai pas la place de ranger mes affaires (OCTAVE MIRBEAU, Le Journal d'une femme de chambre,  1900, page 36 ). Le rideau se ferme brusquement et brusquement l'éclairage change (PAUL CLAUDEL, Le Soulier de satin,  1944, 1re.  partie, 1re.  journée, 7, page 971 ). 

c) Fermer quelque chose à + substantif ou syntagme indiquant le moyen ou la manière. Fermer sa porte à clef, un tiroir à double tour. Il ferme à clé la porte de la chambre; il enferme sa femme dans la chambre à coucher (CHARLES-FERDINAND RAMUZ, La grande peur dans la montagne,  1926, page 89 ). Ils entrèrent dans l'auto; il ferma à clé la portière de droite et poussa le taquet de celle de gauche (JEAN-PAUL SARTRE, La Mort dans l'âme,  1949, page 163 ). 

2. Locutions verbales. 

a) Fermer la porte sur quelqu'un, sur soi. \" La fermer après que quelqu'un est entré ou sorti, en entrant ou en sortant \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

—  Emploi pronominal réfléchi à sens passif. La porte se ferma sur lui à double tour (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Le Rouge et le Noir, 1830, page 451 ). 

b) Fermer la porte au nez de quelqu'un. La claquer brusquement devant lui. 

—  Au figuré. 

·    Fermer la porte au nez de quelqu'un. L'éconduire. C'est comme si on venait de lui fermer une porte au nez (HENRI DE MONTHERLANT, Les Lépreuses,  1939, page 1503 ). 

·    Fermer sa porte (à quelqu'un). Refuser de le recevoir, de l'entendre. 

·    Fermer sa porte à quelque chose Refuser d'y prêter attention. Goethe (...) ferme sa porte à la poésie et (...) reprend ses forces dans des travaux d'intellectualisme (ROMAIN ROLLAND, Beethoven, tome 1, 1928, page 196 ). 

c) Fermer ses portes (par métonymie). Cesser toute activité. À sa mort en 1800 sa famille (...) fait prospérer la fabrique (...); vendue en 1840, la manufacture dut fermer ses portes en 1848 (GEORGES FONTAINE, La Céramique française.  1965, page 74 ). 

3. Fermer un tiroir. \" Le faire rentrer dans le meuble où il est emboîté \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

—  Emploi intransitif. Les tiroirs ferment mal, (...) une indiscrétion est toujours possible (GEORGES BERNANOS, Journal d'un curé de campagne,  1936, page 1223 ). 

4. [Par métonymie de l'objet]  Fermer une armoire, le garage. 

5. Proverbe. Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée. \" Il faut prendre un parti, il faut se déterminer d'une manière ou d'une autre \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

B.—  [L'objet désigne les parties mobiles d'un organe, les éléments d'un objet; par métonymie cet organe, cet objet] 

1. Manoeuvrer (un élément mobile) 

a) de façon à fixer la pièce à laquelle il est assujetti. Fermer la serrure, le verrou, le loquet. Fermons le loquet de la porte (EDGAR QUINET, Ahasvérus,  1833, 2e.  journée, page 133 ). 

b) de façon à interrompre un débit. Fermer un robinet, une écluse, une vanne. Et cette usine (...) dont on avait négligé de fermer le compteur électrique et qui s'illuminait tous les soirs dans le désert (JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, Dingley, l'illustre écrivain,  1906, page 104) : 

Ø 2. Une bonne invention ces « lampes-témoins », on voit quels clients usent trop de lumière (...). Il ferme la « minuterie » et tire à lui les couvertures. Tiens, Renée qui allume (...). « Si elle n'a pas éteint dans cinq minutes, pense Lecouvreur, je lui coupe le courant »

EUGÈNE DABIT, L'Hôtel du Nord,  1929, page 87. 

—   [Par métonymie de l'objet]  Fermer l'eau, le poste, la télévision. 

2. Rapprocher l'une contre l'autre les parties mobiles (d'un ensemble) dont l'écartement forme une ouverture. Fermer une enveloppe, un couteau, un livre, un parapluie. Elle ferme son face-à-main (ÉDOUARD BOURDET, Le Sexe faible,  1931, 2, page 376 ). 

—  Emploi pronominal à valeur passive et emploi intransitif. Le corsage, à basque, est ouvert carrément sur une chemisette (...) : il se ferme derrière, au moyen d'un lacet de soie (STÉPHANE MALLARMÉ, La Dernière mode,  1874, page 731) : 

Ø 3. Un homme monte à une station. Il n'a pas de bagages. Il a un chapeau en cône tronqué, un pardessus jaune, un pantalon fripé, l'air pauvre. Il se jette dans un coin, et, les mains dans les poches de son pardessus qui ferme mal, il dort.

JULES RENARD, Journal,  1901, page 649. 

—  Au figuré. Fermer sa bourse à quelqu'un (Confer bourse1  I B 3). 

—  Spécialement. 

·    Fermer un angle, une courbe. En réduire l'ouverture. 

·    Fermer un circuit électrique. Établir les liaisons conductrices permettant le passage du courant : 

Ø 4. Un contact à cames (...) est un dispositif automatique pour fermer un circuit électrique pendant un bref intervalle de temps. Quand les ergots de la came touchent le contact, ils le ferment et un courant circule.

EDMUND CALLIS BERKELEY. Cerveaux géants, machines qui pensent,  1957, page 107. 

3. [L'objet désigne une partie du corps]  Même sens que 2. 

a) [Le sujet désigne une personne ou un inanimé concret et l'objet désigne un inanimé concret]  Fermer (les bords d')une plaie, une blessure, une cicatrice. Synonyme : cicatriser. 

·    Par métaphore : 

Ø 5. Ô France! Entends chanter les voix libératrices; L'avenir est prochain qui, d'un doigt enchanté, Ferme tes nobles cicatrices D'où jaillira pour tous la jeune liberté...

ALBERT GLATIGNY, Le Fer rouge,  1870, page 42. 

—  Emploi pronominal à sens passif. Quant à sa blessure, soignée par les plus excellents médecins, elle a dû bientôt se fermer et se cicatriser (THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse,  1863, page 301 ). 

·    Par métaphore. Rien ne guérit en moi; si mes blessures se ferment instantanément, elles se rouvrent tout à coup (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND,Mémoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 197 ). 

—  Locutions verbales. 

·    Fermer les yeux à quelqu'un/de quelqu'un. Abaisser les paupières d'une personne qui vient de mourir. Je te fermerai les yeux, parole, et puis je te ferai une bonne mentonnière pour que tu fermes ta gueule un bon coup! (MARCEL AYMÉ, La Jument verte, 1933, page 48 ).  Au figuré.  L'assister à ses derniers moments. Qu'une main amie lui ferme les yeux, qu'on donne une larme à sa mort (JULES SANDEAU, Mademoiselle de la Seiglière,  1848, page 82 ). 

·    Fermer le bec, la bouche à quelqu'un (au figuré, familier). Le faire taire. Un seul mot va leur fermer la bouche (JEAN-FRANÇOIS COLLIN D'HARLEVILLE, Le Vieux célibataire.  1792, V. 6, page 134 ). Cet enjôleur fermait le bec à toutes les bavardes (ÉMILE ZOLA, L'Assommoir,  1877, page 611 ). 

b) [Le sujet est à la fois l'agent et l'instrument de l'action]  Fermer les doigts, le poing, les yeux. Parfois (...) elle fermait lentement les paupières et la vie abandonnait son visage. (...) bientôt Mme.  Théréson rouvrait les yeux, reprenait sa phrase (JEAN-PAUL SARTRE, La Nausée,  1938, page 124) : 

Ø 6. La vie n'est pas ce que tu crois. C'est une eau que les jeunes gens laissent couler sans le savoir, entre leurs doigts ouverts. Ferme tes mains, ferme tes mains, vite. Retiens-la. Tu verras, cela deviendra une petite chose dure et simple qu'on grignote, assis au soleil.

JEAN ANOUILH, Antigone,  1946, page 190. 

·    Emploi pronominal. Ses deux yeux, fort gros et couverts de paupières épaisses, se fermaient à demi pour considérer la multitude (GUSTAVE FLAUBERT, Madame Bovary, tome 1, 1857, page 160 ). Sa main droite se ferme en forme de cuiller (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère,  1946, page 222 ). 

—  Par analogie. Fermer son visage. Le rendre sombre, en durcir les traits. Synonyme : se renfrogner. 

·    Emploi pronominal. Le visage venait de se fermer subitement (ÉDOUARD ESTAUNIÉ, L'Ascension de Monsieur Baslèvre,  1919, page 26 ). 

—  Au figuré, emploi pronominal.  Devenir impénétrable. Tu te nouais, tu te fermais. Ce qu'il me fallait lutter pour te confesser (PAUL BOURGET, La Geôle,  1923, page 115 ). 

—  Locutions verbales figurées. 

·    Fermer son coeur à. Refuser de comprendre. Vous fermez votre coeur et votre porte à ceux qui veulent vous servir (ALFRED DE VIGNY, Le Journal d'un poète,  1837, page 1081 ). 

·    Fermer l'oreille à. Refuser d'entendre. Tu fermes l'oreille au bon sens. Tu t'obstines dans le mécontentement sourd, dans la mélancolie inerte (HENRI-FRÉDÉRIC AMIEL, Journal,  1866, page 296 ). 

Emploi pronominal réfléchi indirect. Se fermer les oreilles. 

·    Fermer les yeux (à quelque chose). Refuser de se rendre à l'évidence, à ce qui est prouvé, certain. Fermer les yeux à la vérité, à l'évidence, à la lumière (Dictionnaire de l'Académie française.  1878-1932). 

·    Fermer les yeux (sur quelque chose). Refuser de voir. Mais il ne convient pas de fermer volontairement les yeux sur le rôle d'antidote social de la comédie (Arts et littérature dans la société contemporaine (direction Pierre Abraham)  1935, page 7604 ). 

·    Fermer les yeux (littéraire). \" Mourir \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

·    Ne pas fermer l'oeil. Ne pas dormir. Il ne put fermer l'oeil de la nuit. Le lendemain matin, ses agitations redoublèrent (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lamiel,  1842, page 202 ). 

·    Fermer sa gueule (populaire). Se taire. Je faisais des gestes discrets de moulin à vent pour qu'il ferme sa gueule (ANDRÉ MALRAUX, L'Espoir,  1937, page 590 ). 

Ferme la! la ferme! Tais-toi. —  Je m'fous pas mal de c'que tu dis ou d'c'que tu n'dis pas. La ferme! —  J'la fermerai si j'veux, saleté! (HENRI BARBUSSE, Le Feu,  1916, page 30 ). 

c) [Par analogie de b; le sujet désigne une fleur]  Fermer sa corolle. 

—  emploi absolu. Les grands lis ont fermé et les cigales ne chantent pas (ALPHONSE DAUDET, Le Petit Chose,  1868, page 243 ). 

—  Emploi pronominal. Elles [les fleurs] s'ouvraient et se fermaient à différentes heures du jour (JACQUES-HENRI BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature,  1814, page 63 ). 

·    Par métaphore. La rose d'eau se ferme au bord de ma main bleue (JEAN GENÊT, Poèmes,  1948, page 66 ). 

C.—  [L'objet désigne généralement un lieu]  Rendre inaccessible, empêcher l'accès à ou la sortie de. 

1. [Le sujet désigne une personne]  Fermer une salle, une pièce. Nous allons fermer l'appartement, la farce est jouée, et vous remettrez la clef à M. le Maire (HONORÉ DE BALZAC, La Cousine Bette,  1847, page 268 ). 

—  Emploi pronominal à sens passif. Dans les bourgs isolés, dans les stations, les habitants et les squatters se précautionnaient contre toute attaque ou surprise. Les maisons se fermaient à la nuit tombante (JULES VERNE, Les Enfants du capitaine Grant, tome 2, 1868, page 158 ). 

—  En particulier.  Entourer d'une enceinte. Fermer une ville, un parc, un jardin; fermer de murailles, de haies, de fossés. 

—  Par extension.  Empêcher, par une résistance, une défense, l'accès à ou la sortie de. Fermer le passage à l'ennemi; fermer une route, fermer les mers. 

·    Au figuré.  Empêcher l'accès à. Synonyme : contrecarrer. Fermer le chemin des honneurs (Dictionnaire de l'Académie Française). Fermer une carrière à quelqu'un. Emploi pronominal réfléchi. Vous vous fermez toute carrière. Un pas de plus et vous ne pourrez plus quitter la route où vous êtes (ALEXANDRE DUMAS FILS, La Dame aux camélias, 1848, page 216 ).  Fermer la route aux abus. 

—  Spécialement.  CHEMIN DE FER.  Fermer la voie. Interdire (la voie) à la circulation à l'aide du signal approprié : 

Ø 7.... puis, le train passé, la voie fermée, pousser un bouton pour l'annoncer au poste suivant, en pousser un autre pour rendre la voie libre au poste précédent...

ÉMILE ZOLA, La Bête humaine,  1890, page 243. 

2. [Le sujet désigne un inanimé concret]  Interdire l'accès à un lieu. La nuit, Trois lourds barreaux fermaient l'entrée inabordable (VICTOR HUGO, La Légende des siècles, tome 1, 1859, page 69 ). Cette grille [du canal] fermait l'enceinte même de Stahlstadt (JULES VERNE. Les Cinq cents millions de la Bégum,  1879, page 183 ). Si les Versaillais entraient, pas un n'irait au delà des barricades qui fermaient les carrefours (ÉMILE ZOLA, La Débâcle,  1892, page 591 ). 

—  GÉOGRAPHIE.  Abriter (une baie, un port) des vents et de la houle. Deux autres caps fermaient la baie (JULES VERNE, L'Île mystérieuse,  1874, page 94 ). 

3. JEUX.  Fermer le jeu. Empêcher son adversaire de continuer le jeu en le bloquant. 

D.—  1. [L'objet désigne un lieu ouvert au public; l'accent est mis sur le résultat de l'action et ses prolongements dans le temps] 

a) Faire cesser de façon momentanée l'activité de. Fermer une banque, une boutique. Mademoiselle Barnoux, occupez-vous du public, Mme.  Orillane va fermer son guichet un instant (GEORGES BERNANOS, Un Mauvais rêve,  1943, page 981 ). 

·    Fermer boutique. (Faire) cesser une affaire. La crise révèle que ces industriels sont prêts « à fermer boutique » si l'affaire n'est pas rentable (MICHEL DEBATISSE, La Révolution silencieuse, 1963, page 188 ). 

—  emploi absolu.  Cesser son activité. 

·    [Par métonymie du sujet] 

[Le sujet désigne un inanimé]  La banque ferme à trois heures (VICTOR HUGO, Correspondance,  1866, page 549 ).  Spécialement.  BOURSE.   [Pour signifier que le taux d'une valeur était tel à la fermeture de la Bourse]  La Bourse a fermé à tel taux, cette valeur a fermé à tel taux (Dictionnaire de l'Académie française.  1878-1932). 

[Le sujet désigne une personne]  Lundi. Les coiffeurs sont fermés (JEAN COCTEAU, Les Parents terribles,  1938, II, I, page 232 ). 

·    [Pour inviter les personnes présentes à quitter les lieux]  On ferme! —  On ferme! On ferme! crièrent les voix puissantes des gardiens (ÉMILE ZOLA, L'Assommoir,  1877, page 447 ). 

b) Faire cesser (une exploitation) de façon durable. Fermer un chantier, un puits (de mine). Ces mouvements de foule enrichissent l'un, ruinent l'autre, (...) ouvrent et ferment des chantiers (ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos,  1930, page 920 ). 

—  emploi absolu.  Interrompre son activité. La misère était trop grande, il cita les usines qui fermaient, les ouvriers qui s'en allaient (ÉMILE ZOLA, Germinal,  1885, page 1190 ). 

c) Spécialement.  Interrompre, par décision autoritaire ou administrative, de façon momentanée ou définitive, l'activité de. Pyrrhus (...) ferma les gymnases et les théâtres (JULES MICHELET, Histoire romaine, tome 1, 1831, page 173) : 

Ø 8. Seul, un homme errait toujours, (...) ne comprenant pas, s'exaspérant que la police laissât fermer ainsi un établissement d'utilité publique qu'elle surveille et tient sous sa garde.

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, La Maison Tellier, page 1881, page 1183. 

—  Emploi absolu en périphrase factitive. Tu feras fermer les greniers publics. Je viens de signer le décret (ALBERT CAMUS, Caligula,  1944, II, 9, page 46 ). 

2. Mettre une borne à, terminer. 

a) Marquer la limite de. Nous traversions maintenant le pays montueux et boisé qui ferme au sud les campagnes d'Orsenna (JULIEN GRACQ, Le Rivage des Syrtes,  1951, page 16) : 

Ø 9. Une chaîne immense ferme l'horizon de ses noirs rochers. Au milieu une brèche la fend, que l'on peut croire ménagée par l'industrie, ouverte à la dynamite.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 11, 1914-18, page 50. 

—  Fermer les guillemets, la/une parenthèse. Marquer, par un signe d'écriture ou de typographie approprié, la fin d'une partie de discours. 

·    Au figuré.  Mettre fin à une digression. Fraisier fut forcé d'ouvrir et de fermer rapidement une parenthèse dans son discours (HONORÉ DE BALZAC, Le Cousin Pons,  1847, page 209 ). 

b) Au figuré. 

α ) Mettre un terme, dans le temps, à. Fermer une discussion, une liste, un scrutin, le ban*. Buste d'airain dont le piédouche porte les deux dates qui ouvrent et ferment chaque règne (VICTOR HUGO, Le Rhin,  1842, page 256 ). La singulière méditation qui ferme ce plaidoyer pour les églises de France (HENRI MASSIS, Jugements,  1923, page 261) : 

Ø 10. Pardon, Monsieur, dit le Président, nous fermons l'audience pendant cinq minutes, afin de permettre à Me.  Quantin de se reposer des fatigues de son beau discours.

JULES FLEURY-HUSSON, DIT CHAMPFLEURY, Les Bourgeois de Molinchart,  1855, page 205. 

·    Emploi pronominal à sens passif. Trois partisans du candidat de l'opposition (...) arrivèrent au moment où le scrutin allait se fermer (LOUIS REYBAUD, Jérôme Paturot à la recherche d'une position sociale,  1842, page 333 ). 

—  Fermer un cycle, une époque. Être le dernier. Il [Goethe] ferme cette époque d'harmonie et de repos qui se rencontre au commencement de presque toutes les littératures (EDGAR QUINET, Allemagne et Italie,  1836, page 29 ). 

·    Emploi pronominal. Se fermer sur soi-même..  Revenir à son point de départ : 

Ø 11. Le cycle de cette enquête va donc se fermer ici sur lui-même. Revenant à ce qui fut notre point de départ et posant aux doctrines qui furent l'objet de ces études la question même que je me suis posée...

ÉTIENNE GILSON, L'Esprit de la philosophie médiévale,  1932, page 193. 

β ) Fermer la marche. Venir en dernier lieu. Un groupe chuchotant et rieur de sous-lieutenants fermait la marche (JEAN-PAUL SARTRE, La Mort dans l'âme,  1949, page 95) : 

Ø 12. Le cercueil connaît sa route et marche après la tunique flottante du consolateur. Les parents et les amis du défunt, par la manifestation de leur position, ont résolu de fermer la marche du cortège.

ISODORE DUCASSE, DIT COMTE DE LAUTRÉAMONT, Les Chants de Maldoror,  1869, page 308. 

E.—  Littéraire et régionalisme.  [L'objet désigne un animé]  Synonyme : enfermer. N'oubliez donc pas, ce soir, de fermer les bêtes. D'ailleurs, c'est toujours vous qui les fermez (JULES RENARD, Comédies, Poil de carotte,  1900, 3, page 118 ). On est davantage la mère d'un homme entre tous, et de plus près la maîtresse de celui qui vous ferme dans ses bras (JACQUES AUDIBERTI, Le Mal court,  1947, I, page 152) : 

Ø 13. On te connaît bien! Ton père emporta le soc d'une charrue et ton grand-oncle fut fermé en prison pour un vol de laine ou de chanvre! Famille de voleurs!

HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes,  1922, page 145. 

REMARQUE : 1.  Fermable, adjectif.  Que l'on peut fermer. Au lieu de se mouvoir indéfiniment suivant un cycle fermable (PIERRE TEILHARD DE CHARDIN, Le Phénomène humain,  1955, page 47 ). 2.  Fermement, substantif masculin.  rare.  Action de fermer. Son besoin maladif de dire des méchancetés, dont l'émission était toujours précédée d'un fermement jouisseur des yeux (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1885, page 411 ). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 6 793. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 7 689, b) 11 479; XXe.  siècle : a) 10 870, b) 9 636. 

 

FERME1, adjectif, adverbe et interjection.  

I.—  Adjectif. 

A.—  [En parlant d'un inanimé concr]  Qui présente une certaine résistance à la pression, qui est consistant sans être dur. (Quasi-)synonymes : compact, consistant; antonymes : flasque, mou, souple, tendre. Un vivant (...) chancelle entre le ciel et le gouffre. Le sol n'est pas ferme sous ses pas, mais ébranlé d'un tremblement qui fait choir les tours et les colonnes (MARIE-JEANNE DURRY, Gérard de Nerval et le mythe,  1956, page 180) : 

Ø 1. Toutes les feuilles sont luisantes et fermes, analogues à celles du laurier, de l'yeuse; pas d'équivalent de celles du coudrier, par exemple, dont la consistance molle et feutrée, comme spongieuse à la lumière, donne au rayon qui les traverse une coloration verdorée, et fait aux halliers normands leur mystère.

ANDRÉ GIDE, Voyage au Congo,  1927, page 763. 

—  En particulier. 

·    Terre* ferme. 

·    [En parlant d'un fruit ou d'une partie du corps]  Chair ferme. Un petit sein blanc, élastique, bien ferme (NAPOLÉON 1ER, Lettres à Josephine,  1796, page 60 ). Quand elle est à point, il se forme tout autour une croûte qu'on casse pour prendre juste la belle chair ferme (GERMAINE GUÈVREMONT, Le Survenant,  1945, page 48 ). 

B.—  [En parlant d'une personne ou d'un inanimé] 

1. [En parlant d'une personne et par métonymie d'une partie du corps humain] 

a) Qui se tient sans chanceler, qui ne se laisse pas ébranler facilement. Synonyme : stable. L'enfant, qui resta ferme en selle (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Les Beaux Messieurs de Bois-Doré, tome 2, 1858, page 71 ). Ce vieillard de quatre-vingts ans, la tête branlante, le pied ferme, se mit à gravir lentement l'escalier de pavés (VICTOR HUGO, Les Misérables, tome 2, 1862, page 366) : 

Ø 2.... mais en revanche, voluptueuse est la sensation, à chaque gorgée de cette seconde tasse, de remonter, de me retrouver ferme sur mes jambes, et prêt de nouveau à faire face.

CHARLES DU BOS, Journal,  1927, page 196. 

—  Locution adverbiale. De pied ferme. Sans bouger. J'attendis donc le choc de pied ferme (LOUIS REYBAUD, Jérôme Paturot à la recherche d'une position sociale,  1842, page 425 ).  Au figuré (Confer attendre exemple 8). 

—  Locution verbale. Être ferme sur ses étriers*. 

b) Qui traduit la force, l'assurance. Marcher d'un pas ferme; écrire, piloter d'une main ferme; poigne, voix ferme. Synonymes : assuré, décidé, résolu. Vampa (...) continua son chemin du même pas ferme et tranquille (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Le Comte de Monte-Christo, tome 1, 1846, page 459 ). —  Oui, dit-il d'une voix ferme... Je sais. (...) Il est maintenant indifférent et placide (OCTAVE MIRBEAU, Le Journal d'une femme de chambre,  1900, page 166 ). Leurs ancêtres (...) dirigeaient d'une main ferme leurs affaires (ALEXIS CARREL, L'Homme cet inconnu,  1935, page 212 ). 

—  Au figuré. Avoir la main ferme. Un homme d'intelligence fine, ayant la vue saine des choses, la main ferme, le caractère décidé (JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, Le Rayon vert,  1941, page 71 ). 

·    En particulier. domaine de la création artistique et littéraire   Qui témoigne de maîtrise, d'assurance. Dessin, coup de pinceau, exécution, tracé, jeu ferme; style ferme. Des idées si saines exprimées dans un style si ferme, si précis et si simple (PAUL VERLAINE, Œuvres posthumes, tome 2, Charles Baudelaire, 1865, page 17 ). Peinture ferme, où les illusions du dessin sont d'abord dominées (ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Système des beaux-arts,  1920, page 263) : 

Ø 3. MM Tissier et J. Guignet ont conservé leur touche et leur couleur sûres et solides. (...). M. Victor Robert, l'auteur d'une immense allégorie de l'Europe, est certainement un bon peintre doué d'une main ferme; mais l'artiste qui fait le portrait d'un homme célèbre ne doit pas se contenter d'une pâte heureuse et superficielle; car il fait aussi le portrait d'un esprit.

CHARLES BAUDELAIRE, Salon de 1845,  1846, page 162. 

2. Au figuré. 

a)  [En parlant d'une personne] 

—  Littéraire.  Que rien ne peut ébranler. Âme ferme. Synonymes : impassible, imperturbable, stoïque :  

Ø 4. De mon côté, grâce à ces continuelles communications qui créaient entre nous d'innombrables rapports, je devenais plus libre, plus ferme, plus sûr de moi dans tous les sens, et c'était un grand progrès, car Madeleine y voyait un pas fait dans la franchise.

EUGÈNE FROMENTIN, Dominique,  1863, page 161. 

·    Ferme + préposition. Ferme dans l'adversité, dans ses résolutions. 

—   Qui ne se laisse pas influencer, qui montre de l'autorité. Être doux mais ferme. Au lieu d'être faible et dur, il faudrait être ferme et doux, mais je suis un sot (BENJAMIN HENRI CONSTANT DE REBECQUE, Journaux intimes,  1813, page 382 ). 

·    Ferme + préposition. Être ferme avec quelqu'un. Ferme à + infinitif (rare). M. de Séranville, toujours ferme à refuser, changea cinq ou six fois de système quant aux raisons de refuser (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lucien Leuwen, tome 3, 1836, page 183 ). 

b) Par métonymie.  Qui dénote l'assurance, l'autorité, la résolution; qui témoigne d'une attitude sur laquelle on ne transige pas. Regard ferme; ton ferme d'une déclaration, d'une lettre; refus poli mais ferme; instructions très fermes. L'amabilité (...) vaincra toute mauvaise volonté extérieure, sauf peut-être de rares exceptions dont une attitude ferme, mais toujours digne et polie, ferait prompte justice, sois-en sûr (PAUL VERLAINE, Œuvres posthumes, tome 2, Voyage en France par un Français, 1896, page 84 ). Phrase décisive, habile et ferme à la fois (GEORGES BERNANOS, Sous le soleil de Satan,  1926, page 104 ). 

—   [En parlant d'un inanimé abstrait] 

·    Littéraire.  [L'adjectif est généralement antéposé]  Qui est constant Ferme propos, résolution; avoir la volonté ferme de; avoir une ferme espérance. Synonymes : arrêté, décidé, solide. Le menton proéminent est le signe des fermes volontés (JEAN GUÉHENNO, Journal d'un homme de 40 ans,  1934, page 70 ). Cette tenue, il l'avait endossée dans la ferme intention de nous en imposer la vue (JEAN BRULLER, DIT VERCORS, Le Silence de la mer,  1942, page 66 ). 

·    Qui ne change pas, sur quoi l'on peut compter. Convention, proposition, règle ferme. 

C.—  Emplois spéciaux. 

1. BOURSE et COMMERCE.  Achat, marché, vente ferme; prix fermes et définitifs. À caractère définitif. Antonyme : conditionnel. On appelle « marchés fermes » ceux où le vendeur et l'acheteur sont tenus d'exécuter tous leurs engagements (NICOLAS-JEAN-BAPTISTE BOYARD, La Bourse et ses spéculations mises à la portée de tout le monde,  1853, page 170 ). Voir achat exemple 11. 

2. CHEMIN DE FER.  Prix, tarif ferme. Il est plus exact de les [les prix de transports] fixer en bloc pour chaque parcours que de les calculer d'après une formule basée sur la distance. Ce système est celui des « prix fermes » ou de « gare à gare » (CHARLES BRICKA, Cours de chemins de fer, tome 2, 1894, page 1007 ). 

II.—  Adverbe. 

A.—  Avec force, intensité. Fabrice (...) prit la main du cadavre qu'il secoua ferme (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, La Chartreuse de Parme, 1839, page 38 ). Le froid pinçait ferme (FRANÇOIS COPPÉE, La Bonne souffrance,  1898, page 83 ). 

—  Locutions verbales. 

·    Discuter ferme. Discuter avec énergie, âpreté. Dans la salle, on bavarde ferme, et personne ne danse plus (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Claudine à l'école,  1900, page 318 ). Tu ne montes pas? Ça discute ferme, là-haut... C'est intéressant (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 249 ). 

·    (Se) tenir ferme. (Se) tenir solidement. Elle l'attendait sur le seuil de sa chambre, en se tenant ferme aux jambages de la porte (ALPHONSE DE CHATEAUBRIANT, Monsieur des Lourdines,  1911, page 115 ).   Au figuré. Tiens ferme ce que tu as (ANDRÉ GIDE, Le Retour de l'enfant prodigue,  1907, page 482 ). 

B.—  Avec abondance, beaucoup. Conan s'est donc mis à chopiner ferme (ROGER CRÉTIN, DIT ROGER VERCEL, Capitaine Conan,  1934, page 227 ).  Il aurait mieux fait d'étudier sérieusement Marx. (...) il fallait qu'il s'établisse un programme et qu'il se mette à bûcher ferme (SIMONE DE BEAUVOIR, Les Mandarins,  1954, page 120 ). 

C.—  Spécialement. 

1. BOURSE, COMMERCE.  D'une manière nette et définitive, en s'en tenant au prix et aux conditions fixées. Antonyme : sous condition. Acheter, vendre ferme; réserver ferme. Il faut du nerf, alors que vous vendez ferme comme si vous saviez tout (PAUL CLAUDEL, L'Échange, 1re.  version, 1894, I, page 672 ). 

2. DROIT PÉNAL.  Sans sursis. Un an (de prison) ferme. Si on pouvait les pincer une bonne fois, elles écoperaient ferme, c'est fort probable (LÉON BLOY, La Femme pauvre,  1897, page 257 ).  Confer Le Républicain Lorrain, 22 juin 1978, page 16. 

III.—  Interjection, vieillie  \" Quand on veut inciter au courage. Allons, ferme mes amis! \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 3 277. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 3 882, b) 4 945; XXe.  siècle : a) 5 760, b) 4 509. 

 

Forme dérivée du verbe \"fermer\"

 fermer

FERMER, verbe.  

I.—  Vieux.  Rendre fixe. 

A.—  ARCHITECTURE.  Fermer une voûte. 

—   [Le sujet désigne une personne]  Poser la clef de voûte. 

—   [Le sujet désigne un élément de construction]  Consolider, assurer une voûte. 

·    Par métaphore. Tu illumines (...) la situation de la connaissance, où tu viens te placer par magie comme une clef de voûte qui ferme et assure une phrase (PAUL VALÉRY, Mauvaises pensées et autres,  1942, page 164 ). 

B.—  MARINE.  Fermer une embarcation. L'arrêter, l'amarrer.  Attesté notamment dans DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ), DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT) et Larousse de la Langue française. 

II.—  Usuel. 

A.—  [L'objet désigne un élément mobile, généralement un dispositif de fermeture]  Manoeuvrer (le ou les éléments d'une ouverture), de façon à priver de communication deux espaces. Fermer brusquement, doucement, soigneusement, vivement. Synonyme littéraire : clore; antonyme : ouvrir. L'air était devenu plus tiède, les nuits si belles, qu'ils ne fermaient plus la croisée (ANDRÉ GIDE, La Tentative amoureuse,  1893, page 75 ). 

1. Emplois et constructions. 

a) Emploi absolu : 

Ø 1. Elle jeta les yeux vers la porte : il l'avait laissée ouverte, comme pour marquer qu'il avait seulement l'intention d'entrer et de sortir.

—  « Tu as froid? Veux-tu que je ferme? »

ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, La Mort du père, 1929, page 1316. 

b) Emploi pronominal réfléchi à valeur passive et emploi intransitif (souvent avec un adverbe) En haut, se trouvait une chambre dont la porte, comme celle des granges, se fermait avec un crochet qu'on mettait du dehors (GUSTAVE FLAUBERT, Par les champs et par les grèves,  1848, page 327 ). Une porte qui fermait hermétiquement (PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 2, 1859, page 473 ). Une méchante armoire de bois blanc, qui ne ferme point et où je n'ai pas la place de ranger mes affaires (OCTAVE MIRBEAU, Le Journal d'une femme de chambre,  1900, page 36 ). Le rideau se ferme brusquement et brusquement l'éclairage change (PAUL CLAUDEL, Le Soulier de satin,  1944, 1re.  partie, 1re.  journée, 7, page 971 ). 

c) Fermer quelque chose à + substantif ou syntagme indiquant le moyen ou la manière. Fermer sa porte à clef, un tiroir à double tour. Il ferme à clé la porte de la chambre; il enferme sa femme dans la chambre à coucher (CHARLES-FERDINAND RAMUZ, La grande peur dans la montagne,  1926, page 89 ). Ils entrèrent dans l'auto; il ferma à clé la portière de droite et poussa le taquet de celle de gauche (JEAN-PAUL SARTRE, La Mort dans l'âme,  1949, page 163 ). 

2. Locutions verbales. 

a) Fermer la porte sur quelqu'un, sur soi. \" La fermer après que quelqu'un est entré ou sorti, en entrant ou en sortant \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

—  Emploi pronominal réfléchi à sens passif. La porte se ferma sur lui à double tour (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Le Rouge et le Noir, 1830, page 451 ). 

b) Fermer la porte au nez de quelqu'un. La claquer brusquement devant lui. 

—  Au figuré. 

·    Fermer la porte au nez de quelqu'un. L'éconduire. C'est comme si on venait de lui fermer une porte au nez (HENRI DE MONTHERLANT, Les Lépreuses,  1939, page 1503 ). 

·    Fermer sa porte (à quelqu'un). Refuser de le recevoir, de l'entendre. 

·    Fermer sa porte à quelque chose Refuser d'y prêter attention. Goethe (...) ferme sa porte à la poésie et (...) reprend ses forces dans des travaux d'intellectualisme (ROMAIN ROLLAND, Beethoven, tome 1, 1928, page 196 ). 

c) Fermer ses portes (par métonymie). Cesser toute activité. À sa mort en 1800 sa famille (...) fait prospérer la fabrique (...); vendue en 1840, la manufacture dut fermer ses portes en 1848 (GEORGES FONTAINE, La Céramique française.  1965, page 74 ). 

3. Fermer un tiroir. \" Le faire rentrer dans le meuble où il est emboîté \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

—  Emploi intransitif. Les tiroirs ferment mal, (...) une indiscrétion est toujours possible (GEORGES BERNANOS, Journal d'un curé de campagne,  1936, page 1223 ). 

4. [Par métonymie de l'objet]  Fermer une armoire, le garage. 

5. Proverbe. Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée. \" Il faut prendre un parti, il faut se déterminer d'une manière ou d'une autre \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

B.—  [L'objet désigne les parties mobiles d'un organe, les éléments d'un objet; par métonymie cet organe, cet objet] 

1. Manoeuvrer (un élément mobile) 

a) de façon à fixer la pièce à laquelle il est assujetti. Fermer la serrure, le verrou, le loquet. Fermons le loquet de la porte (EDGAR QUINET, Ahasvérus,  1833, 2e.  journée, page 133 ). 

b) de façon à interrompre un débit. Fermer un robinet, une écluse, une vanne. Et cette usine (...) dont on avait négligé de fermer le compteur électrique et qui s'illuminait tous les soirs dans le désert (JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, Dingley, l'illustre écrivain,  1906, page 104) : 

Ø 2. Une bonne invention ces « lampes-témoins », on voit quels clients usent trop de lumière (...). Il ferme la « minuterie » et tire à lui les couvertures. Tiens, Renée qui allume (...). « Si elle n'a pas éteint dans cinq minutes, pense Lecouvreur, je lui coupe le courant »

EUGÈNE DABIT, L'Hôtel du Nord,  1929, page 87. 

—   [Par métonymie de l'objet]  Fermer l'eau, le poste, la télévision. 

2. Rapprocher l'une contre l'autre les parties mobiles (d'un ensemble) dont l'écartement forme une ouverture. Fermer une enveloppe, un couteau, un livre, un parapluie. Elle ferme son face-à-main (ÉDOUARD BOURDET, Le Sexe faible,  1931, 2, page 376 ). 

—  Emploi pronominal à valeur passive et emploi intransitif. Le corsage, à basque, est ouvert carrément sur une chemisette (...) : il se ferme derrière, au moyen d'un lacet de soie (STÉPHANE MALLARMÉ, La Dernière mode,  1874, page 731) : 

Ø 3. Un homme monte à une station. Il n'a pas de bagages. Il a un chapeau en cône tronqué, un pardessus jaune, un pantalon fripé, l'air pauvre. Il se jette dans un coin, et, les mains dans les poches de son pardessus qui ferme mal, il dort.

JULES RENARD, Journal,  1901, page 649. 

—  Au figuré. Fermer sa bourse à quelqu'un (Confer bourse1  I B 3). 

—  Spécialement. 

·    Fermer un angle, une courbe. En réduire l'ouverture. 

·    Fermer un circuit électrique. Établir les liaisons conductrices permettant le passage du courant : 

Ø 4. Un contact à cames (...) est un dispositif automatique pour fermer un circuit électrique pendant un bref intervalle de temps. Quand les ergots de la came touchent le contact, ils le ferment et un courant circule.

EDMUND CALLIS BERKELEY. Cerveaux géants, machines qui pensent,  1957, page 107. 

3. [L'objet désigne une partie du corps]  Même sens que 2. 

a) [Le sujet désigne une personne ou un inanimé concret et l'objet désigne un inanimé concret]  Fermer (les bords d')une plaie, une blessure, une cicatrice. Synonyme : cicatriser. 

·    Par métaphore : 

Ø 5. Ô France! Entends chanter les voix libératrices; L'avenir est prochain qui, d'un doigt enchanté, Ferme tes nobles cicatrices D'où jaillira pour tous la jeune liberté...

ALBERT GLATIGNY, Le Fer rouge,  1870, page 42. 

—  Emploi pronominal à sens passif. Quant à sa blessure, soignée par les plus excellents médecins, elle a dû bientôt se fermer et se cicatriser (THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse,  1863, page 301 ). 

·    Par métaphore. Rien ne guérit en moi; si mes blessures se ferment instantanément, elles se rouvrent tout à coup (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND,Mémoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 197 ). 

—  Locutions verbales. 

·    Fermer les yeux à quelqu'un/de quelqu'un. Abaisser les paupières d'une personne qui vient de mourir. Je te fermerai les yeux, parole, et puis je te ferai une bonne mentonnière pour que tu fermes ta gueule un bon coup! (MARCEL AYMÉ, La Jument verte, 1933, page 48 ).  Au figuré.  L'assister à ses derniers moments. Qu'une main amie lui ferme les yeux, qu'on donne une larme à sa mort (JULES SANDEAU, Mademoiselle de la Seiglière,  1848, page 82 ). 

·    Fermer le bec, la bouche à quelqu'un (au figuré, familier). Le faire taire. Un seul mot va leur fermer la bouche (JEAN-FRANÇOIS COLLIN D'HARLEVILLE, Le Vieux célibataire.  1792, V. 6, page 134 ). Cet enjôleur fermait le bec à toutes les bavardes (ÉMILE ZOLA, L'Assommoir,  1877, page 611 ). 

b) [Le sujet est à la fois l'agent et l'instrument de l'action]  Fermer les doigts, le poing, les yeux. Parfois (...) elle fermait lentement les paupières et la vie abandonnait son visage. (...) bientôt Mme.  Théréson rouvrait les yeux, reprenait sa phrase (JEAN-PAUL SARTRE, La Nausée,  1938, page 124) : 

Ø 6. La vie n'est pas ce que tu crois. C'est une eau que les jeunes gens laissent couler sans le savoir, entre leurs doigts ouverts. Ferme tes mains, ferme tes mains, vite. Retiens-la. Tu verras, cela deviendra une petite chose dure et simple qu'on grignote, assis au soleil.

JEAN ANOUILH, Antigone,  1946, page 190. 

·    Emploi pronominal. Ses deux yeux, fort gros et couverts de paupières épaisses, se fermaient à demi pour considérer la multitude (GUSTAVE FLAUBERT, Madame Bovary, tome 1, 1857, page 160 ). Sa main droite se ferme en forme de cuiller (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère,  1946, page 222 ). 

—  Par analogie. Fermer son visage. Le rendre sombre, en durcir les traits. Synonyme : se renfrogner. 

·    Emploi pronominal. Le visage venait de se fermer subitement (ÉDOUARD ESTAUNIÉ, L'Ascension de Monsieur Baslèvre,  1919, page 26 ). 

—  Au figuré, emploi pronominal.  Devenir impénétrable. Tu te nouais, tu te fermais. Ce qu'il me fallait lutter pour te confesser (PAUL BOURGET, La Geôle,  1923, page 115 ). 

—  Locutions verbales figurées. 

·    Fermer son coeur à. Refuser de comprendre. Vous fermez votre coeur et votre porte à ceux qui veulent vous servir (ALFRED DE VIGNY, Le Journal d'un poète,  1837, page 1081 ). 

·    Fermer l'oreille à. Refuser d'entendre. Tu fermes l'oreille au bon sens. Tu t'obstines dans le mécontentement sourd, dans la mélancolie inerte (HENRI-FRÉDÉRIC AMIEL, Journal,  1866, page 296 ). 

Emploi pronominal réfléchi indirect. Se fermer les oreilles. 

·    Fermer les yeux (à quelque chose). Refuser de se rendre à l'évidence, à ce qui est prouvé, certain. Fermer les yeux à la vérité, à l'évidence, à la lumière (Dictionnaire de l'Académie française.  1878-1932). 

·    Fermer les yeux (sur quelque chose). Refuser de voir. Mais il ne convient pas de fermer volontairement les yeux sur le rôle d'antidote social de la comédie (Arts et littérature dans la société contemporaine (direction Pierre Abraham)  1935, page 7604 ). 

·    Fermer les yeux (littéraire). \" Mourir \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

·    Ne pas fermer l'oeil. Ne pas dormir. Il ne put fermer l'oeil de la nuit. Le lendemain matin, ses agitations redoublèrent (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lamiel,  1842, page 202 ). 

·    Fermer sa gueule (populaire). Se taire. Je faisais des gestes discrets de moulin à vent pour qu'il ferme sa gueule (ANDRÉ MALRAUX, L'Espoir,  1937, page 590 ). 

Ferme la! la ferme! Tais-toi. —  Je m'fous pas mal de c'que tu dis ou d'c'que tu n'dis pas. La ferme! —  J'la fermerai si j'veux, saleté! (HENRI BARBUSSE, Le Feu,  1916, page 30 ). 

c) [Par analogie de b; le sujet désigne une fleur]  Fermer sa corolle. 

—  emploi absolu. Les grands lis ont fermé et les cigales ne chantent pas (ALPHONSE DAUDET, Le Petit Chose,  1868, page 243 ). 

—  Emploi pronominal. Elles [les fleurs] s'ouvraient et se fermaient à différentes heures du jour (JACQUES-HENRI BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature,  1814, page 63 ). 

·    Par métaphore. La rose d'eau se ferme au bord de ma main bleue (JEAN GENÊT, Poèmes,  1948, page 66 ). 

C.—  [L'objet désigne généralement un lieu]  Rendre inaccessible, empêcher l'accès à ou la sortie de. 

1. [Le sujet désigne une personne]  Fermer une salle, une pièce. Nous allons fermer l'appartement, la farce est jouée, et vous remettrez la clef à M. le Maire (HONORÉ DE BALZAC, La Cousine Bette,  1847, page 268 ). 

—  Emploi pronominal à sens passif. Dans les bourgs isolés, dans les stations, les habitants et les squatters se précautionnaient contre toute attaque ou surprise. Les maisons se fermaient à la nuit tombante (JULES VERNE, Les Enfants du capitaine Grant, tome 2, 1868, page 158 ). 

—  En particulier.  Entourer d'une enceinte. Fermer une ville, un parc, un jardin; fermer de murailles, de haies, de fossés. 

—  Par extension.  Empêcher, par une résistance, une défense, l'accès à ou la sortie de. Fermer le passage à l'ennemi; fermer une route, fermer les mers. 

·    Au figuré.  Empêcher l'accès à. Synonyme : contrecarrer. Fermer le chemin des honneurs (Dictionnaire de l'Académie Française). Fermer une carrière à quelqu'un. Emploi pronominal réfléchi. Vous vous fermez toute carrière. Un pas de plus et vous ne pourrez plus quitter la route où vous êtes (ALEXANDRE DUMAS FILS, La Dame aux camélias, 1848, page 216 ).  Fermer la route aux abus. 

—  Spécialement.  CHEMIN DE FER.  Fermer la voie. Interdire (la voie) à la circulation à l'aide du signal approprié : 

Ø 7.... puis, le train passé, la voie fermée, pousser un bouton pour l'annoncer au poste suivant, en pousser un autre pour rendre la voie libre au poste précédent...

ÉMILE ZOLA, La Bête humaine,  1890, page 243. 

2. [Le sujet désigne un inanimé concret]  Interdire l'accès à un lieu. La nuit, Trois lourds barreaux fermaient l'entrée inabordable (VICTOR HUGO, La Légende des siècles, tome 1, 1859, page 69 ). Cette grille [du canal] fermait l'enceinte même de Stahlstadt (JULES VERNE. Les Cinq cents millions de la Bégum,  1879, page 183 ). Si les Versaillais entraient, pas un n'irait au delà des barricades qui fermaient les carrefours (ÉMILE ZOLA, La Débâcle,  1892, page 591 ). 

—  GÉOGRAPHIE.  Abriter (une baie, un port) des vents et de la houle. Deux autres caps fermaient la baie (JULES VERNE, L'Île mystérieuse,  1874, page 94 ). 

3. JEUX.  Fermer le jeu. Empêcher son adversaire de continuer le jeu en le bloquant. 

D.—  1. [L'objet désigne un lieu ouvert au public; l'accent est mis sur le résultat de l'action et ses prolongements dans le temps] 

a) Faire cesser de façon momentanée l'activité de. Fermer une banque, une boutique. Mademoiselle Barnoux, occupez-vous du public, Mme.  Orillane va fermer son guichet un instant (GEORGES BERNANOS, Un Mauvais rêve,  1943, page 981 ). 

·    Fermer boutique. (Faire) cesser une affaire. La crise révèle que ces industriels sont prêts « à fermer boutique » si l'affaire n'est pas rentable (MICHEL DEBATISSE, La Révolution silencieuse, 1963, page 188 ). 

—  emploi absolu.  Cesser son activité. 

·    [Par métonymie du sujet] 

[Le sujet désigne un inanimé]  La banque ferme à trois heures (VICTOR HUGO, Correspondance,  1866, page 549 ).  Spécialement.  BOURSE.   [Pour signifier que le taux d'une valeur était tel à la fermeture de la Bourse]  La Bourse a fermé à tel taux, cette valeur a fermé à tel taux (Dictionnaire de l'Académie française.  1878-1932). 

[Le sujet désigne une personne]  Lundi. Les coiffeurs sont fermés (JEAN COCTEAU, Les Parents terribles,  1938, II, I, page 232 ). 

·    [Pour inviter les personnes présentes à quitter les lieux]  On ferme! —  On ferme! On ferme! crièrent les voix puissantes des gardiens (ÉMILE ZOLA, L'Assommoir,  1877, page 447 ). 

b) Faire cesser (une exploitation) de façon durable. Fermer un chantier, un puits (de mine). Ces mouvements de foule enrichissent l'un, ruinent l'autre, (...) ouvrent et ferment des chantiers (ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos,  1930, page 920 ). 

—  emploi absolu.  Interrompre son activité. La misère était trop grande, il cita les usines qui fermaient, les ouvriers qui s'en allaient (ÉMILE ZOLA, Germinal,  1885, page 1190 ). 

c) Spécialement.  Interrompre, par décision autoritaire ou administrative, de façon momentanée ou définitive, l'activité de. Pyrrhus (...) ferma les gymnases et les théâtres (JULES MICHELET, Histoire romaine, tome 1, 1831, page 173) : 

Ø 8. Seul, un homme errait toujours, (...) ne comprenant pas, s'exaspérant que la police laissât fermer ainsi un établissement d'utilité publique qu'elle surveille et tient sous sa garde.

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, La Maison Tellier, page 1881, page 1183. 

—  Emploi absolu en périphrase factitive. Tu feras fermer les greniers publics. Je viens de signer le décret (ALBERT CAMUS, Caligula,  1944, II, 9, page 46 ). 

2. Mettre une borne à, terminer. 

a) Marquer la limite de. Nous traversions maintenant le pays montueux et boisé qui ferme au sud les campagnes d'Orsenna (JULIEN GRACQ, Le Rivage des Syrtes,  1951, page 16) : 

Ø 9. Une chaîne immense ferme l'horizon de ses noirs rochers. Au milieu une brèche la fend, que l'on peut croire ménagée par l'industrie, ouverte à la dynamite.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 11, 1914-18, page 50. 

—  Fermer les guillemets, la/une parenthèse. Marquer, par un signe d'écriture ou de typographie approprié, la fin d'une partie de discours. 

·    Au figuré.  Mettre fin à une digression. Fraisier fut forcé d'ouvrir et de fermer rapidement une parenthèse dans son discours (HONORÉ DE BALZAC, Le Cousin Pons,  1847, page 209 ). 

b) Au figuré. 

α ) Mettre un terme, dans le temps, à. Fermer une discussion, une liste, un scrutin, le ban*. Buste d'airain dont le piédouche porte les deux dates qui ouvrent et ferment chaque règne (VICTOR HUGO, Le Rhin,  1842, page 256 ). La singulière méditation qui ferme ce plaidoyer pour les églises de France (HENRI MASSIS, Jugements,  1923, page 261) : 

Ø 10. Pardon, Monsieur, dit le Président, nous fermons l'audience pendant cinq minutes, afin de permettre à Me.  Quantin de se reposer des fatigues de son beau discours.

JULES FLEURY-HUSSON, DIT CHAMPFLEURY, Les Bourgeois de Molinchart,  1855, page 205. 

·    Emploi pronominal à sens passif. Trois partisans du candidat de l'opposition (...) arrivèrent au moment où le scrutin allait se fermer (LOUIS REYBAUD, Jérôme Paturot à la recherche d'une position sociale,  1842, page 333 ). 

—  Fermer un cycle, une époque. Être le dernier. Il [Goethe] ferme cette époque d'harmonie et de repos qui se rencontre au commencement de presque toutes les littératures (EDGAR QUINET, Allemagne et Italie,  1836, page 29 ). 

·    Emploi pronominal. Se fermer sur soi-même..  Revenir à son point de départ : 

Ø 11. Le cycle de cette enquête va donc se fermer ici sur lui-même. Revenant à ce qui fut notre point de départ et posant aux doctrines qui furent l'objet de ces études la question même que je me suis posée...

ÉTIENNE GILSON, L'Esprit de la philosophie médiévale,  1932, page 193. 

β ) Fermer la marche. Venir en dernier lieu. Un groupe chuchotant et rieur de sous-lieutenants fermait la marche (JEAN-PAUL SARTRE, La Mort dans l'âme,  1949, page 95) : 

Ø 12. Le cercueil connaît sa route et marche après la tunique flottante du consolateur. Les parents et les amis du défunt, par la manifestation de leur position, ont résolu de fermer la marche du cortège.

ISODORE DUCASSE, DIT COMTE DE LAUTRÉAMONT, Les Chants de Maldoror,  1869, page 308. 

E.—  Littéraire et régionalisme.  [L'objet désigne un animé]  Synonyme : enfermer. N'oubliez donc pas, ce soir, de fermer les bêtes. D'ailleurs, c'est toujours vous qui les fermez (JULES RENARD, Comédies, Poil de carotte,  1900, 3, page 118 ). On est davantage la mère d'un homme entre tous, et de plus près la maîtresse de celui qui vous ferme dans ses bras (JACQUES AUDIBERTI, Le Mal court,  1947, I, page 152) : 

Ø 13. On te connaît bien! Ton père emporta le soc d'une charrue et ton grand-oncle fut fermé en prison pour un vol de laine ou de chanvre! Famille de voleurs!

HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes,  1922, page 145. 

REMARQUE : 1.  Fermable, adjectif.  Que l'on peut fermer. Au lieu de se mouvoir indéfiniment suivant un cycle fermable (PIERRE TEILHARD DE CHARDIN, Le Phénomène humain,  1955, page 47 ). 2.  Fermement, substantif masculin.  rare.  Action de fermer. Son besoin maladif de dire des méchancetés, dont l'émission était toujours précédée d'un fermement jouisseur des yeux (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1885, page 411 ). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 6 793. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 7 689, b) 11 479; XXe.  siècle : a) 10 870, b) 9 636. 

 

FERME3, substantif féminin.  

CONSTRUCTION.  Assemblage de pièces de bois ou de métal destinées à porter le faîtage d'un toit. Un comble composé de fermes de tôle (EUGÈNE VIOLLET-LE-DUC, Entretiens sur l'architecture,  1872, page 40 ). 

—  Spécialement.  Décor de théâtre monté sur un châssis (confer Dictionnaire de la langue verte (HECTOR FRANCE) 1907). Bordenave s'emportait contre les machinistes, qui n'en finissaient pas d'enlever le décor (...), le prince allait recevoir quelque ferme sur la tête (ÉMILE ZOLA, Nana,  1880, page 1204 ). 

 

DÉRIVÉS : Fermette, substantif féminin. a)  Ferme de faux comble ou de lucarne. (Attesté notamment dans le Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (PAUL ROBERT) et Grand Larousse de la langue française en six volumes). b)  Barrage à fermettes. Écluse soutenue par des fermes. Le bruissement monotone des nappes glissant entre les fermettes du barrage (ÉMILE MOSELLY, Terres lorraines,  1907, page 53 ). 

 

Forme dérivée du verbe \"fermer\"

 fermer

FERMER, verbe.  

I.—  Vieux.  Rendre fixe. 

A.—  ARCHITECTURE.  Fermer une voûte. 

—   [Le sujet désigne une personne]  Poser la clef de voûte. 

—   [Le sujet désigne un élément de construction]  Consolider, assurer une voûte. 

·    Par métaphore. Tu illumines (...) la situation de la connaissance, où tu viens te placer par magie comme une clef de voûte qui ferme et assure une phrase (PAUL VALÉRY, Mauvaises pensées et autres,  1942, page 164 ). 

B.—  MARINE.  Fermer une embarcation. L'arrêter, l'amarrer.  Attesté notamment dans DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ), DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT) et Larousse de la Langue française. 

II.—  Usuel. 

A.—  [L'objet désigne un élément mobile, généralement un dispositif de fermeture]  Manoeuvrer (le ou les éléments d'une ouverture), de façon à priver de communication deux espaces. Fermer brusquement, doucement, soigneusement, vivement. Synonyme littéraire : clore; antonyme : ouvrir. L'air était devenu plus tiède, les nuits si belles, qu'ils ne fermaient plus la croisée (ANDRÉ GIDE, La Tentative amoureuse,  1893, page 75 ). 

1. Emplois et constructions. 

a) Emploi absolu : 

Ø 1. Elle jeta les yeux vers la porte : il l'avait laissée ouverte, comme pour marquer qu'il avait seulement l'intention d'entrer et de sortir.

—  « Tu as froid? Veux-tu que je ferme? »

ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, La Mort du père, 1929, page 1316. 

b) Emploi pronominal réfléchi à valeur passive et emploi intransitif (souvent avec un adverbe) En haut, se trouvait une chambre dont la porte, comme celle des granges, se fermait avec un crochet qu'on mettait du dehors (GUSTAVE FLAUBERT, Par les champs et par les grèves,  1848, page 327 ). Une porte qui fermait hermétiquement (PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 2, 1859, page 473 ). Une méchante armoire de bois blanc, qui ne ferme point et où je n'ai pas la place de ranger mes affaires (OCTAVE MIRBEAU, Le Journal d'une femme de chambre,  1900, page 36 ). Le rideau se ferme brusquement et brusquement l'éclairage change (PAUL CLAUDEL, Le Soulier de satin,  1944, 1re.  partie, 1re.  journée, 7, page 971 ). 

c) Fermer quelque chose à + substantif ou syntagme indiquant le moyen ou la manière. Fermer sa porte à clef, un tiroir à double tour. Il ferme à clé la porte de la chambre; il enferme sa femme dans la chambre à coucher (CHARLES-FERDINAND RAMUZ, La grande peur dans la montagne,  1926, page 89 ). Ils entrèrent dans l'auto; il ferma à clé la portière de droite et poussa le taquet de celle de gauche (JEAN-PAUL SARTRE, La Mort dans l'âme,  1949, page 163 ). 

2. Locutions verbales. 

a) Fermer la porte sur quelqu'un, sur soi. \" La fermer après que quelqu'un est entré ou sorti, en entrant ou en sortant \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

—  Emploi pronominal réfléchi à sens passif. La porte se ferma sur lui à double tour (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Le Rouge et le Noir, 1830, page 451 ). 

b) Fermer la porte au nez de quelqu'un. La claquer brusquement devant lui. 

—  Au figuré. 

·    Fermer la porte au nez de quelqu'un. L'éconduire. C'est comme si on venait de lui fermer une porte au nez (HENRI DE MONTHERLANT, Les Lépreuses,  1939, page 1503 ). 

·    Fermer sa porte (à quelqu'un). Refuser de le recevoir, de l'entendre. 

·    Fermer sa porte à quelque chose Refuser d'y prêter attention. Goethe (...) ferme sa porte à la poésie et (...) reprend ses forces dans des travaux d'intellectualisme (ROMAIN ROLLAND, Beethoven, tome 1, 1928, page 196 ). 

c) Fermer ses portes (par métonymie). Cesser toute activité. À sa mort en 1800 sa famille (...) fait prospérer la fabrique (...); vendue en 1840, la manufacture dut fermer ses portes en 1848 (GEORGES FONTAINE, La Céramique française.  1965, page 74 ). 

3. Fermer un tiroir. \" Le faire rentrer dans le meuble où il est emboîté \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

—  Emploi intransitif. Les tiroirs ferment mal, (...) une indiscrétion est toujours possible (GEORGES BERNANOS, Journal d'un curé de campagne,  1936, page 1223 ). 

4. [Par métonymie de l'objet]  Fermer une armoire, le garage. 

5. Proverbe. Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée. \" Il faut prendre un parti, il faut se déterminer d'une manière ou d'une autre \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

B.—  [L'objet désigne les parties mobiles d'un organe, les éléments d'un objet; par métonymie cet organe, cet objet] 

1. Manoeuvrer (un élément mobile) 

a) de façon à fixer la pièce à laquelle il est assujetti. Fermer la serrure, le verrou, le loquet. Fermons le loquet de la porte (EDGAR QUINET, Ahasvérus,  1833, 2e.  journée, page 133 ). 

b) de façon à interrompre un débit. Fermer un robinet, une écluse, une vanne. Et cette usine (...) dont on avait négligé de fermer le compteur électrique et qui s'illuminait tous les soirs dans le désert (JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, Dingley, l'illustre écrivain,  1906, page 104) : 

Ø 2. Une bonne invention ces « lampes-témoins », on voit quels clients usent trop de lumière (...). Il ferme la « minuterie » et tire à lui les couvertures. Tiens, Renée qui allume (...). « Si elle n'a pas éteint dans cinq minutes, pense Lecouvreur, je lui coupe le courant »

EUGÈNE DABIT, L'Hôtel du Nord,  1929, page 87. 

—   [Par métonymie de l'objet]  Fermer l'eau, le poste, la télévision. 

2. Rapprocher l'une contre l'autre les parties mobiles (d'un ensemble) dont l'écartement forme une ouverture. Fermer une enveloppe, un couteau, un livre, un parapluie. Elle ferme son face-à-main (ÉDOUARD BOURDET, Le Sexe faible,  1931, 2, page 376 ). 

—  Emploi pronominal à valeur passive et emploi intransitif. Le corsage, à basque, est ouvert carrément sur une chemisette (...) : il se ferme derrière, au moyen d'un lacet de soie (STÉPHANE MALLARMÉ, La Dernière mode,  1874, page 731) : 

Ø 3. Un homme monte à une station. Il n'a pas de bagages. Il a un chapeau en cône tronqué, un pardessus jaune, un pantalon fripé, l'air pauvre. Il se jette dans un coin, et, les mains dans les poches de son pardessus qui ferme mal, il dort.

JULES RENARD, Journal,  1901, page 649. 

—  Au figuré. Fermer sa bourse à quelqu'un (Confer bourse1  I B 3). 

—  Spécialement. 

·    Fermer un angle, une courbe. En réduire l'ouverture. 

·    Fermer un circuit électrique. Établir les liaisons conductrices permettant le passage du courant : 

Ø 4. Un contact à cames (...) est un dispositif automatique pour fermer un circuit électrique pendant un bref intervalle de temps. Quand les ergots de la came touchent le contact, ils le ferment et un courant circule.

EDMUND CALLIS BERKELEY. Cerveaux géants, machines qui pensent,  1957, page 107. 

3. [L'objet désigne une partie du corps]  Même sens que 2. 

a) [Le sujet désigne une personne ou un inanimé concret et l'objet désigne un inanimé concret]  Fermer (les bords d')une plaie, une blessure, une cicatrice. Synonyme : cicatriser. 

·    Par métaphore : 

Ø 5. Ô France! Entends chanter les voix libératrices; L'avenir est prochain qui, d'un doigt enchanté, Ferme tes nobles cicatrices D'où jaillira pour tous la jeune liberté...

ALBERT GLATIGNY, Le Fer rouge,  1870, page 42. 

—  Emploi pronominal à sens passif. Quant à sa blessure, soignée par les plus excellents médecins, elle a dû bientôt se fermer et se cicatriser (THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse,  1863, page 301 ). 

·    Par métaphore. Rien ne guérit en moi; si mes blessures se ferment instantanément, elles se rouvrent tout à coup (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND,Mémoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 197 ). 

—  Locutions verbales. 

·    Fermer les yeux à quelqu'un/de quelqu'un. Abaisser les paupières d'une personne qui vient de mourir. Je te fermerai les yeux, parole, et puis je te ferai une bonne mentonnière pour que tu fermes ta gueule un bon coup! (MARCEL AYMÉ, La Jument verte, 1933, page 48 ).  Au figuré.  L'assister à ses derniers moments. Qu'une main amie lui ferme les yeux, qu'on donne une larme à sa mort (JULES SANDEAU, Mademoiselle de la Seiglière,  1848, page 82 ). 

·    Fermer le bec, la bouche à quelqu'un (au figuré, familier). Le faire taire. Un seul mot va leur fermer la bouche (JEAN-FRANÇOIS COLLIN D'HARLEVILLE, Le Vieux célibataire.  1792, V. 6, page 134 ). Cet enjôleur fermait le bec à toutes les bavardes (ÉMILE ZOLA, L'Assommoir,  1877, page 611 ). 

b) [Le sujet est à la fois l'agent et l'instrument de l'action]  Fermer les doigts, le poing, les yeux. Parfois (...) elle fermait lentement les paupières et la vie abandonnait son visage. (...) bientôt Mme.  Théréson rouvrait les yeux, reprenait sa phrase (JEAN-PAUL SARTRE, La Nausée,  1938, page 124) : 

Ø 6. La vie n'est pas ce que tu crois. C'est une eau que les jeunes gens laissent couler sans le savoir, entre leurs doigts ouverts. Ferme tes mains, ferme tes mains, vite. Retiens-la. Tu verras, cela deviendra une petite chose dure et simple qu'on grignote, assis au soleil.

JEAN ANOUILH, Antigone,  1946, page 190. 

·    Emploi pronominal. Ses deux yeux, fort gros et couverts de paupières épaisses, se fermaient à demi pour considérer la multitude (GUSTAVE FLAUBERT, Madame Bovary, tome 1, 1857, page 160 ). Sa main droite se ferme en forme de cuiller (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère,  1946, page 222 ). 

—  Par analogie. Fermer son visage. Le rendre sombre, en durcir les traits. Synonyme : se renfrogner. 

·    Emploi pronominal. Le visage venait de se fermer subitement (ÉDOUARD ESTAUNIÉ, L'Ascension de Monsieur Baslèvre,  1919, page 26 ). 

—  Au figuré, emploi pronominal.  Devenir impénétrable. Tu te nouais, tu te fermais. Ce qu'il me fallait lutter pour te confesser (PAUL BOURGET, La Geôle,  1923, page 115 ). 

—  Locutions verbales figurées. 

·    Fermer son coeur à. Refuser de comprendre. Vous fermez votre coeur et votre porte à ceux qui veulent vous servir (ALFRED DE VIGNY, Le Journal d'un poète,  1837, page 1081 ). 

·    Fermer l'oreille à. Refuser d'entendre. Tu fermes l'oreille au bon sens. Tu t'obstines dans le mécontentement sourd, dans la mélancolie inerte (HENRI-FRÉDÉRIC AMIEL, Journal,  1866, page 296 ). 

Emploi pronominal réfléchi indirect. Se fermer les oreilles. 

·    Fermer les yeux (à quelque chose). Refuser de se rendre à l'évidence, à ce qui est prouvé, certain. Fermer les yeux à la vérité, à l'évidence, à la lumière (Dictionnaire de l'Académie française.  1878-1932). 

·    Fermer les yeux (sur quelque chose). Refuser de voir. Mais il ne convient pas de fermer volontairement les yeux sur le rôle d'antidote social de la comédie (Arts et littérature dans la société contemporaine (direction Pierre Abraham)  1935, page 7604 ). 

·    Fermer les yeux (littéraire). \" Mourir \" (Dictionnaire de l'Académie Française). 

·    Ne pas fermer l'oeil. Ne pas dormir. Il ne put fermer l'oeil de la nuit. Le lendemain matin, ses agitations redoublèrent (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lamiel,  1842, page 202 ). 

·    Fermer sa gueule (populaire). Se taire. Je faisais des gestes discrets de moulin à vent pour qu'il ferme sa gueule (ANDRÉ MALRAUX, L'Espoir,  1937, page 590 ). 

Ferme la! la ferme! Tais-toi. —  Je m'fous pas mal de c'que tu dis ou d'c'que tu n'dis pas. La ferme! —  J'la fermerai si j'veux, saleté! (HENRI BARBUSSE, Le Feu,  1916, page 30 ). 

c) [Par analogie de b; le sujet désigne une fleur]  Fermer sa corolle. 

—  emploi absolu. Les grands lis ont fermé et les cigales ne chantent pas (ALPHONSE DAUDET, Le Petit Chose,  1868, page 243 ). 

—  Emploi pronominal. Elles [les fleurs] s'ouvraient et se fermaient à différentes heures du jour (JACQUES-HENRI BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature,  1814, page 63 ). 

·    Par métaphore. La rose d'eau se ferme au bord de ma main bleue (JEAN GENÊT, Poèmes,  1948, page 66 ). 

C.—  [L'objet désigne généralement un lieu]  Rendre inaccessible, empêcher l'accès à ou la sortie de. 

1. [Le sujet désigne une personne]  Fermer une salle, une pièce. Nous allons fermer l'appartement, la farce est jouée, et vous remettrez la clef à M. le Maire (HONORÉ DE BALZAC, La Cousine Bette,  1847, page 268 ). 

—  Emploi pronominal à sens passif. Dans les bourgs isolés, dans les stations, les habitants et les squatters se précautionnaient contre toute attaque ou surprise. Les maisons se fermaient à la nuit tombante (JULES VERNE, Les Enfants du capitaine Grant, tome 2, 1868, page 158 ). 

—  En particulier.  Entourer d'une enceinte. Fermer une ville, un parc, un jardin; fermer de murailles, de haies, de fossés. 

—  Par extension.  Empêcher, par une résistance, une défense, l'accès à ou la sortie de. Fermer le passage à l'ennemi; fermer une route, fermer les mers. 

·    Au figuré.  Empêcher l'accès à. Synonyme : contrecarrer. Fermer le chemin des honneurs (Dictionnaire de l'Académie Française). Fermer une carrière à quelqu'un. Emploi pronominal réfléchi. Vous vous fermez toute carrière. Un pas de plus et vous ne pourrez plus quitter la route où vous êtes (ALEXANDRE DUMAS FILS, La Dame aux camélias, 1848, page 216 ).  Fermer la route aux abus. 

—  Spécialement.  CHEMIN DE FER.  Fermer la voie. Interdire (la voie) à la circulation à l'aide du signal approprié : 

Ø 7.... puis, le train passé, la voie fermée, pousser un bouton pour l'annoncer au poste suivant, en pousser un autre pour rendre la voie libre au poste précédent...

ÉMILE ZOLA, La Bête humaine,  1890, page 243. 

2. [Le sujet désigne un inanimé concret]  Interdire l'accès à un lieu. La nuit, Trois lourds barreaux fermaient l'entrée inabordable (VICTOR HUGO, La Légende des siècles, tome 1, 1859, page 69 ). Cette grille [du canal] fermait l'enceinte même de Stahlstadt (JULES VERNE. Les Cinq cents millions de la Bégum,  1879, page 183 ). Si les Versaillais entraient, pas un n'irait au delà des barricades qui fermaient les carrefours (ÉMILE ZOLA, La Débâcle,  1892, page 591 ). 

—  GÉOGRAPHIE.  Abriter (une baie, un port) des vents et de la houle. Deux autres caps fermaient la baie (JULES VERNE, L'Île mystérieuse,  1874, page 94 ). 

3. JEUX.  Fermer le jeu. Empêcher son adversaire de continuer le jeu en le bloquant. 

D.—  1. [L'objet désigne un lieu ouvert au public; l'accent est mis sur le résultat de l'action et ses prolongements dans le temps] 

a) Faire cesser de façon momentanée l'activité de. Fermer une banque, une boutique. Mademoiselle Barnoux, occupez-vous du public, Mme.  Orillane va fermer son guichet un instant (GEORGES BERNANOS, Un Mauvais rêve,  1943, page 981 ). 

·    Fermer boutique. (Faire) cesser une affaire. La crise révèle que ces industriels sont prêts « à fermer boutique » si l'affaire n'est pas rentable (MICHEL DEBATISSE, La Révolution silencieuse, 1963, page 188 ). 

—  emploi absolu.  Cesser son activité. 

·    [Par métonymie du sujet] 

[Le sujet désigne un inanimé]  La banque ferme à trois heures (VICTOR HUGO, Correspondance,  1866, page 549 ).  Spécialement.  BOURSE.   [Pour signifier que le taux d'une valeur était tel à la fermeture de la Bourse]  La Bourse a fermé à tel taux, cette valeur a fermé à tel taux (Dictionnaire de l'Académie française.  1878-1932). 

[Le sujet désigne une personne]  Lundi. Les coiffeurs sont fermés (JEAN COCTEAU, Les Parents terribles,  1938, II, I, page 232 ). 

·    [Pour inviter les personnes présentes à quitter les lieux]  On ferme! —  On ferme! On ferme! crièrent les voix puissantes des gardiens (ÉMILE ZOLA, L'Assommoir,  1877, page 447 ). 

b) Faire cesser (une exploitation) de façon durable. Fermer un chantier, un puits (de mine). Ces mouvements de foule enrichissent l'un, ruinent l'autre, (...) ouvrent et ferment des chantiers (ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos,  1930, page 920 ). 

—  emploi absolu.  Interrompre son activité. La misère était trop grande, il cita les usines qui fermaient, les ouvriers qui s'en allaient (ÉMILE ZOLA, Germinal,  1885, page 1190 ). 

c) Spécialement.  Interrompre, par décision autoritaire ou administrative, de façon momentanée ou définitive, l'activité de. Pyrrhus (...) ferma les gymnases et les théâtres (JULES MICHELET, Histoire romaine, tome 1, 1831, page 173) : 

Ø 8. Seul, un homme errait toujours, (...) ne comprenant pas, s'exaspérant que la police laissât fermer ainsi un établissement d'utilité publique qu'elle surveille et tient sous sa garde.

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, La Maison Tellier, page 1881, page 1183. 

—  Emploi absolu en périphrase factitive. Tu feras fermer les greniers publics. Je viens de signer le décret (ALBERT CAMUS, Caligula,  1944, II, 9, page 46 ). 

2. Mettre une borne à, terminer. 

a) Marquer la limite de. Nous traversions maintenant le pays montueux et boisé qui ferme au sud les campagnes d'Orsenna (JULIEN GRACQ, Le Rivage des Syrtes,  1951, page 16) : 

Ø 9. Une chaîne immense ferme l'horizon de ses noirs rochers. Au milieu une brèche la fend, que l'on peut croire ménagée par l'industrie, ouverte à la dynamite.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 11, 1914-18, page 50. 

—  Fermer les guillemets, la/une parenthèse. Marquer, par un signe d'écriture ou de typographie approprié, la fin d'une partie de discours. 

·    Au figuré.  Mettre fin à une digression. Fraisier fut forcé d'ouvrir et de fermer rapidement une parenthèse dans son discours (HONORÉ DE BALZAC, Le Cousin Pons,  1847, page 209 ). 

b) Au figuré. 

α ) Mettre un terme, dans le temps, à. Fermer une discussion, une liste, un scrutin, le ban*. Buste d'airain dont le piédouche porte les deux dates qui ouvrent et ferment chaque règne (VICTOR HUGO, Le Rhin,  1842, page 256 ). La singulière méditation qui ferme ce plaidoyer pour les églises de France (HENRI MASSIS, Jugements,  1923, page 261) : 

Ø 10. Pardon, Monsieur, dit le Président, nous fermons l'audience pendant cinq minutes, afin de permettre à Me.  Quantin de se reposer des fatigues de son beau discours.

JULES FLEURY-HUSSON, DIT CHAMPFLEURY, Les Bourgeois de Molinchart,  1855, page 205. 

·    Emploi pronominal à sens passif. Trois partisans du candidat de l'opposition (...) arrivèrent au moment où le scrutin allait se fermer (LOUIS REYBAUD, Jérôme Paturot à la recherche d'une position sociale,  1842, page 333 ). 

—  Fermer un cycle, une époque. Être le dernier. Il [Goethe] ferme cette époque d'harmonie et de repos qui se rencontre au commencement de presque toutes les littératures (EDGAR QUINET, Allemagne et Italie,  1836, page 29 ). 

·    Emploi pronominal. Se fermer sur soi-même..  Revenir à son point de départ : 

Ø 11. Le cycle de cette enquête va donc se fermer ici sur lui-même. Revenant à ce qui fut notre point de départ et posant aux doctrines qui furent l'objet de ces études la question même que je me suis posée...

ÉTIENNE GILSON, L'Esprit de la philosophie médiévale,  1932, page 193. 

β ) Fermer la marche. Venir en dernier lieu. Un groupe chuchotant et rieur de sous-lieutenants fermait la marche (JEAN-PAUL SARTRE, La Mort dans l'âme,  1949, page 95) : 

Ø 12. Le cercueil connaît sa route et marche après la tunique flottante du consolateur. Les parents et les amis du défunt, par la manifestation de leur position, ont résolu de fermer la marche du cortège.

ISODORE DUCASSE, DIT COMTE DE LAUTRÉAMONT, Les Chants de Maldoror,  1869, page 308. 

E.—  Littéraire et régionalisme.  [L'objet désigne un animé]  Synonyme : enfermer. N'oubliez donc pas, ce soir, de fermer les bêtes. D'ailleurs, c'est toujours vous qui les fermez (JULES RENARD, Comédies, Poil de carotte,  1900, 3, page 118 ). On est davantage la mère d'un homme entre tous, et de plus près la maîtresse de celui qui vous ferme dans ses bras (JACQUES AUDIBERTI, Le Mal court,  1947, I, page 152) : 

Ø 13. On te connaît bien! Ton père emporta le soc d'une charrue et ton grand-oncle fut fermé en prison pour un vol de laine ou de chanvre! Famille de voleurs!

HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes,  1922, page 145. 

REMARQUE : 1.  Fermable, adjectif.  Que l'on peut fermer. Au lieu de se mouvoir indéfiniment suivant un cycle fermable (PIERRE TEILHARD DE CHARDIN, Le Phénomène humain,  1955, page 47 ). 2.  Fermement, substantif masculin.  rare.  Action de fermer. Son besoin maladif de dire des méchancetés, dont l'émission était toujours précédée d'un fermement jouisseur des yeux (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1885, page 411 ). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 6 793. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 7 689, b) 11 479; XXe.  siècle : a) 10 870, b) 9 636. 

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