Espagne 1987-1988 Un socialisme décaféiné Toute idylle a une fin, celle des Espagnols avec leur chef de gouvernement Felipe Gonzalez...
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Espagne 1987-1988
Un socialisme décaféiné
Toute idylle a une fin, celle des Espagnols avec leur chef de gouvernement Felipe Gonzalez aussi.
L'année
1987 a marqué sans aucun doute la fin d'un certain état de grâce qui, bon an mal an, régnait depuis
l'arrivée des socialistes au pouvoir, fin 1982.
Dès le mois de janvier, la grogne a commencé dans les
rangs des lycéens, bientôt rejoints par les enseignants, les agriculteurs et presque tous les corps de
métiers.
Des médecins aux mineurs, ils ont été plus d'un million à faire grève pour des motifs différents ;
les revendications salariales étaient pour la plupart symboliques, ne jouant dans certains cas que sur une
rallonge de 1%.
Pas de doute, cette longue vague d'agitation qui a secoué l'Espagne jusqu'en mai, a été
avant tout un gigantesque ras-le-bol collectif.
A la Moncloa, siège du gouvernement, on n'a pas compris: tout marchait comme sur des roulettes.
L'inflation avait baissé: de 8% en 1986, elle devait fléchir à 5% en 1987, un indice honorable, même en
Europe.
L'entrée de l'Espagne dans le Marché commun s'était mieux passée que prévu, et la relance était
là.
Felipe Gonzalez n'a vu dans le mécontentement général qu'une seule explication, "la démocratie est
ennuyeuse" ; l'Espagne se payait le luxe de s'ennuyer.
S'il y avait là une part de vérité, on ne peut oublier que les Espagnols avaient accepté avec patience la
politique d'austérité du gouvernement pour remettre le pays sur les rails.
Ce n'est que lorsque Felipe
Gonzalez a déclaré que tout allait bien, mais que les travailleurs devaient continuer à se serrer la ceinture,
que les rouages se sont grippés.
Fin de l'état de grâce
Désireux de donner un coup de semonce à leurs dirigeants, les Espagnols ont profité d'un triple scrutin
(communal, régional et européen) le 11 juin 1987.
Le résultat des municipales était éloquent: le Parti
socialiste ouvrier espagnol (PSOE) n'a remporté que 37% des voix, contre 44% lors des législatives un an
plus tôt.
Il a perdu la majorité absolue dans la plupart des grandes villes, à commencer par Madrid, ainsi
que dans six des treize parlements régionaux.
Il n'a d'ailleurs pas été le seul parti à y laisser des plumes.
La conservatrice Alliance populaire, qui est
passée à la fin de 1986 des mains de Manuel Fraga Iribarne à celles du jeune Andalou Antonio Hernandez
Mancha, a perdu six points, équivalant à 1,3 million de voix.
Toutefois, le Centre démocratique et social
d'Adolfo Suarez a été confirmé comme le parti des mécontents du socialisme, et le troisième en
importance.
La coalition regroupant les communistes et les pacifistes a fait son meilleur score (7%) aux
municipales.
La fin de l'état de grâce s'est dramatisée en octobre 1987, quand a éclaté la crise entre le gouvernement
et le syndicat frère, l'Union générale des travailleurs (UGT).
Son secrétaire général, le très respecté
Nicolas Redondo, a démissionné de son siège de député du PSOE aux Cortès en compagnie de son bras
droit, pour ne pas devoir entériner le budget "antisocial" du ministre de l'Économie, Carlos Solchaga.
Ce coup d'éclat, qui a provoqué un malaise dans les rangs des militants, a assombri le XXXIe congrès du
PSOE en février 1988.
Au lieu de triompher comme il l'espérait, Felipe Gonzalez a dû alors se défendre
contre l'accusation d'avoir "décaféiné" son socialisme, au point de faire le lit des banquiers et d'avoir
oublié les classes défavorisées.
Malchance, quelques jours plus tôt, la publication des statistiques de 1987
révélaient que, pour la première fois dans son histoire, l'Espagne avait passé le cap des trois millions de
chômeurs, dont deux millions sans couverture sociale.
Reprise économique
L'impact psychologique de tels chiffres masquait pourtant une réalité.
Le pays était enfin sorti du creux de
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la vague: la tendance amorcée en 1986 s'est confirmée, il s'est créé chaque mois plus d'emplois qu'il ne
s'en est perdu.
Objectivement, l'année 1987 a été positive dans de nombreux domaines.
L'économie s'est assainie, aidée par la baisse du prix du pétrole.
La demande interne de biens de
consommation, due en grande partie à l'augmentation des salaires réels, a relancé l'industrie.
Les
investissements étrangers ont afflué, la Bourse de Madrid est celle qui s'est développée le plus
rapidement.
Autre record pour le tourisme, quarante-sept millions de visiteurs! L'Espagne est-elle en
passe de devenir le Japon de l'Europe? Le PNB a accusé une croissance supérieure à 5%, l'inflation a plié
plus que prévu (4,8% au lieu de 5%).
L'objectif de 3% pour 1988 paraissait tout à fait crédible.
En 1987, le pays est définitivement sorti de sa léthargie économique.
Les banques parlaient de fusionner,
les chefs d'entreprise pariaient enfin sur la compétitivité et se lançaient dans de lourds investissements de
modernisation.
Cela a ses inconvénients.
Les importations massives de biens d'équipement ont entraîné
un déficit du commerce extérieur de 615 milliards de pesetas, en dépit d'une augmentation des
exportations de 17% vers la....
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