ÉPREUVE 21 Septembre 1990 Amérique du Sud L' écrivain et journaliste contemporain Claude Roy affirme dans sa Défense de la...
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ÉPREUVE 21
Septembre 1990
Amérique du Sud
L' écrivain et journaliste contemporain Claude Roy affirme
dans sa Défense de la littérature : «La littérature est toujours,
même quand les écrivains expliquent comment ils se sentent
mal ou pourquoi il faut se sentir mal, une façon de se sentir
l) mieux.».
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Dans un devoir composé et illustré d'exemples précis, vous analyserez et
commenterez ces affirmations.
COMPRÉHENSION DU SUJET
Ce sujet nous fait aborder un domaine un peu particulier puisqu'il s'agit
des rapports entre !'écrivain et son œuvre dans la démarche créatrice.
On
aurait souhaité que le sujet vous invitât à vous appuyer plutôt sur votre
expérience de lecteur, mais sa formulation, le contexte d'où la phrase est
extraite, ne laissent aucun doute, c'est bien de création littéraire qu'il
s'agit, sujet redoutable pour un élève de 1 ! ...
D'autre part, cette pensée revêt un côté paradoxal, voire un peu
provocateur, qui ne doit pas vous échapper.
Elle s'inscrit dans le contexte
des années 50-60 où Sartre et Camus, en particulier, s'interrogent sur
l'utilité de la littérature.
L'ouvrage Défense de la Littérature de Claude Roy (collection Idées NRF,
paru en 1968) est une lecture vivement conseillée, un texte qui a fourni
matière à de nombreux sujets de discussions (sujet 1) ou de dissertations
littéraires (sujet Ill).
ère
- «comment ils se sentent mal et pourquoi il faut se sentir mal» : il s'agit
donc des auteurs qui font passer dans leurs œuvres leur inquiétude, leur
désarroi, leur désespoir, ou bien même qui vont jusqu'à avoir sur la condi
tion humaine des vues pessimistes et/ou beaucoup d'amertume envers
leurs semblables.
C'est un exemple a fortiori et nous devrons nous en
souvenir en choisissant nos exemples.
- «une façon de se sentir mieux» nous invite à réfléchir sur ce qu'a pu leur
apporter, en termes de consolation, de soulagement, de défoulement, en
définitive de bonheur, la réalisation de leur œuvre.
DÉVELOPPEMENT RÉDIGÉ
L'activité littéraire est périodiquement impliquée dans des débats sur sa
portée, son utilité.
Il lui arrive même d'être en posture d'accusée, dans les
Rimbaud, le « voleur de feu» laissant là la poésie pour se lancer dans une
tout autre aventure.
Mais il faut observer que le monde littéraire abonde moins en artistes
véritablement consumés par leurs œuvres que celui de la peinture et de la
musique.
Peut-être justement que les mots, la communication avec autrui,
même seulement espérée, peuvent tout de même adoucir quelque peu
certains drames intérieurs.
«C'est donc quelque chose de bien atrocement délicieux que d'écrire pour
qu'on reste à s'acharner ainsi en des tortures pareilles et qu'on n'en
veuille pas d'autres.
Il y a là dessous un mystère qui m'échappe», écrivait
Flaubert à Louise Colet.
Cela nous incite à aller plus loin.
Pour éclairer la réflexion de Claude Roy, il faudrait dire tout d'abord que,
quel que soit le type d'œuvre, il y a un plaisir profond attaché à l'acte
même d'écrire, et que beaucoup d'écrivains nous ont avoué.
Stendhal
composant en quelques mois La Chartreuse de Parme, Rousseau écrivant
Julie ou La Nouvelle Héloïse, nous ont fait part de cette griserie de la créa
tion.
Ce fut pour eux une parenthèse heureuse, une satisfaction de tout
leur être, un bonheur continu de créer «des êtres selon leur cœur», d'ima
giner les aventures et les malheurs de leurs héros.
Mais c'est aussi sou
vent le plaisir de l'artisan à son établi, fier d'avoir vaincu la difficulté,
d'avoir donné forme à son rêve intérieur.
Toute la correspondance d'un
Balzac, d'un Flaubert, de ces grands forçats de l'écriture, est pleine de
moments de joie créatrice, succédant, il est vrai, à des phases de pessi
misme.
Il arrive même que les auteurs confessent une sorte de dette envers le
livre qui les a révélés à eux-mêmes, les a obligés à des réflexions, voire à
une ascèse profitable.
Montaigne déclare à propos des Essais : «Mon livre
m'a bien plus fait que je n'ai fait mon livre».
C'est qu'on écrit souvent pour se consoler des infortunes de la vie, pour se
confesser ou tenter de communiquer avec les autres, et le seul fait de
donner forme écrite à ses sentiments peut être gratifiant.
La fonction consolatrice de l'œuvre qui porte évidemment la trace de
l'ennui, des angoisses, voire....
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