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Complexité psyc·hologique des personnages De nombreux personnages du drame romantique sont pourvus d'une psychologie simple, aisément définissable. Dans Lorenzaccio par...

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« Complexité psyc·hologique des personnages De nombreux personnages du drame romantique sont pourvus d'une psychologie simple, aisément définissable. Dans Lorenzaccio par exemple, la mère du héros, Marie Soderini, est une mère aimante que la dégradation de son fils désespère; Pierre Strozzi est un jeune homme or­ gueilleux et impulsif, surtout animé par une volonté de puissance personnelle et desservi par une absence presque totale de réflexion.

Dans Ruy Blas, don Salluste incarne l'homme de pouvoir dont l'orgueil a été humilié, qui médite longuement et machine précisément sa ven­ geance.

Mais ce n'est pas chez ces personnages, le plus souvent secondaires, qu'il faut chercher l'originalité de la psychologie romantique.

Celle-ci réside surtout dans les nombreux personnages dont le « moi » apparaît divisé et contradictoire, dont la vérité psychologique reste mysté­ rieuse, dont les motivations profondes échappent à toute · - -· rationalité étroite. DES PERSONNALÎTÉS DIVISÉES ET INSTABLES Le conflit des passions . ' La division psychologique du-personnage peut s'expri­ mer par l'opposition de deux passions antagonistes.

Elles donnent du personnage une image contradictoire.

C'est le cas du héros d' Hernani.

'ceiui-ci vit pour la haine autant que pour l'amour.

Il doit venger son père, exécuté par le précédent roi d'Espagne, le père de l'actuel roi don Carlos. Cette vengeance, Hernani ne la conçoit nullement comme un acte de justice impassible, mais comme la réalisation d'un désir _brûlant.

Il hait don Carlos: «Je vous hais, je vous hais, oui, je te hais dans l'âme!» (Il, 3, v•.

570).

L'idée du meurtre excite en lui une joie féroce, une volupté presque physique, exprimée parfois avec une rare violence: Ce que je veux de toÏ/·[ ...

] C'est tout ce qu'un poignard, furieux et vainqueur, En y fouillant longtemps peut prendre au fond d'un cœur ! (1, 4, V.

403, 405-406) Or, cette violence haineuse du vengeur n'empêche pas l'amoureux de faire preuve de douceur et de tendresse: Parle-moi, ravis-moi.

N'est-ce pas qu'il est doux D'aimer et de savoir qu'on vous aime è genoux? D'être deux, d'être seuls? et que c'est douce chose De se parler d'amour, la nuit, quand tout repose? ' (Il, 4, V.

691-694) C'est pourtant le même personnage qui parle! Poussée à ce point, sa double capacité à la violence haineuse et à l'extrême douceur compromet sa cohérence psycholo­ gique.

Hernani est un de ces personnages qui expriment . les doutes éprouvés par le Romantisme sur l'unité de la personne•humaine. Des transformations brutales d!=! la personnalité Certains personnages éprouvent cette division du­ «moi», non pas à tout moment, mais à l'occasion d'une transformation brutale de leur personnalité, d'une espèce de «conversion» ..

C'est le cas du héros de Lorenzaccio. Jeune homme heureux et calme, pur et méditatif, qui avait, «le coeur et les mains tranquilles» (Ill, 3), son individualité s'est brutalement transformée, «tout à coup», la nuit où il a fait le serment de tuer un tyran.

Racontant cette nuit étrange à Philippe Strozzi, il déclare: cette «exaltation fié­ vreuse [.·..

] a enfanté en moi le Lorenzo qui te parle» (Ill, 3). Un nouveau Lorenzo est né cette nuit-là, portant le même nom mais radicalement différent de l'ancien. C'est une transformation comparable qui affecte le.roi don Carlos dans Hernani.

Sortant du tombeau de Charlemagne, l'empereur nouvellement élu commence son règne par un amnistie général� (IV, 4), _alors qu'il s'était régulièrement, et seulement en�ore deux scènes plus tôt (IV, 2), prononcé pour le plus féroce des châtiments.

Les adversaires du roi ne reconnaissent pas ce nouveau personnage: « Oui parle ainsi ? le roi ? », demande Hernani.

Et don Carlos répond: « Non, l'empereur» (IV, 4, v.

1756-1757). Lorenzo et don Carlos expriment ainsi l'instabilité de la personne humaine, capable de véritables révolutions internes dans lesquelles l'identité, l'unité du «moi» semble se perdre. Interaction de l'être et du paraÎtre La distinction de l'être et du paraître est souvent invoquée pour rendre compte d'une certaine forme de division de la personnalité.

Ainsi l'hypocrite est celui qui paraît ce qu'il n'est pas, et réciproquement.

Néanmoins une telle distinction ne remet pas vraiment en cause l'unité du «moi».

Elle dit au contraire qu'il existe un «être» de la personne, «être» qui constitue sa vérité profonde et qu'il convient de distinguer des apparences qu'il produit, éventuellement fausses, mensongères.

Il est donc toujours possible de traverser ces apparences pour dévoiler la vérité de la personne. Or, le héros de Lorenzaccio montre les limites, et mêroe la fausseté d'une telle analyse.

Lorenzo, pour assassiner le tyran de Florence, a joué au débauché cynique_. Il a cru pouvoir adopter ce «paraître» sans modifier pour autant son «être», pur et idéaliste.

Il a cru pouvoir contenir son moi intime, « liqueur précieuse», dans le «flacon» , ignoble des apparences mensongères (111, 3)1.

Il a cru pouvoir devenir hypocrite, pour la bonne cause, sans modifier sa personnalité véritable.

Mais il doit constater son erreur. Car ces apparences ignobles sont devenues son être: « Je suis devenu vicieux, lâche», avoue-t-il (Ill, 3).

Et il s'étonne lui-même de sa malléabilité, du peu de résistance de son être profond à l'influence de ce vice qu'il croyait seulement jouer, et dont il pensait pouvoir se débarrasser comme d'un costume: « quel homme de cire suis-je donc? 1.

Voir également la métaphore du « bâton d'or couvert d'écorce» (Ill, 3). Le Vice [.

..] s'est-il si profondément incorporé à mes fibres? [...]je ne puis [...] me retrouver moi-même» (IV, 5). t:expérience de Lorenzo montre que l'être intime de la personne, loin de pouvoir maîtriser les apparences qu'il produit, est en fait déterminé par elles.

A la limite, peut­ être n'y a-t-il pas d' «être».

Peut-être le «moi» profond n'existe-t-il que dans les apparences, les manifestations extérieures de la personne, souvent changeantes et contradictoires1• LES ZONES D'OMBRE DE LA CONSCIENCE .Ainsi de nombreux personnages de ées drames·échap­ pent, par l'incohérence et l'instabilité de leur personnalité, . à une analyse psychologique traditionnelle.

Plutôt que de voir dans ce trait une faiblesse du drame romantique, ori peut se demander si celui-ci n'exprime pas de la sorte une approche psychologique nouvelle, qui s'attache avant tout aux zones d'ombre de la conscierc�. Difficile connaissance de . .

soi La complexité psychologique s'exprime notamment par la difficulté fréquente qu'éprouvent les personnages à. s'expliquer eux-mêmes; à se comprendre.

Cette absence relative de lucidité peut' avoir plusieurs causes..... »

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