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ACTE Il, SCÈNES 1, 2 ET 3 Curiace adresse un discours de félicitation à Horace qui a été choisi comme...

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« ACTE Il, SCÈNES 1, 2 ET 3 Curiace adresse un discours de félicitation à Horace qui a été choisi comme champion entre tous les Romains avec ses deux frères.

Il se réjouit d'être bientôt allié à cette glorieuse famille.

Albe a perdu d'avance (v.

347-370)! Horace affiche d'abord une modestie de politesse, puis dé­ clare son «juste orgueil»: il est prêt à vaincre ou à mourir (v.

371= 388). Face à Curiace qui parle de déchirement et d'amitié, Horace ne veut considérer que l'ivresse de la gloire (v.

389-408). (Scène 1) Un soldat albain, Flavian, vient annoncer à Curiace qu'il a été choisi avec ses deux frères comme champion: il accepte, non sans stupéfaction ni tristesse.

(Scène 2) Le messager parti, Curiace maudit un «honneur» qui repré­ sente le comble du tragique.

Horace, dans cette situation, voit au contraire une chance exceptionnelle d'héroïsme: avoir à sacrifier pour sa patrie non seulement sa vie mais ses senti­ ments (v.

423-452). Curiace le lui concède, mais juge inhumain de ne considérer que l'héroïsme.

Horace refuse le moindre attendrissement et veut arrêter la conversation (v.

453-502). Comme Curiace insiste, il lui conseille ironiquement de se lamenter avec sa fiancée, tandis que lui part inciter sa femme à la fermeté (v.

503-514).

(Scène 3) COMMENTAIRE « ••• si on en faisait un roman...

» {Corneille) !.:entracte qui vient de s'achever fournit l'occasion d'évoquer le théori­ cien de la dramaturgie classique qu'était aussi Corneille.

En effet ses trois Discours sont illustrés par des exemples tirés de ses propres pièces et, dans le second, il parle longuement du début de cet acte : « À la fin du premier acte, Curiace et sa maîtresse Camille vont rejoindre le reste de la famille, qui doit être dans un autre appartement ; entre les deux actes, ils y reçoivent la nouvelle de l'élection des trois Horaces: à l'ouverture du second, Curiace paraît dans cette même salle pour l'en congratuler.

Dans le roman, il aurait fait cette congratulation au même lieu où l'on en reçoit la nouvelle, en présence de toute la famille et il n'est point vraisemblable qu'ils s'écartent eux deux pour cette conjouissance, mais il est [c'est] nécessaire pour le théâtre.

• Corneille complète cette remarque dans I' «Examen • de la pièce : plutôt que de trouver une raison peu convaincante de cette séparation imposée par l'unité de lieu, il a décidé de n'en donner aucune par« adresse de théâtre•. Il ne faut pas voir dans ces remarques une auto-critique, bien au contraire.

En s'appuyant sur ses réussites au théâtre, Corneille commente mais aussi rectifie ces grandes théories littéraires de !'Antiquité qui font autorité à son époque.

Le début de cet acte lui sert d'exemple pour redéfinir deux notions de la Poétique d'Aristote en montrant comment le vraisemblable peut céder au nécessaire qui est «le besoin du poète pour arriver à son but ou pour y faire arriver ses acteurs [personnages]•.

Par là il amorce aussi une réflexion sur les conventions propres à un genre littéraire. Le retour du tragique !:acte précédent s'achevait sur une détente, fondée sur la substitution d'un combat singulier à une bataille.

!:annonce du choix des combattants va renverser cette espérance et nouer l'intrigue par un «tour de vis» qui va en trois scènes porter la tension à son maximum.

Le «comble» semble atteint, dit Curiace : «Je mets à [défie de] faire pis, en l'état où nous sommes, Le sort et les démons, et les dieux et les hommes» (v.

427-428). Et Horace le répète, mais sur un ton de pur constat : «Notre malheur est grand; il est au plus haut point• (v.

489). Par une ironie du sort habituelle dans l'univers tragique, c'est au moment où le malheur semble être évité qÙ'il atteint son sommet.

Le choix de Rome a été fait entre les deux actes O'action continue dans cet intervalle: c'est ce qui oppose selon les théoriciens les divisions en actes et les dMsions en scènes) et nous l'apprenons dès le troisième vers de la première scène. Habilement on ne nous apprend celui d'Albe que dans la scène suivante, qui frappe par sa concision: demande d'information limitée au minimum (deux vers), réponse lapidaire qui tient en un hémistiche (v.

411).

Toute la substance de la séquence organisée par ces deux nouvelles est dans la réaction des personnages: avec ces trois scènes se noue l'intrigue, mais l'intérêt dramatique est tout autant dans l'opposition entre les deux personnages. Première apparition d'Horace Le début du second acte est un moment privilégié dans le théâtre du XVll 0 siècle pour l'apparition d'un nouveau personnage qui bénéficie de toute l'attention du spectateur, reposée par l'entracte.

Horace, absent d'un premier acte plein de craintes et d'espérances, n'apparaît qu'une fois élu entre tous comme champion de Rome.

Ses premières paroles, suivant une longue tirade de Curiace, sont attendues avec impatience et, après quelques propos polis, son caractère se révèle vite : «Mais quoique ce combat me promette un cercueil, La gloire de ce choix m'enfle d'un juste orgueil» (v.

377-378) La scène 2 : l'art du coup de tonnerre Entre deux scènes où alternent les tirades, où les personnages explicitent leur position, la courte scène 2 introduit un rythme tout différent : répliques brèves, rapidité de l'information, importance du non-dit que Flavian souligne par un «mot» de théâtre qui clôt la scène par une sorte de point de suspension lourd de sens (v.

421).

La scène est creusée par un silence: la parole de Curiace semble un moment éteinte, réduite à un monosyllabe incrédule (v.

411) qui montre sa stupeur.

Le vers 412 décrivant son «front triste» et ses «regards sévères» valent comme indications scéniques.

Le théâtre classique limitait le plus possible les indications scéniques, le texte devant se suffire à lui-même (Corneille a parfois regretté cette contrainte), et il n'est donc pas rare qu'un personnage les prenne à son compte (voir v.

571).

Le vers est donc moins une question de Flavian qu'un silence expressif de Curiace.

Dans le vers 411, l'alexandrin est brisé par laquestion de Curiace, sertie de deux répliques de Flavian; la deuxième est inutile puisqu'elle ne fait que répéter la première: moment de «sur-place», bref arrêt de la dynamique du dialogue, comme après un coup de tonnerre; mais aussi formation d'un chiasme, figure de la symétrie et de l'inversion. Faisant écho avec le vers 349 qui nous apprenait le choix de Rome («vos frères et vous»), le vers souligne la symétrie entre les Horaces et les Curiaces en même temps qu'elle en annonce l'affrontement Mur: combat entre alter ego dont les rimes des vers 419-420 offrent une image sonore. Horace et Curiace: de l'opposition à l'adieu Dans la première scène, la situation impose la modestie à celui qui félicite et à celui qui est félicité, mais ces deux modesties prennent déjà des couleurs bien différentes.

Curiace, dans les vers 365-370, n'est pas forcément sincère: il peut s'agir surtout d'une exagération rhétorique pour faire l'éloge d'Horace.

Mais il n'hésite pas, en tout cas, à évoquer la défaite de sa patrie.

Quand Horace fait montre d'une momentanée modestie, c'est au contraire pour mieux louer le courage romain (v.

371-376).

Sa tirade s'infléchit d'ailleurs vite vers une certitude en soi-même où la modestie n'apparaît plus que comme une courtoisie obligée (v.

377-380): «J'ose espérer beaucoup de mon peu de vaillance», et qui finit en une quasi-certitude en la victoire (v.

385-388), appuyé par une maxime (v.

385) et s'opposant à la fin de la tirade de Curiace.

Dans les paroles de ce dernier, pas de principes intangibles et impersonnels, mais au contraire l'émotion et la subjectivité et, à la fin de la scène, toute une rhéto­ rique 0nterjections, phrases exclamatives et fausses interrogations) et tout un vocabulaire de la plainte qui rapproche Curiace de Sabine et de Camille: «De tous les deux côtés j'ai des pleurs à répandre» (v.

396), le lien d'amitié, rappelé à plusieurs reprises {v.

390, v.

403, v.

407), remplaçant celui de l'amour et du mariage.

Quand Curtace donnera à Flavian sa réponse, il récapitulera ces liens sacrifiés: «l'amitié, l'alliance et l'amour» (v.

418). Dans la scène 3, l'Ôpposition entre les deux personnages va se creuser jusqu'à les séparer.

Dans une première partie, ils évoquent leur situation commune en employant la première.... »

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