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ACTE V - Scènes 5 et 6 Introduction Pendant longtemps dans la pièce, Don Juan est empêché de souper. Tenons...

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« ACTE V - Scènes 5 et 6 Introduction Pendant longtemps dans la pièce, Don Juan est empêché de souper. Tenons cette obsession pour fondamentale : Don Juan ne parvient pas à manger comme il a de plus en plus de mal à réussir ses séductions.

Car manger et parler explicitent la séduction orale de Don Juan : Don Juan parle pour dévorer, il envoûte ses victimes pour les consommer.

C'est à un repas qu'ironiquement il invite la statue de pierre : comment pourrait-elle manger? Et, d'ailleurs, si elle partageait le repas du jouisseur, ne se compromettrait-elle pas à sa table maudite? Contre toute attente, la statue accepte l'offre; ou plutôt elle retourne l'invitation et place Don Juan dans les circonstances d'un repas que le Commandeur a préparé spécialement pour le damné. Rien pourtant ne fait reculer Don Juan.

Il s'endurcit dans sa faute jusqu'au point de non retour, jusqu'à vouloir abattre d'un coup d'épée le spectre qui, le dernier, voudra le convaincre de renoncer.

Arrêté par le fantôme de la femme voilée qui redouble le retour d'Elvire revêtue elle aussi d'un voile (N 6), Don Juan résiste.

La femme voilée se mue en image du Temps pour signifier que la vie de Don Juan va dans l'instant être fauchée.

Le temps file entre les doigts du séducteur qui, main tendue, ne contrôle sa mort qu'en acceptant jusqu'au bout d'assumer sa vie.

Alors la _ Statue le terrasse, Don Juan s'effondre et Sganarelle, son valet, reste seul en scène sans salaire. a.

Le spectre : la mort et la machine Don Juan voit un spectre se dresser devant lui: fantôme de toutes les femmes déshonorées et perdues par le bourreau des âmes, le spectre « incarne » la culpabilité et le ressentiment. Pourtant, surgi de l'au-delà et du surnaturel, le spectre offre encore à Don Juan une issue à sa vie de scandales.

Jusqu'au dernier instant, Don Juan aurait pu bénéficier de la grâce.

Mais il entend mal les paroles, il s'attache juste à la voix.

Don Juan« veut voir» ce qu'est le spectre, fendre l'enveloppe des apparences et pénétrer au cœur de la vérité.

Au nom de la raison souveraine, il ne pense qu'à identifier le phénomène qu'il ne comprend pas (« spectre, fantôme, ou diable, je veux voir ce que c'est» ). Confiant dans la faculté de pénétration de ses yeux (c'est par le regard que Don Juan évalue le monde), il force l'illusion à se dissiper; il veut entrer dans les coulisses de ce qu'il croit être un événement de théâtre sans s'apercevoir que le spectre n'est qu'un spectre, pur effet, magie insaisissable et inaccessible par la raison.

Moins rationaliste, plus proche de la superstition qui accrédite les mystères extravagants de l'univers, Sganarelle, lui, croit.

Il sait qu'il n'y a rien au-delà de l'étrangeté de cette apparition sinon la puissance invisible de Dieu. L'aveuglement obstiné de Don Juan est tel qu'il ne comprend pas même que le spectre est d'une certaine manière son double, comme lui une apparition évanescente qui va et vient.

Don Juan vient rencontrer son destin qui lui apprend qu'il n'est pas plus tangible qu'une ombre derrière laquelle ne se trouve aucune réalité. Sganarelle insiste pourtant auprès de son maître pour qu'il évite sa tragédie.

Le message du spectre est un des moyens d'accès à la voix de Dieu sous la forme d'une menace et d'une prophétie.

Le valet joue son double rôle structurel : il introduit du comique dans ce moment fantastique et dramatique.

Mais il est aussi, dans le drame, impuissant à faire entendre raison à son maître. b.

L'épreuve héroïque Par une nouvelle JJ}étamorphose fantastique, le spectre revêt l'habit du Temps.

Don Juan se heurte donc au temps qu'il a outrageusement méprisé. Le séducteur suit maintenant les échéances d'une vie de mortel alors qu'il s'imaginait indestructible, humain plus qu'humain.

Il croyait se maintenir durablement dans la répétition de ses instants de jouissance.

Homme du présent, du plaisir le plus immédiatement ressenti, Don Juan ignore le passé (il oublie ses victimes et ne regrette rien) et le futur (il ne prend pas garde à sauver son âme). La figure armée de sa faux le met en demeure d'honorer sa dette au temps qu'il a, par trop de plaisir, littéralement usé.

Don Juan espère encore se battre contre la vision; mais la faux du Temps est plus indestructible que l'épée du simple mortel.

Don Juan brasse le néant, il est impuissant à ramener l'irréel qu'il ne saisit pas à la réalité où il a prise.

Il est comme ces libertins qui, pour éradiquer la superstition, s'obstinent à expliquer par les mathématiques (2 et 2 font 4) les prodiges de la nature.

Mais il échoue à rationaliser l'irrationnel. Sganarelle, lucide et désespéré, conscient maintenant que la vie est en jeu, réitère la demande du spectre.

Mais Don Juan ne flanche pas: il s'affirme devant la mort.

Son opiniâtreté est orgueilleuse : fierté personnelle accrue par la volonté de ne pas faillir à sa réputation, à son propre mythe(« il ne sera pas dit...»). L'épreuve de la mort est vécue comme une épreuve héroïque: tandis que, au cours de l'acte V, Don Juan avait accepté le refuge du masque, pour lui dégradant, de l'hypocrisie conformiste, nous le retrouvons ici véritablement grandi par le combat perdu de la mort.

Don Juan regagne son panache et efface les atermoiements de sa fin de vie pour s'élever à la hauteur de son mythe.

Homme de la négation absolue(à Dieu, aux usages sociaux, aux conformismes de toute nature ...), Don Juan prononce, et pâr deux fois, le non du refus(« non, non, il ne sera pas dit...»).

Il refoule son inquiétude et brave la force incompréhensible qui l'assaille. c.

La fin de Don Juan À la suite de ces premières expressions de l'au-delà, intervient, comme annoncé, la statue du Commandeur.

Elle arrête Don Juan dans son élan: Don Juan: [ ...] Allons, suis moi [à Sganarelle] La Statue : Arrêtez, Don Juan. Cet arrêt ordonné annonce la mort qui fait obstacle.

Il met fin à la course.... »

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