C'est à l'époque des Lumières que l'écrivain apparaît pour la première fois comme un personnage qui peut jouer un rôle...
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C'est à l'époque des Lumières que l'écrivain apparaît pour la première fois comme un
personnage qui peut jouer un rôle dans la société; ce n'est plus seulement le poète qui
chante l'amour courtois dans les cours médiévales, ou qui pose les bases de la langue
française avec la Pléiade à la Renaissance.
Dès le XVIIIe, avec par exemple l'engagement
de Voltaire dans l'affaire Callas, se profile la figure de "l'intellectuel engagé", qui prendra
de plus en plus d'ampleur jusqu'à jouer un rôle crucial au XXe.
Or cette figure peut paraître problématique : les préoccupations de l'écrivain ne
devraient-elles pas être d'abord d'ordre esthétique? L'écrivain n'est-il pas d'abord un
artiste? Voltaire prononce le mot : "utile" dans la préface de son Dictionnaire
philosophique; mais l'art ne se définit-il pas justement comme ce qui est gratuit?
Dans les faits, la dimension esthétique sert la cause de l'écrivain, plutôt qu'elle ne l'en
détourne; mais on peut s'interroger sur les limites que rencontre la figure de l'intellectuel
engagé.
I Le rôle politique et social de l'écrivain
Dès le XVIIIe siècle se manifeste une évolution sensible du rôle de l'écrivain : le
mouvement des Lumières donne naissance à la figure de l'écrivain philosophe, qui
réfléchit sur le fonctionnement de l'Etat et de la société, et qui se permet parfois de
remettre ces deux entités en question.
Montesquieu par exemple, dans De l'origine des
lois, interroge les différents modèles politiques existant en Europe et les compare pour
tenter de dégager des règles, et un hypothétique modèle parfait.
A cette occasion il écrit
un texte extrêmement satirique, De l'esclavage des nègres, qui sous couvert d'une
approbation ironique dénonce vigoureusement l'esclavage (qui était un commerce
florissant).
La figure de l'écrivain engagé trouve de nombreuses incarnations par la suite : au XIXe,
Victor Hugo en est l'emblème; il met son art au service de Napoléon Ier, qu'il loue dans
des poèmes divers comme Bounaberdi, dans le recueil Les Orientales; ou à l'inverse, il
fustige Napoléon III, dans Les châtiments.
Il se penche aussi sur la société, en allant bien
plus loin dans ce domaine que les écrivains du XVIIIe: Les misérables brosse un tableau
pathétique et détaillé de la misère des petites gens.
Le politique et le social se rejoignent
dans l'engagement qui le porte aux côtés des "communards", en 1870 : il est l'un des
seuls écrivains à soutenir la Commune de Paris dans ses débuts.
II L'écrivain engagé doit divertir pour mieux convaincre
Ce qui fait la spécificité de l'intellectuel engagé par rapport à l'homme politique, c'est qui
choisit un moyen d'expression artistique et, en l'occurrence, littéraire : l'alliance de
l'écriture et de l'engagement s'incarne au XVIIIe dans des récits philosophiques, contes
ou romans, qui prennent une forme séduisante (amusante, romanesque, tragique) pour
mieux s'assurer l'adhésion du lecteur : ainsi Voltaire, dans ses contes philosophiques,
choisit-il une forme courte qui ne lasse pas; une écriture rapide, et un ton
perpétuellement ironique qui doit amuser le lecteur.
Son héros éponyme, Candide, subit
des avanies qui font sourire, avant de s'apercevoir qu'il faut renoncer à l'"optimisme"
(sous-titre du conte Candide) et voir le monde tel qu'il est : par ce biais Voltaire dénonce
la cruauté de l'esclavage ou le despotisme des jésuites dans les colonies.
Montesquieu
donne aux réflexions de L'origine des lois une forme romanesque dans les Lettres
persanes : cette oeuvre fait faire par des Persans une remise en cause des systèmes
occidentaux et du despotisme, et donne ainsi à la réflexion une touche exotique et
séduisante.
La poésie permet également de transmettre des idéaux : au XXe....
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