Dégagez l'intérêt philosophique de cc texte en procédant à son étude ordonnée. Pour les Politiques[... ], on les croit plus...
Extrait du document
«
Dégagez l'intérêt philosophique de cc texte en procédant à
son étude ordonnée.
Pour les Politiques[...
], on les croit plus occupés à tendre aux hommes
des pièges qu'à les diriger pour le mieux, et on les juge habiles plutôt
4ue sages.
L'expérience en effet leur a enseigné qu'il y aura des vices
aussi longtemps qu'il y aura des hommes; ils s'appliquent donc à pré
venir la malice humaine, et cela par des moyens dont une longue
expérience a fait connaître l'efficacité, et que des hommes mus par la
crainte plutôt que guidés par la raison ont coutume d'appliquer; agis
sant en t:e•la d'une façon qui paraît contraire à la religion, surtout aux
théologiens: seloll ces derniers en dfet, le souverain denait conduire
les affaires publiques conformément am: règles morales que le parti
culier est tenu d'observer.
Il n'est pas douteux cependant que les Poli
tiques ne traitent dans leurs écrits de la Politique avec beaucoup plus
de bonheur que les philosophes: ayant eu l'expérience pour maî
tresse, il n'ont rien enseigné en effel qui füt inapplicable.
SPINOZA
Autres notions abordées : le devoir ; la religion.
DÉGAGER LA PROBLÉMATIQUE
Ce texte assez bref n'en est pas moins dense et possède deux
foyers de réflexion.
Le premier concerne les «Politiques», c'est
à-dire les hommes politiques en général et ceux qui nous gou
vernent en particulier (lorsque l'on parle des hommes politiques,
il faut bien se rappeler que tous ne sont pas en permanence
ministres ou députés) : sont-ils aussi méchants qu'on le dit sou
vent ? Spinoza se /ivre ici à l'analyse critique d'un lieu com
mun selon lequel les Politiques sont tous cupides, méchants et
sans scrupules.
Le second foyer, qui est une conséquence du pre
mier, est une leçon de modestie pour les philosophes : eux qui
ont des idéaux apparemment bien plus nobles que /es Politiques,
sont-ils vraiment plus aptes à parler de la politique ? Spinoza
semble en douter.
Les questions que pose Spinoza rejoignent un vaste et long
débat entre /es «idéalistes» et /es «pragmatiques» ou /es
«cyniques», entre /es «colombes» et /es «faucons».
REPERER LE MOUVEMENT DU TEXTE
Dans un premier moment, Spinoza rend compte du jugement
souvent porté sur /es politiques,jugement plutôt péjoratif dans
la bouche de l'opinion publique.
Il ne s'emploie pas à démon
trer que l'opinion se trompe et que /es Politiques sont meilleurs
qu'on ne le pense, mais plutôt à expliquer que l'opinion a rai
son et ne peut s'en prendre qu'à elle-même.
Il présente alors /es grands traits des méthodes des Politiques ;
le maître-mot est ici : efficacité.
Spinoza donne une interpréta
tion pragmatique de la politique : les politiciens visent non un
idéal mais des résultats.
Il distingue à cette occasion le pragmatisme des Politiques pro
fessionnels et l'idéalisme de ceux qui, au lieu de faire la poli
tique, se contentent d'en parler sans se frotter à la réalité.
EXPLICITER LES TERMES
- «Tendre aux hommes des pièges»: quels aspects de la vie
politique sont visés par cette opinion ? Comment les formuler
sous un jour positif?
- « habiles plutôt que sages» : précisez l'opposition de ces deux
qualités.
L'habileté concerne l'aptitude à mettre en œuvre avec
succès des moyens en vue d'un but ; la sagesse concerne la
détermination des buts eux-mêmes, leur évaluation par rapport
à une idée du bien.
- « L'expérience leur a enseigné ...
» ;«une longue expérience»;
«Ayant eu l'expérience pour maîtresse» : que vaut cette for
mation par l'expérience ? Spinoza l'oppose à celle des théolo
giens et des philosophes ; quelle est la source du savoir de ces
derniers?
- « Prévenir la malice humaine»: malice n'est pas à comprendre
au sens d'intelligence, d'astuce, mais de vice (le malin, c'est
l'esprit du mal).
Peut-on trouver, dans les pratiques actuelles, des
mesures orientées dans ce but ?
- «Les règles morales que le particulier est tenu d'observer»:
Spinoza semble en dispenser les hommes politiques.
Que penser
de cette distinction, à un moment où l'on n'a jamais tant parlé de
« moralisation de la vie publique» ?
Introduction
Que peut-on attendre des hommes politiques ? Doit-on leur demander
de faire le bien, ou d'obtenir des résultats, de réaliser des projets quitte à se
dire parfois que la fin justifie les moyens ? Spinoza s'est bien rendu compte
de l'ambiguïté de notre position à l'égard de ceux qui nous gouvernent, entre
ce que nous attendons secrètement et ce que nous disons publiquement, et
prend la défense des Politiques face aux critiques habituelles dont ils sont
l'objet de la part de l'opinion publique.
Spinoza ne cherche pas à les blan
chir du cynisme qu'on leur reproche souvent, mais à montrer qu'il s'agit
moins de vices que d'une méthode qui a sa raison d'être.
Sa présentation des méthodes politiques est en fait encadrée par l'évo
cation des deux feux entre lesquels ils se trouvent pris : celui du sens com
mun qui se plaint et celui des théologiens et philosophes qui pensent
pouvoir donner des leçons aux Politiques.
En étudiant l'analyse pragmatique que propose Spinoza nous pourrons
nous demander si l'expérience doit être la seule référence en politique.
Étude ordonnée et intérêt philosophique
Pour évoquer les méthodes des «Politiques», Spinoza s'appuie tout
d'abord sur les critiques qu'on leur adresse couramment : au lieu de faire le
bien du peuple, ils font de la «politique politicienne» et préfèrent les
manœuvres aux grands projets, la tactique à une véritable vision d'avenir.
Sur ce point, on peut au moins constater que les choses n'ont guère évolué
depuis trois siècles car ce reproche peut encore être souvent entendu.
Ce qu'on reproche donc aux Politiques, c'est de « tendre des pièges» plu
tôt que de diriger les hommes « pour le mieux» ; formules qui sont synthé
tisées par les deux prédicats «habiles» et «sages».
Les politiciens se
spécialiseraient donc dans les jeux de tactique, dans la combinaison de
moyens, plutôt que dans la réflexion sur la valeur des buts que ces moyens
doivent permettre d'atteindre.
Spinoza exprime ce reproche de façon à nous faire entrer dans un des
grands débats à propos de la politique : « tendre des pièges» et « diriger pour
le mieux» ne s'opposent pas vraiment comme le mal et le bien; il s'agit plutôt de savoir dans quelle logique se situe le Politique: poursuit-il un idéal,
ou ressemble-t-il plutôt- Spinoza privilégie apparemment cette hypothèse
- à un joueur d'échecs qui, pour parvenir....
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓