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Algérie 1988-1989 Après les émeutes Crise profonde d'un régime en rupture avec son peuple, sanction de vingt-cinq ans d'erreurs, et...

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« Algérie 1988-1989 Après les émeutes Crise profonde d'un régime en rupture avec son peuple, sanction de vingt-cinq ans d'erreurs, et timides espoirs d'"ouverture politique": si 1988 restera une année noire pour l'Algérie, elle aura aussi été, paradoxalement, celle où l'hégémonie politique exercée par le FLN a pris fin et où, pour la première fois, la société civile a repris la parole après un quart de siècle de silence. Tout a éclaté - à défaut de commencer puisque des grèves se multipliaient depuis trois semaines - le 5 octobre 1988.

Pendant six jours, de violentes émeutes ont secoué Alger avant de se propager dans plusieurs villes.

Des vagues de jeunes ont déferlé dans les rues, lançant des pierres contre les policiers, brûlant des pneus et des voitures, faisant voler en éclats cabines téléphoniques et panneaux publicitaires et s'en prenant à tout ce qui représente l'État, le Parti ou l'opulence.

Des mesures sans précédent dans l'histoire de l'Algérie indépendante allaient être proclamées: état de siège, couvre-feu, création d'un "commandement militaire".

Des scènes oubliées depuis la guerre de libération ont resurgi: soldats en tenue léopard et chars devant les bâtiments stratégiques.

Puis, tout a basculé.

En tirant sur la foule, l'armée "nationale populaire" a offert aux Algériens et au monde l'image d'une dictature. Plus de 500 morts Le bilan fut lourd: plus de 500 morts selon des sources médicales, loin en tout cas des 159 annoncés officiellement.

Le 10, après une incroyable vacance du pouvoir, un discours du chef de l'État, Chadli Bendjedid ramena le calme en promettant des "réformes politiques". Si la pénurie des denrées de première nécessité - en particulier la semoule - a mis le feu aux poudres, l'origine du mal remonte à plus loin.

Car l'Algérie paye les tares du "modèle boumédiéniste": étatisation à outrance et "industrie industrialisante" qui a entraîné une faillite complète de l'agriculture, aggravant pénuries et marché noir.

La crise économique aiguë a accéléré l'explosion: la dégringolade des prix du pétrole (chute de 40% des recettes d'exportation) a brisé la croissance - 1% en 1986-1987 -, faisant tomber celle-ci pour la première fois depuis l'indépendance en dessous d'un taux d'expansion démographique fou de 3,2%, alors que le nombre des chômeurs passait de 658 000 en 1984 à 1 200 000 en 1987. La "malvie" de la jeunesse marginalisée des grandes villes, privée de toute perspective d'avenir - les "gardiens de murs", comme on appelle ces jeunes qui passent leurs journées appuyés aux murs des cités -, rendait l'explosion inévitable.

Dans un pays où le sentiment de la base reste très égalitariste, l'arrogance d'une classe de profiteurs et de privilégiés du régime étalant sa richesse et cachant mal sa corruption quand la rigueur et l'austérité remplaçaient le fameux "État-providence", a aggravé la rupture avec la population. Indépendamment de ce contexte économique et social, les luttes de clans, à leur paroxysme à l'approche du VIe congrès du FLN (Front de libération nationale) ont pesé lourd.

Utilisant un malaise social aigu, certaines franges du Parti et de l'armée en ont appelé, dès septembre, à la rue pour trancher un conflit de sommet et déstabiliser Chadli Bendjedid et son entourage.

Retournant habilement la situation, sachant que l'Algérie n'échapperait pas à des réformes économiques et politiques profondes, celui-ci s'est, à son tour, servi de la révolte pour marginaliser ses adversaires.

Utilisant les demandes de la "rue" comme un véritable levier, Chadli a compris qu'il devait aller vite.

Il fallait éviter ainsi que le scepticisme ambiant aboutisse à une nouvelle explosion, mais surtout profiter du "coup" subi par un Parti laminé au sortir des émeutes et par une armée qui avait perdu sa "légitimité" en tirant sur la foule. Les mesures de "la Présidence" Dès lors, la chronologie des mesures prises par "la présidence" à partir du 12 octobre 1988, date de la levée de l'état de siège et de l'annonce d'un référendum le 3 novembre, portant sur une modification de la Constitution, avait de quoi donner le vertige.

Le 24 octobre, une profonde réforme du FLN appelé à perdre son "hégémonie politique" même si le "multipartisme" était exclu, fut annoncée.

Limogeage le 29 octobre des hommes - Chérif Messaadia et Lakehal Ayat - qui symbolisaient les deux institutions les plus honnies du pays, le Parti unique et la toute-puissante police politique, la Sécurité militaire (SM).

Le 3 novembre, la première réforme constitutionnelle adoptée par référendum consacrait la séparation du Parti et de l'État.

Nommé Premier ministre le 5, Kasdi Merbah - qui dirigea la SM sous Boumédiène - présentait, une semaine plus tard, un gouvernement composé de nombreux technocrates, mais où "l'ouverture politique" était remise à plus tard.

Il fallait, en effet, rassurer ceux qui refusaient toute libéralisation inconsidérée du système.

Les 27 et 28 novembre, l'obligation de faire face à la rue, d'assurer la survie.... »

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