DE L'ASTROLOGIE À LA NUMÉROLOGIE L 'entreprise est-elle vraiment le haut lieu de la rationalité qu'on imagine ? Si on...

« DE L'ASTROLOGIE À LA NUMÉROLOGIE L 'entreprise est-elle vraiment le haut lieu de la rationalité qu'on imagine ? Si on parle de rationalisation des méthodes de production, on ne peut pas en dire autant de certaines pratiques managériales.

On a vu des cadres envoyés en stage de pensée vaudou, d'autres sont partis marcher sur les braises accompagnés de gourous pour assurer leur « réénergé­ tisation » (sic!).

On a aussi pu observer la multiplication des méthodes irrationnelles et obscurantistes en recrutement numérologie, astrologie, hématologie, etc.

Certes, le phéno­ mène a été largement médiatisé ...

Un peu trop aux yeux de nombreux recruteurs, qui trouvent que tout ce tapage autour de ces méthodes jette une ombre sur la profession.

Il est vrai que tous ne tirent pas les tarots pour choisir leur candidat ! Il n'empêche.

Le livre de Caroline Brun, I.:Irrationnel dans l'entre-prise, aux éditions Balland, dresse un tableau impression­ nant de ces pratiques.

Quelques-uns des plus grands patrons les utilisent.

Ambroise Roux, l'ancien P-DG de la CGE, éminent ponte du patronat français, a bien « commis » un livre sur la parapsychologie...

Selon une enquête de Marilou Bruchon­ Schweitzer, 25 % des cabinets de recrutement utiliseraient des méthodes telles que la morphopsychologie, la numérologie, etc.

La morphopsychologie semble la plus employée, suivie de l'astrologie.

Les autres techniques sont rarissimes. ■ En catimini Légalement, l'entreprise doit informer des méthodes de recru­ tement qu'elle emploie.

Mais quel recruteur va avouer faire le thème astral de son candidat ? Quel est celui qui va reconnaître avoir recruté Untel parce qu'il avait un profil morphopsycho­ logique plus adéquat que les autres ? Si on tire les cartes derrière votre dos, il est bien entendu impossible de s'opposer à quoi que ce soit.

Mais veillez aux indices : si on vous demande l'heure de votre naissance, soyez vigilant.

Il y a du thème astral dans l'air.

..

« Si l'on pose au can­ didat ce genre de question, il pourra en tirer des conclusions quant au sérieux de l'entreprise et aux valeurs qu'elle véhicule», avertit Jean-Paul Menassier, à l'École nationale des ponts et chaussées (ENPC).

Consultant pendant des années, Jean-Paul Menassier organise aujourd'hui pour les étudiants des séminaires de préparation aux tests et aux procédures de recrutement. ■ Quel recours contre ces pratiques ? Comme la graphologie (voir le Pratique « La grapho en toute légalité» dans le chapitre précédent), ces techniques n'ont pas été explicitement mentionnées dans le texte de la loi Aubry du 31 décembre 1992.

La circulaire d'application de la loi précise cependant que «le recours à des techniques présentant une marge d'erreur importante ne serait pas conforme à l'obliga­ tion de pertinence imposée par la loi».

Vous pouvez donc intenter un recours contre une entreprise qui utiliserait la mor­ phopsychologie ou l'astrologie sans vous en avertir.

Il est - hélas ! - quasi impossible de le savoir. LA MORPHOPSYCHOLOGIE La morphopsychologie ne date pas d'hier ! On a en effet retrouvé des typologies remontant à !'Antiquité, essayant d'as­ socier certains tempéraments aux traits du visage ...

Selon une anecdote rapportée par les morphopsychologues, César s'adonnait déjà à cette «science» quand il disait à Brutus : « Ton discours est écrit sur ton visage.

» Le postulat de cette technique ? Que les traits du visage sont le reflet du psychisme, aussi bien dans ses composantes FLASH Deux photos au minimum L'analyse morphopsychologique peut avoir lieu pendant l'entretien, à votre insu.

Certaines entreprises se ris­ quent aussi à une analyse à partir d'une photo d'identité accrochée au ���-� : CV.

Mais les morphopsychologues estiment qu'il faut au moins une photo de face et une autre de profil pour faire un travail sérieux.

On n'a encore jamais vu cependant de petites annonces qui avaient cette exigence. conscientes qu'inconscientes.

En clair : on peut lire sur votre visage comme à livre ouvert sur tout ce qui se passe à l'inté­ rieur, même jusqu'aux replis les plus intimes de votre âme.

Pas la peine de vous dissimuler, Big Brother vous observe ! ■ Les trois zones du visage Les morphopsychologues prétendent s'appuyer sur une méthode scientifique, au carrefour de la biologie et de la psy­ chologie qui découpe le visage en trois zones.

La partie haute, dite cérébrale (front, yeux), est censée représenter l'intellect, la réflexion.

La partie médiane (nez, joues) représente l'étage dit «affectif».

Il serait en étroite relation avec les sentiments et les émotions.

Enfin, la zone basse, ou « étage instinctif», serait connectée à la partie inférieure de notre corps (sous la ceinture !) et à nos instincts. « Les trois parties du visage permettent d'étudier la vie intellec­ tuelle, la vie affective e t les capacités d_e réalisation de l'individu », explique Brigitte Guthman, de l'Institut de mor­ phopsychologie appliquée.

Pour chacune de ces zones, les morphopsy vont observer trois éléments : les récepteurs (yeux, nez, bouche), l'ossature, c'est-à-dire la « charpente osseuse» du visage, et enfin « les chairs».

« �observation des chairs indique la façon dont on gère ses tensions, commente Brigitte Guthman.

On voit certains visages gonfler ou se dégonfler d'un jour à l'autre.» Tout cela va être servi à la« sauce freudienne», puisque la mor­ phopsychologie entend faire le parallèle entre ces trois élé­ ments et les trois instances de l'inconscient définis en psycha­ nalyse.

Les récepteurs seraient liés au Moi, le cadre, au Ça (c'est-à-dire les instincts profonds) et le rapport récepteurs­ cadre au Surmoi (les principes, tout ce qui est de l'ordre de l'éducation, de la socialisation...). ■ Êtes-vous dilaté ou rétracté ? Votre visage est-il de type « dilaté» (c'est-à-dire large, ouvert) ou plutôt« rétracté» (c'est-à-dire plus recroquevillé, fermé ...) ? « Rétracté latéral » ou « rétracté frontal » ? Selon les« lois » de la morphopsychologie, ces quatre mouvements des traits sont en relation avec le caractère.

Explication : « Sur le plan phy­ sique, lorsque vous êtes heureux, vous avez tendance à prendre de l'espace, à vous étirer, à ouvrir le visage, explique Carleen Binet dans son livre �ABC de la morphopsychologie, aux édi­ tions Jacques Grancher.

Lorsque cela ne va pas, ou que vous sortez et qu'il grêle, vous allez au contraire vous courber, vous faire tout petit.

C'est ainsi que l'on va repérer, dans le visage, les zones en dilatation et celles en rétractation.

Les premières seront bombées.

Les secondes seront en creux.

» Autres éléments du diagnostic morphopsy : la « rétractation latérale » et la« rétraction frontale ».

Si vous avez un nez qui pointe ou un profil« aérodynamique», c'est que vous êtes un « rétracté latéral».

Autrement dit, une personne à priori dyna­ mique, pleine de vitalité, avec un goût du risque, une volonté d'aller de l'avant.

Si au contraire vous avez le menton qui rentre et un nez recourbé, vous êtes plutôt un « rétracté frontal», c'est-à-dire quelqu'un qui freine sa spontanéité et qui aime contrôler...

Excellent profil pour un comptable ou un contrôleur qualité, mais pas pour un poste relationnel. ■ Avez-vous le bon profil ? Un recruteur consciencieux, qui applique ces règles à la lettre, va donc se méfier d'un visage à dominante rétractée s'il recherche un commercial ou un créatif.

« Les yeux rétractés, rentrés, disent que la personne est d'abord tournée vers la réflexion intérieure, qu'elle est moins réceptive aux idées exté­ rieures et aux modes.

Il faut plus de temps pour la convaincre. Mais elle a de grandes capacités de concentration, explique Brigitte Guthman.

Des yeux dilatés marquent au contraire une grande ouverture aux idées extérieures, un goût des échanges, de la tolérance.

Mais ils dénotent une certaine influençabilité.

» Comme en graphologie, un seul indice de rétractation ou de dilatation ne suffit pas au diagnostic final.

C'est la combinai­ son, le recoupement de plusieurs mouvements qui.... »