Décor de thé8tre, XVIII• siècle, pe.'nt par Servandoni (1695-1766). 853 .- LE THÉATRE ITALIEN 853.1 - DES ORIGINES AU XVll9...
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Décor de thé8tre, XVIII• siècle, pe.'nt par Servandoni (1695-1766).
853 .- LE THÉATRE ITALIEN
853.1 - DES ORIGINES AU XVll9 SIÈCLE.
A - Le Moyen Age.
a) Les" laudes".
Comme partout ailleurs en Europe, le théâtre italien
a d'abord pris l'aspect du drame religieux (mystère), à
l'origine duquel se trouvent les laudes (" louanges'").
• Le courant est né en Ombrie, au XIII• siècle,
dans le sillage de saint François d'Assise (11821226; voir ci-dessus 852.1, B, b).
La ferveur reli
gieuse inspire des poésies populaires qui sont récitées
par des confréries de laudesi (" louangeurs ").
Le
contenu des laudes est touj,ours le même : glorification
de Dieu et du Christ, Nativité.
Passion.
Résurrection.
vies exemplaires des saints.
Ces poèmes lyriques et fer
vents, tout empreints de l'allégresse exprimée dans le
Cantique du soleil de saint François d'Assise, ont très
souvent une forme dialoguée et prendront, dans le
courant du XIV• siècle, un aspect nettement drama
tique et scénique.
On a conservé ainsi quelque deux
cents recueils de laudes, pour la plupart anonymes,
regroupés par des confréries religieuses et laïques qui
se forment dans la seconde moitié du XIII• siècle,
lorsque la ferveur se mue en fanatisme (mouvement des
disciplinés de Ranieri Fasani, vers 1258-1260 : les
flagellants).
• Iacopo dei Benedetti dit Iacopone da Todi
(1230-130 6) est un compositeur de laudes qui a dé
passé, de beaucoup, le niveau du lyrisme populaire.
L'édition florentine de ses poèmes (1490) nous propose
une centaine de louanges dont 93 sont considérées
comme authentiques.
Iacopone da Todi était un fran
ciscain intransigeant qui réclamait.
contre ceux qu'on
appelait les conventuali, une observation rigoureuse,
rigide de la règle édictée par le fondateur de l'ordre.
Persécuté par le parti des mondains, que soutenait le
pape Boniface VIII, il fut excommunié et jeté en prison;
il ne devait retrouver la liberté et le pardon qu'en 1303.
Avec les laudes de ce moine exalté, nous sortons de
la poésie religieuse populaire.
Les peintures de la fai
blesse humaine, de l'abaissement du corps et ae
l'élèvement de l'âme, laissent apparaitre non seulement
un sens mystique évident, mais encore des qualités
littéraires particulièrement vigoureuses, un sens de
l'observation intérieure de soi-même qui permettent
aux historiens de la littérature italienne de considérer
Iacopone da Todi comme « la personnalité la plus
=...,portante de notre histoire littéraire avant !'Alighieri »
(Natalino Sapegno, Compendio di Storia della lette·
ratura italiana, 1, p.
82).
Le chef-d'œuvre des laudes de
Iacopone da Todi (qui écrivit, d'autre part.
en latin,
vers 1300, une Louange intitulée Stabat Mater) est
sans contredit la Louange de la Dame du Paradis,
connue aussi sous le titre : les larmes de la Madone
(P ianto della Madonna); il dépeint les douleurs de la
Mère de Dieu au pied de la croix, douleurs qui reflètent
l'antithèse mystérieuse entre l'angoissante situation
humaine et la sagesse parfaite et impassible de Dieu.
Il est intéressant de noter que Iacopone da Todi est un
contemporain de Cavalcanti et des initiateurs du dolce
stil nuovo; de même que ceux-ci ont donné une nou
velle dimension (celle de la psychologie intérieure) à
la description de la souffrance amoureuse, de même
Iacopone a transformé la poésie religieuse populaire
en une aventure mystique intérieure.
b) Les représentations sacrées
et les débuts de l'humanisme.
e Insensiblement, les laudes du XIII• siècle sont
devenus des mystères (sans qu'on puisse cependant
parler d'un théâtre religieux italien comparable au
théâtre français).
Puis le mistero, drame religieux popu
laire auquel s'ajoutent, peu à peu, des éléments pro
fanes, devient, au Quattrocento, la rappresentazione
sacra ( « représentation sacrée »).
Ce genre mixte, où
les scènes et les personnages de la vie quotidienne
font irruption au sein du drame religieux, lui-même
transformé en récit à l'intrigue souvent complexe et
romanesque, fleurit à Florence, sous les Médicis.
Le
point de vue didactique et éditiant est oublié au profit
de l'anecdote et de l'aventure.
Ainsi : l'Étoi/e (la
Stella, anonyme), La Représentation de l'enfant pro
digue (Rappresentazione del figliol prodigo, ano-
Scènes de la comédie italienne (commedia dell'arte).
I.
Le Docteur, Brighella, Pantalon et Arlequin.
Il.
Arlequin fait la cour à une servante.
nyme, XIV8 siècle), Barlaam et Josaphat (Barlaam e
Giosafat).
de Bernardo Pulci (1438-1488), La Conver
sion de Marie-Madeleine (Conversione di Maria
Maddalena) et La Passion (Passione) de Castellano
Castellani.
Le plus illustre des auteurs de représenta
tions sacrées est le Florentin Feo Belcari (1410-14 8 4),
qui écrivit aussi des laudes, des vies de saints, des
traités de poétique.
etc.
; citons : Abraham et Isaac
(Abraam ed Isaac).
Saint Jean dans le désert (San
Giovanni ne/ deserto).
l"Annonciation de Notre-Dame
(Annunciazione di Nostra Donna), etc.
• Au courant humaniste doit être rattaché
Albertino Mussato (de Padoue; 1261-1329).
Il a
écrit, à !"imitation de Sénèque, une tragédie politique
et profane, Ecerinis, dans laquelle il met en garde ses
concitoyens contre la menace de dictature constituée
par Cangrande Della Scala.
Humaniste aussi, le Politien (Il Poliziano, voir
852.3, C, b), auteur de la Fable d'Orphée (Favola
di Orfeo, 1480) qui est la première véritable pièce de
théâtre profane de l'histoire de la littérature italienne
(si l'on excepte Mussato).
A la différence de Mussato,
le Politien n'imite pas les Latins.
Il utilise la technique
de la représentation sacrée, à laquelle il ajoute quelques
éléments de l'églogue dialoguée.
Il aura de nombreux
imitateurs comme Niccolo da Correggio (1450-1508),
auteur de La Fable de Céphale (la Fabula di Cefa/o).
B - Le XV/e siècle.
a) La tragédie.
Voir Annexe tableau n° 5.
• La renaissance des lettres au XVIe siècle, le
goût pour les choses de I' Antiquité se sont traduits au
théâtre par la naissance de la tragédie régulière, c'est-à
dire de la tragédie écrite selon les règles de la poétique
aristotélicienne (les unités).
La première œuvre du
genre fut, en 1515, Sophonisbe (Sofonisbà).
de
Gian Giorgio Trissino; elle a été suivie d'un grand
nombre d'autres, toutes aussi médiocres et aussi
artificielles, que nous rappelons dans le tableau n° 5
de l'Annexe.
En fait, la conséquence la plus importante,
pour la littérature mondiale, de la théorie des unités, ce
n'est pas en Italie qu'on la trouve, mais en France (le
théâtre de Corneille et de Racine; voir 843.2).
• Il faut isoler l'œuvre qu'on peut considérer
comme la meilleure tragédie du XVIe siècle italien
Horace (Orazia, 1546), de l'Arétin, que nous aurons
d'autres raisons d'admirer (voir ci-dessous, 854.2, B, d).
La sobriété de la langue et du style, la description
« shakespearienne » des caractères, la technique sa
vante de !"Arétin ont été appréciées à juste titre.
fait défiler sur la scène tous les types humains :
l"avare, le prodigue, l'entremetteur, la catin, le valet
voleur, le maitre orgueilleux et querelleur, le vieillard
libidineux, le jeune amoureux, etc.
: on peut dire, sans
exagération, que tous les « emplois » qui ont été jus
qu'à nos jours attribués aux comédiens du monde
entier ont été créés par les auteurs italiens du XVIe siècle.
Dans ce genre, qui triomphe à Ferrare et surtout à Flo-
b) La comédie.
Voir Annexe tableau n° 6.
• L'Arioste (1474-1533) est le créateur de la
comédie moderne.
L'auteur du Roland furieux a vécu
dans l'ambiance raffinée de la cour de Ferrare, où l'on
aimait passionnément les fêtes et le théâtre, passion
largement partagée par celui qu'on appelait parfois
Messer Ludovico.
Le modèle est, naturellement, la
comédie latine (Térence, Plaute).
Mais !'Arioste ne
s'est pas contenté d'imiter; il a transformé thèmes,
intrigues, personnages, ne conservant de ses modèles
latins que les mécanismes, les structures de la co
médie (ressorts, procédés comiques, etc.).
La scène est
transportée à Crémone, à Ferrare, les personnages sont
ces hommes et ces femmes bruyar,ts, amoureux, jaloux,
cupides, menteurs ou attendrissants de l'Italie si vi
vante du XVIe siècle.
Certes les intrigues sont artifi
cielles (et parfois compliquées), mais c'est souvent le
propre du théâtre comique, qui est rarement un théâtre
d'analyse.
Ce qui domine, chez !'Arioste, c'est le
sens mordant de la satire, genre dans lequel sa verve
poétique s'était aussi exercée (voir ci-dessus, 852.3,
D, a).
Rappelons les principales comédies de !'Arioste :
Le Coffret (La Cassaria, 1508 en prose, 1528-1529 en
vers), Lena (1529), Le Nécromancien (Il Negromante.
1520), Les Personnages supposés (/ Suppositi, 1509).
• Les successeurs de /"Arioste.
Ils sont légion;
le théâtre italien au XVI e siècle est un véritable fait de
civilisation qui va se transmettre peu à peu à toute
l'Europe.
Les auteurs sont nombreux et prolifiques, et
c'est une erreur que de les considérer comme de
simples fabricants de « farces ».
La comédie italienne
s'est développée dans deux directions :
- La manière de !'Arioste, satirique, turbulente,
L 'Arioste (peinture anonyme).
Scènes de la comédie italienne (suite).
Ill.
Arlequin bâtonné.
IV.
Travesti.
rence, le plus représentatif est le très fécond auteur de
comédies Giammaria Cecchi (1518-1587).
- Une manière plus « évoluée» s'oriente vers la
comédie de caractères et l'analyse psychologique; le
représentant le plus typique de ce style est le Siennois
Alessandro Piccolomini.
Le tableau n° 6 de l'Annexe donne les principaux
noms de la comédie italienne du XVJ e siècle.
• les chefs-d'œuvre du théâtre comique italien
ont été écrits en marge de ces comédies de cour.
Elles
sont l'œuvre de Pietro Bacci, dit !'Arétin (1492-1556),
l'auteur de la tragédie Horace (voir ci-dessus, a), et
Nicolas Machiavel, l'auteur du Prince, le principal
ouvrage de philosophie politique de la Renaissance.
A l'Arétin l'on çloit cinq comédies en prose, écrites,
entre 1525 et 1542, avec un sens extraordinairement
fin de la scène et du dialogue ; le Maréchal (Il Ma
rescalco), la Courtisane (la Cortigiana), l 'Hypocrite
(l 'Jpocrito), la Talanta, le Philosophe (Il Filosofo).
A Machiavel on doit la traduction de l 'Andrienne,
de Térence, et l'adaptation, sous le titre italien de
Clizia, de La Casina de Plaute.
Mais on lui doit surtout
la Mandragore (la Mandragola, 1520), qui est sans
doute la comédie la plus réussie du XVIe siècle italien
et, en même temps, une pièce à double sens, dans la
quelle Machiavel laisse apparaitre son pessimisme et
son scepticisme.
c) La commedia dell'arte.
On appelle ainsi une technique théâtrale caractérisée
par l'absence de texte écrit; à la place, un simple cane
vas, un «scénario».
découpé en scènes, et accompagné
d'indications sur le jeu des acteurs, qui improvisent,
en fonction de leur génie personnel.
On aurait tort
cependant, de croire que la commedia dell'arte est qu
théâtre ce que la jam session des jazzmen est à la
musique écrite.
Elle est, en fait, une organisation pro
fessionnelle et commerciale du théâtre.
La première
compagnie qui se spécialisa dans ce genre apparaît à
Padoue en 1545.
La commedia dell'arte n'est pas à proprement parler
une improvisation pure.
C'est un métier.
Il s'agit de
faire rire le spectateur à partir d'un certain nombre de
moyens techniques {bouffonnades, lazzi, cabrioles,
bastonnades, bagarres, utilisation d'accessoires tradi-
tionnels, etc.).
Les personnages sont eux aussi très
conventionnels, sortes de marionnettes vivantes : les
deux Zanni {le Zanni intrigant et animateur de l'in
trigue et le Zanni balourd et bouffon qui se transformera
progressivement en Arlecchino : Arlequin; le nom dérive
peut-être du vieux français Hellequin qui désignait le
chef des diables dans les mystères du XI• siècle), le
Capitan, Pantalone, Pulcinella (Polichinelle), il Dot
tore (le Docteur) formant avec Pantalon le couple
traditionnel des vieillards et des songe-creux, Burat
tino (domestique bavard et rusé), Scappino (valet
roublard), etc.
Les premiers scénarios de la commedia
dell'arte, furent publiés en 1611 ; on en connait plu
sieurs centaines qui ont été joués dans toute l'Europe
(et qui connaissent, à notre époque, un renouveau
significatif).
A l'origine historique de ce genre dramatique il y
a une réaction contre le faux héroïsme de la Renais
sance, contre l'admiration et l'imitation trop systéma
tique.
des Anciens ; on peut donc parler d'une source
populaire de cette commedia dell'arte.
Le Padouan
Angelo Beolco, dit Il Ruzzante (1502-1542), a écrit.
outre des comédies traditionnelles et littéraires, des
pièces en dialecte paysan, avec une intrigue très simple
et dans lesquelles apparaissent développés une certaine
conception libérale de la vie, un certain anticlérica
lisme ou tout au moins une liberté d'esprit assez proche
de l'érasmisme.
On trouve le même réalisme pittoresque
que chez le Vénitien Andrea Calma (1510-1571).
Le
Ruzzante et Calmo sont considérés comme étant à
l'origine de cette révolution théâtrale qui a conduit au
refus du texte écrit et à la commedia dell'arte.
Il ne faudrait cependant pas se faire trop d'illusions
sur la signification philosophique de ce genre.
Les
critiques modernes insistent sur la réfutation de l'ordre
social, que reflète l'opposition des maîtres et des
serviteurs et, d'une manière générale, de tous les
couples de la commedia dell'arte.
Mais l'on ne doit pas
oublier que les comédiens qui ont propagé ce genre à
travers toute l'Europe n'étaient ni des politiques, ni des
philosophes, ni des révolutionnaires; c'était avant tout
de!; comédiens, des gens du voyage, des techniciens.
S'ils s'amusaient à bafouer l'ordre établi, c'est qu'ils
sentaient que cette satire simpliste trouvait un écho
dans leur public.
On peut donc parler, si l'on veut, de la
signification collective et inconsciente de la commedia
dell'arte; mais il ne faudrait pas y voir la forme dra
matique populaire d'une pensée prérévolutionnaire
consciente et organisée.
d) Le drame pastoral et le mélodrame.
Il s'agit ici d'un genre dont l'ancêtre est le Politien
(Orfeo, voir ci-dessus, A, b).
Les histoires de bergers
et de bergères, les comédies bucoliques, connaissent
une vogue considérable à la fin du XVJe siècle (l'âge
baroque approche).
Dans le même ordre d'idées la
tragédie qui finit bien - melodramma - est une dis
traction appréciée, sinon un art raffiné.
Le spectacle
devient de plus en plus conventionnel, et la musique
se mêle au théâtre sous forme de chansons, d'airs à la
mode.
Entre 1590 et 1595, dans les milieux florentins
qui entourent le comte Giovanni de' Bardi, poètes et
musiciens cherchent à créer un style musical expressif,
très proche du texte : Vincenzo Galilei (le père du
grand Galilée), les musiciens Peri et Giulio Caccini, les
savants comme Piero Strozzi, le poète florentin Ottavio
Rinuccini (1562-1621).
Rinuccini écrit un drame pas
toral, Dafne (1597-1 598), récité sur une musique de
Peri et Jacopo Corsi; une autre tentative est faite en
1600 par Rinuccini et Peri (Euridice, représentée à
l'occasion du mariage de Marie de Médicis avec
Henri IV).
Mais le succès du genre, d'où devait sortir
l'opéra, fut assuré par l'Orfeo de Claudio Monteverdi
(1567-1643), qui avait repris le livret de Alessandrino
Striggio.
Il fut confirmé en 1608 avec l 'Arianna dans
laquelle Monteverdi, débarrassé....
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