ACTE Ill Les deux questions essentielles de la pièce, celle de Dieu et celle de l'honneur, s'y font jour. L'acte...
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ACTE Ill
Les deux questions essentielles de la pièce, celle de Dieu et
celle de l'honneur, s'y font jour.
L'acte Ill commence comme l'acte 1 : à l'éloge du tabac
correspond celui de la médecine, induit par le déguisement
de Sganarelle.
Ce préambule permet d'introduire la question
primordiale posée par Sganarelle à son maître : en quoi Don
Juan croit-il {scène 1) ? La rencontre d'un homme miséra
ble et pieux, qui demande la charité, illustre les principes de
l'athéisme du grand seigneur {scène 2).
Puis Don Juan porte
secours à Don Carlos, un frère d'Elvire lancé à sa poursuite
sans le connaître {scène 3).
Mais le second frère arrive et
veut venger sa sœur en tuant Don Juan sur l'heure, ce qui
entraîne une altercation entre les deux frères.
Don Carlos
finit par persuader son frère de remettre à plus tard leur ven
geance {scène 4).
La fin de l'acte se referme sur le couple
Sganarelle/Don Juan, et laisse place au surnaturel.
La sta
tue du Commandeur, tué par Don Juan précédemment,
acquiesce à l'invitation à dîner que lui lance par défi son
meurtrier {scène 5).
ACTE Ill, SCÈNE 1
(DON JUAN, SGANARELLE)
Plutôt que d'échanger son habit avec celui de son maître,
Sganarelle a fait prévaloir l'idée d'un double déguisement.
Don Juan l'interroge sur cet« attirail ridicule» qui, il en con
vient, dissimule à merveille l'identité de son valet.
Il s'agit,
explique Sganarelle, de « l'habit d'un vieux médecin [...]
laissé en gage» qu'il a racheté.
Mais la considération qu'il
en obtient le dédommage amplement : cinq ou six paysans
sont venus le consulter« ainsi qu'un habile homme».
Et Sga
narelle, voulant« soutenir l'honneur de [son] habit» a dis
cuté leur cas et distribué des remèdes« à l'aventure» ! Tant
mieux si les malades guérissent ! Sganarelle a bien fait, répli-
que Don Juan.
Les vrais médecins n'en savent pas plus que
son valet et « leur art est pure grimace ».
Sganarelle, sur
pris, interroge son maître: ne croit-il pas non plus en la méde
cine, aux miracles du séné et du vin émétique? Et Sganarelle
d'expliquer que les effets en sont si merveilleux qu'il a vu
récemment un malade à l'agonie à qui on s'avisa d'en don
ner : il en mourut« tout d'un coup ».
« Voulez-vous rien de
plus efficace? » conclut Sganarelle.
Inspiré par son habit de médecin qui lui « donne de
l'esprit », Sganarelle interroge alors son maître sur ses con
victions profondes.
Est-il possible qu'il ne croie point du tout
au Ciel, à ('Enfer, au diable à la vie éternelle, au « Moine
bourru » ? Don Juan se tait et ricane.
Mais à quoi croit-il
donc? « Je crois, répond Don Juan, que deux et deux sont
quatre [...] et que quatre et quatre sont huit ».
Sganarelle
se lamente : la religion de son maître est donc I'arithméti
que ! Et voulant persuader son maître de son erreur, il se
lance alors dans une longue démonstration de l'existence
de Dieu : qui a fait ces arbres, ces rochers, cette terre, et
ce ciel que voilà là-haut? Le corps de l'homme n'est-il pas
une machine admirable? Don Juan, toujours muet et ironi
que, attend patiemment, que Sganarelle ait fini son« raison
nement ».
Sganarelle � agite, veut prouver l'extraordinaire
fonctionnement du cerveau humain.
Emporté par son élo
quence, il joint le geste à la parole, et, à force de gesticula
tions, ...
tombe par terre.« Voilà ton raisonnement qui a le
nez cassé », conclut laconiquement Don Juan, tandis que
Sganarelle, vexé, abandonne la partie.
Ils s'avisent tout à
coup qu'ils se sont égarés, et Sganarelle appelle à grands
cris un homme qui passe au loin.
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Une errance symbolique
Du point de vue dramatique, la scène n'apporte rien.
Don Juan et
Sganarelle cheminent dans une forêt où ils s'égarent.
Mais cet égare
ment est peut être symbolique : Don Juan s'égare dans des amours
compliquées qui n'aboutissent pas.
Plus sûrement, Don Juan s'écarte
de la« droite voie » dont parle Dante au début de La Divine Comédie.
Lui aussi se trouve dans une « forêt obscure » ; il ne croit à rien, ce
qui l'éloigne de Dieu, et plus encore du commun des mortels, repré
senté par son valet.
Une journée bien remplie
Du point de vue de l'unité de temps, il semble que nous soyons en
fin d'après-midi.
Mais comment, depuis le matin, Don Juan a-t-il pu
fuir Done Elvire, faire des plans d'enlèvement, échapper à un naufrage,
passer un moment chez Pierrot, courtiser Charlotte et Mathurine, tan
dis que Sganarelle trouvait chez un fripier un costume de médecin et
délivrait des ordonnances, avant de reprendre son voyage avec son
maître ?
Quoi qu'il en soit, la marche ininterrompue de Don Juan et Sgana
relle a une valeur essentielle : Don Juan est quelqu'un qui ne s'arrête
jamais, qui va droit à la catastrophe finale, et cette marche, sur le plan
dramatique, permet une série de rencontres.
La pièce est conçue
comme un défilé de personnages successifs, technique fréquente dans
les premières œuvres de Molière, comme Les Fâcheux.
La satire de la médecine
Elle n'est pas en situation comme dans les pièces suivantes de
l'auteur : Le Médecin malgré lui, L'Amour médecin, Le Malade imagi
naire.
C'est un pur divertissement, amené...
par un costume ! Mais
elle a une fonction de contraste.
À cette époque, la médecine, qui repose
davantage sur les œuvres des grands médecins de I'Antiquité (Hippo
crate, V• siècle av.
J.-C, et Gallien, 11• siècle ap.
J.-C), que surYexpé
rimentation, est encouragée par l'Église.
Ainsi, la médecine, considérée
comme article de foi, faute de recherche expérimentale et d'efficacité,
est mise par Sganarelle sur le même plan que la religion.
Le vocabu
laire de la discussion les assimile plaisamment.
Pour Don Juan, la méde
cine est une des« grandes erreurs 11 humaines ; pour Sganarelle, Don
Juan a l'âme mécréante, parce qu'il ne croit pas au séné ou au vin
émétique.
« Ses miracles ont converti les plus incrédules esprits », et
Sganarelle en a vu des effets merveilleux.
On connaît les démêlés de
Molière avec les médecins, qui croient encore, à la suite d'Hippocrate
et Galien, à la théorie des humeurs : bile, atrabile, pituite et sang, dont
l'équilibre conditionne la santé.
Les saignées et les purgations, qui
sont censées rétablir cet équilibre, sont les grands remèdes du temps
(cf.
le ballet des clystères dans Monsieur de Pourceaugnac, et le der
nier acte du Malade imaginaire).
Enfin, la description par Sganarelle
de cette merveilleuse« machine» qu'est l'homme renvoie aux premières
dissections.
La profession de foi de Sganarelle
Il est remarquable que, dans cette scène, le personnage éponyme*
de la pièce ne soit que le faire-valoir de son valet, un peu comme dans
Jacques le Fataliste et son maÎtre, de Diderot.
Or Sganarelle exprime
ici une forme de religion populaire, qui n'est pourtant pas sans rapport
avec celle des grands esprits du temps.
Certes, il est superstitieux :
il croit au Moine bourru, au Loup garou.
Mais, plus fondamentalement,
l'absence de croyance est pour lui incompréhensible.
Sans être allé
aux« écoles», il défend, comme le philosophe Gassendi (1592-1655),
l'argument des causes finales, qui consiste à « expliquer un fait en
le faisant connaître comme moyen d'une fin», en l'occurrence à infé
rer des merveilles de la création l'idée du Créateur.
Face à cette foi
naïve et inébranlable, Don Juan se présente comme un matérialiste
qui ne croit qu'aux valeurs de la raison et de la science, presque un
disciple de Descartes !
ACTE Ill, SCÈNE 2
(DON JUAN, SGANARELLE, UN PAUVRE)
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Don Juan et Sganarelle, égarés dans la forêt, avisent un
mendiant et lui demandent le chemin qui mène à....
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