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ACTE Ill, SCÈNE 1
hi�1•1t*,hi
Monologue de Sabine.
Elle voudrait pouvoir ne penser qu'à
son frère ou bien qu'à son mari, mais c'est impossible (v.
711718).
Elle s'exhorte à ne considérer que la gloire commune aux
deux combattants, puis invoque la Fortune contre laquelle elle
sera ferme (v.
719-738).
Mais elle retombe aussitôt dans les
ténèbres de l'angoisse, puis invoque les dieux qui lui accor
dent cruellement la paix qu'elle avait désirée (v.
739-764).
COMMENTAIRE
Un monologue à alternative
rigoureusement construit
Dans certains monologues le personnage exprime son débat intérieur,
son partage entre deux sentiments contradictoires ou l'obligation de choi
sir entre deux actions incompatibles : ce sont les monologues à alternative,
dont plusieurs sont célèbres dans l'œuvre de Corneille, celui d'Émilie dans
la première scène de Cinna hésitant entre son amour et la vengeance ou
celui (dans Po/yeucte) de Pauline partagée entre l'espoir et la crainte, lui
aussi ouvrant l'acte Ill.
La construction de ce monologue est nettement marquée.
Une première
partie qui sert d'introduction oppose les quatre premiers vers aux quatre
suivants autour d'une exclamation pivot («mais las »).
Le premier vers («Pre
nons parti,,mon âme, en de telles disgrâces.
») étant repris par le cinquième
(«quel parti prendre en un sort si contraire? »), la question sans réponse
venant annuler la résolution inttiale.
Aux impératifs d'exhortation à soi-même
(cinq dans les quatre premiers vers) s'oppose l'interrogation ou le constat
de l'impossibilité d'une réponse.
Cette opposition stylistique sera reprise et développée dans la deuxième
partie qui oppose seize vers d'exhortation à soi-même (v.
719-734), où
abondent les impératifs en début de vers ou d'hémistiche qui organisent
les phrases, à vingt vers où s'écroulent les résolutions de Sabine (v.
739758), avec une inversion (v.
756) et le changement d'un seul mot («mort »
au vers 758 remplace «bras» au vers 734), ce qui souligne d'autant mieux
le renversement de perspective.
La construction parallèle et antithétique
des deux mouvements est soulignée par une autre reprise avec inversion,
celle du vers 726 par le vers 752 (qui contient ce que la rhétorique appellerait une antimétabole).
Chacun des mouvements est suivi en outre d'une
invocation : au défi à la Fortune où Sabine parle comme un philosophe
stoïcien (v.
735-738) répondent des reproches aux dieux (v.
759-764) où
elle parle en héroïne tragique accablée par le sort.
Délibération qui n'ouvre sur aucune décision, méditation qui revient à
son point de départ, effort de la pensée logique qui n'aboutit qu'à un sentiment approfondi d'accablement, cette tirade, malgré sa rigoureuse construction, est surtout un passage lyrique*.
Un passage lyrique
Si les reprises structurent le monologue, elles créent aussi des répétitions
et des entrelacs qui bercent l'oreille et font de cette tirade un chant de douleur.
La variation la plus lancinante est celle des vers contenant les mots
«femme» et «sœur» (v.
712), «femme» et «fille» (v.
732, v.
756), «époux» et
«frère» (v.
716, v.
750).
Lassociation de ces mots constitue le leitmotiv du
déchirement de Sabine entre les deux camps, qui apparai1 dès la première
scène, court tout au long de la pièce, mais trouve ici son orchestration la
plus serrée.
La variation des types de phrases (impératifs, interrogations et fausses
interrogations, exclamations, invocations) participent de ce lyrisme, modulant musicalement le texte.
Quand Sabine s'adresse à l'illusion (v.
739748), ainsi personnifiée*, les images se multiplient, s'organisent en antithèse autour de l'opposition de la lumière et de la nuit («clarté» rime avec
«obscurité»), accompagnée par l'opposition de timbre é-i / a-ou.
Le monologue est en effet souvent le lieu du lyrisme : le personnage,
seul, s'abandonne à ses sentiments, à ses doutes, le temps de l'action suspendu un moment.
Ainsi l'auteur tend parfois à quitter le «poème dramatique» pour le «poème lyrique», adoptant par exemple les stances, suite de
strophes du même type (celles de Rodrigue, dans la scène 7 de l'acte I du
Cid sont célèbres).
Chez Corneille, les vers tendent à s'organiser alors par
groupe de quatre, comme c'est le cas ici pour l'introduction (v.
711-718).
Les reprises de vers rappellent ainsi certaines formes....
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