Dans ses Témoignages sur le thé§tre (1952), Louis Jouvet écrit: « Le but du théâtre ne peut pas être une...
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Dans ses Témoignages sur le thé§tre (1952), Louis Jouvet écrit:
« Le but du théâtre ne peut pas être une recherche d'ordre intellectuel,
mais plutôt une révélation d'ordre sentimental.»
Vous commenterez et vous discuterez cette affirmation en vous appuyant sur
des exemples empruntés à vos lectures ou à vos diverses expériences
théâtrales.
ANALYSE DU SUJET
Le théâtre aurait donc un but autre que de simplement divertir ou de
permettre de voir• en chair et en os » des vedettes célèbres (Claude
Brasseur, Daniel Auteuil, Emmanuelle Béart, Aldo Maccione, Juliette
Binoche, par exemple).
La phrase de Jouvet étant faite de deux •
propositions » antithétiques et nuancées (•plutôt »), cela va vous
permettre de bâtir votre plan en· trois mouvements.
Le •ne peut pas être » va donner la possibilité de discuter.
+
recherche
intellect
+
révélation
'#
sentiment
Problème des références
De quel théâtre Jouvet parle-t-il? De quel théâtre vais-je pouvoir parler? Ma
relation avec le théâtre lu et étudié en classe en vue de passer un examen n'est
certes pas la même qu'avec un théâtre •vu » ou auquel j'ai participé en tant
qu'acteur.
II est d'ailleurs possible que Jouvet fasse ici allusion à la relation
entretenue entre le comédien et son art (souvenez-vous, si vous l'avez vu sur
scène ou à Iatélévision, du spectacle Elvire Jouvet 40, dans lequel les leitmo
tive étaient:•sentir»,•éprouver»,•le sen-ti-ment», ce dernier terme déta
ché et accentué par l'acteur Philippe Clévenot qui interprétait L.J.).
Jouvet envisage certainement ici la tragédie française du XVII' siècle ou la
«grande» comédie moliéresque (Dom Juan, par exemple); peut-êre aussi
tous les théâtres «viscéraux» (drame élisabéthain, Shakespeare, drame du
Siècle d'Or espagnol).
On pourrait yjoindre le théâtre de Paul Claudel, celui
de Samuel Beckett, peut-être aussi, si vous le connaissez, le théâtre extrême
oriental Gaponais, plus particulièrement).
Semble ne pas pouvoir s'appliquer à des formes de théâtre léger: on voit mal
comment le «Boulevard » pourrait illustrer la phrase en question.
Dans les connaissances à exploiter: le phénomène de la catharsis*, celui de la •,
distanciation*.
Vous souvenir aussi que le théâtre, avant d'être spectacle, au sens où nous
l'entendons, a été cérémonie liturgique*, une sorte de mystère sacré; vous
rendre compte aussi que le fait d'éprouver du plaisir ou même de l'intérêt à
voir un" spectacle théâtral est quelque chose de très mystérieux; pourquoi
nous intéresser à quelque chose de faux, à des acteurs qui «miment » actions
et sentiments, à un langage éloigné de toute réalité? Etrange aussi le« but» du
théâtre: à quoi peut-il bien servir? Quelle peut être sa finalité?
Ligne directrice
Partir de la futilité (apparente ou réelle) du théâtre, ainsi que son opposé : le
mystère.
Un divertissement qui peut ne pas être «gratuit», qui parle avant tout aux
sens.
Aboutir, à un certain moment, à sa nécessité profonde, à sa gravité presque
mystique.
a) On ne vient rien chercher de particulier au théâtre, sinon un certain pla\sir
(ou un plaisir certain); en tout cas, pas de réponses à des questions précises.
b) La volonté d'acquérir quelque chose (un gain quelconque dans quelque
domaine que ce soit) n'a pas lieu d'être.
c ) La réflexion intellectuelle critique et desséchante n'y a pas sa place: ce
n'est pas son domaine ; ne permettrait que de fausses découvertes, s'arrêterait
à la surface des choses et des êtres.
d) Problème de cette«révélation sentimentale»:
-croyance;
- mysticisme ;
- se ferait avec brutalité, sans qu'on s'y attende;
- ne passerait pas par la réflexion.
e) Sentimentale - réactions physiques, sensorielles et passionnelles
(larmes, rire, émotions humaines); - découverte du «non-visible»,
découverte de l'âme, que SEUL le théâtre pourrait permettre.
Ce à quoi l'on assiste, sur une scène de théâtre, c'est essentiellement à
l'affrontement souvent douloureux (même dans les comédies) d'êtres de chair
et de sang qui parlent, aiment, souffrent et meurent.
De ce fait, son but n'est pas seulement de divertir, mais d'utiliser le divertis
sement pour aboutir à quelque chose d'autre, qui dépasserait les «leçons»
auxquelles on l'a parfois confiné.
En effet, il ne s'agit pas vraiment de
comprendre, mais de sentir et d'éprouver.
Il faut accepter l'idée que devant les yeux crevés d'Œdipe, devant la révolte
d'Antigone ou le supplice de Phèdre, ce n'est pas réellement mon intelligence
qui est sollicitée, mais plutôt ce qu'Aristote pommait déjàla terreur et la pitié.
C'est grâce à la catharsis•, par une véritable projection du spectateur sur les
personnages, que pourra opérer cette révélation: ressentant les douleurs, les
peines, les angoisses et les joies des personnages, je vais me trouver comme
libéré des miennes ; tout est fait pour que cet investissement du spectateur
dans le spectacle et dans les « problèmes » des personnages fonctionne :
l'illusion savamment calculée d'une réalité quin'existe pas, l'engloutissement
dans le gouffre de la scène, les éclairages, tout ce qui concerne l'acteur,
et surtout sa voix et son timbre.
C'est peut-être dans cette libération profonde de moi-même que se trouve la
première - et probablement la plus importante, tant il est vrai qu'elle ne
saurait se trouver ailleurs -révélation.
Révélation sentimentale, car elle ne
passe pas par l'intelligence, elle est faite avant tout d'intuition.
Même si le héros échoue (la mort solde souvent son histoire), le spectateur
aura découvert quelque chose de positif, et ce, bien sûr, de façon intuitive: que
l'on peut influer-ou tenter d'influer- sur son destin; l'homme est capable
de voir clair en lui-même, ou essayer d'y voir clair: pensons ici aux tentatives
(vaines) de Phèdre, àla façon dont elle se débat contre un destin injuste, àtout
ce qu'elle peut dire sur la destinée humaine, à tout ce qu'elle peut nous
apprendre sur la destinée humaine et sur le sens-oule non-sens-de la vie.
La vision de ce personnage m'invite, sans que cela soit explicitement dit, sans
"leçon», à l'élargir à mon propre cas puisque, dans le théâtre, rien ni
personne ne« commente,..
- comme c'est le cas dans un roman - puisque
nous en sommes réduits à ne voir les choses que sous l'angle de vision des
personnages, que par des êtres qui parlent à d'autres êtres ou à eux-mêmes;
c'est par l'intermédiaire du spectacle que l'on parviendra à de telles décou
vertes.
Le théâtre tragique, en particulier (mais ce serait aussi le cas du théâtre
comique, car seule une différence d'optique les sépare), en dressant les per
sonnages les uns contre les autres, contre eux-mêmes, contre les lois et contre
le monde, me force petit à petit à prendre conscience, par exemple, de ces....
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