Dans Lire le théâtre, Anne Ubersfeld souligne l'importance de la mise en scène pour révéler les potentialités du texte théâtral...
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Dans Lire le théâtre, Anne Ubersfeld souligne l'importance de la mise en scène pour
révéler les potentialités du texte théâtral : la représentation est la somme de T (le texte)
et T' (la mise en scène); elle précise que le texte au théâtre est troué, laisse des vides;
et c'est à la représentation de combler ces vides.
La notion de genre comique
complexifie cette réflexion : s'il est évident que la mise en scène permet de déployer le
texte, encore faut-il se demander dans quel sens elle le déploie.
La mise en scène doitelle s'adapter à la tonalité comique ou tragique d'un texte? Peut-on jouer de manière
comique un texte qui semblait ne pas l'être? Et dans quelle mesure faire cela revient-il à
trahir le texte?
I Déployer une potentialité comique déjà perceptible dans le texte
La question n'est pas la même selon le texte auquel on a affaire : dans le cas d'un texte
évidemment comique, comme le sont ceux de Molière ou de Marivaux, on peut se
demander comment la mise en scène contribue à déployer un comique qui est déjà dans
le texte : celui-ci ne se suffit-il pas à lui-même?
_le rôle de la mise en scène pourrait alors consister à actualiser ce comique évident, pour
nous rendre drôle ce qui l'était au siècle de Molière.
Exemple : la mise en scène du
Médecin volant au théâtre des Amandiers de Nanterre, en 2007.
Le cadre est une France
des années 1950, et Sganarelle, censé être un pauvre paysan, habite dans une cabane
en tôle au bord d'une autoroute et sous un gigantesque panneau publicitaire.
Cette
représentation moderne fait mieux percevoir au spectateur la dimension comique d'une
action dans laquelle un quasi SDF "roule" une famille de la bonne bourgeoisie en se
faisant passer pour médecin.
II Jouer à contre-courant : est-ce trahir le texte?
Dans Notes et contre-notes, Ionesco souligne le pouvoir de la mise en scène sur
l'atmosphère d'une pièce : "prenez une tragédie, précipitez le mouvement, vous aurez
une pièce comique".
_trahir le texte ? Par exemple, en jouant comiquement une pièce tragique: cette
entreprise pose problème dans le cas de la tragédie, qui repose sur une tension jamais
dénouée.
Le metteur en scène ne risque-t-il pas de trahir l'auteur en faisant rire le
spectateur? Exemple : mise en scène de Bérénice de Racine aux Amandiers en 2007 : le
personnage d'Antiochus, amoureux secrètement de Bérénice mais qui reste toujours dans
l'ombre (personnage aux accents pathétiques) affiche un désespoir systématique et
exagéré qui le fait paraître comique.
On peut se demander si cette introduction d'accents
comiques enrichit le texte de Racine, et si elle ne risque pas de stériliser la dimension
tragique du texte.
_ou le révéler? certaines pièces de Molière présentent des accents tragiques, qui
n'apparaissent pas explicitement dans le texte mais dans toute l'intrigue : ainsi L'école
des femmes met en scène un vieux barbon qui enferme la jeune....
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