Article encyclopédique L'UKRAINE AU XXe SIÈCLE Au début du xxe siècle, dans l’Empire russe, trois Ukraine commencent à s’individualiser :...
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Article encyclopédique
L'UKRAINE AU XXe SIÈCLE
Au début du xxe siècle, dans l’Empire russe, trois Ukraine commencent à
s’individualiser : une Ukraine industrielle, regroupant, de Kharkov (Kharkiv)
jusqu’au Donets, une forte minorité russe ; une Ukraine agricole, avec pour
capitale Kiev, qui rassemble à la fois la bourgeoisie locale et les élites
intellectuelles ukrainiennes, auxquelles le pouvoir tsariste, depuis les
fameuses lois de 1863 et 1876 (prohibition de la langue ukrainienne en tant que
langue scolaire, puisque selon la circulaire du ministre Petr Valuev, « la
langue ukrainienne n’existait pas, n’avait jamais existé et ne pouvait pas
exister »), interdit toute expression nationale ; une Ukraine occidentale «
périphérique » (Podolie, Volhynie, Ruthénie subcarpatique), intégrée à l’Empire
austro-hongrois, où s’exprime avec le plus de force - et avec la bénédiction des
autorités locales - le sentiment national ukrainien.
La situation
ethno-politique de l’Ukraine est rendue encore plus complexe par l’existence,
dans les villes, d’une forte minorité juive, immortalisée par les nouvelles
d’Isaac Babel (Contes d’Odessa), une partie de l’Ukraine étant - à l’instar de
la Biélorussie - « zone de résidence » pour les Juifs de l’empire.
Révolution sociale et nationale.
Les révolutions de 1917 libèrent, ici aussi, les aspirations nationales, et
révèlent l’extraordinaire complexité des données ukrainiennes.
Durant quatre
années (1917-1921), l’Ukraine est un véritable « laboratoire expérimental » de
toutes les émancipations politiques, sociales et nationales comme de toutes les
oppositions au nouveau régime bolchevique.
Coexistent, au moment même où la
région est successivement occupée par les Allemands, puis par les Polonais, un
mouvement national, la Rada, mené par l’intelligentsia, mais rassemblant un
éventail très large d’Ukrainiens, qui proclame - contre Moscou l’autodétermination de l’Ukraine ; un mouvement paysan, dirigé aussi bien contre
les Rouges que contre les Blancs, et dont l’anarchiste Nestor Makhno (1889-1935)
incarne les aspirations libertaires les plus extrêmes ; un mouvement ouvrier
bolchevique, russifié et très minoritaire, mais réclamant, lui aussi, une
certaine autonomie par rapport à Moscou.
Au terme d’une révolution à la fois sociale et nationale d’une extrême
complexité, qui ne saurait être réduite à un appendice de la révolution russe,
l’Ukraine, pour s’être appuyée sur une Allemagne vaincue, sur une France trop
lointaine, sur la Pologne à l’heure où la Russie sortait finalement victorieuse,
mais aussi, et surtout, parce qu’elle était la région la plus riche de l’ancien
empire, perd définitivement une indépendance qu’elle semblait avoir acquise avec
la signature du traité de Brest-Litovsk entre la Russie et l’Allemagne en 1918,
et que la direction du Parti communiste de Russie (bolchevique) avait fait un
temps miroiter (fin 1919) en s’engageant à « convoquer le Congrès constituant
des soviets d’Ukraine, qui déciderait démocratiquement si l’Ukraine soviétique
serait indépendante ou non ».
La collectivisation forcée et l'invasion nazie
Après une brève période d’accalmie, marquée par une reconnaissance - limitée de l’identité ukrainienne (politique d’ukrainisation des cadres dans les années
1920, et tentative, sous la direction du bolchevik ukrainien Mikhaïlo Skrypnyk
(1880-1938), de construire un véritable État national ukrainien au sein de
l’Union), l’Ukraine est, plus que toute autre région, frappée à partir de 1929
par la collectivisation forcée des campagnes que le gouvernement central veut
exemplaire dans ce grenier à céréales de l’Union.
Pour briser une résistance
paysanne plus forte ici que nulle part ailleurs, le pouvoir central organise
dans les kolkhozes ukrainiens récalcitrants une véritable famine, qui fait plus
de cinq millions de victimes (1932-1933).
Ensuite, la direction stalinienne
liquide les cadres locaux du Parti comme ce qu’il restait de l’intelligentsia
ukrainienne, accusée de « nationalisme ».
En septembre 1939, l’URSS annexe l’Ukraine occidentale qui était, aux termes du
traité de Riga (mars 1921), revenue à la Pologne.
L’histoire de l’accueil
favorable réservé, dans les premiers temps de l’invasion nazie, aux Allemands
par une partie des Ukrainiens des régions rattachées de force à l’Union
soviétique à la fin de 1939 restera sans doute longtemps une des « pages
blanches » de l’histoire soviétique.
Seule la barbarie nazie, traitant les
Ukrainiens en « sous-hommes », allait ressouder Russes et Ukrainiens dans les
combats contre l’ennemi commun.
La vigueur du nationalisme ukrainien et de
l’opposition au bolchevisme se manifestent principalement en Ukraine
occidentale, où, dès juin 1941, l’Organisation des nationalistes ukrainiens
(OUN), dirigée par Stepan Bandera (1909-1950), s’engage contre l’« impérialisme
moscovite bolchevique », et proclame à Lvov (Lviv) un État ukrainien.
Néanmoins,
dans la mesure où les nationalistes aspiraient à faire de l’Ukraine un État
indépendant, alors que les nazis entendaient en faire une colonie de
l’impérialisme allemand, l’action de l’OUN, dans l’Ukraine occupée, était vouée
à l’échec.
En fait, dès 1942, l’Armée insurrectionnelle ukrainienne (UPA) mène
une lutte armée sur trois fronts - contre le pouvoir colonial nazi, contre
Moscou, contre la résistance polonaise antinazie.
Après la fin de la guerre,
cinq années seront nécessaires au régime bolchevique pour « pacifier » l’Ukraine
occidentale où résistent des maquis armés.
La réincorporation de ce territoire
au sein de l’Union soviétique s’accompagne de persécutions religieuses contre
les uniates, contraints de fusionner avec l’Église orthodoxe, de déplacements de
populations et de déportations massives.
À la mort de Staline, en 1953, les
Ukrainiens occidentaux constituent, avec les Baltes, l’un des plus importants
contingents « nationaux » du Goulag.
En 1954,....
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