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PRÉSOCRATIQUES

Publié le 02/04/2015

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PRÉSOCRATIQUES

On estime généralement que les thèmes de réflexion et les méthodes de la philosophie grecque sont définitivement fixés par l'enseignement de Socrate et l'oeuvre de Platon ; on ne veut pas dire par là qu'avant il n'y avait rien de « philosophique «, mais plutôt que tout ce qui advient avant le IVe siècle est à considérer comme la lente émergence de la pensée philosophique. C'est pourquoi une présen¬tation historique des « philosophes « et des écoles s'impose en premier lieu.

1 — Les cosmogonies mythiques constituées selon la tradition d'Homère et d'Hésiode ( -'750) et rassemblées au VIe siècle avant J.-C. se caractérisent par leurs liaisons aux pratiques des sectes

 

orphiques (mythes d'Éleusis, religion agraire avec le culte de Déméter) et leur constante tentative d'expliquer l'ordre du monde par une généalogie des dieux. Rattachées aux cosmogonies chaldéennes, elles subsistent à travers Platon et les pères de l'Église fort avant dans notre ère.

2 — Les cosmologies ioniennes sont développées par les milésiens : Thalès, Anaximandre, Anaximène, connus essentiellement par Aristote et originaires de Milet en Ionie (entre 640 et 480) lieu de naissance des cités d'Asie Mineure dont la décadence a lieu au Ve siècle. C'est à ce moment précis que vit Héraclite (545-480 av. J.-C.), contemporain d'Anaximène (550-480). L'expansion grecque est étranglée en Occident par Carthage, en Orient par les conquêtes perses. Il se produit alors un repli sur la Grande Grèce (Italie, Sicile).

3 — Les pythagoriciens du nom de Pythagore (570-480 ? 1 né à Samos, en Ionie. Il fondera à Crotone vers 530 une école, association religieuse influente jusqu'à la mort de Platon. Au milieu du Ve siècle, après la révolte des cités qu'ils avaient implantées, les pythagoriciens émigrèrent en Grèce continentale où l'on trouve Philolaos de Thèbes, Archytas de Tarente. (D'après le Timée de Platon, on conjecture souvent l'existence d'un pythagoricien Timée de Locres, mais rien ne permet de conclure que ce protagoniste du dialogue est pythagoricien ni qu'il fut un personnage réel.) Un second mouvement (néo-pythagorisme) se développe au ler siècle après J.-C. avec Nicomaque Jamblique.

4 — Les éléates (Melissos de Samos, 495 — ?, mis à part) sont aussi, notamment avec Xénophane de Colophon (570-480), des exilés ioniens qui ont fondé, sur la mer Thyrrénienne, Élée, la ville dont sont originaires Parménide (510-540) et Zénon (485.420). Ce courant, caractérisé par son opposition à la physique ionienne, doit faire face à un renouveau de la spéculation physique avec :

5 — Les nouveaux physiciens : Anaxagore de Clazomènes (500-430) en Ionie, Empédocle d'Agrigente (490-430) en Sicile et Démocrite d'Abdère (460-370) en Thrace, lequel, élève de Leucippe de Milet, reçut aussi l'enseignement de Zénon d'Élée. Au cours de ce Ve siècle, l'esprit ionien est également représenté par la tendance des :

6 — Médecins : tels Hippon, Diogène d'Appolonie et surtout Hippo¬crate de Cos ('—'450). Pendant cette période de renouveau physique, se développe :

7 — La sophistique dont les principaux représentants : Protagoras (485410) et Gorgias (485-380) seront les contemporains de Socrate.

 

Les thèmes traités par ces penseurs et leur évolution reflètent la naissance de la philosophie, pensée profane et rationnelle, à partir des récits cosmogoniques, pensée mythique et religieuse.

1. Le thème de la physis

Il va se déployer chez les milésiens dans une cosmologie sans dieux, régie par un principe, une origine, une certaine nature (physis) dont le concept doit être suffisamment riche pour pouvoir être racine de toutes choses. Il s'agit dès lors, non plus comme chez Hésiode, d'une histoire, mais d'une repré¬sentation (théôria) du cosmos.

1 — On cherche en proposant un modèle du cosmos à faire comprendre l'existence d'un ordre.

2 — On utilise des modèles explicatifs empruntés au monde humain, mais en s'éloignant peu à peu de l'anthropo¬morphisme primitif. Hésiode explique le cosmos à partir de l'union sexuelle d'éléments (terre, océan) déifiés, Héraclite fait de la justice un principe d'ordre, les médecins un principe d'équilibre entre les humeurs, dont la rupture est cause de maladie, et peu à peu s'impose un type d'intel¬ligibilité technique (notions de cause, de fabrication). Le langage poétique est abandonné, et la nouvelle « physique « se préoccupe toujours d'expliquer l'ordre cosmique par le jeu de principes et d'éléments abstraits, qu'il s'agisse de l'intel¬ligence (Anaxagore), de l'amour, de la haine, des quatre éléments (Empédocle), du vide et des atomes (Leucippe, Démocrite).

2. Le thème de l'Être et de la vérité

Toute étude du cosmos constitue une réponse à la question « Qu'est-ce qui constitue ce qui est ? « ; par conséquent, elle suppose une réponse à la question « Comment pouvons-nous savoir cequi constitue ce qui est ? «, c'est-à-dire à la question « Qu'est-ce que la vérité ? «. Les présocratiques ont abordé la phase décisive de la constitution de la philosophie en faisant de ces questions et de leurs réponses un thème explicite de réflexion.

a — Pour les uns, la vérité désigne la pertinence du système cosmologique (Anaximandre, pythagoriciens) ; pour les autres (éléates), la vérité, c'est-à-dire l'Etre, est indépendante de ces systèmes qui sont plutôt du domaine de l'opinion, c'est-à-dire d'une pensée qui n'est ni stable, ni fondée.

b — Pour les uns, la vérité est l'objet d'une révélation (aussi bien Parménide que Pythagore). Pour les autres, elle est l'objet d'une enquête mettant en oeuvre des discours bien constitués, se référant à une pratique dominée (les ioniens, les médecins).

c — Pour les uns, la vérité est une (Parménide, Pythagore) ; pour d'autres (sophistes), elle est multiple et relative (1).

 

d — Pour les uns, (pythagoriciens, et néo-pythagoriciens), la vérité est transparente à l'intelligibilité mathématique : il y a correspondance entre les éléments et les nombres. D'un autre côté, on trouve (Empédocle) une physique élaborée sur une combinatoire d'éléments qualitativement déterminés.

· La question du sens historique et philosophique des théories présocratiques est fonction de l'interprétation qu'on donne à leurs conceptions de l'Etre et de la Vérité. On peut y voir le premier déploiement de ce qui trouvera sa forme dans la logique et la métaphysique d'Aristote (2) ou au contraire un type de pensée originale, faisant de la vérité le « dévoilement de l'Etre « ; la philosophie alors, loin d'effectuer le sens dernier de cette pensée en constituerait un recouvrement occultant (voir Heidegger).

1. Cf. Protagoras : « L'homme est la mesure de toute chose. «

2. Interprétation suggérée ici (Cf J.P. Vernant, Les Origines de la pensee grecque, 1969 ; Mythe et pensée chez les grecs, 1971).

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