CE QUE N'EST PAS UN COMMENTAIRE COMPOSÉ: UN COMMENTAIRE LINÉAIRE Comnientaire linéaire et commentaire composé sont deux exercices différents; il...
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CE QUE N'EST PAS
UN COMMENTAIRE COMPOSÉ:
UN COMMENTAIRE LINÉAIRE
Comnientaire linéaire et commentaire composé
sont deux exercices différents; il faut bien les distin
guer l'un de l'autre, car ce qui est demandé au bacca
lauréat, c'est un commentaire composé, et non un
commentaire linéaire.
EXEMPLE DE COMMENTAIRE LINÉAIRE
TEXTEN° 2
l...'..Huître
l...'.huître, de la grosseur d'un galet moyen, est d'une apparence plus ru
gueuse, d'une couleur moins unie, brillamment blanchâtre.
C'est un
monde opiniâtrement clos.
Pourtanron peut l'ouvrir: il fa6t alors la tenir au
creux d'un torchon, se servir d'Ùn couteau ébréché et peu franc, s'y re
prendre à plusieurs fbis.
Lès doigts curieux s'y coupent; s'y cassent les
ongles; c'est un travail grossier.
Les coups qu'on lui porte marquent son
enveloppe de ronds blancs, d'une sorte de halos.
À l'intérieur, l'on trouve tout un monde, à boire et à manger: sous un
firmament (à proprement parler) de nacre, les-cieux d'en-dessus s'af
faissent sur les cieux d'en'..dessous, pour ne plus former qu'une mare, un
sachet visqueüx et verdâtre, qui flue et reflue à l'odeur et à la vue, frangé
d'une dentelle noirâtre sur les bords.
Parfois très rare une formule perle à leur gosier de nacre, d'où l'on trouve
aussitôt à s'orner.
Francis Ponge (1899-1988)
Le parti pris des choses,
Gallimard, 1942.
Commentaire
/1 se trouve - ce qui est une situation très rare - que l'auteur de« L'Huître» a
lui-même fait un commentaire de son texte, dans un ouvrage intitulé Entretiens de Francis Ponge avec Philippe Sollers*.
Ce commentaire est linéaire.
En voici de larges extraits.
(...)
1.
Le texte(...) se présente, typographiquement, sur la page, en
tr;,ois paragraphes.
Le premier~ l'huître close et la façon de l'ouvrir.
Le second, l'[otérieur de l'huître et le troisième, beaucoup plus
court et qui ne fait que deux lignes, la perle ~u'on y trouve parfois;
beaucoup plus court, évidemment, le troisième, parce que la perle
est i;importionnellement beaucoup moins importante, du point de
vue du volume(...) quê1'httîtFO elle-même.
DonC la division en trois
paragraphes est déjà adéquate(...) à l'objet.
_,
2.
« L'huître, de la grosseur d'un galet moyen, est d'une apparence
plus rugueuse, d'une couleur moins unie, brillamment blanchâtre»
Il y a là évidemment une sorte
m araison, le rapport de
l'huître et du galet.
Mais traitée( ...) de la façon a
froide; enfin, il
me semble.
On peut croire en effet qu'il s'agit d'une pure description.(...)
3.
«brillamment blanchâtre»
En français actuel, «briller», «brillamment» est affecté d'un coefficie~ositif (comme valeur morale (...) ou esthétique).
C'est bien
d'être brillant; c'est beau.
Briller, .9.'est positif.
(...) Au contraire,
«blanchâtre», comme beaucoup de mots se terminant en «âtre»,
est affecté d'un coeffir-ie,;,t oégaîif, i:>éjoratif.
(...) Eh bien! le seul fait
d'agencer un mot de coefficient positif, comme« brillant», et un mot
de coefficient négatif, comme «blanchâtre», nous fait sortir Q!J.Jieu
commun.
C'est-à-dire que «brillamment blanchâtre-» est exactemènftë gmtraire d'un lieu commun.
(...)
4.
· «"C'est un monde opiniâtrement clos»
Comment se fait-il que, dans ce texte, (...) il y ait auiaoLde mots
qui se terminent par« âtre», c'est-à-dire parj_!accent circonflexe)J,
r, e.
(...) Eh bien, parëe'qüe l'huître aussi, l'huîtw elle-roême est un
rri'ôt qui comporte une voyelle, ou plutôt une'ctiphtongue si on veut,
enfin I:±,r-e.
Il est évident que si, dans mon 'texte, se trouvent des
mots comme «blanchâtre», «verdâtre»,(...) c'est aussi parce que je
suis déterminé par le mot huître.
(...)
• On trouvera l'intégralité du com~ire de •!.:Huître» dans Entretiens de Francis
Ponge avec Philippe Sollers (Gallimard / Seuil, 1970), pages 108-116.
De nombreuses
coupures, indiquées par(...), ont été pratiquées; la présentation a été modifiée; la numérotation des remarques de 1 à 12 a été introduire par commodité.
22
0
0
0
0
LJ
D
D
LJ
u
D
0
O.
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
5.
«à boire et à manger»
C'est exactement vrai quant à l'huître; on boit et on mange; mais
quand on dit: «On y trouve à boire et à manger», c'est un lieu
commun.
JP.
œgreods "8 lieu commun.
Cela peut se lire, tout uniment, comme cela, mais en même temps, je redonne sa valeur
concrète à cette expression.
(...)
6.
«sous un firmament, à proprement parler, de nacre»
Évidemment, là, il y a peut-être quelque chose d'Llll peu pédant,
c'est-à-dire qu'il faut savoir que «firmament» signifie le ciel comme,.,
le concevaient certains Anciens, c'est-a-aire commëuriëëoupole
solide.
ferme· firmament.
Eh bien, la nacre, c'est évidemmëm: quelqîie chose de ferme de solide.
Voila qui va me permettre ensuite de
parler «des cieux d'en-dessus et'des cieux d'en-dessous», liJUi sont
alors les deux P.arties çomestjbjes de l'huître.
(••.)
7.
«pour ne plus former qu'une mare, un sachet visqueux et-verdâtre»
Là, il y au~ desçrjptjon, 1::-) en un_sens, mais je crois qu'elle est
t~s strie~, qu'elle ne tient pas beaucoup plus de place que le sachet lui-même.
(••.)
8.
«sachet visqueux et verdâtre» ..
Étant donné aussi le nombre de voyelles, le u-e-u, qui est quelque
chose de visqueux par lui-même, et, de nouveau, le «verdâtre», il
me semble qu6 je suis aussi proche que possible de la «vérité»,(...)....
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