... A quoi servent les livres s'ils ne nous ramènent pas vers la vie, s'ils ne parviennent pas à nous...
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A quoi servent les livres s'ils ne nous ramènent pas vers la vie, s'ils ne
parviennent pas à nous y faire boire avec plus d'avidité? La quête d'un
livre, comme certains d'entre nous le savent, est souvent plus enrichis
sante que sa lecture.
Ce que je voudrais dire brièvement, c'est qu'un livre, comme tout autre
objet, sert souvent de prétexte à ce que nous cherchons en réalité.
Certes,
les ouvrages que nos mentors nous recommandent peuvent, s'ils se trou
vent nous atteindre au bon moment, produire le résultat désiré, mais com
ment prévoir de si heureuses coïncidences? D'autre part, si ces livres - je
parle ici des trésors de la littérature et non de ses sous-produits - vien
nent à tomber entre nos mains avant que nous soyons prêts à les accueillir,
ou au contraire quand nous sommes blasés, surmenés, ou encore s'ils
nous prennent à rebrousse-poil, le résultat peut être désastreux.
Si on
adopte « la route ouverte» comme méthode de voyage à travers la vie, il
est certain qu'il faut l'appliquer aussi à la lecture.
Que celle-ci soit une
aventure! Un événement! C'est bien assez de pousser chaque jour tant de
boutons au point de rendre ce monde de plus en plus invivable!
Notre espoir à tous, en prenant un livre, est de rencontrer un homme
selon notre cœur, de vivre des tragédies et des joies que nous n'avons pas
le courage de provoquer nous-mêmes, de rêver des rêves qui rendent la vie
plus passionnante, peut-être aussi de découvrir une philosophie·de l'exis
tence qui nous rende plus capables d'affronter les problèmes et les épreu
ves qui nous assaillent.
Nous contenter d'accroître la masse de nos con
naissances ou de perfectionner notre culture, quoi que cela puisse signi
fier, ne me paraît pas en valoir la peine.
( .•• )
Mais le gain essentiel qu'on peut tirer de la lecture est peut-être le désir
de communiquer vraiment avec les autres hommes.
Lire comme il faut,
c'est s'éveiller et vivre, acquérir un renouveau d'intérêt pour ses voisins, en
particulier ceux qui diffèrent le plus de nous dans tous les domaines.
Il n'y a
jamais eu une telle pléthore de livres, ni plus profonds abîmes d'indiffé
rence au sort de nos frères humains, ni si peu d'aptitude à penser et à agir
de manière personnelle.
Je dois dire qu'en général j'ai trouvé des hommes meilleurs, à tous les
sens du mot, parmi les ignorants que chez les gens cultivés de ce monde.
Chaque jour les crimes les plus monstrueux contre l'humanité sont commis
par des êtres qui ont joui de tous les avantages de l'instruction.
On rend
certes les gens plus lettrés, plus sensibles aux livres mais on n'en a pas fait
pour autant de meilleurs citoyens.
Un livre ne vaut pas mieux, et le plus souvent bien moins, qu'un rocher,
un arbre, une....
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