Analyse du sujet et problématisation : Le sujet porte sur une forme particulière de réécriture : l’adaptation cinématographique d’une œuvre...
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Analyse du sujet et problématisation :
Le sujet porte sur une forme particulière de réécriture : l’adaptation
cinématographique d’une œuvre littéraire, c’est à dire la transformation d’une œuvre
écrite en film, sa transposition du livre à l’écran.
Les genres littéraires concernés par
cette transposition sont essentiellement le théâtre ( mais peut-on véritablement parler de
transposition puisque le théâtre est fait pour être représenter et témoigne donc d’une
parenté certaine avec le cinéma ; par ailleurs, le théâtre ne doit être envisagé ici qu’en
tant que livre, donc dans sa version écrite et non représentée) et surtout le roman et
avec lui toutes les formes de récits ( nouvelles, contes, etc…).
Le sujet n’envisage ce phénomène de réécriture de transposition trans-générique
que de façon partielle, du point de vue des limites, c’est-à-dire sinon des échecs du
moins des difficultés rencontrées lors d’une telle entreprise.
Notons que le terme de « limites » désigne, au sens premier, une ligne de
démarcation, une frontière.
Problématique : En quoi la transposition cinématographique d’une œuvre
littéraire est-elle difficile ? Quelles sont les frontières entre œuvre
cinématographique et œuvre littéraire ?
Ce sujet met finalement en jeu l’imperméabilité des frontières et le rapport hiérarchique
entre le 7ème art et l'art littéraire.
Il invite à examiner les apports et intérêts des deux
disciplines et à statuer sur les notions d’art majeur et d’art mineur.
I)
La transposition à l’écran comme appauvrissement du récit
Les adaptations à l’écran d’œuvres littéraires s’avèrent souvent déceptives elle sont
obligées de sélectionner des passages, de modifier certains pans de l’intrigue de
l’œuvre…etc.
Elles sont dès lors davantage limitées que les livres.
1)
La richesse narrative d’une œuvre littéraire ne peut être
totalement représentée à l’écran
Dans une œuvre littéraire, l’écrivain laisse souvent libre cours à son imagination et
peut se laisser aller aux développements les plus farfelus.
Le romancier, en particulier,
lorsqu’il conçoit son œuvre n’a pas à l’esprit les contraintes nécessaires à l’adaptation
cinématographique : la richesse thématique et descriptive d’un roman ne peut donc se
retrouver, à l’identique dans un film.
Le roman peut restituer, par exemple, toutes les
nuances abstraites de la psychologie humaine, ce qu’un réalisateur va avoir du mal à faire
ressortir à l’écran, à moins de superposer à l’image des passages lus du roman, témoignant
ainsi de la supériorité de ce dernier.
Il en est de même pour la transposition
cinématographique de contes, type d’œuvre littéraire multipliant les extravagances parfois
difficiles à mettre en image.
Cf.
Le jugement de Simone de Beauvoir sur les adaptations de romans à l’écran :
« l'adaptation d'un roman à l'écran est presque toujours regrettable.
Le visage d'Emma
Bovary est indéfini et multiple, son malheur déborde son cas particulier ; sur l'écran je
vois un visage déterminé, et cela diminue la portée du récit.
»
Ex :
·
les premières adaptations de Frankenstein de Marie Schelley n’ont pu,
par manque d’avancée technologique dans le cinéma, restituer fidèlement
la dimension fantastique du roman ( le fantastique paraît artificiel) : cf.
la
première adaptation en 1910, en film muet, par J.
Searle Dawley
2)
Le suspense et l’intrigue littéraires sont souvent
irreprésentable en totalité à l’écran.
Les adaptations cinématographiques sont souvent contraintes à des impératifs de
durée et de budget, les empêchant ainsi de transmettre les moindres détails de l’intrigue
d’une œuvre littéraire, d’autant plus lorsque celle-ci est longue.
Le réalisateur doit choisir
certains passages qui lui semblent les plus marquants et en laisser d’autres de côté.
Ce
choix influe parfois sur le suspense de l’œuvre qui apparaît comme amoindri dans
l’adaptation.
Ces choix tendent d’ailleurs parfois à trahir le message de l’écrivain, le
réalisateur tendant à s’approprier l’œuvre littéraire afin de lui faire véhiculer un message
qui lui est propre.
Ceci se présente pourtant comme une limite que la probité interdit de
franchir lorsque l’on emprunte son œuvre à un auteur.
·
Adaptation du Da Vinci Code très controversée, relevant le défi de
représenter en 2h30 les 574 pages du roman de Dan Brown : l’intrigue perd de
son suspense et de sa richesse.
·
Adaptation du roman à succès de Khaled Hosseini, Les Cerfs-Volants de
Kaboul, par Marc Forster qui retrace, à travers le récit d'une amitié brisée, le
destin de l'Afghanistan depuis 1979.
Le film a été jugé, par certains
journalistes, comme véhiculant « une vision manichéenne et totalement proaméricaine de l'histoire, renvoyant dos à dos les communistes et les talibans,
vantant les vertus du courage, de la virilité, et de la réussite sociale.
» (Le
Monde)
·
Terence Fisher, pour réaliser Le Chien des Baskerville, dispose d'un petit
budget.
Il supprime donc la scène de poursuite à travers Londres ainsi que le
personnage annexe de Laura Lyons.
II)
L’adaptation cinématographique : l’impossibilité de
transposer la relation privilégiée entre le lecteur et l’œuvre
1)
Le livre stimule davantage l’imagination du lecteur
Le livre, ne représentant les choses que par les mots, tend à stimuler l’imagination
du lecteur qui se représente à sa façon les personnages et les lieux.
L’adaptation à l’écran
empêche ce plaisir de la rêverie et de l’imagination en proposant une image unique et fixe
qui parfois provoque la déception chez le spectateur.
C’est souvent le cas lors d’adaptation
de romans fantastiques se déroulant dans des paysages totalement irréels, appelant des
représentations propres à l’imagination particulière de chaque lecteur ( cf.
adaptation du
Seigneur des Anneaux ou de Harry Potter).
2)
Le cas particulier de l’adaptation au cinéma d’une pièce
de théâtre : une rupture du lien sacré
spectateur/représentation
Le théâtre apparaît comme un genre hybride fondé à la fois sur un texte littéraire,
un livre et sur une représentation scénique.
L’adaptation cinématographique d’une pièce
de théâtre peut donc apparaître comme aisée puisque le théâtre est par définition un genre
destiné à être représenté et dans lequel les contraintes de mise en scène sont prises en
compte.
Cependant l’adaptation cinématographique d’une pièce de théâtre trouve aussi
ses limites car elle ne peut parvenir à recréer le lien quasi sacré entre scène et salle, entre
représentation et spectateur, l’écran s’interposant entre les deux....
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