Devoir de Philosophie

Espagne 1988-1989 Le dérapage Quand les objectifs d'un chef de gouvernement s'écartent des aspirations de la majorité de ses concitoyens,...

Extrait du document

« Espagne 1988-1989 Le dérapage Quand les objectifs d'un chef de gouvernement s'écartent des aspirations de la majorité de ses concitoyens, il y a dérapage, et tel a été le cas en Espagne en 1988.

Tandis que Felipe Gonzalez, les yeux vissés sur "le grand défi" de 1992, proposait de consolider le processus de redressement économique, selon lui "notable, mais non achevé", le pays criait pouce. Incapables de concilier croissance et justice sociale, faisant la sourde oreille aux avertissements des syndicats, les socialistes se sont retrouvés, le 14 décembre 1988, avec plus de huit millions de travailleurs participant à la première grève générale digne de ce nom en cinquante ans.

Cela est arrivé alors que le gouvernement croyait jouer sur du velours.

Les intentions de vote lui donnaient toujours la majorité absolue.

L'intégration de l'Espagne dans la Communauté européenne se révélait être un franc succès, et les ministres préparaient fébrilement la première présidence de l'Espagne à la tête de la CEE.

L'économie enregistrait une croissance à rendre jaloux les partenaires européens (5%). Le congrès du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), en février 1988, avait pourtant été un coup de semonce.

Après que Nicolas Redondo, le président du syndicat-frère, l'Union générale des travailleurs (UGT), eut publiquement mis en doute le socialisme du gouvernement, Felipe Gonzalez promit un "virage social" qui, s'il fut donné, n'a pas été perçu.

Et ceux qui nourrissaient quelque espoir dans ce sens lors du remaniement ministériel de juillet 1988 durent encore déchanter.

L'objectif demeurait le même: augmenter le gâteau avant de le partager. Le grand débrayage Au début de 1988, les négociations collectives s'étaient déroulées en fonction d'une inflation prévue de 3% pour l'année en cours.

En fait, elle a été presque double: 5,8%! Pendant ce temps, les salaires n'ont grimpé que de 5,5% en moyenne.

Année médiocre, donc, pour les travailleurs.

Mais excellente pour les banques, dont les profits ont augmenté de 45% et qui ont connu une sérieuse amorce de modernisation. Deux "grandes", celles de Bilbao (la troisième du pays) et de Viscaya (la sixième), ont fusionné en janvier 1988, devenant ainsi le principal groupe bancaire d'Espagne.

Une autre tentative entre les deux premières, Banco Central et Banesto, a fini par échouer début 1989. Côté emploi, malgré un gros effort ayant abouti à la création de 320 000 postes, l'indice de chômage n'a baissé que de huit dixièmes de point pour se situer fin décembre 1988 à 19,7%.

L'arrivée massive de femmes sur le marché du travail en a été la principale raison.

Les socialistes, préoccupés par la marginalisation des jeunes, ont proposé en octobre de subventionner les entreprises acceptant d'employer des moins de vingt-cinq ans sans formation professionnelle durant une période de six à dixhuit mois.

La mesure, qui devait toucher 800 000 jeunes, a été très mal accueillie par les syndicats qui y ont surtout vu le danger de convertir les intéressés en une main-d'oeuvre bon marché, rendant ainsi l'emploi encore plus précaire.

Ce fut le détonateur officiel du grand débrayage. Pourtant, les huit millions de grévistes du 14 décembre étaient moins des travailleurs en colère que des citoyens déçus.

Ils en voulaient à leurs gouvernants, après six ans de pouvoir absolu, d'être "arrogants" et de ne s'être pas encore attaqués aux grands maux de l'Espagne.

Aux hôpitaux vétustes, aux tribunaux si lents, à l'éducation médiocre, aux moyens de transport déficients.

Ils étaient en plus écoeurés par l'émergence d'une nouvelle classe sociale, celle des yuppies, important des voitures de luxe et spéculant de façon effrénée dans l'immobilier, ce qui a fait doubler les prix en deux ans.

Pilar Miro, directrice de la radio télévision espagnole et amie personnelle de Felipe Gonzalez, déclencha un scandale en octobre 1988 en reconnaissant s'habiller "chic et choc" sur notes de frais.

Le fait qu'elle n'ait pas été limogée surle-champ a indigné les cafés du Commerce. Felipe Gonzalez, très affecté par cette grève dirigée contre lui, a aussitôt convoqué les syndicats pour négocier des mesures sociales.

Leur attitude intransigeante tout au long de janvier 1989 n'a pas permis de déboucher sur un accord, et le gouvernement n'a pas substantiellement changé de politique.

Mais le file:///F/dissertations_pdf/0/451148.txt[15/09/2020 14:08:51] bilan est lourd.

Le PSOE s'est coupé de sa base naturelle en s'en prenant, souvent violemment, à l'UGT qui se rebellait pour la première fois.

Le Parti en est sorti affaibli, perdant des militants et des électeurs.

A en croire les sondages d'opinion début 1989, les socialistes n'auraient plus en effet la majorité absolue en cas d'élections générales. Les partis d'opposition semblent donc avoir profité de la situation.

L'Alliance.... »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓