Australie 1983-1984 Une gauche raisonnable "Hawke le Messie", "l'année Hawke": pour l'Australie, 1983 restera dans les annales comme celle de...

« Australie 1983-1984 Une gauche raisonnable "Hawke le Messie", "l'année Hawke": pour l'Australie, 1983 restera dans les annales comme celle de la venue au pouvoir du "sauveur" Robert (Bob) Hawke, Premier ministre travailliste élu lors d'une élection fédérale anticipée, le 5 mars 1983.

C'est que la récession a touché de plein fouet l'Australie, restée jusqu'alors relativement à l'abri de la crise mondiale.

Au terme des trente-quatre années de gestion de la coalition de droite (libéraux-Parti national), interrompues par une parenthèse travailliste en 1972-1975, les fermetures d'usines et les licenciements se sont succédé à un rythme accéléré.

Au début de 1983, le taux de chômage a dépassé les 10%, l'inflation a atteint 11% et la croissance économique, qui a connu une progression constante durant la décennie précédente, a stagné dans le marécage de la croissance zéro.

Dans ce contexte aussi peu encourageant, les électeurs ont massivement accordé leurs suffrages au Parti travailliste, qui contrôlait déjà quatre des six États du pays, et à Bob Hawke, au pragmatisme rassurant et promettant des réformes en douceur.

Dans sa marche au pouvoir, le Parti travailliste a eu en effet la sagesse de se choisir comme dirigeant, avant les élections, un modéré au charisme indéniable. Un pragmatisme rassurant Ce charisme n'a semble-t-il pas été altéré par le pouvoir.

Après un an à la direction du pays, Bob Hawke a atteint en effet des sommets de popularité inégalés: plus de 74% d'opinions positives.

Son secret: avoir mis fin à l'ère de Malcolm Fraser, son prédécesseur, caractérisée par la confrontation sociale, et mis en place un consensus parfaitement huilé qui lui a permis de se forger une image de conciliateur au-dessus des classes.

La "trêve" d'un an entre patronat et syndicats, que Hawke a réussi à instaurer, a flatté apparemment chez les Australiens le mythe toujours vivace d'une société idéale sans classes, qui puise ses sources dans l'ère "pionnier" de ce continent à l'histoire récente. Parallèlement à cette réussite sur le plan social, Hawke et les travaillistes peuvent aussi se vanter d'avoir relancé l'économie et obtenu les meilleurs résultats dans ce domaine depuis quinze ans.

À la fin de 1983, les prévisions annonçaient un taux de croissance de 7% pour l'année fiscale 1983/84, une baisse du chômage à 9,5% et de l'inflation à 6%.

Robert Hawke, dès son accession au pouvoir, a bénéficié de conditions particulièrement favorables, et notamment de l'amélioration de la conjoncture économique internationale.

Il a même reçu l'aide du ciel, puisque des pluies bienfaisantes ont mis fin à une éprouvante sécheresse de quatre années, provoquant une soudaine reprise de la production agricole, représentant presque la moitié des exportations. Bob Hawke a également bénéficié de la victoire du voilier Australia II dans l'America Cup.

Cette victoire inattendue a provoqué dans tout le pays une vague de ferveur patriotique que Bob Hawke, plus australien que nature, ancien buveur de bière inscrit au livre "Guiness" des records pour sa consommation naguère immodérée de cette boisson nationale, a su parfaitement capitaliser en accordant un jour férié à cette occasion.

De même, lors d'autres événements de la vie sociale australienne (Coupe Davis, test match de cricket, remise des oscars du cinéma, etc.), Bob Hawke était là, passant remarquablement à l'écran et utilisant à merveille les médias, donnant à voir à ses concitoyens une image, miroir d'eux-mêmes, d'un homme simple aux goûts simples, lui le boursier de la prestigieuse université britannique d'Oxford. Tout l'a prédisposé à son rôle de médiateur.

À 54 ans, Hawke a été l'avocat des syndicats australiens, puis pendant dix ans président du conseil des syndicats australiens (ACTU) qui a réuni sous sa bannière un mouvement ouvrier combatif, revendiquant le taux de grève le plus élevé au monde.

Ce lien étroit avec les syndicats a permis à Hawke de gagner à moitié son pari de mettre en place une socialdémocratie modérée. La pièce maîtresse du dispositif économique du Parti travailliste a été un accord sur les prix et les salaires conclu avant même les élections avec le Conseil des syndicats, traduction dans les faits du projet politique de consensus voulu par Bob Hawke.

Selon cet accord, le gouvernement s'est engagé à maintenir le pouvoir d'achat à long terme mais peut refuser des augmentations jugées insupportables pour file:///F/Lycée/angui/0/450131.txt[12/09/2020 18:50:49] l'économie, à un moment précis.

Le mouvement syndical, pour sa part, a accepté de.... »