États-Unis 1981-1982 La fin de la lune de miel Ronald Reagan est le seul président des États-Unis, depuis le New...
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États-Unis 1981-1982
La fin de la lune de miel
Ronald Reagan est le seul président des États-Unis, depuis le New Deal, qui soit arrivé au pouvoir avec un
programme de politique intérieure et de politique étrangère entièrement élaboré.
Allant à l'encontre de
l'idée selon laquelle les Américains ont l'esprit pragmatique et sont peu enclins à l'idéologie, l'équipe
Reagan fait appel à une idéologie profondément enracinée à laquelle elle doit ses succès et ses échecs.
C'est grâce à l'originalité de son programme et au désenchantement général né des contradictions de son
prédécesseur que Ronald Reagan, tout comme François Mitterrand en France, a été élu.
Reagan a vu
dans son élection la volonté d'un changement politique radical, et il a profité de ce qu'on a appelé "la lune
de miel de la première année" pour mettre en œuvre la plus grande partie de son programme.
La lune de
miel finie, les querelles qui semblent caractériser la vie politique américaine ont repris droit de cité.
Pour comprendre le programme politique du président, il faut savoir que, dans sa grande majorité, l'élite
des milieux d'affaires et de l'armée n'a jamais accepté le New Deal.
Cela est particulièrement vrai dans les
États du Sud et de l'Ouest, où la Nouvelle droite est née de la très ancienne opposition à l'État-providence
de Keynes, alliée au refus hyper-nationaliste de la détente et de la politique de grande puissance des
États-Unis.
Longtemps marginale dans la vie politique américaine -, la défaite cuisante de Barry
Goldwater en 1964 en est un exemple -, la Nouvelle droite doit son arrivée au pouvoir en 1980 à sa
propre évolution comme à celle de la société américaine.
La Nouvelle droite est restée très réticente à l'égard des interventions gouvernementales, et elle continue
à préconiser d'importantes augmentations des dépenses militaires.
Consciente de sa faiblesse, elle a
ajouté deux autres thèmes qui ont grandement contribué à son succès.
Il s'agit en premier lieu de ce que
l'on appelle les "problèmes de société": contre le féminisme, l'avortement et la pornographie, et pour les
valeurs familiales, celles de la "Majorité morale" et des autres religions fondamentalistes.
Cette stratégie
s'inspire en partie d'études montrant que les travailleurs américains sont libéraux en matière d'économie
et conservateurs en matière sociale.
De plus, à la différence des républicains conservateurs qui l'ont
précédé, Reagan a adopté un programme explicitement tourné vers la croissance économique (économie
de l'offre) qui devait aboutir au plein emploi et grâce auquel il enleva au Parti démocrate des voix des
classes laborieuses.
La société américaine a évolué autant que la Nouvelle droite.
La démonstration des limites de la
puissance militaire des États-Unis au Vietnam combinée à une importante stagflation a provoqué un
sentiment de crise et de panique dans tout le pays.
L'élite traditionnellement libérale des milieux d'affaires
de Wall Street était divisée sur des questions aussi importantes que le libre-échange et les dépenses
militaires, créant ainsi une carence du pouvoir qu'ont révélée les atermoiements de l'administration
Carter.
Dans une économie à croissance lente, les interventions gouvernementales paraissaient
suspectes, l'inflation émoussait tout sentiment de solidarité ouvrière, les programmes de plein emploi
fondés sur la croissance économique n'avaient plus de sens et le mécontentement dû à la concurrence
étrangère s'intensifiait.
Les libéraux avaient tout misé sur une économie en expansion: lorsque
l'expansion cessa, ils n'avaient plus rien à offrir.
Enhardi par sa stupéfiante victoire électorale, Reagan tenta de mettre en œuvre sur tous les fronts le
programme de la Nouvelle droite.
Cependant, au plus fort de sa popularité, il jugea nécessaire d'établir
des priorités politiques.
Son administration décida de s'occuper tout d'abord des problèmes économiques,
ensuite de la politique étrangère et enfin des questions sociales.
Les résultats ont correspondu à cet ordre
des priorités: sur le plan économique, le programme a été appliqué ; en matière de politique étrangère,
l'administration n'a pu mettre en pratique certaines des idées auxquelles elle tenait le plus ; et en ce qui
concerne les questions sociales, tout reste à faire.
Réussite politique, échec économique?
Les Américains se remettent lentement de l'étonnante victoire politique remportée par Reagan lors du
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vote par le Congrès de ses coupes budgétaires et fiscales.
Au cours de sa première année d'exercice,
Reagan a obtenu pratiquement tout ce qu'il voulait sur le plan économique et il est sorti vainqueur du
conflit qui l'opposait au syndicat des contrôleurs aériens (PATCO).
Conformément au dogme de l'économie de l'offre soutenu par la Nouvelle droite (et que le vice-président
Bush avait qualifié d'"économie vaudou" pour exprimer le mépris des républicains orthodoxes à l'égard de
telles hérésies), seules d'importantes réductions fiscales pouvaient accroître le pouvoir d'achat,
encourager les investissements privés et, de la sorte, relancer l'économie.
En théorie, cette politique
ressemble beaucoup à celle mise en place par Kennedy en 1962 aux mêmes fins, mais le plan de Reagan
comportait en plus de fortes réductions des dépenses sociales et une augmentation sans précédent du
budget militaire.
Du fait qu'aux États-Unis le budget alloué aux programmes sociaux est soit insignifiant,
soit résolument défendu par des groupes d'intérêt, ces mesures s'accompagnèrent inévitablement de
lourds déficits.
Cela n'a pas gêné les économistes de l'offre de son équipe, mais fit frémir les républicains
traditionnellement monétaristes pour lesquels l'équilibre du budget est sacro-saint.
Les résultats conjugués des coupes budgétaires et fiscales ont provoqué un transfert massif de capitaux
en faveur des riches et aux dépens des pauvres.
De ce point de vue, la réaction de Reagan à la grève des
contrôleurs aériens est tout à fait significative de sa politique.
Le candidat Reagan avait promis aux
contrôleurs aériens d'approuver leurs revendications en matière de salaires.
Le président s'opposa à toute
négociation.
Il les licencia et mit en place de nouveaux effectifs selon un plan élaboré par l'administration
Carter.
Et, contrairement à la tradition américaine, il refusa de réintégrer les grévistes, pourtant disposés
à s'incliner.
C'est en partie à cause de ce climat antisocial que le syndicat de l'automobile (United Auto
Workers) a dû renégocier ses contrats avec Ford et General Motors, en abandonnant certains avantages
acquis.
L'administration Reagan a remarquablement réussi à s'imposer en matière économique.
Cependant, les
conséquences de sa politique ont mis le Parti républicain dans un grand embarras.
Les taux d'intérêt sont
si élevés que la croissance économique est pratiquement nulle, d'où chômage et morosité politique.
De
plus le mouvement syndical moribond, contraint de réagir, rassemble ses forces pour soutenir le candidat
du Parti démocrate aux prochaines présidentielles.
Par ailleurs, même chez les républicains - qui se sont
finalement ralliés au programme du président - la grogne s'est installée du fait des taux d'intérêts trop
élevés, qui nuisent aux petites entreprises et aux agriculteurs.
La réussite politique du programme
intérieur de Reagan s'est transformée en désastre économique.
Les avatars du "réarmement"
Le bilan de l'administration Reagan est moins négatif en....
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