Brésil 1988-1989 L'impasse L'année a été marquée par le net durcissement des revendications ouvrières, l'atomisation des formations politiques, une incertitude...
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Brésil 1988-1989
L'impasse
L'année a été marquée par le net durcissement des revendications ouvrières,
l'atomisation des formations politiques, une incertitude extrême sur les marchés
et l'inaction exaspérante des dirigeants, faisant resurgir, insidieuse, la
nostalgie du temps des militaires.
Alors que la situation économique n'a cessé
de se détériorer, le président José Sarney, de plus en plus isolé, a fait la
preuve qu'il n'est pas l'homme de la situation.
Tous les espoirs, mais aussi
toutes les appréhensions d'une population qui sent qu'elle a été trompée, sont
tournés vers les élections présidentielles, prévues pour le 15 novembre 1989.
Le "plan d'été" relance les grèves
Le Brésil traverse sa pire crise économique depuis cinquante ans.
En 1988, la
situation s'est nettement détériorée avec une croissance négligeable de 0,2%,
causée par un déclin de 3,2% de la production industrielle, et accompagnée d'une
inflation qui a atteint le taux officiel de 934% ; dès juillet 1988, il
dépassait 20% par mois.
Malgré la négociation entre patronat et syndicats d'un
"pacte social", en octobre, destiné à limiter à 26,5% la progression des prix,
l'inflation a poursuivi son ascension.
Devant la menace d'hyperinflation et la
vague d'augmentations décidées par le secteur privé, le gouvernement a été
obligé d'intervenir.
Lancé en janvier 1989, le "plan d'été" représente une tentative de stabilisation
plus orthodoxe que les précédentes ("plan Cruzado" de février 1986, "plan
Bresser" de juin 1987).
Après avoir décrété un sévère ajustement des prix, des
biens et services de base, le président José Sarney a annoncé le gel total des
prix de cent quatre-vingts produits de base pour une période initiale de
quarante-cinq jours, la création du nouveau cruzado (1 NCz = 1 000 Cz)
accompagné d'une dévaluation de 17%, l'abolition des mécanismes d'indexation, la
centralisation de toutes les opérations de change à la Banque centrale, et le
durcissement des conditions de crédit.
Des mesures destinées à réduire le déficit public ont été prévues: abolition de
cinq ministères, licenciement de 60 000 fonctionnaires fédéraux, accélération du
programme de privatisation des entreprises publiques.
Le gouvernement s'est en
outre engagé à limiter ses dépenses au niveau des recettes effectivement
perçues.
Après une hausse de 26,1% autorisée en janvier 1989, le mécanisme d'indexation
des salaires a été pratiquement aboli.
Très vite, la résistance s'est organisée.
Pour la première fois, les deux
grandes centrales syndicales ont oublié leurs divergences et ont appelé leurs
membres à une grève générale les 14 et 15 mars 1989.
Jusqu'alors, la Centrale
unique des travailleurs (CUT), plus radicale et proche du Parti des travailleurs
(PT), avait mené seule la lutte contre les politiques économiques du
gouvernement.
L'appui de la Centrale générale des travailleurs (CGT), plus
modérée, a été décisif et 70% des travailleurs ont suivi le mot d'ordre de
grève.
Déjà, en novembre et en décembre 1988, une série de débrayages (à
Petrobrás, et aux aciéries de Volta Redonda et d'Ouro Branco) avait donné lieu à
de graves affrontements.
La répression par l'armée de la grève de Volta Redonda
avait provoqué la mort de trois travailleurs et alimenté d'innombrables rumeurs
de soulèvement et de conspirations.
La situation sociale a continué de se
détériorer: multiplication des arrêts de travail, occupations d'usines, actes de
sabotages.
Quant au Congrès, s'il a approuvé une grande partie des mesures prévues par le
plan, il a refusé d'entériner la disparition des cinq ministères, les coupes
envisagées dans la fonction publique et le programme de privatisation des
entreprises.
Les premiers résultats du "plan d'été" n'ont guère été encourageants.
Malgré le
gel des prix, l'inflation a atteint plus de 6% en mars 1989 (le double du
chiffre prévu) et les produits ont disparu des magasins.
L'activité productive
s'est orientée de plus en plus vers le marché international.
La récession de
1988, en réduisant la demande d'importations, a provoqué l'apparition d'un
surplus commercial record de plus de 19 milliards de dollars.
En juin 1989, la
plupart des dispositions du plan étaient abandonnées.
Le ministre des Finances, Mailson da Nóbrega, s'est efforcé pour sa part de
normaliser les relations avec ses nombreux créanciers.
Les arriérés des intérêts
causés par le moratoire de 1987 ont été payés, et en novembre 1988, quatorze
banques commerciales ont avancé 4 des 5,2 milliards de dollars négociés dans le
cadre d'un accord portant sur le refinancement de 62,1 milliards de dollars sur
une période de vingt ans, accompagné de crédits commerciaux et inter-banques
pour une somme de 14,8 milliards de dollars.
Le pays a versé en intérêts et en
remboursements plus qu'il n'a initialement emprunté ; et pourtant, par le jeu
des intérêts composés, la dette n'a cessé d'augmenter, pour atteindre 116
milliards de dollars en 1989.
Les débats constitutionnels
La nouvelle Constitution a été promulguée le 5 octobre 1988 après dix-neuf mois
de délibérations.
Elle donne l'image d'un pays moderne, progressif, soucieux de
protéger les plus démunis, conscient de la nécessité d'une plus grande justice
sociale et du respect de l'environnement.
Tout en marquant un net progrès sur
les textes antérieurs, elle est inapplicable dans sa facture actuelle.
Le cadre
législatif et réglementaire étant encore inexistant, deux cent lois devront être
votées pour mettre en pratique les principes du document constitutionnel.
Son élaboration a donné lieu à plusieurs débats significatifs.
Le premier,
visant à affaiblir le président Sarney, portait sur la nature présidentielle du
régime et sur l'adoption d'un système parlementaire.
Menaces à peine voilées
d'intervention militaire, distribution de faveurs par les conseillers du
président....
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